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Accueil du site > Tribune Libre > Pour Thomas Piketty, dans le vieux grenier de la comptabilité nationale, la (...)
#30 des Tendances

Pour Thomas Piketty, dans le vieux grenier de la comptabilité nationale, la boîte à outils idéale

Comme nous l'avons vu, l'application elle-même de la tautologie hissée à hauteur de première loi fondamentale du capitalisme par Thomas Piketty est bourrée d'à-peu-près et d'incongruités. Nous avons également montré que lui-même n'accorde guère de crédit à la capacité qu'elle aurait d'aider à cerner quoi que ce soit.

Mais il insiste une fois encore sur les faiblesses extrêmes de son biniou, et c'est pour introduire la nécessité d'une deuxième loi fondamentale du capitalisme, rustine tout de même improbable, au vu du pneu à réparer : la première baudruche.

Lisons : 
«  Il convient d'insister sur le fait que la loi α = r x β  ne nous dit pas comment sont déterminées ces trois grandeurs, et en particulier comment est déterminé le rapport capital / revenu au niveau d'un pays, rapport qui mesure en quelque sorte l'intensité capitalistique d'une société donnée. » (Idem, page 98.)

Préoccupation que l'exclusion préalable du capital fixe ne permet plus à Thomas Piketty d'avoir... Lui seul paraît l'ignorer :
« Pour avancer dans cette direction, il nous faudra introduire d'autres mécanismes et d'autres notions, en particulier le taux d'épargne et d'investissement et le taux de croissance. Cela nous conduira à la deuxième loi fondamentale du capitalisme, selon laquelle le rapport β d'une société est d'autant plus élevé que son taux d'épargne est important et que son taux de croissance est faible » (Idem, page 98.)

Pour notre part, nous n'oublierons pas, quelles que soient les vertus de cette deuxième loi, qu'elle ne fera que tenter de servir de remède à l'inutilité désormais avérée de la première...

Que revoici en toute humilité :
«  À ce stade, la loi  α = r x β nous indique simplement que quelles que soient les forces économiques, sociales, politiques déterminant les niveaux pris par le rapport capital / revenu β, la part du capital α et le taux de rendement r, ces trois grandeurs ne peuvent pas être fixées indépendamment les unes des autres » (Idem, pages 98-99.)

Bien sûr..., puisque la loi elle-même n'a été exhibée que pour servir à cela... en sa qualité de ce que Thomas Piketty croit n'être qu'une pure tautologie.

Mais, le sixième jour enfin, notre guide se retourne avec un certain contentement vers l'immensité du chemin théorique qu'il nous a permis de parcourir. De fait, les résultats sont considérables. Et la route sera encore longue. Mais soufflons un peu :
« Les concepts essentiels de production et de revenu, de capital et de patrimoine, de rapport capital / revenu et de taux de rendement du patrimoine étant maintenant posés [et articulés dans l'immense première loi fondamentale du capitalisme, brevetée Piketty], il est grand temps de commencer à examiner plus précisément comment ces notions abstraites [d'une abstraction foudroyante] peuvent être mesurées, et ce que ces mesures nous apprennent au sujet de l'évolution historique de la répartition des richesses dans les différentes sociétés » (Idem, page 99.)

Dommage, chauffés comme nous l'étions, nous aurions bien voulu prendre tout de suite la deuxième loi fondamentale du capitalisme à la gorge...

C'est par le titre "La comptabilité nationale, une construction sociale en devenir" que s'ouvre la partie que nous abordons ici du livre de Thomas Piketty. Plus que la théorie dans laquelle il ne paraît guère pouvoir que vasouiller, la comptabilité nationale convient à son caractère et à ses aptitudes. Il la connaît sans doute mieux que personne en France. Voyons si l'expérience qu'il en a peut nous apporter une meilleure compréhension des travers qui sont les siens dans le domaine de ce qu'il prend pour de la théorie...

Dès le début, nous sentons qu'il est ici comme un poisson dans l'eau :
«  […] les premières tentatives de mesure du revenu national et du capital national remontent à la fin du XVIIe et au début du XVIIIe siècle.  » (Idem, page 99.)

"Revenu national"... Nous le savons, chez Thomas Piketty, tout est revenu (salaires et profits) qui, cumulé, nous donne le "revenu national". La dépréciation du capital fixe étant jetée par dessus bord, ne reste plus que du patrimoine, qu'on pourrait appeler Paul, Jacques, ou "capital national"... Pourquoi pas ?

Nous le voyons, Thomas Piketty est un enfant de cette comptabilité-là. C'est son langage à lui. Tout l'y mène et l'y ramène. Que dire des résultats qu'il a su retirer des travaux de cette période ancienne ? Qu'ils confirment un effet d'impact très important sur son cerveau :
«  Ces estimations concernent autant le stock de capital national que le flux annuel de revenu national » (Idem, page 99.)

Et nous voici aussitôt devenus β..., lettre dont il faut aussitôt redire qu'elle n'exprime rien d'autre que le rapport capital / revenu. Comme on le constate avec un certain émerveillement, Thomas Piketty n'avait qu'à tremper un peu les doigts dans les documents de la comptabilité nationale pour y pêcher aussitôt deux des concepts cardinaux qui devaient le conduire à formuler la sensationnelle première loi fondamentale du capitalisme ! C'est comme cela : il y a des gens qui ont de la veine.

Pourquoi donc ces praticiens-là sont-ils allés lui fournir un pareil tribut ? C'est qu'eux-mêmes cherchaient quelque chose de précis. Quoi donc ? C'est lui qui en fait la constatation :

«  En particulier, l'un des premiers objectifs de ces travaux est de calculer la valeur totale des terres, de loin la plus importante source de richesses dans les sociétés agraires de l'époque, tout en reliant ce patrimoine foncier au niveau de la production agricole de la rente foncière.  » (Idem, pages 99-100.)

On le voit : Thomas Piketty n'éprouve absolument aucun besoin de parler d'un quelconque travail quand il évoque les richesses (économiques) produites par l'agriculture. Il n'y voit donc aucun salarié. Il est fasciné par le patrimoine (qu'il prend pour du capital, sans plus) et surtout par la rente.

Ce qui veut dire que, pour lui, grâce à la seule comptabilité nationale... le compte est bon. Il ne souhaite rien demander de plus.

Car c'est alors que son prurit de grand réformateur social peut se manifester... Il vient de se trouver de vrais précurseurs, et l'outillage intellectuel basique qu'il lui faut pour réussir au plus haut niveau possible avec la boîte à outils d'un monsieur bricolage :
«  Il est intéressant de noter que ces auteurs poursuivent souvent un objectif politique bien précis, généralement sous forme d'un projet de modernisation fiscale. » (Idem, page 100.)

Non seulement Félicie..., mais Thomas aussi. Ça tombe bien.

Michel J. Cuny


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