Oublions le Covid et revenons aux choses sérieuses

Au revoir Covid.
L’épisode Covid qui occupe de façon obscène la scène médiatique va bientôt se refermer, sans doute plus rapidement que beaucoup l’imaginent, tout simplement parce que l’effet de nouveauté étant passé, il va bien falloir donner autre chose en pâture à l’humanité pour garder son attention. Une fois l’effet déconfinement passé, une fois épuisés les pathétiques reportages sur les nouveaux libérés, il va être difficile de maintenir l’attention des foules. Bien sûr, la fantomatique 2ème vague va être pressée jusqu’à la dernière goutte. Nous allons être gavés heure par heure par le comptage des entrées et des sorties des hôpitaux et des Epahd, et des experts viendront nous expliquer comment analyser les différentiels et surtout que s’il faut se réjouir du nombre croissant de sorties de hôpitaux, il faut au contraire se désoler du nombre croissant de sorties des Epahd. Après quelques semaines de ces c…….. auxquelles nous sommes désormais habitués, l’épiphénomène Covid va retourner d’où il vient pour permettre aux seuls sujets qui comptent de regagner le devant de la scène qu’ils ont temporairement abandonné aux experts en médecine.
La Déesse Economie est de retour, dopée par la profondeur abyssale de la crise fabriquée par les imbéciles qui ont décidé, tous ensemble, avec un instinct synchronique, de placer le bouton de l’activité humaine sur arrêt. C’est inédit dans l’histoire du capitalisme. Habituellement, c’est le système qui fabriquait lui-même ses crises, pour en quelque sorte s’autoréguler en corrigeant ses excès. Cette fois, ce sont les acteurs du système qui ont bloqué la machine, sans doute histoire de voir ce que cela allait faire. A moins que ces acteurs soient seulement de banals crétins. Allez savoir… ?
Erysichton est de retour.
En inventant l’économie capitaliste, l’homme, (pseudonyme Faust), a signé avec le diable un pacte qui a scellé son destin. Il ignorait alors que ce diable insatiable allait dévorer, morceau par morceau, tout ce qui dans son environnement, sur la terre, dans les océans, dans l’air, est indispensable à sa survie. Avec la fin annoncée de l’épidémie, Erysichthon est de retour. Il va pouvoir reprendre exactement là où il s’était interrompu, en dévorant tout ce qu’il pourra dévorer, jusqu’à consommer son propre corps (à ce sujet, Covid ne s’est-il pas invité dans le mythe d’Erysichton pour aider l’homme à se dévorer lui-même ?).
Aveuglé par la prospérité des premiers temps, grisé par les progrès fabuleux qu’il réalisait, émerveillé par les prouesses de la technologie, l’homme se convainquit d’avoir inventé le meilleur système de développement pour son espèce, et il n’eut de cesse de le promouvoir pour qu’il se répande partout sur la planète. Il n’eut pas trop de mal à vaincre les résistances sporadiques de quelques utopies collectivistes. Elles s’effondrèrent d’ailleurs d’elles même lorsque la nature corrompue et individualiste de leurs protagonistes prit le dessus sur l’idéologie du partage et de la communauté des biens. Dès lors, plus rien ne pouvait entraver la marche conquérante de l’homme vers son destin.
Les arbres n’atteignent jamais le ciel.
La machine capitaliste, comme toute les machines, mais aussi comme tout corps vivant, ne peut fonctionner sans énergie. Cette énergie, c’est le marché. Vendre et acheter, et générer des bénéfices qui permettront d’augmenter la production de biens, donc de vendre plus, d’acheter plus, de gagner plus pour vendre et gagner encore plus. Le progrès dans le modèle capitaliste n’est pas linéaire. C’est une spirale qui se nourrit d’elle-même pour s’élever toujours plus haut. Toujours plus haut ? Mais jusqu’où ? Chacun sait que les arbres n’atteignent jamais le ciel. Pourtant, l’homme est convaincu que le progrès capitaliste peut atteindre le ciel, et qu’il peut même le dépasser, conquérir et coloniser de lointaines planètes, pour continuer à s’élever toujours plus haut vers cet inaccessible infini. Pour atteindre son but, l’homme s’apprête à conquérir l’immortalité grâce à l’intelligence artificielle générale. C’est bien le moins qu’il puisse faire pour réaliser de si ambitieux projets.
