Police : vol à l’arraché de l’arme de service
Jeudi 9 mai 2024 la police reçoit un appel à 21h15 signalant l'agression d'une femme par un homme armé d'un cutter dans les parties communes d'un immeuble du quai de la Gare, Paris XIII°. Les policiers du Groupe de Soutien des Quartiers arrivés sur les lieux remarquent des traces de sang sur le palier et entendent des appels au secours provenant de l'intérieur d'un appartement. Un policier tente d'enfoncer la porte pendant que ses collègues passent par un balcon mitoyen, de se ruer à l'intérieur pour porter secours à la victime. Les policiers doivent faire usage de leur pistolet à impulsions électriques pour maîtriser l'agresseur. La dame âgée de 73 ans, blessée de deux coups de cutter au cou et à un bras, est évacuée sur la Pitié Salpêtrière.
De retour au commissariat, deux des policiers à être intervenus demandent à l'agresseur de souffler dans l'éthylomètre après avoir procédé à une fouille de sûreté (fouille sommaire ou palpation de sûreté dans le but d'ôter tout ce qui pourrait présenter un caractère dangereux pour les personnes présentes, l’intervenant, pour l’individu lui-même ou qui pourrait l’aider à s’enfuir). C'est à ce moment que l'homme âgé de 32 ans s’empare de l'arme d'un fonctionnaire et tire sur ceux-ci. L'un des policiers est touché à l'abdomen et à la cuisse (probablement lors de la lutte et sous le GPBI), son collègue est atteint dans le dos (portait-il un Gilet Pare-Balles Individuel ou une House Tactique Modulaire). Un policier riposte dans le cadre légal de la légitime défense de soi ou d'autrui. L'assaillant touché au ventre est transporté à l'hôpital, pronostic vital non engagé ce qui n'est pas le cas pour l'un des fonctionnaires âgé de 31 ans qui est entre la vie et la mort.
Les policiers n'ont pas le droit à l'erreur, des « pékins » de faire remarquer que l'individu n'était pas menotté... Celui-ci était « inconnu des services et de la justice ». Il est toujours plus facile pour un regard extérieur de commenter le geste, et à fortiori après, en sous-entendant qu'à leur place et dans la même situation nous aurions mieux fait. Il faut bien constater que si les policiers portent une arme de service, ils ne s’en servent que rarement, pour ne pas dire jamais, sauf à l'entraînement et dans des conditions codifiées dans un stand bien éclairé et propret. Un policier lambda peut faire toute sa carrière sans jamais se retrouver confronté à une situation qui l'oblige à tirer en situation réelle. L'attaque peut être si soudaine que l'irréparable sera accompli sans que le policier n'ait le temps d’esquisser un geste. Les Gestes Techniques Professionnels en Intervention enseignés à l'école de police portent principalement sur le « contrôle de la tête » afin d'entraîner la chute et de faciliter le menottage, et peu sur le désarmement qui n'est jamais sans risques.
Le jeudi 13 juillet 2023, un policier voyageant à bord du TGV Milan-Paris intervient pour maitriser un déséquilibré qui tentait de briser des vitres du wagon ! L'individu tente alors de subtiliser l'arme du policier, un coup de feu part accidentellement sans faire de victime. Les policiers furent autorisés le 18 novembre 2015, à titre temporaire (dérogation), à porter leur arme individuelle en dehors de leur service durant l'état d’urgence (arrêté du 4 janvier 2016). L’assassinat du couple de policiers à leur domicile au mois de juin 2016 a conduit le ministre de l’Intérieur à pérenniser l'autorisation du port de l'arme en dehors du service (arrêté du 25 juillet 2016).
La rencontre avec un : psychopathe, mystique, asocial, illuminé, alcoolisé, drogué, sous l'emprise médicamenteuse, désire de se faire « trucidé » ou qui a planifié sa réaction représente un réel danger. Il peut sortir une arme quelconque, s'emparer de celle de l'agent intervenant et s'en prendre à n'importe qui, n'importe où, n'importe quand et n'importe comment ! Les agents de la pénitentiaire ont constaté que des détenus enseignaient à d'autres comment se dérober à une palpation... Si surprise doit y avoir, il est préférable qu'elle le soit pour le malfrat ou le « Tango ».
Un œil averti remarque que certains policiers faisant face à un individu au moment de s'en éloigner effectuent un pivot trop long ou contraire à leur sécurité et favorable à la saisie de l'arme portée dans un étui extérieur. Pour les pivots, comparons le corps du tireur à une porte. Le vantail pivote sur ses gonds situés d'un seul côté formant l'axe de rotation, l'autre bord du vantail décrit un arc de cercle de rayon constant. C'est le principe directeur du pivot, sauf que l'agent peut choisir de déplacer dans l'axe et de pivoter dans un sens ou dans l'autre afin de ne pas présenter sa « hanche forte » et favoriser la défense ou la riposte. On distingue trois formes principales de pivots : le petit pivot qui privilégie la rapidité de la riposte, le grand pivot qui privilégie la stabilité, et le volte-face. Le pivot doit être adapté à la protection du fonctionnaire et au tir. Pour effectuer un pivot on évite de croiser les jambes, sauf pour un volte-face (« Cobra » à condition de maîtrisser le mouvement) et on conserve TOUJOURS la « hanche forte » du côté opposé à l'individu.
