Patriot Act : quand Big Brother s’installe
Le président américain George W. Bush continue ses pressions auprès du Congrès pour renouveler le controversé Patriot Act dont certaines clauses arrivent à échéance pour l’année 2005. Cette pièce maîtresse de la lutte contre le terrorisme est une atteinte directe aux libertés individuelles de millions de civils américains. Depuis quelques années, sous le couvert de la sécurité nationale, différentes agences du gouvernement (CIA, NSA, FBI) se sont vues octroyer des pouvoirs extraordinaires. Le développement récent des technologies high-tech leur offre des outils efficaces pour mieux ficher et cataloguer les citoyens. L’Amérique, cette terre de liberté, et dont les rives sont tant convoitées, est maintenant sur une pente descendante à faire rougir les Pères fondateurs. Nous sommes aux portes de cette dictature silencieuse telle que décrite par l’écrivain George Owell dans son livre 1984.
La vie aux États-Unis n’est plus la même depuis que deux avions remplis de kérosène ont frappé les tours jumelles du World Trade Centre. En quelques minutes une panique généralisée s’est emparée de ce pays, qui fut récupérée par les fonctionnaires pour redorer le blason de l’État. Il y a plus de trente ans, au lendemain du scandale du Watergate, la confiance de la population envers l’establishment avait été profondément ébranlée. Le président Richard Nixon avait délibérément abusé de ses pouvoirs en faisant enregistrer les conversations de ses interlocuteurs dans le bureau ovale. Habité par une paranoïa excessive, il voyait ses ennemis jusque dans sa soupe, étant convaincu qu’ils étaient prêts à saisir la moindre occasion pour le frapper. En 1974, écrasé par la presse et voulant surtout éviter la destitution, il démissionne. L’opinion publique scandalisée remet totalement en question la légitimité du gouvernement et se méfie de ses institutions. Pas question de laisser Big Brother toucher à la liberté et surtout à la vie privée garanties par la Constitution.
En 2001, lorsque George W. Bush se rend à New York pour constater les dégâts sur le site des attentats, la confiance que lui accordent les Américains atteint des sommets. On le perçoit comme un homme d’État fort, capable de prendre les initiatives nécessaires pour protéger le territoire de la menace terroriste. Or, la population complètement aveuglée ne pouvait se douter un seul instant que Big Brother allait s’installer confortablement dans leur vie par l’entremise du Patriot Act.
Cette loi adoptée par le Congrès augmente considérablement le pouvoir de l’État pour épier ses propres citoyens. Elle donne le droit aux autorités de mener des perquisitions sans mandat sur une propriété privée et d’écouter sans l’accord d’un juge les communications téléphoniques et numériques. Il est maintenant possible d’obliger les cliniques médicales, les librairies, les universités, les bibliothèques, ainsi que les fournisseurs de service Internet, de donner toutes les informations confidentielles sur un client. En cas d’arrestation, un citoyen peut être isolé et déporté sans justification. Finalement, la police peut utiliser des méthodes beaucoup plus extrêmes pour mener des interrogatoires et ainsi menacer l’intégrité physique et psychologique d’une personne.
Cette ingérence de l’État est une preuve évidente que des fonctionnaires peuvent utiliser de tristes événements pour justifier leur utilité auprès d’une population. Utilisant la peur, les émotions, ils feront tout en leur pouvoir pour influencer l’opinion publique en leur faveur. Dans le cas présent, cela a donné naissance à une Amérique complètement différente, ayant des similitudes avec le totalitarisme. Pour un pays qui prétend défendre la liberté aux quatre coins du monde, cette remise en question des droits individuels dans sa propre cour m’apparaît très inquiétante. Il faut espérer que le vaste mouvement de contestation qui s’organise réussira a renverser l’application du Patriot Act.
Mathieu Bréard
Montréal
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