P. Kagame : 98,76 % à l’élection présidentielle au Rwanda de ce 15 juillet ? Non 99.15% [1].[2] ? (1/ … ?)
En commençant ce papier, il y a quelques semaines déjà, j’avais pronostiqué, prudemment, le résultat annoncé dans le titre, avec un point d’interrogation, toutefois. In petto, je pensais « peut mieux faire » ! Et là bingo, j’ai gagné ! …….Mais revenons à mon texte initial ….
Le cas « Paul Kagame » ne revenait plus, depuis quelques temps déjà, que sporadiquement à la surface du flot, trop dense, trop intense des informations « attendues, présélectionnées et distillées » de la presse mainstream. Mais, cependant, le silence assourdissant qui entourait la situation au Rwanda et en République Démocratique du Congo, semblait s’estomper, se lézarder progressivement et graduellement, et ce, jusqu’à tout récemment : un sursaut ! (quantitatif/qualitatif ?). Une « opportunité », dans une actualité mondiale assez chaotique, se serait-elle subitement présentée, « hors Ukraine, Gaza, Assange, Biden, Trump » ?. Une « fenêtre de tir », comme on dit à propos des moments les plus opportuns pour le lancement d’un satellite ? Il y a eu, opportunément, pour la « mise à feu », les fameuses[3] « Forbidden stories – Rwanda Classified » de mi-juin 2024 et les contre-feux inévitables[4] . Néanmoins, ceux-ci semblent « offenses de rigueur », « spontanéité de commande », « désordres désuets », etc. A part, peut-être, pour Colette Braeckman[5] qui semble bien avoir été prise à un « piège », la pauvre !
La question du « pourquoi du maintenant » n’est pas aussi idiote qu’on pourrait le penser. Il y avait bien entendu les élections présidentielles de ce 15 juillet, mais pas que……. !
En effet tout ce qui est dit, actuellement, dans les derniers documents publiés et lors des diverses interventions sur les blogs et autres réseaux sociaux, par des acteurs de tous bords, est, en fait, connu et dénoncé, par plus d’un, depuis belle lurette[6] (entre autres, ici même, sur le forum Agora Vox ….). Toutes ces critiques ou « accusations » étaient systématiquement passées presqu’inaperçues grâces aux manœuvres (quasiment « secrets publics » – sic Pégasus et Trolls de service) soigneusement entretenues par les sbires du pouvoir rwandais actuel. Très vite ce qui était mis à jour, déjà à l’époque, était classé et rangé, illico presto, au titre de « banal négationnisme », « classique révisionnisme », « divisionnisme habituel », « complotisme endémique », etc.….. Donc, circulez : il n’y a rien à voir !
Mais dans l’« actuelle initiative des histoires interdites », il y a, selon moi, un quelque chose de trop peu, quelque chose qui me laisse un goût d’inachevé ….
Mais pour comprendre mon point de vue, en quelque sorte ma déception et mon amertume, il me semble bon de rappeler que les régimes alternativement autoritaires et totalitaires au Rwanda sont en fait la « quasi norme » depuis des siècles.
Une Féodo-Monarchie absolue de Droit Divin, régnait depuis très probablement le 15ième ou 16ième siècle dans la région correspondant grosso modo au Rwanda actuel, sur des populations, vivant à l’âge du fer, sans écriture[7]-[8]-[9], sans la roue, sans textile, sans bêtes de somme, jusqu’au 20ième siècle.
L’impérialisme traditionnel du Royaume ancestral du Rwanda établissait aux marges de ses territoires des « zones tampons » qui matérialisaient les limites de son isolationnisme relatif. Des féaux y représentaient la cour, avec les avantages inhérents. Cette Cour où les fils de ces féaux recevaient l’initiation Intore, étant en plus « gage de la loyauté de leur père vis-à-vis du Mwami ». Cette distanciation relative (xénophobie ?) vis-à-vis de l’« étranger » se manifestait, par exemple, durant les traites négrières : la Cour rwandaise n’a jamais laissé les esclavagistes pénétrer le pays … pas plus d’ailleurs que Stanley qui en 1876 en a été « chassé » de l’île Ihéma, dans la rivière Akagéra, sous une pluie de flèches et de lances venant des « troupes » rwandaises (Intore et d’autres milices traditionnelles).
