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Pas de croissance sans Etat providence

Le très libéral Economist fait sa « une » avec un Nicolas Sarkosy triomphant et souligne : « Jean-Baptiste Colbert once again reigns in Paris ». Il explique que le pourfendeur, pendant la campagne électorale, du « système français » est celui qui le défend aujourd’hui, souligne ses avantages et en profite, pour mieux s’en sortir que les anglo-saxons face à la crise financière. 

 Il faut rendre à César ce qui est à César. Le président français est un opportuniste et aujourd’hui c’est sans doute l’attitude la plus payante. Or, les défenseurs traditionnels du système français, ne le sont pas. Et ils soulignent que le prépondérance de l’Etat est un leurre, que le gouvernement persiste dans sa vision néolibérale, que les voisins s’en sortent mieux qu’ici. Ils demandent plus, c’est normal, mais contestent ce qui est accompli et surtout ce qui est structurellement protégé, ce qui l’est moins.

Mais l’essentiel est ailleurs.

Le Economist conclut (et pourrait-il en être autrement ?), que ce qui semble bien marcher aujourd’hui, ne marchera plus une fois la reprise en vue. Alors, les anglo-saxons auront de nouveau un meilleur système : « Those generous welfare states that preserve people’s incomes tend to blunt incentives to take new work. That large state, which helps to sustain demand in hard times, becomes a drag on dynamic new firms when growth resumes. The latest forecasts are that the United States and Britain could rebound from recession faster than most of continental Europe ». Ceci est un tour de passe-passe irrecevable : Il sous tend la logique que lorsque ça va mal c’est à l’Etat et aux contribuables de payer la casse et quand ça va bien c’est aux entrepreneurs et autres banquiers de faire des bénéfices. Or ce qui s’est passé, c’est qu’au moment ou les liquidités étaient abondantes, il n’y avait chez les entrepreneurs ni goût du risque, ni politique d’investissements productifs. Il n’y avait qu’une malice et une volonté d’inventer les moyens financiers et juridiques adéquats pour concentrer le capital à l’infini le plus rapidement possible, quitte à faire des « investissements hasardeux » et suicidaires. En conséquence, le flux de liquidités n’a pas permis une envolée de la croissance (excepté financière et donc globalement inutile), et celle-ci est restée molle, ne permettant pas une redistribution conséquente. Ainsi, à trop vouloir garder l’argent pour soi, on a fini par le perdre. Le court-termisme c’est à dire le suicide de l’anticipation, l’enterrement du long terme, l’obligation de résultats immédiats, ont tué la croissance qui est pourtant le crescendo officiel de l’économie du marché. L’Etat providence n’y est pour rien, sauf de ne pas avoir réagi plus tôt, de s’être accommodé de la dérive financière et d’une croissance molle en remplaçant les augmentations nécessaires par la politique du crédit. Bref, en ayant capitulé de ses obligations et prérogatives en se lavant les mains. Lors de la reprise, quand elle reviendra (et ce n’est pas demain la veille, quoi qu’on dise), les outils qui empêcheront les dérives suicidaires de l’économie de marché devront être bien en place : désormais il n’y aura pas de croissance sans intervention de l’Etat. C’est peut-être là la leçon principale de cette crise. L’économie est une chose trop sérieuse pour l’abandonner aux banquiers. Contrairement au président français, ils restent les derniers idéologues et les pires anticipateurs.


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6 réactions à cet article    


  • Forest Ent Forest Ent 11 mai 2009 10:20

    C’est très rassérénant : nous nous sortirons plus mal de la crise, prévoient ceux qui ont prévu qu’il n’y aurait pas de crise. smiley


    • plancherDesVaches 11 mai 2009 10:49

      Bien vu, Forest.

      Mais c’est du libéral-propagande habituel : prions Sainte Croissance....


    • Candide Candide 11 mai 2009 11:02

      Un consultant auprès de l’ONU....Mazette, dans le village on est fiers. Il a mis un peu de temps à nous expliquer ce qu’on dit à longueur de pages ici tous les jours, mais c’est normal. A force de consulter on voit plus rien....Et puis on s’étonne plus du tout de voir qu’on est dans la merde, vu la rapidité des mecs qui sont aux commandes.


      • Michel Koutouzis Michel Koutouzis 11 mai 2009 14:05

         Ce que je lis, moi, à logueur de journée concerne « les patrons voyous », les hudge fonds, les « parachutes dorés », la « dérive boursière des istitutions finacières », les plans de relance plus ou moins à la mesure de la crise« , que »les fauteurs sont fiancés et pas les victimes« , etc, etc. Oui, je lis aussi »que plus jamais rien ne sera comme avant« , qu’il faut réguler le système », qu’il faut « se débarasser au plus vite des actifs toxiques ». Ce petit article dit deux ou trois choses un peu différentes, eventuellement à débattre : que la crise est le produit de trop de liquidités concentrés" que la croissance est impossible si ces liquidités ne sont pas investies avec une logique à long terme, que l’Etat libéral s’est accommodé d’une croissance molle pendant des années en remplaçant les augmentations (pouvoir d’achat) par le crédit. Ce dernier point, je vous l’accorde a été plus ou moins taité.


      • Emile Red Emile Red 11 mai 2009 12:11

        « Contrairement au président français, ils [...les banquiers...] restent les derniers idéologues »

        Celle là fallait la faire, Sarko ne serait pas un idéologue, ou bé mazette, et quoi-t-est ce qu’il est le professeur nainbus ?
        S’il sont tous comme ça les consultants à l’ONU, à moi la peur, il y a du mouron à se faire sur l’avenir de la planète.


        • Anthony Tabet 17 mai 2009 02:16

          Il suffit d’ailleurs de voir Fillon (si, si, vous savez bien, le premier ministre...) se féliciter de la - toute relative mais réelle - bonne résistance à la crise de la France qui serait due à ses courageuses réformes (!) pour comprendre ce qu’il est en est de leur soumission totale et inconditionnelle à cette idéologie financière.

          En réalité, c’est juste le manque de temps - 2 ans seulement - qui limite les dégâts. Sarkozy élu un an plus tôt on aurait eu autant de crédits hypothécaires pourris que les Espagnols (comme prévu dans son programme) et sans le paquet fiscal et l’exonération fiscale sur les heures supplémentaires une augmentation bien moindre et surtout moins brutale du nombre de chômeurs. Mais pas de souci, il a encore 3 ans et sans doute même 8 devant lui, la prochaine crise, on se la prendra à fond comme les autres winners néolibéraux qui ont tout compris.

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