Petits arrangements entre amis

Sempiternelle rengaine. Pas un jour ne passe sans que l’on entende parler de cette détestable crise. L’information devient refrain, tant l’incapacité des politiques à répondre durablement aux dysfonctionnements actuels, pose la question de leur aptitude à assumer les plus hautes fonctions au sein de notre pays. « Vivre est une chanson dont mourir est le refrain » disait Victor Hugo. Il n’avait pas anticipé que le disque pouvait être rayé… Nous sommes en train d’être consumés à petit feu. Notre état de somnolence, entretenus par une légion de faussaires intellectuels, nous condamne à idolâtrer nos bourreaux sans saisir la portée et l’incidence des décisions qu’ils prennent. Comme un malade ne connaissant pas le diagnostic, la rationalité laisse place à l’émotivité, et des relents identitaires naissent ici ou là.
Pourtant, jamais une remise en question sereine et raisonnée n’a été aussi impérieuse.Saisir le mal actuel est la clé pour que le refrain cesse, et que la chanson entonne à nouveau
Nos Etats sont proches du défaut de paiement. Jamais l’attaque sur les dettes souveraines n’a été aussi fourbe qu’elle l’est actuellement[1]. Nos banques sont à genoux, illiquides et insolvables, et ne subsistent que grâce à une perfusion clandestine de deniers publics.
C’est un fait. Le modèle économique français a échoué dans ses devoirs de compétitivité, d’égalité, et de solidarité. C’est une obligation de résultat, et ce dernier n’est malheureusement pas là où on pourrait l’attendre. L’heure de faire les comptes approche, et il va falloir déterminer sur qui vont peser les efforts de redressements.Voilà un sujet ô combien électrique, où les impératifs de justice sociale devront coûte que coûte être mis en avant, sous peine de connaître une profonde instabilité au sein de notre pays.
Aucune législation n’a imaginé une quelconque procédure en matière de faillite étatique. L’Etat, entité suprême, était considéré comme au-dessus de ce genre de problématique. Mais la technocratie mondialisée étant passée par là, la France est devenue un actif parmi tant d’autres. Abandonnant progressivement ses pouvoirs régaliens au profit d’une Europe toujours plus atlantiste, notre pays s’est rendu dépendant de créanciers privés avides et apatrides.
La faillite d’une entreprise a depuis longtemps fait l’objet d’encadrement législatif, dont l’étude et l’application de certains points se révèleront précieux, logiques, et efficaces tant d’un point de vue moral qu’économique.
En droit français, la procédure de redressement ou de liquidation judiciaire peut avoir une incidence sur la situation du chef d'entreprise lorsqu'il a commis des fautes. En effet la faillite a toujours eu une fonction sanctionnatrice, en marginalisant le commerçant malhonnête.
Sont susceptibles d'en relever tous les dirigeants de droit ou de fait de la personne morale.
On entend par dirigeant de droit, les organes légaux de gestion de l’entreprise (président du conseil d'administration, administrateurs, membres du directoire...).
La notion de dirigeant de fait vise quant à elle les personnes qui directement ou par personne interposée, exercent une activité de gestion au sein de la personne morale à la place des dirigeants légaux. Ainsi, le dirigeant de fait est celui qui s’immisce dans l’administration de la société.
La faillite que nous connaissons actuellement, résulte de la convergence de deux phénomènes complémentaires : la prise du pouvoir d’une élite technocratique financière, et le clientélisme des élites politiques.
Main basse sur les Nations !
Régularisation budgétaire, charge de la dette, plan de rigueur… les exemples sont nombreux pour illustrer le fait que nos politiques ne tiennent plus la barre de notre pays. L’argent est le nerf de la guerre. Celui qui contrôle l’argent, contrôle l’exercice du pouvoir car « la main qui donne est au dessus de celle qui reçoit »[2]. Or, la France n’a plus la maîtrise de son appareil économique, du moins de la conduite de ce dernier. Libre à nos dirigeants de prendre des mesures d’opportunité, de couper dans les budgets, et d’augmenter nos impôts pour se donner une bouffée d’air. Mais la source du mal subsiste, et ne tarit pas. En cause, le « casse » du siècle. Sous couvert de vouloir lutter contre l’inflation, le président Pompidou a adopté le 3 janvier 1973 la loi félonne du même nom, interdisant à l’Etat français d’emprunter à taux zéro à la Banque de France. Qui ne prend pas la mesure de l’importance de la création monétaire dans la crise que nous connaissons actuellement, ne peut de façon sérieuse comprendre les origines du mal qui nous ronge.