L’arrivée des explorateurs allemands, dès 1880[10], n’avait pas très bien été accueillie non plus. Mais l’opportunisme de la Cour a prévalu sur sa prudente méfiance traditionnelle vis-à-vis des nouveaux venus, pour finalement admettre un « partenariat ou protectorat ». Les rapports entre classes sociales locales étaient, encore à l’époque, réglés par des contrats de servage très complexes et subtiles (ubuhake - uburetwa). Les cultivateurs-éleveurs étaient les membres de la classe sociale numériquement majoritaire mais soumise à la caste régnante d’un des 15[11] clans tutsis traditionnels. Cette classe sociale dominée était en permanence en « opposition » larvée vis-à-vis des castes proches de la Cour[12]. Cette Cour n’a pas été épargnée par les manigances et autres intrigues et conspirations, normalement de mise dans les couches socio-culturelles dominantes et ce, allant jusqu’au coup d’Etat de Rucunshu de 1896 où Ababega éliminèrent Abanyiginya.
Les étrangers nouvellement arrivés ont cru que cette population formait une entité et l’ont perçue, selon leurs critères de l’époque, réellement homogène : une seule et même langue, une seule et même religion, une culture (danses, poésie, musique). Donc une « nation unie » au sens « occidental contemporain » d’une collectivité humaine soudée, sous l’égide d’un absolutisme traditionnel. Cela devait, donc, convenir, dans l’esprit réductionniste de la Conférence de Berlin,(1884) et de celle de Bruxelles (1890 [13]) à des « sauvages » et à leur « cuisine socio-culturelle intérieure.
Cette même Cour était très réfractaire à la conversion au Christianisme proposée par les Missionnaires. La tutelle belge « remplaça », de ce fait, le roi Yuhi Musinga par son fils catéchumène Mutara Rudahigwa en 1931 et devant la croissance du nombre de « conversions hutus », le pays entier s’est converti massivement en 1931, ce qui fut reconnu comme le « Miracle Rwandais » par Rome. Le Père Lavigerie[14], depuis son monastère de Maison Carrée à Alger, préconisait aux évangélisateurs de convertir d’abord les chefs … le peuple suivrait !. Ce fut le contraire au Rwanda tout à l’honneur de ces pauvres et naïfs Pères Blancs[15]….Comme quoi l’unité d’une religion traditionnelle a été une perception des premiers étrangers venus au Rwanda et la conversion unanime au Catholicisme, une nouvelle opportunité intelligente du pouvoir. Espérait-il ainsi se faire un allié de son « protecteur »… ?.
La masse populaire rwandaise est passée subitement et successivement, en 35 ans, par deux républiques à « Mouvement d’Union Nationale » autoritaire (Kayibanda et Habyarimana) et depuis 1994, à une troisième république à « Front Patriotique Tutsi totalitaire ». Si la Première République sous Kayibanda de 1959 à était issue d’une « révolution sociale [16] » celle, sous Habyarimana, de 1973, elle, l’était d’un coup d’état (causant relativement peu de victimes, n’empêche … !) renversant Kayibanda devenu « incontrôlable ».
La Première République, était issue d’une révolution sociale (avec ses excès et même avec des pogroms) abolissant la Monarchie par référendum, sous l’égide de l’ONU[17]. Grégoire Kayibanda, deuxième président[18] avait dû « faire avec », c’est-à-dire vivre les premières affres de l’« acculturation » et l’inexpérience de la gestion publique des choses républicaines « modernes » occidentales. De plus elle devait faire face à la contrerévolution menée par les castes dirigeantes de l’ancien régime. Les Inyenzi ([19]) ont semé une terreur qui a continué à exacerber des ressentiments déjà anciens dans les couches socio-culturelles les plus défavorisées de la population. Le pays, par sa taille, par ses populations, par ses ressources, par sa localisation géographique isolée n’avait pas une stature, ni d’atouts, ni de puissance potentielle et donc n’était pas convoité par des « pouvcoirss extérieures ». L’assassinat de Lumumba (1961) dans le Congo voisin a certainement marqué les esprits et les orientations politiques. L’assuétude de Kayibanda à l’urwarwa et sa dérive régionnalisante et ethnisante ont eu raison de son « règne »
La deuxième République, celle d’Habyarimana, était trop occupée du développement économique, social et culturel intérieur (en ce compris la solution HCR du rapatriement des réfugiés de 1960) pour avoir une politique extérieure très prégnante. Dépendant de l’aide technique et financière et de la coopération étrangère, un subtil équilibre était mis en place entre les non-alignés, le Nord, l’Est et l’Ouest. Les relations avec la France, la Belgique, la Suisse, l’Allemagne, le Canada, les USA étaient assez chaleureuses dans la forme du moins. Par « compensation-équilibre » des relations avec la Chine ont été marquées, par exemple, après 1973, par des « Dons du Peuple Chinois » au Peuple Rwandais (route Kigali-Kibungo-Rusumo). Des relations diplomatiques ont été même établies, dans les années 1980, avec le Corée … du Nord !!! Par contre une prudente distanciation a toujours été de mise vis à vis de la Libye de Kadhafi. En 1980, l’indépendance du régime vis-à-vis des USA s’est, entre-autre, manifestée par le refus d’Habyarimana de se voir imposer une base de l’Africom au Bugéséra. Mal lui en a pris ? Donc pas d’expansionnisme revanchard … mais au contraire, soumissions aux ukases du FMI et de la Banque Mondiale dans le cadre des ajustements structurels.[20]
Pour ce qui est de la troisième république elle est issue du tout premier de tous les crimes, celui contre la Paix, qu’a été la guerre d’octobre 1990 et de l’acte terroriste (assassinat d’Habyarimana d’avril 1994) qui a fait de Kagame un tyran au sens étymologique du terme.
