Pirates de l’information politique, votez plus clairement, et roulez jeunesse...
La polémique autour de la prétendue vidéo pirate sur les enseignants a un air d’ancien temps. Un temps follement apaisant où les politiques contrôlaient leur image publique et pouvaient sans vergogne user d’un double langage en fonction de l’endroit et des personnes à qui ils s’adressaient. Ce temps semble désormais révolu et il me semble que c’est un atout à la fois pour la démocratie et pour une génération qui s’informe prioritairement sur Internet. Ce qui est particulièrement outrageant, par contre, ce sont les réactions affreusement réactionnaires ou militantes de ceux qui crient au scandale et à la manipulation. Car si on passe en revue ce qui s’est vraiment passé, on constate avec dépit que la démocratie a beaucoup gagné en diffusant cette vidéo, mais soudainement beaucoup perdu avec les analyses absurdes qui en découlent.
Commençons par le commencement, c’est-à-dire par la définition du mot piratage : on peut dire qu’une vidéo est piratée quand elle est tronquée ou séquencée de manière à détourner les propos d’une personne. Or, dans cette vidéo, ce n’est pas le cas, puisque Ségolène Royal définit en termes politiques un objectif à atteindre et les solutions pour atteindre cet objectif .
Une position : éviter que les enseignants donnent des cours en dehors du public, mais participent au « soutien scolaire individualisé et gratuit », en faisant un « pacte » avec eux « pendant la campagne présidentielle ».
Des propositions : une majeure « révolutionnaire » qui consiste à appliquer les 35 heures au collège, et une mineure complétive qui consiste à payer les heures supplémentaires des enseignants.
Il s’agit donc bien d’une argumentation politique, et non d’une manipulation ou d’un piratage des propos de la candidate. La vidéo n’a donc rien de « pirate ». On peut alors arguer qu’elle a été volée, mais cet argument ne tient pas une seconde pour une personnalité publique qui se destine aux plus hautes fonctions, surtout à la plus grande de toutes, puisqu’il s’agit de la magistrature suprême : il paraît bien légitime que chacun d’entre nous, citoyens, puissions décortiquer le squelette de son projet de société et que cet exercice, que certains qualifieront de « boucherie », se fasse au grand jour. D’autres seconds couteaux, par exemple le premier secrétaire PS de la Fédération du Maine-et-Loire Serge Bardy, crient quand même au scandale en jurant que ces propos étaient « placés hors de leur contexte ». Là, je dois avouer que le sens de cette remarque laisse perplexe : cela signifie-t-il que les discours, discutés lors d’une réunion de militants socialistes, sont radicalement différents de ceux prononcés à la tribune ? Si tel est le cas, il devient plus qu’urgent de développer la diffusion de ces vidéos en ligne afin de dévoiler clairement les projets de société de tous les candidats.
Second point, la vérité de l’information. Il est étonnant qu’aucun journaliste n’ait fait ce que sa déontologie lui recommande de faire : recouper et vérifier l’information. Car la question qui sous-tend toute cette polémique est celle-ci : le discours de Ségolène Royal était il un dérapage ou une sortie de route contrôlée ? La campagne présidentielle ayant commencé depuis bien longtemps, il est fort possible que la candidate ait réitéré dans un passé proche son argumentation politique sur les enseignants. Pour notre part, à la rédaction de www.sitoyen.fr, nous avons retrouvé ce discours de campagne de Ségolène Royal, au Poinçonnet, le 23 septembre 2006, qui confirme sa position et ses propositions mineures et majeures sur les enseignants.
http://www.dailymotion.com/video/xflhh_segolene-royal-au-poinconnet
Internet devient un outil d’information politique primordial. Les vidéos en ligne se développent et dévoilent souvent des propositions qui restent dans les tiroirs ou qui ne sont pas politiquement correctes. Elle est là, la chance d’une nouvelle génération qui s’informe sur Internet et qui veut faire avancer les débats feutrés de la campagne traditionnelle : dénicher les propositions des candidats et les divulguer aux autres citoyens. En ce moment, une autre vidéo sur Internet, bien qu’elle fasse moins de bruit, montre la force des nouveaux métiers d’information politique du Web : le benjamin de l’Assemblée nationale, Laurent Wauquiez, dévoile une analyse « révolutionnaire » sur l’état actuel de
http://www.dailymotion.com/video/xk15i_itw-laurent-wauquiez
Disséquer le squelette des projets de société des candidats est une façon rationnelle pour voter plus clairement. C’est aussi une façon de dresser un bilan, de faire un droit d’inventaire des pratiques politiques. S’empêcher d’utiliser les fonctionnalités que nous offre Internet est la meilleure façon pour notre génération de se planter une épine dans le pied. Il est temps de prendre le relais. Tel est notre projet.
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