Par cette loi, qui a bien évidemment mué en une version européenne[3], nous avons adoubé un mécanisme permettant aux tenants du système de la City et de Wall Street, de concentrer en leurs mains une quantité considérable d’argent, grâce aux intérêts perçus sur les emprunts consentis.
Cette perte du pouvoir régalien de battre monnaie, est à mettre en perspective avec l’abandon progressif de notre souveraineté au profit de l’entité supranationale européenne. Loin d’atteindre le rêve européen, nous avons perdu tous les instruments permettant la conduite de notre pays, en favorisant au maximum une libre circulation des capitaux. Les objectif initiaux de l’Europe[4], du moins les officieux, sont respectés : une Europe bridée par sa bureaucratie, incapable de mettre un pied devant l’autre sans l’accord de tous les pays ; où les capitaux (sales) partent de la City[5] pour s’expatrier au Bahamas ou à Jersey et reviennent en terre européenne blanc comme neige et où les entreprises délocalisent leur production en Chine ou au Brésil, du fait d’un euro trop fort rendant le coût productif trop important.
Nous avons réalisé le rêve névrosé des financiers les plus déments : une création monétaire à leur profit leur permettant, par le phénomène de l’usure d’accaparer le maximum de richesse. L’ensemble étant facilité par une circulation des capitaux de plus en plus libre, ce qui leur a permis de donner naissance à ce monstre cyclique@, qui assèche nos économies, et paupérise les peuples. L’argent n’a pas de patrie, il va où sont ses intérêts, il fait et défait à loisir selon l’aubaine du moment. Si un pouvoir supérieur ne l’encadre pas, et bien il nous dirigera.
Du dilettantisme en politique
Un crime d’une telle envergure ne peut se faire sans la complicité de tierce personne. Si nous restons sur l’exemple de la loi de 1973, nombreux sont les présidents qui se sont succédés sans remettre en cause ni même parler de cette hérésie. Pour les experts, cette loi faisait obstacle à la tentation qu’auraient eu les dirigeants de financer leur croissance sans limite, par le biais de ce que l’on appelle « la planche à billet ». Loin de mettre fin à cette démagogie politique, cette loi a alourdi davantage notre budget, et a contribué à tresser la corde que nous avons autour de notre cou. Une simple limite à l’emprunt, un plafonnement, aurait amplement suffit pour mettre fin à cette pratique complaisante, mais nous avons préféré faire un énorme cadeau à Goldman Sachs, Lazard Brothers, Barclays et consorts[6]… Cette loi est passé en force pour entrer dans nos chaumières grâce au lobbying incessant du milieu financier. Le lobbying… Ne sous estimez pas ce nouveau pouvoir, qui parfois peut être plus puissant que les Etats. Pour être élu Président de la République à l’heure actuelle, il faut s’imposer sur la scène médiatique, et cela nécessite des moyens considérables. Derrière chaque candidat « naturel », de puissants groupes de pression exercent une influence considérable et soutiennent financièrement nos futurs élus pour leur permettre d’accéder à l’Elysée. Or une fois élu, le petit protégé effectuera un retour d’ascenseur, prendra des mesures favorables à ses chers mécènes, sous peine d’être lâché et dénigré. Ainsi la politique mise en œuvre par chaque Président fraichement élu, et donc la gestion du pays, est directement influencée par les grandes contributions versées en amont lors de la campagne. Nos dirigeants de droit sont ainsi contraint par des tierces personnes à mener une politique, peut être à l’encontre de leur philosophie, du moins contre l’intérêt réel du pays.
Le pouvoir décisionnel ne se situerait donc plus chez notre dirigeant de droit, mais prendrait naissance ailleurs, chez des personnes, des groupes, ou des réseaux qui de façon obscure influenceraient directement la conduite de notre pays, et les décisions prises. Le pouvoir en fait ne s’exercerait plus par une entité légale, élue démocratiquement, mais par des tierces personnes qui s’immisceraient dans la gestion du pays, bien entendu contre l’intérêt des citoyens. Ces dirigeants de fait devraient donc, sur le modèle de la législation en matière d’entreprise en difficulté, être responsables des pertes et de la mauvaise gestion des finances du pays.