Et l’impérialisme du Régime actuel lui se met à l‘occidentale « otanesque » en établissant partout, à l’étranger, des « tremplins » par l’obtention (pour Crystal Venture, entre autres) des concessions sur des terres « agricoles » au Congo Braza (par exemple[21]) et de zones de prospections minières en République Centre Afrique (comme autre exemple[22]). En plus des formations aux USA et en Israël ( ?) des Forces de Défense du Rwanda (RDF en anglais), la mise à disposition de l’APR dans plusieurs interventions de l’ONU (jusqu’à Haïti …. !!!) font du Rwanda le principal contributeur (donateur-receveur) des forces de la communauté internationale pour des opérations de maintien de la paix et autres missions internationales. Mais pas que ……depuis le rapport Duclerc, la macronie a imaginé d’offrir la protection française des installations Total au Mozambique sous bannière rwandaise ……. Le Rwanda de Paul Kagame aurait accepté que l’Africom ait une base à Kigali-Kanombe (cfr ci-dessus, l’option Bugesera refusée par Habyarimana). Mais il n’est pas certain que cette décision ait eu l’heur de plaire au Pentagone….Kanombe n’est que quelques hectares en plein centre quasi-urbanisé …. Et l’Otan dans tout cela ????[23]
Dans une prochaine livraison, j’essayerai, après ce fort long préambule, d’explique mon amertume, mon dépit, mon sentiment de « trop peu » que les « Forbidden stories – Rwanda Classified » ont suscité dans mes réflexions.
En espérant avoir à faire face à des réactions, des corrections, des commentaires, des remarques, des critiques que l’actuel papier devraient susciter.
(A suivre… ?)
[2] A propos de Victoire Ingabire, Kagame aurait dit, devant un public de jeunes INTORE de son parti-Etat, « Est-ce que vous connaissez une certaine personne appelée INGABIRE ? Cette petite femme issue de génocidaires. Mais on veut faire croire au monde entier que c'est une femme visionnaire. En fait, c'est elle qu'on veut qu'elle soit présidente du Rwanda. Et elle le croit aussi, elle le croit. Oui, oui. …….. Laissez-la faire, mais elle connaitra une fin tragique ».
https://www.youtube.com/live/BkBm3X4sjDQ - 1h:02’:14”
[3] https://www.youtube.com/watch?v=1Z43DdpTrVI et
https://auvio.rtbf.be/media/investigation-investigation-3200257
[4].https://www.youtube.com/watch?v=8q-lBXrls24https://www.echosdafrique.com/20240610-colette-braeckman-emportee-par-le-tsunami-de-rwanda-classified-fin-de-carriere-en-queue-de-poisson
[5] https://www.youtube.com/watch?v=8q-lBXrls24https://www.echosdafrique.com/20240610-colette-braeckman-emportee-par-le-tsunami-de-rwanda-classified-fin-de-carriere-en-queue-de-poisson
[6] « Belle lurette » c’est depuis le 04/06/1994 pour la république actuelle et dès avant le 01/10/1990 pour BK 5befor Kagamé)
[7] Pour ce qui est de l’écriture il a vite été établi qu’il ne s’agissait pas d’une « carence » culturelle, un retard civilisationnel pur mais bien d’une stratégie de pouvoir extrêmement puissante. Ainsi le Code de la monarchie rwandaise est une « chanson de geste » ésotérique et transmis par voie orale par quatre « abiru » (mages), chacun pour un quart de cette épopée, quart inconnu des trois autres …. Fabuleux système ! Une des bases fondamentales des structures du totalitarisme ? Le Mwami semblait bien savoir écrire et même se servir d’une machine à écrire ( ?).
