Paradoxe à Washington : quand Obama reçoit un criminel de guerre
C’est une scène paradoxale qui attend la Maison Blanche cette semaine. Barack Obama compte annoncer officiellement la fin de la guerre en Irak et le retrait des troupes américaines. Pour se faire il a convoqué à Washington le chef du gouvernement irakien, Nouri al-Maliki. Or ce dernier est poursuivi par la justice espagnole pour crime contre l’humanité, crime de guerre et crime contre la communauté internationale.
Maliki et quelques hauts gradés de son armée, comme le chef des forces terrestres le général Gheidan, sont visés par la justice pour avoir perpétrer deux massacres de sang froid à Achraf. Ce camp de réfugiés iraniens, qui abrite 3400 membres des Moudjahidine du peuple d’Iran, est une épine dans le flanc du gouvernement irakien parce que la cible principale de la dictature religieuse en Iran. Il abrite en effet des opposants déterminés aux mollahs qui luttent depuis plus de 20 ans pour instaurer la démocratie en Iran. Totalement inféodé à Téhéran, où il a vécu de longues années à la solde du corps des gardiens de la révolution, Maliki a pris l’engagement d’éliminer l’opposition aux mollahs sur le territoire irakien. Il a choisi pour cela la date du 31 décembre, à laquelle il compte fermer le camp, en toute illégalité et dans un bain de sang. Pour la première fois, un premier ministre déclare donc qu’il va commettre un meurtre de masse.
Dans une première attaque en juillet 2009, Maliki avait fait 11 morts dans cette population sans armes et sans défense, qu’il s’était pourtant engagé par écrit auprès des Etats-Unis à traiter humainement. Le 8 avril 2011, cette fois son attaque a fait 36 morts, tirés comme des lapins ou écrasés sous les blindés, et des centaines de blessés. Et à présent, Maliki annonce une prochaine attaque pour le 31 décembre, après trois années d’un blocus totalement inhumain. Un blocus durement dénoncé par Philippe Douste-Blazy le 10 décembre dans une conférence à Paris. Le secrétaire général adjoint de l’ONU et ancien chef de la diplomatie française a martelé : « Si je suis ici cet après-midi, avec vous, c'est aussi parce que je suis médecin, et que je trouve scandaleux et contraire aux droits de l'homme d'empêcher des médecins spécialistes d'entrer dans le camp pour soigner des malades, ou d'empêcher des malades de sortir du camp pour se faire soigner, expliquant ainsi un certain nombre de morts qui auraient pu être évitées. Ceci est inhumain, et aujourd'hui, le jour international des droits de l'homme, nous devons le dire publiquement, c'est inhumain ! »
Le cas d’Achraf a réussi à mobiliser tout ce que Washington compte de décideurs politiques des deux bords, et une armada de politiciens et de personnalités de premier plan en Europe. La baronne Ashton, Haute représentante de l’UE pour les affaires étrangères a nommé un représentant spécial pour le camp, l’ambassadeur Jean de Ruyt. Le représentant de l’ONU en Irak Martin Kobler, a porté le dossier devant le Conseil de sécurité.
Aux USA l’affaire fait grand bruit puisqu’à l’origine les autorités américaines ont signé avec chacun des Achrafiens un accord promettant de les protéger jusqu’au règlement final de leur situation. Or en guise de protection, les USA ont transféré la sécurité du camp à Bagdad, devenu le meilleur allié des mollahs.
Le Congrès américain a fait une bronca le 7 décembre jugeant que Maliki ne méritait pas d’être reçu à la Maison Blanche, selon Sheila Jackson Lee, s’il n’acceptait pas d’abord de ne pas assassiner ou mutiler des Achrafiens. « Le gouvernement irakien lèche les bottes ensanglantées des mollahs à Téhéran », a dit Dana Rohrabacher, président de la sous-commission parlementaire de surveillance et des enquêtes. Des avocats aussi éminents que Alan Dershowitz ont mis en garde Barack Obama qu’en recevant Maliki il ne devait en aucun cas garder le silence, car ce silence serait interprété comme un accord tacite à une attaque contre Achraf et un carnage degrande ampleur. Un ancien secrétaire américain à la sécurité, Tom Ridge, a posé la question essentielle : Maliki « sera-t-il un amis des Etats-Unis ... ou un laquais de l’Iran ? » Et le fils de Ted Kennedy, Patrick, ancien membre du Congrès, de lancer à Barack Obama : « M. le President, si Nouri al-Maliki vous rencontre le 12 décembre et trois semaines après commet la plus grande violation des droits humains et crime contre l’humanité en attaquant et massacrant 3400 réfugiés sans armes du camp d’Achraf , ce sera trop lourd à expliquer, notre pays ne pourra pas dire qu’il ne savait pas, car nous avons lancé des avertissements. »
Le 10 décembre également, une brochette de généraux américains plusieurs fois étoilés ont adressé une lettre ouverte à Barack Obama pour l’enjoindre d’empêcher Maliki d'exterminer les 3400 Achrafiens.
Depuis une semaine, des tableaux publicitaires fleurissent à Washington contre « Maliki ce criminel », sur les bus, dans le métro et à la télévision. Ce 12 décembre une manifestation monstre va appeler Obama à ne pas recevoir d’assassin à la Maison Blanche, de crainte de voir partout des taches de sang des Achrafiens.
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