Pas de paix au Moyen-Orient sans courage politique
Pourtant, l’élément fondamental de cette conférence
d’Annapolis est certainement la présence de certains pays arabes comme la Syrie,
mais également l’Arabie saoudite, présence qui dénote peut-être une volonté
plus grande de parvenir à terme à un règlement. De fait, la réunion de ces pays
avec Israël autour d’une même table de négociations marque une avancée au moins
symbolique tant il est de notoriété publique que la Syrie et l’Arabie saoudite
n’ont jamais formellement reconnu l’existence de l’Etat d’Israël. Le monde
arabe serait-il en train de changer et si tel est le cas pour l’Arabie saoudite
- chantre du sunnisme wahhabite -, n’est-ce pas beaucoup par crainte de
l’épouvantail et de la menace du puissant voisin chiite iranien ?
Cela dit, Itzhak Rabin qui, lui, ne manquait pas de courage
politique, n’avait pas eu besoin de l’aval et de la présence des pays arabes
pour commencer le processus de paix avec les Palestiniens. Il était
parfaitement conscient de l’intérêt vital d’Israël de se retirer d’une grande
partie des territoires occupés. A cet égard, il était, selon sa phrase
emblématique, déterminé à « combattre le terrorisme comme s’il n’y avait pas de
processus de paix et à poursuivre le processus de paix comme s’il n’y avait pas
de terrorisme ».
C’est à l’occupant israélien qu’il incombe d’initier le
premier pas consistant à évacuer les territoires occupés car le concept des
deux Etats est à présent accepté par l’ensemble des intervenants. Pour mémoire,
c’est la France par la voix du président Mitterrand qui avait été la première à
le demander en 1982. Mais le responsable israélien qui en aura le courage
politique existe-t-il seulement même si voilà plus de cinq ans que la
quasi-totalité des sondages en Israël démontre une nette majorité de la
population en faveur de cette idée de ce retrait ? N’oublions pas que Rabin a
été assassiné pour cela... Les dirigeants israéliens devront constamment être
stimulés en ce sens par les autorités américaines et nommément par le (futur ?) président américain qui tiendra un rôle crucial. N’oublions pas que c’est lors
des discussions de Tabba de 2001 organisées par le président Clinton que l’on
était passé le plus proche d’un accord, accord qui aurait abouti si Clinton
avait pu disposer d’un an ou de deux ans de plus...Voilà pourquoi l’impulsion
américaine, si elle est positive et dans le bon sens, est tout à fait
fondamentale. Il ne faut donc pas que les Israéliens comptent indéfiniment sur
le protecteur américain pour les dispenser d’une solution courageuse car la
paix n’aura de réelles chances d’aboutir que dès lors qu’Israël se retrouvera
face à un président américain un peu moins coopératif. C’est donc aux
Américains et aux Israéliens de trouver dans un premier temps le courage politique de
faire progresser le dossier même si trouver un dirigeant palestinien charismatique
et représentatif qui acceptera de s’engager dans la signature de l’acte de
fondation de cet Etat palestinien relèvera par la suite du défi. Il y aura
manifestement un problème palestinien de mise en œuvre le jour où un
Palestinien devra signer la création d’un Etat palestinien viable car la frange
extrémiste de son peuple refusera un tel accord qui réduirait ce futur Etat au
quart de la Palestine historique. Précisément, le rôle des Arabes, s’il est
moins décisif pour l’enclenchement du processus, sera déterminant pour la suite
car ils devront alors jouer un rôle de modérateurs et de banquiers vis-à-vis du
peuple palestinien. Du reste, l’appui des Arabes avait beaucoup manqué à Arafat
lorsque Clinton avait tenté de résoudre ce processus.
Quoi qu’il en soit, l’Etat d’Israël doit cesser de se
considérer comme une enclave occidentale au sein du Moyen-Orient. Israël doit
absolument se résigner à l’intégration dans sa région et cesser de regarder
continuellement vers l’Occident tout en jetant un regard condescendant vers
l’Orient. La terre d’Israël, l’histoire du peuple d’Israël sont foncièrement et
fondamentalement d’Orient, le peuple d’Israël doit donc une fois pour toutes
cesser de se conduire comme un corps étranger dans sa région ! Certes, un
effort considérable doit être demandé aux Israéliens, mais cet effort devra
fatalement aboutir car, si les Israéliens ne s’identifient pas à cette terre
d’Orient, s’ils n’admettent pas enfin leur appartenance à cette identité
orientale - avec toutes ses qualités et toutes ses contradictions - alors les
Israéliens, et avec eux le peuple juif, se condamneront à l’errance éternelle.
9 réactions à cet article
Ajouter une réaction
Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page
Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.
FAIRE UN DON