Quels responsables ?
Face à l’absence de transparence, une tentative d’identification de ces dirigeants, ou du moins l’apport de preuve à leur encontre est un travail d’une grande complexité. Mais une approche empirique, et surtout pragmatique de la situation permet de révéler certaines accointances ô combien douteuses.
Les méthodes entourant le financement des partis et campagnes, devraient déjà pousser à l’interrogation.
Prenons pour exemple la période contemporaine. Certains financements obtenus par le cercle restreint du Président Sarkozy laissent songeur. Outre les dons consentis par les grandes richesses françaises (Bettancourt, Boloré, Pinault…), la fondation de Carla Bruni aurait reçu, selon le DailyMail un financement de 1 500 000 euros de la part de John Paulson, ancien président de Goldman Sachs, pour développer « un programme ambitieux de scolarisation dans les milieux défavorisés ». Une belle intention à n’en pas douter, mais cette accointance avec Paulson devrait nécessiter une plus grande transparence.
Laurent Wauquiez également se serait rendu cet été à Londres pour s’entretenir avec certains financiers français de la City pour financer son mouvement politique Nouvel Oxygène, satellite de l’UMP[7].
Rien d’illégal bien entendu dans tout cela, mais ne croyez pas qu’il s’agit là d’actes purement désintéressés. Le don entraîne le contre don, n’est-ce-pas monsieur Bourdieu.
Loin de vouloir pointer la faiblesse du seul Nicolas Sarkosy, cette pratique est en vigueur pour l’ensemble de la classe politique actuelle, ne croyez-pas qu’ils mettent tous leurs œufs dans le même panier…
La question du pouvoir médiatique également est fondamentale. Ce dernier joue un rôle primordial dans la tenue des débats de société, dans la primauté accordée à telle question par rapport à telle autre, et dans la montée de tel candidat par rapport à tel autre. Et l’influence exercée sur les citoyens français est considérable, anesthésiante, mortelle... Sans opérer une étude exhaustive sur la propriété des organes de presse et télévisuel[8], il est de notoriété publique que ces derniers appartiennent à des grands groupes industriels, avec comme dominance le duo Dassault-Lagardère, grand contributeurs devant l’éternel des campagnes de nos Présidents. Or il apparait que le groupe Lagardère est détenue à 60% par des capitaux étrangers. Lesquels ? Ces 60% ont potentiellement un pouvoir de censure sur la ligne éditoriale de tous les organes détenues par le groupe. Ils exercent donc une influence directe sur nos esprits.
Le mélange des genres, est curieux. La consanguinité du pouvoir politique, médiatique, et financier presque obscène. La séparation des pouvoirs chère à Montesquieu, doit absolument être réformée.
Concernant l’Union Européenne, comme il a été dit plus haut, cette dernière détient des compétences exclusives sur les Etats, notamment en matière douanière, monétaire, commerciale, et concurrentielle. Tout est décidé à la Commission Européenne pour être ensuite transposé dans nos Etats. Or un bref aperçu du curriculum vitae des dirigeants européens est révélateur des liens qui ont été tissés entre pouvoir politique et milieux financiers[9].
Un double effet de flux s’est mis en place entre le milieu de la finance internationale, et les instances européennes. D’un côté l’UE sert de base de recrutement, de l’autre les institutions financières placent leurs pions, et mettent aux postes clés des anciens de la maison. Verrouillage institutionnel…
Le but de cet article n’est pas d’entamer la chasse aux sorcières, car nous avons une part de responsabilité qu’il va falloir assumer. Nous nous sommes trop longtemps reposé sur notre système social. Nous avons laissé filé la dépense publique, sans exiger la mise en place de gardes fous. Quand des efforts sont nécessaires, tout le monde est d’accord sauf quand il s’agit de se les appliquer à soi-même. Pourtant des efforts seront nécessaires citoyens. Prenons du recul sur les erreurs que nous avons commises. Ré intéressons nous au fonctionnement de la cité, soyons curieux et ne prenons pas pour argent comptant tout ce qui nous est dit. Posons nous des questions. Pourquoi décide-t-il cela ? Qu’a-t-il comme arrière pensée réellement ? Le pouvoir se situe-t-il réellement en France ? Pourquoi sommes nous rentrés à nouveau dans l’OTAN ? Au bénéfice de qui ? Pourquoi le communautarisme monte en France ? Cette montée est-elle fortuite ou intéressée ? Pourquoi l’Europe ? Quels intérêts sert-elle réellement ? Pourquoi Draghi ? Pourquoi Barroso ? Pourquoi Van Rompuy ? Pourquoi pas une personne élue démocratiquement ?
