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Accueil du site > Tribune Libre > Pas de paix au Moyen-Orient sans courage politique

Pas de paix au Moyen-Orient sans courage politique

Cela a été dit et répété : en dépit de la reprise des premiers pourparlers de paix pour le Moyen-Orient gelés depuis le 11-Septembre, la guerre en Irak et la guerre du Liban, la conférence d’Annapolis qui vient de se terminer entre Américains, Israéliens et Palestiniens a laissé un goût d’exercice imposé. Il est en effet foncièrement suspect qu’un homme tel que le président Bush se décide, à quatorze mois de la fin de ses deux mandats de huit ans, de s’intéresser enfin à ce nœud gordien moyen-oriental qu’est la cause palestinienne. Par ailleurs, quelle crédibilité accorder au Premier ministre israélien lorsque par exemple sa ministre des Affaires étrangères prévient les Arabes d’Israël qu’ils devront un jour se déplacer vers la Cisjordanie ? Peut-on en effet décemment déloger des familles habitant depuis des siècles à Nazareth, en Galilée, à Haïfa... ? Quelle crédibilité peut-on enfin accorder à M. Abbas qui semblait lors de cette conférence ne représenter qu’une intelligentsia palestinienne de plus en plus déconnectée des préoccupations d’un peuple réduit à la misère ? Bref, cette conférence d’Annapolis semblait a priori peu crédible et peu prometteuse eu égard à la faiblesse politique des trois participants.

Pourtant, l’élément fondamental de cette conférence d’Annapolis est certainement la présence de certains pays arabes comme la Syrie, mais également l’Arabie saoudite, présence qui dénote peut-être une volonté plus grande de parvenir à terme à un règlement. De fait, la réunion de ces pays avec Israël autour d’une même table de négociations marque une avancée au moins symbolique tant il est de notoriété publique que la Syrie et l’Arabie saoudite n’ont jamais formellement reconnu l’existence de l’Etat d’Israël. Le monde arabe serait-il en train de changer et si tel est le cas pour l’Arabie saoudite
- chantre du sunnisme wahhabite -, n’est-ce pas beaucoup par crainte de l’épouvantail et de la menace du puissant voisin chiite iranien ?

Cela dit, Itzhak Rabin qui, lui, ne manquait pas de courage politique, n’avait pas eu besoin de l’aval et de la présence des pays arabes pour commencer le processus de paix avec les Palestiniens. Il était parfaitement conscient de l’intérêt vital d’Israël de se retirer d’une grande partie des territoires occupés. A cet égard, il était, selon sa phrase emblématique, déterminé à « combattre le terrorisme comme s’il n’y avait pas de processus de paix et à poursuivre le processus de paix comme s’il n’y avait pas de terrorisme ».

C’est à l’occupant israélien qu’il incombe d’initier le premier pas consistant à évacuer les territoires occupés car le concept des deux Etats est à présent accepté par l’ensemble des intervenants. Pour mémoire, c’est la France par la voix du président Mitterrand qui avait été la première à le demander en 1982. Mais le responsable israélien qui en aura le courage politique existe-t-il seulement même si voilà plus de cinq ans que la quasi-totalité des sondages en Israël démontre une nette majorité de la population en faveur de cette idée de ce retrait ? N’oublions pas que Rabin a été assassiné pour cela... Les dirigeants israéliens devront constamment être stimulés en ce sens par les autorités américaines et nommément par le (futur ?) président américain qui tiendra un rôle crucial. N’oublions pas que c’est lors des discussions de Tabba de 2001 organisées par le président Clinton que l’on était passé le plus proche d’un accord, accord qui aurait abouti si Clinton avait pu disposer d’un an ou de deux ans de plus...Voilà pourquoi l’impulsion américaine, si elle est positive et dans le bon sens, est tout à fait fondamentale. Il ne faut donc pas que les Israéliens comptent indéfiniment sur le protecteur américain pour les dispenser d’une solution courageuse car la paix n’aura de réelles chances d’aboutir que dès lors qu’Israël se retrouvera face à un président américain un peu moins coopératif. C’est donc aux Américains et aux Israéliens de trouver dans un premier temps le courage politique de faire progresser le dossier même si trouver un dirigeant palestinien charismatique et représentatif qui acceptera de s’engager dans la signature de l’acte de fondation de cet Etat palestinien relèvera par la suite du défi. Il y aura manifestement un problème palestinien de mise en œuvre le jour où un Palestinien devra signer la création d’un Etat palestinien viable car la frange extrémiste de son peuple refusera un tel accord qui réduirait ce futur Etat au quart de la Palestine historique. Précisément, le rôle des Arabes, s’il est moins décisif pour l’enclenchement du processus, sera déterminant pour la suite car ils devront alors jouer un rôle de modérateurs et de banquiers vis-à-vis du peuple palestinien. Du reste, l’appui des Arabes avait beaucoup manqué à Arafat lorsque Clinton avait tenté de résoudre ce processus.