Le capitalisme se nourrit de cette onirique naïveté. Il s’en nourrit, et il la produit pour mieux masquer l’hideuse et diabolique machinerie qui l’anime. Car ce binôme infernal Production-Consommation représente les deux têtes d’une hydre qu’aucun Héraclès ne viendra anéantir. La Production aspire insatiablement les ressources de plus en plus rare d’une planète déséquilibrée, et la Consommation répand le poison de ses excès sur la terre, dans les mers et dans les airs. Comment l’homme peut-il croire que ce modèle de croissance continue est son avenir ? Le croit-il d’ailleurs ? Mais s’il ne le croit pas, s’il ne le croit plus, il sait que la machine s’est emballée. Il sait qu’il ne peut plus arrêter cette spirale, et il attend, résigné, le moment où le chaos submergera et emportera son espèce, comme un autre chaos emporta en leur temps les dinosaures. Tout au plus se rassure-il en se disant que ce n’est pas pour demain, et qu’il lui reste encore une dose de bon temps à consommer. Après moi le déluge, et tant pis pour les générations qui devront l’affronter. Car tel ce personnage projeté par la fenêtre du cinquantième étage d’une tour, et qui se dirige inexorablement à la rencontre du sol, il se contente de réaliser le décompte des étages qui défilent l’un après l’autre, en constatant avec un optimisme déroutant que jusqu’à présent, tout va bien. Et puisque tout va bien, il serait ridicule de se priver de l’opulence et de la béatitude procurées par notre merveilleuse société de consommation.
L’homme ne veut pas arrêter, ni même freiner cette machine infernale qui le conduit à sa perte. Il ne veut pas sortir de son cocon douillet, entouré de ses biens de consommation qui sont autant de hochets qui le rassurent et l’isolent du monde hostile qu’il refuse de voir. Car les premiers signes du chaos sont déjà visibles. La planète se réchauffe sous l’effet de l’hyper activité d’une humanité toujours plus nombreuse, et le réchauffement produit des phénomènes climatiques destructeurs qui se multiplient. Les glaciers fondent et le niveau des océans s’élève lentement, mais inexorablement. Bientôt, les côtes les plus plates seront submergées, bientôt des dizaines, puis des centaines de millions d’humains devront quitter leur habitat pour chercher refuge sur des terres en apparence plus hospitalières. Bientôt, l’air des villes sera irrespirable sans masques filtrants, les sols des cultures seront morts. Hier, quelques milliers de morts ici et là tués par quelques cyclones. Aujourd’hui, quelques centaines de milliers de tués par un virus extirpé de sa jungle. Pas de quoi fouetter un chat. Au vingtième étage, la chute continue, mais tout va toujours bien.
C’est seulement pour tout à l’heure.
Alors que la démocratie a triomphé à peu près partout sur la planète, les hommes auraient pu désigner à leur tête, pour présider à leur destin, les meilleurs d’entre eux qui auraient été capables, ou qui au moins auraient tenté d’infléchir ce destin tragique. Mais ils y ont renoncé. Au contraire, comme s’ils voulaient précipiter cette fin qui leur semble ne pas vouloir arriver, ils élisent pour les conduire des chantres de ce système mortifère. Pire, ces dirigeants inconséquents jugeant le capitalisme insuffisamment destructeur y ont adjoint l’économie libérale, laquelle a d’elle-même engendré l’économie ultra libérale, dans laquelle la production de biens n’est même plus au centre du système. Le productivisme capitaliste est envoyé au rebus avec d’autres idéologies antiques. Ce sont désormais les flux financiers qui mènent le monde. Des flux virtuels, une économie fantôme en quelque sorte. Cette organisation phantasmatique de la société humaine est à plus d’un titre fascinante. En effet, les ressorts de ce système sont d’une telle absurdité qu’ils échappent à tout raisonnement logique et pourvu d’un peu de sens. Voué par nature, à l’instar d’un château de cartes à s’effondrer sur lui-même, il aspirera dans sa chute l’ensemble de l’humanité. Qu’importe, le moment n’est pas encore venu, c’est seulement pour tout à l’heure, alors à quoi bon s’inquiéter. Pourquoi cet alarmisme terrifiant quand rien de vraiment tangible ne se passe ? Il est urgent d’agir crient ici ou là quelques voix éclairées, mais qui restent inaudibles. Ces Cassandres ne croient déjà plus à aucune possibilité d’action. Pourtant, les jeunes générations, contrairement à leurs ainées, sont dotées d’une solide conscience écologique. Il n’y a qu’à voir l’enthousiasme que suscite chez ces jeunes l’ouverture d’un nouvel Apple store, ou la sortie du dernier smartphone à la mode. L’humanité, gangrénée par l’injonction consumériste, n’est plus armée pour résister. La fin n’est désormais plus une hypothèse, et il n’y a pas d’alternative. Face à ce constat, l’homme, tel ce malade à qui le médecin vient d’apprendre qu’il ne lui reste que quelques mois à vivre, se précipite avec frénésie dans une bacchanale consumériste, car depuis longtemps, c’est sa seule raison de vivre, le seul ressort de son bonheur, le graal qui fait se lever tous les matins chacun d’entre nous. C’est là le pacte que nous avons signé avec le diable, et qui s’apprête à nous emporter, bien plus sûrement que le Covid, à jamais.
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