[8] Le linguiste André Coupez a mis en évidence que comme dans quasiment toute communication verbale, il y avait au Rwanda, la langue de la Cour, la langue des Clans et la langue du Commun. Merveilleux outils de domination (comme c’est encore le cas aujourd’hui dans nos « démocraties occidentales ») appelés « l’ubengwe ».
[9] Jan Czekanowski. In « Carnets de route au cœur de l’Afrique ». Editions noir sur blanc. P 385
[11].https://burundi-forum.org/39273/rwanda-comment-hutu-tutsi-et-twa-partagent-ils-les-memes-clans-tentatives-dexplication/
[12] Kandt - 1904-1905 ; “Les Wahutu ont un comportement étrange. En présence de leurs maîtres, ils sont graves et réservés et se dérobent aux questions. Masi aussitôt que les Watussi ont tourné le dos à notre camp … ils se plaignent de l’oppression qu’ils doivent subir et de leur privation totale de tout droit….. Je leur ai dit de se débrouiller eux-mêmes, eux, qui sont cent fois plus nombreux que les Watussi, et qui ne savent que gémir et se plaindre comme des femmes ». Reinhart Bindseil : Ruanda und Deutschland Seit Den Tagen Richard Kandts” – Dietrich Reimer Verlag.
[13].https://fr.wikipedia.org/wiki/Conf%C3%A9rence_internationale_anti-esclavagiste_de_1889%E2%80%931890
[14] Fondateur de la société des Missionnaires d’Afrique en 1868, dits aussi Pères Blancs
[15] « Je demande aux Watutsi qui apportent le lait et qui viennent voir l’église : « Savez-vous quel est ce bâtiment ? » « Oui, disent-ils, c’est la « ecclésia » ». « Il faudra aussi venir le dimanche », leur dis-je. « Le catéchisme c’est pour les Bahutus ! ». « Bien leur, répondis-je, le catéchisme est pour tous ceux qui ont une âme. Seuls, les bêtes féroces du pori ne sont pas instruites ». « Mais alors il faut nous enseigner à part, nous ne pouvons pas nous assoir ensemble avec les Bahutus ». « Non leur répondis-je, tous sont égaux devant Dieu ». Quel orgueil de caste !!! Les Watutsis partout au Ruanda, sont réfractaires au catéchisme » Le 3 juillet 1911. Diaire de la mission de Lulenga (Kikeri) Rugari – Tongres Sainte-Marie.
[16] Non sans excès et même avec des pogroms.
[17] Je suis d’accord avec Bernard Lugan quand il dit que le principe démocratique occidental d’« un homme une voix » n’a pas de sens en Afrique.
[18] Après Dominique Mbonyumutwa, premier Président dfe Janvier
[19] "INYENZI" c'est à dire : "ingangurarugo yiyemeje kuba ingenzi" ("combattants de la milice Ingangurarugo qui se sont donnés pour objectif d’être les meilleurs"). La traduction en français du mot Inyenzi est bien entendu "cafard" ... mais jamais ceux qui se sont donnés ce nom ne voulaient lui donner le sens péjoratif contenu dans l'acceptation qu'en font les européens. Le seul vrai point commun entre l'appellation et le mot est le fait que la tactique des Inyenzi, consistait à attaquer de nuit et à "disparaître" le jour. Contrairement à ce que prétend Prunier : « appelés par le gouvernement hutu » in The Rwanda Crisis History of a génocide Kampala 1999
[20] Je ne partage pas l’idée de Bernard Lugan, suivant laquelle, le Discours de La Baule (cfr https://perspective.usherbrooke.ca/bilan/servlet/BMEve/1279) de François Mitterrand, lors de la 16e conférence des chefs d'État d'Afrique et de France, en juin 1990, ait été l’amorce du chaos politique au Rwanda. Les effets dévastateurs des ajustements structurels avaient déjà commencé à faire leur preuve et leur effets pervers. La guerre, elle, a commencée en octobre 1990. Les initiatives d’« aggionarmento politique » avait été entamées bien avant par le gouvernement Habyarimana.
[22] https://www.crisisgroup.org/fr/africa/central-africa/central-african-republic-rwanda/b191-rwandas-growing-role-central-african-republic
[23] La désignation par les États-Unis du Kenya comme un allié majeur non membre de l'Organisation du traité de l'Atlantique Nord (OTAN) renforce son rôle dans la sécurité régionale et internationale. Et le Rwanda dans tout cela ?
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