Quoi qu’il en soit, l’Etat d’Israël doit cesser de se considérer comme une enclave occidentale au sein du Moyen-Orient. Israël doit absolument se résigner à l’intégration dans sa région et cesser de regarder continuellement vers l’Occident tout en jetant un regard condescendant vers l’Orient. La terre d’Israël, l’histoire du peuple d’Israël sont foncièrement et fondamentalement d’Orient, le peuple d’Israël doit donc une fois pour toutes cesser de se conduire comme un corps étranger dans sa région ! Certes, un effort considérable doit être demandé aux Israéliens, mais cet effort devra fatalement aboutir car, si les Israéliens ne s’identifient pas à cette terre d’Orient, s’ils n’admettent pas enfin leur appartenance à cette identité orientale - avec toutes ses qualités et toutes ses contradictions - alors les Israéliens, et avec eux le peuple juif, se condamneront à l’errance éternelle.


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9 réactions à cet article    


  • ZEN ZEN 4 décembre 2007 11:28

    Votre article est courageux, malheureusement, je suis moins optimiste que vous sur le court et le moyen terme

    Voilà ce que je disais il y a peu en répondant à une article de Avox traitant du même sujet et en me référant à plusieurs articles de presse récents :

    M. Bush s’engage sur le dossier de l’Etat palestinien . Annapolis : une chance historique d’échouer ?...

    Un nouveau mirage, une nouvelle manière de gagner du temps, de donner le change, probablement....alors que la colonisation de la Cisjordanie, jamais interrompue, s’intensifie, créant une situation irréversible et rendant la création d’un Etat palestinien quasiment impossible.Il suffit de regarder une carte pour le comprendre.Le retrait de Gaza était un alibi commode donnant les mains libres en Cisjordanie pour instaurer un fait accompli , qui ne pourrait être mis en question sans drames.Politique coloniale à courte vue et suicidaire d’Israël... Lundi, plusieurs milliers de colons israëliens se sont réunis devant le Mur des Lamentations , afin de prier pour l’échec de cette conférence. Que va faire Yaweh , alors que d’autres prient pour le résultat inverse ?...Négotiations de la dernière chance en tous cas ; si elles échouent, le camp modéré palestinien sera anéanti et les chances de créer un Etat palestiniens deviendront nulles. S’il n’y a pas de vives pressions des USA sur Israël, il y a peu de chances d’aboutissement. Mais qu’attendre de Bush, qui a avalisé en 2004, l’annexion future par Israël des blocs de colonies les plus importantes de Cisjordanie ?...En paroles, Bush est un sage(ou un opportuniste) :« ...Le désespoir est un terreau sur lequel propèrent extrèmistes et radicaux... », vient-il d’affirmer.

    « Bush est en train de se faire une bonne image en faisant croire qu’il veut la paix entre Israel et les Palestiniens (avec un état Juif et les palestiniens dehors... bien sûr). On peut supposer sans trop s’avancer que de l’argent sera distribué. Il n’est en effet pas possible d’ouvrir un front avec l’Iran tant que la poudrière palestinienne menace Israel. Par ailleurs cela assoit le role de protecteur des US vis-à-vis de l’opinion internationale. Israel prépare ses frappes (justifiées pour Bush & co) vers l’Iran, et le protecteur US se tiens prêt à intervenir si nécessaire. C’est de l’avis de beaucoup le scénario le plus vraisemblable... »(commentaire de Hermès sur Agoravox)

    http://www.liberation.fr/actualite/monde/293019.FR.php?rss=true http://www.monde-diplomatique.fr/cartes/cisjordaniedpl2000


    • Adama Adama 4 décembre 2007 12:20

      Cher monsieur Santi,

      Nous ne nous sentons absolument pas occidentaux ni étrangers en terre d’israël, vous fantasmez !

      Que l’état d’Israël soit une enclave démocratique dans une région où seules les dictatures règnent, je vous l’accorde.

      Votre argumentation est des plus curieuses, nous devrions recevoir des leçons de démocratie « orientale » de la part de nos voisins afin d’être plus crédibles !!!

      Ne pensez-vous pas, que les colonisateurs arabes venus prêchez la bonne parole de Mahomet, doivent avant tout se démettre de leurs potentats respectifs et du joug d’une religion fachisante(problème bien connu en Europe !) et qui est en contradiction flagrante et violente avec une pensée rationelle ?

      Eux, dont le Coran et le sabre furent leurs seuls arguments durant des siècles de massacres de différents peuples ou de conversion forçées, et qui fort de l’exemple de leurs ancêtres, ont comme finalité que le monde devienne Islam, c’est à dire littéralement soumis !

      Sujet à réflexions non ? et pas seulement en terre d’Israël...


      • ZEN ZEN 4 décembre 2007 13:03

        Touchant , Adama !...