Nous avons depuis trop longtemps abandonné le politique pour nous laisser bercer par les experts dialectiques, qui disent tout et son contraire, opèrent des revirements idéologiques à 180° d’un jour sur l’autre, et nous mentent chaque jour ! Le sophisme a triomphé. Le fallacieux l’a emporté sur la vérité. Et c’est notre faute à tous…
La gestion de la France ne s’opère plus à l’Elysée, en fonction de la mentalité du président et de la vision qu’il se fait de l’intérêt du pays, mais bien à Bruxelles, Francfort, ou lors des rendez-vous informels de nos dirigeants avec la clique lobbyiste gravitant autour d’eux. Et si nous allons jusqu’au bout du raisonnement, cette clique apparaît être elle-même sous la tutelle d’intérêts supérieurs financiers. Lesquels ? Remontons les fils…
Nos dirigeants de fait, responsables pour une grande partie de la situation actuelle, doivent être tenus responsable du marasme dans lequel nous nous trouvons. Un changement de cap doit être adopté pour redresser notre pays, mais il sera avant tout nécessaire de remercier ces gouvernants malhonnêtes, et les contraindre de purger le passif qui nous asphyxie tant.
Le panel de sanction à leur encontre est considérable. Tout mauvais dirigeant de droit ou de fait, en cas de faute de gestion, est susceptible de se voir prononcer une multitude de sanctions, allant de la simple interdiction d’exercer, au comblement du passif sur son patrimoine propre. Ils devraient au moins être frappés d’interdiction de diriger à nouveau une quelconque fonction publique. Ils devraient rendre compte de la gestion calamiteuse du pays, des choix qu’ils ont effectués dans le simple but d’assurer une réélection, et de se garder une place au soleil.
Quant à nos dirigeants de fait, cet empire financier anglo-saxon, qui depuis des années tisse sa toile, et s’infiltre dans tous les interstices du monde politique national et européen, leur mise en accusation pour escroquerie serait la moindre des choses pour calmer la fureur publique, et permettre à notre société, mais également aux citoyens grecs, espagnol, portugais, irlandais… de se reconstruire.
Nous réclamons le débat, mais il nous est refusé. Nous avons besoin d’un changement de cap, d’un nouveau projet de société, mais rien de tout cela n’émerge. La curiosité des citoyens est dénigrée pour laisser place aux accusations de conspirationnisme. La liberté d’expression laisse place au « deux poids deux mesures ». Nous devons exiger le débat, pour mettre fin aux petits arrangements et aux privilèges contemporains. Une résurrection du Comité de Salut Public[10] semble être la première étape pour nous tirer du marasme actuel.
[1] Pendant que nous consultons nos conseiller bancaires internationaux, ces derniers parient dans notre dos des assurances contre le risque de défaut. Les CDS sur la France n’ont jamais été aussi important.
[2] Napoléon Bonaparte
[3] L’article 123 du Traité de Lisbonne stipule en effet « qu’il est interdit à la Banque centrale européenne et aux banques centrales des États membres, ci-après dénommées « banques centrales nationales », d’accorder des découverts ou tout autre type de crédit aux institutions, organes ou organismes de l’Union, aux administrations centrales, aux autorités régionales ou locales, aux autres autorités publiques, aux autres organismes ou entreprises publics des États membres ; l’acquisition directe, auprès d’eux, par la Banque centrale européenne ou les banques centrales nationales des instruments de leur dette est également interdite »
[4] [4] http://www.telegraph.co.uk/news/worldnews/europe/1356047/Euro-federalists-financed-by-US-spy-chiefs.html
[5] Voir le documentaire « City, la finance en eaux troubles », disponible sur le blog « Minuit moins une
[6] Cette loi est passée en 1973, et depuis 1974 la France n’a cessé de rendre des budgets déficitaires.
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