Penser l’ennemi moléculaire, affronter l’exception
« Le terrorisme ne ressemble à aucune autre guerre... Et vous ne pouvez pas faire de comparaison point par point... »
« C'est certainement un problème qui touche le monde entier et qui ne reculera que devant une action mondiale... Comment pouvez-vous parvenir à une action mondiale quand chaque pays est d'accord pour traiter avec les terroristes, dans l'espoir qu'il sera épargné, et se fiche éperdument de ses voisins ? »
« Et vous croyez que le terrorisme peut survivre sans l'assentiment, ou du moins l'approbation passive de la société dans laquelle il existe ? »
Paroles des veufs noirs dans la nouvelle « Le trèfle à quatre feuilles »Isaac Asimov, Union Générale d'Edition, 1999 (pages 219-220)
Editée pour la première fois en 1990
Le soutien unanime reçu de partout par la France en réaction à l'horrible massacre qui a endeuillé une fois de plus notre pays avec le massacre de Nice perpétré symboliquement le jour de la Fête nationale constitue bien évidemment une marque d'humanité dans un monde qui en semble chaque jour dépourvu.
http://www.bruxelles2.eu/2016/07/15/les-reactions-europeennes-apres-lattaque-de-nice/
Un assassin est mort, fort heureusement abattu par la Police, un tueur au camion qui laisse derrière lui, outre un grand nombre de blessés, le désastre de 84 vies fauchées au nom de raisons plus obscures les unes que les autres qui rendent en tout cas ce crime - son auteur, ses possibles instigateurs - irrecevable tant en ses justification que ses motivations.
Il n'y a rien à expliquer car il n'y a plus de temps à consacrer à se perdre dans une nébuleuse d'arguties et d'interrogations fuligineuses pour tenter de justifier l'injustifiable, d'expliquer ce que chacun a parfaitement compris et qui se résume à un constat très simple, aussi désagréable ou pénible soit-il à admettre pour certains : nous sommes en guerre face à un terrorisme déterritorialisé, bientôt technicisé et désormais absolutisé dans sa dimension pseudo-théologique mais qui en réalité ne se réduit qu'à sa dimension intrinsèquement criminelle, la seule dimension qui permet de l'identifier sans se tromper.
Le prévisible et l'attendu se sont donc une fois de plus produits et l'on n'en finit plus de s'interroger sur les commentaires qui, une fois de plus, se trompent d'ennemi.
Guerre civile : commentaire sous http://www.bvoltaire.fr/mariedelarue/quand-le-patron-de-la-dgsi-agite-le-spectre-de-la-guerre-civile,271210
Il s'agit d'affronter un ennemi moléculaire qui a changé de tactique et peut agir n'importe où, n'importe comment, mais qui fort heureusement demeure identifiable dans la mesure où il se réfère à un mode et à un cadre d'action - le terrorisme - en relation avec une "hostilité absolue" à l'égard d'une population attaquée, comme l'écrit J-C. Monod dans un très intéressant ouvrage intitulé "penser l'ennemi, affronter l'exception".
Décrété par le chef de l'Etat après les attentats du 13 novembre 2015 qui ont fait 130 morts, le régime d'exception de l'état d'urgence a été prolongé en février et mai. Lors de son interview du 14 juillet, une dizaine d'heures plus tôt avant l'attentat de Nice, le président avait confirmé son intention de ne pas prolonger l'état d'urgence au-delà du 26 juillet. Cette mesure sera donc prolongée pour trois mois, avec appel à la « réserve opérationnelle ». Soit.
Et ensuite ? En attendant quoi ? Dans quel but ? Le débat est ouvert.
Il ne le demeurera pas éternellement dans la mesure où il va falloir admettre que l'hostilité ne pouvant être considérée comme l'horizon indépassable de notre temps, les déclarations comme les mesures cosmétiques sont ineffectives et qu'il n'est pas acceptable de vivre sans réagir avec l'idée que sortir de chez soi vous expose au risque de perdre la vie simplement parce que des gens, identifiés et identifiables, ont décidé que la vôtre ne valait rien.
Références :
9 réactions à cet article
Ajouter une réaction
Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page
Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.
FAIRE UN DON