Parc zoologique de Paris : tout ce que vous ne verrez pas
Le Parc zoologique de Paris - anciennement "Zoo de Vincennes" -, a ré-ouvert ses portes après six années de travaux : restauration, réhabilitation et transformation.
Suivez le guide.
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On nous avait prévenus : « Ce ne sont pas les animaux qui sont montrés aux hommes mais les hommes qui sont invités à venir découvrir les animaux », explique Sophie Ferreira Le Morvan, la directrice du parc.
On aura reçu et compris le message. Avis aux visiteurs : le millier d'animaux (?) présents n'est donc pas là pour être dérangé... à tel point que lorsque ces animaux n'ont aucun envie de se laisser voir et de s’exhiber, ce qui est bien compréhensible quand on sait qu’ils n'ont rien demandé à personne... on ne les voit ni ne les entrevoit tout simplement pas. Et l'on repart déçus car bredouilles... bredouilles pour l'oeil.
On s’empresse de nous préciser, sans doute à titre de consolation, que « les animaux évoluent dans une réplique superbe de leur milieu naturel, jouissant de nettement plus d'espace et de confort ».
Certes ! Personne ne viendra critiquer la volonté de faire vivre les animaux dans les meilleures conditions possibles mais alors, dans ce cas, on se demande bien pourquoi diable l’on n’a pas décidé tout simplement de leur ficher la paix à tous en leur accordant de continuer de vivre là où ils sont nés (ou bien, là où ils auraient vu le jour à l'état sauvage), eux et leurs descendants… les uns en Afrique et sa plaine du Sahel, désert et savane, d’autres en Patagonie, Madagascar aussi, la Guyane puis l’Europe… les cinq vastes zones qui divisent le parc.
(du béton oui ! des animaux non !)
Aussi, pour cette raison, vous ne verrez pas le loup de Sibérie ou d'ailleurs, ni le Jaguar, ni le rhinocéros, ni le puma, les Caïmans pas davantage, le lynx, les lions une autre fois sans doute... car tous avaient manifestement mieux à faire, ailleurs… tous occupés à faire la sieste, quelque part… on ne sait où…
Sont-ils là ? Oui ? Non ? Brillent-ils tous par leur absence ?
Mais alors, ce parc zoologique serait-il le fruit d’une nouvelle réflexion accoucheuse d’un nouveau concept … surréaliste de surcroît : ce qui est à voir n’est pas là, mais ailleurs, dans notre imagination, et dans notre frustration ? Un peu à la Magritte finalement : « Ceci n’est pas un Puma mais l’enclos d’un Puma » jusqu’à sa logique ultime et son dernier retranchement : « Ceci n’est pas un Zoo mais la tentative d’un Zoo ».
Et pour peu que ce soit les leurs : seuls leurs excréments et autres déjections, attesteront de leur présence passée - et à re-venir ? Du moins, c'est à espérer.
Les lionnes au loin, étendues, immobiles, nous tourneront le dos pour mieux nous présenter leur derrière, c’est vous dire !
Vous ne verrez pas grand-chose non plus dans la volière ni dans le vivarium… si vous êtes chanceux... peut-être une vipère minuscule lovée et indifférence ; elle aussi, endormie.
(encore du béton)
Têtards, salamandres… introuvables, même à la loupe dans un aquarium impénétrable ; si tant est, toutefois, que nous soyons venus pour eux…
(Les égarées du bec, à la recherche d'une pitance incertaine)
Pour la même raison, on cherchera en vain les tapirs ; on nous laisse entendre qu’ils se sont cachés, eux aussi endormis, loin des regards et des visiteurs qui en seront pour leur argent (22 euros - 80 euros pour une famille de deux enfants), leur temps de visite (deux heures à chercher, à scruter dans l'espoir de...) et la déception de ceux qui, adultes et enfants réunis, se lasseront vite d’un effort qui consiste à tenter d’apercevoir une tête, une queue, une carapace, une oreille, une plume, un mouvement, un geste, un regard, que sais-je encore…
Avant de renoncer totalement et de gagner au plus vite la sortie.
Certes, il est vrai que les girafes se laisseront voir mais… reconnaissons qu’il leur est difficile de faire autrement.
« Nous voulons aussi apprendre aux visiteurs à entraîner leur regard, à faire l'effort de patienter en silence jusqu'à ce qu'un animal finisse sa sieste », poursuit Sophie Ferreira Le Morvan.
Aussi, prévoyez la journée de 10h à 18h ; tout en sachant que bon nombre d’animaux ont la fâcheuse habitude de mettre fin à leur sieste le soir au coucher du soleil à la tombée de la nuit. Une solution donc : se laisser enfermer car les loutres, elles, ne sortent que lorsqu'il fait nuit noire. Prévoir non seulement la journée mais la nuit alors : torche, thermo de café, casse croute et sac de couchage.
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(Immobile des heures durant ; ou quand l'ennui vous fige et vous tue aussi sûrement que la balle du fusil d'un braconnier sous d'autres tropiques)
Après une visite bien décevante de 14h45 à 17h30, difficile de ne pas conclure comme suit : ce parc zoologique nous apporte une nouvelle fois la preuve, si c’était encore nécessaire, de l’inutilité des lieux de captivité ouvert au public (1) qu’aucun de ses occupants absents-présents n’aura choisi d'habiter, et moins encore d'y mourir d’ennui après des années de négation de leur animalité : car enfin, le destin d’une girafe n’est-il pas de mourir dans la gueule de lions en meute, après une course qui aura eu raison de ses forces, et certainement pas de vieillesse sous les regards inquisiteurs qui en demanderont toujours plus, d’un public venu tuer un Samedi ou un Dimanche en famille ?
D'autant plus qu'il s'agit de lieux "hyper-marchandisés" qui ne tiennent aucune de leurs promesses "marketing".
La question est posée. Reste à y répondre.
1 - Hors protection des espèces et de leur reproduction qui n’ont pas besoin, soit dit en passant, du regard du public, en attendant leur retour dans leurs milieux naturels – on pensera à l’oryx algazelle ; espèce en voie d’extinction ; il est sans doute de bon ton de le déplorer, aussi, déplorons-le.
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Pour prolonger, cliquez : Le sang des bêtes
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