Qu'il s'agisse du port de l'arme, du dégainé et du tir, il est essentiel de prendre de bonnes habitudes. A force de porter une arme au quotidien on finit par en prendre de mauvaises et à en banaliser la présence. Une Garde du Corps de Tony Blair a « oublié » son pistolet dans les toilettes d’un Starbucks à Londres. Un policier qui rentrait chez lui en civil et sur son scooter personnel s'est fait braquer sur la rocade à Fort-de-France (Martinique) dans la nuit du 13 mars 2024. Les voleurs se sont emparés du deux-roues et de la sacoche dans laquelle se trouvait l'arme de service, les chargeurs et carte de légitimation ! Un étui à port discret, inside par exemple, aurait évité qu'une arme se retrouve dans on ne sait quelle main. Article 114-4 RGEPN « Le fonctionnaire de police est responsable, en tous temps, en tous lieux et en toutes circonstances, de son arme individuelle, pour autant que celle-ci n'ait pas été déposée à l'armurerie ou en un lieu sécurisé de son service ou de son unité ou dans un autre lieu sécurisé où le dépôt de l'arme est autorisé par instructions de son service ou de son unité ».
L'article L435-1 du Code de la sécurité intérieure (loi n°2017-258 du 28 février 2017) autorise l'usage de l'arme : « Lorsque des atteintes à la vie ou à l'intégrité physique sont portées contre eux ou contre autrui ou lorsque des personnes armées menacent leur vie ou leur intégrité physique ou celles d'autrui ». La notion de légitime défense s'étend à la défense d'un lieu occupé ou d'une personne confiée (personnalité, gardé à vue, détenu). « Lorsqu'ils ne peuvent immobiliser, autrement que par l'usage des armes, des véhicules, embarcations ou autres moyens de transport, dont les conducteurs n'obtempèrent pas à l'ordre d'arrêt et dont les occupants sont susceptibles de perpétrer, dans leur fuite, des atteintes à leur vie ou à leur intégrité physique ou à celles d'autrui. (...) Dans le but exclusif d'empêcher la réitération, dans un temps rapproché, d'un ou de plusieurs meurtres ou tentatives de meurtre venant d'être commis, lorsqu'ils ont des raisons réelles et objectives d'estimer que cette réitération est probable au regard des informations dont ils disposent au moment où ils font usage de leurs armes ». Article R434-19 du Code de la sécurité intérieure : policiers et gendarmes ont l'obligation d'intervenir même hors service. Ils doivent être identifiable : uniforme, brassard, gilets et être en possession de leur carte de légitimation)
Le type d'arme et l'étui peuvent être des conditions favorisantes un accaparement. Un syndicat de policiers avait demandé le retour de la dragonne, mais les armes livrées (Sig Sauer) étaient dépourvues d'anneau de fixation du mousqueton. La dragonne sur une arme à feu apparait au début du XIX° siècle avec le pistolet de Mamelouk à silex, calibre 14,5 mm 1802-1813, et l'anneau de calotte va se généraliser sur les revolvers Lefaucheux et Dumonthier. Le choix de l'étui n'est pas quelconque, il se doit de protéger l'arme, la maintenir, la retenir (rétention active ou passive), couvrir la détente, être adapté à la morphologie de son porteur, et à une extraction rapide. Il est plus difficile d'arracher une arme portée dans un étui à rétention active. La notation internationale comprend trois niveaux. Niveau 1 rétention modérée : l'arme est maintenue par un serrage parfois réglable en tension. Niveau 2 rétention élevée : l'étui dispose d'un verrouillage mécanique (bouton-pression, levier). Niveau 3 rétention optimale : l'étui possède un troisième moyen de verrouillage couvrant généralement une partie du haut de l'arme. Le fonctionnaire en tenue n'a guère le choix de l'étui ni du porte-chargeur.
Le policier en formation reçoit l'instruction armement et tir un jour par semaine. L'habilitation Sieg Sauer en poche, il se doit de suivre trois sessions annuelles (3 x 30 cartouches) encadrées par deux Formateurs Technique et Sécurité en Intervention afin de la conserver. Maitriser les différentes positions de tir, la gestion des incidents de tir et le changement tactique de magasin ressemble une gageure. S'il y a des policiers qui portent l'arme parce que cela est le réglement, d'autres se « piquent au jeu » et ne sont guère favorables à la dragonne qui entrave le tir main faible et peut contrarier un changement tactique de magasin. Des fonctionnaires vont suivre un stage payé de leurs propres deniers dans un pays limitrophe afin d'améliorer leur technique de tir. Il faut dire que la munition n'y coûte que 150 € les 500 9 mm FMJ.
Selon certains hommes et femmes politiques, sociologues, les rapports entre policiers et citoyens seraient différents si ceux-ci ne portaient pas d’arme et de citer la Grande-Bretagne, la Norvège et la Nouvelle-Zélande... L'époque est loin où le GPx de Polices Secours rentrait chez lui en tenue avec son pistolet « Rr 51 Unique » calibre 7.65 et son bâton blanc au ceinturon. Une correction, une précision, une remarque ?
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