      • Michel Santi Michel Santi 4 décembre 2007 15:44

        Cher Sami, non ce n’était pas le sens de mon dernier paragraphe, Israel n’a aucune leçon de démocratie à apprendre des pays Arabes, pas plus que des pays dits « occidentaux » du reste. Néanmoins, cette opinion n’engage que moi, Israel doit vraiment régler ses problèmes avec les Arabes et avec le peuple palestinien en ne comptant que sur elle-même, c’est-à-dire en faisant abstraction du soutien inconditionnel que lui prodigue les Etats-Unis. Selon moi, c’est précisément du fait qu’elle use et abuse de ce soutien tout à fait déterminant qu’elle s’éloigne ainsi d’un règlement rapide de cette crise, la rue Arabe ressentant cet appui comme un chèque en blanc - humiliant pour eux - accordé par la nation la plus puissante du monde à l’Etat Israélien, à leur détriment. Vous le savez, la paix ne se fera pas sans les peuples, tant le peuple d’Israel que le peuple - ou les peuples - arabes. Là, j’en viens aux régimes autoritaires - parfois dictatoriaux - des pays arabes ( et répond partiellement à fouadraiden ) : l’expérience a montré que, souvent, les peuples sont moins extrémistes et plus ouverts au compromis que leurs dirigeants. Israel doit donc tenir compte de cette société civile arabe qui est foncièrement modérée et plus civilisée qu’on le pense. A son tour, cette société civile doit être conséquente et insufler partout ou elle le peut de la pluralité dans certains régimes qui en ont bien besoin ! Peut-être suis trop utopique... ? Quant à l’Islam, je pense que vous le savez aussi, l’on n’aura jamais de problèmes avec un « bon » lecteur du Coran. Cordialement.


      • fouadraiden fouadraiden 4 décembre 2007 13:40

        attention tt de meme à ne pas prendre les dirigeants arabes pour autre chose que des régimes policiers,illégitimes et surtout incompétents ,ne refletant en rien l’opinion des masses arabes. et qd bien meme Israel parviendrait à se convaincre ,un jour, de conclure un réel accord avec ces régimes autoritaires ,les populations arabes resteraient, ds l’état actuel des choses , hostiles au peuple juif en leur sein.

        les Juifs d’Europe ,pourchassés et massacrés par leurs propres concitoyens européens, ont été contraints d’ inventer le sionime, code de survie et de sauvegarde pour un peuple d’exilés,et les Arabes pour leur plus gd malheur hérite de cette situation au moment meme ou ils cumulent tte les faiblesses du monde..

        compte tenu des nombreuses guerres et de la colonisation des terres palestiniennes les arabes du monde entier sont devenus antisémites(voir le cas algérien récent).

        l’Occient a créé une situation inextricable dont il est le seul responsable et voir les Arabes ennemis des Juifs ds nos postes télé , nos journeaux et nos conversations , c’est encore ce qui pouvait arriver de mieux à l’Occident pour conjurer son antisémitisme millénaire.



          • fouadraiden fouadraiden 5 décembre 2007 11:26

            excellent pt de vue de ce professeur,que je ne cesse de relayer ici ou là.

            les élites arabes et les néoconservayeurs auraient donc les memes intérets , c’est donc ce qui expliquerait l’improvisation de la conférence d’Annapolis : le bobardement sur l’iran à condition de faire croire à l’opinion arabe que le cas palestinien est redevenu une priorité pour la maison blanche....


          • moebius 4 décembre 2007 20:45

            Ah ! que voila une bétise ; Israel devrait renoncer au soutien américain et le peuple, les peuples sont choses si saintes


            • ZEN ZEN 5 décembre 2007 16:39
              Et volià comment Olmert veut sacrifier Annapolis

               

              Israël relance la construction d’une colonie controversée
              LE MONDE | 05.12.07 | 10h55 • Mis à jour le 05.12.07 | 10h55
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              Jérusalem, correspondant

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              ne semaine après le sommet d’Annapolis (Maryland), l’administration israélienne a annoncé avoir lancé un appel d’offres pour la construction de 307 nouveaux logements dans la colonie de Har Homa. La création de cette implantation, à proximité de Bethléem, à la fin des années 1990, avait déjà soulevé de vives controverses. <script language="JavaScript">if (provenance_elt !=-1) {OAS_AD('x40')} else {OAS_AD('Middle')}</script>


              Alors que des pourparlers doivent s’ouvrir le 12 décembre pour tenter de créer un Etat palestinien, l’extension de Har Homa est considérée comme « une provocation » par les Palestiniens. « Si Israël n’annule pas cette décision, cela sabotera les résultats d’Annapolis avant même le début de leur application », a déclaré Saëb Erakat, principal conseiller de Mahmoud Abbas, président de l’Autorité palestinienne.

              Pour le gouvernement israélien d’Ehoud Olmert, cette colonie fait partie du « Grand Jérusalem » et devrait, dans la perspective de la création de la Palestine, être englobée à ce que les Israéliens appellent leur « capitale unifiée et indivisible ». En revanche, pour les Palestiniens, elle est située sur le territoire conquis lors de la guerre des Six-Jours (1967) et doit faire partie de Jérusalem-Est, dont l’Autorité palestinienne souhaite faire sa capitale..."

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