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Accueil du site > Tribune Libre > Pour un Québec lucide solidaire

Pour un Québec lucide solidaire

Je suis inquiet. Inquiet pour le Québec que j’aime. Inquiet pour mon peuple qui a survécu contre vents et marées, mais qui ne semble pas conscient des écueils qui menacent aujourd’hui son avenir.

Le Québec a fait un bond prodigieux depuis un demi-siècle. D’une province sous-scolariséed qui traînait la patte économiquement sur ses voisins, il est devenu une société moderne qui a peu à envier au reste du monde riche.

Ce sont les Québécois francophones, naguère Canadiens français, qui ont le plus profité des changements en profondeur de leur société.

Le moteur de cette transformation spectaculaire ? L’État du Québec, tout provincial soit-il demeuré au cours de ce demi-siècle.

Certains parlent de réussite du modèle québécois, s’appuyant sur l’intervention de l’État. Pour ma part, j’y vois plutôt une variante québécoise et canadienne de l’État providence. Même si je demeure toujours indépendantiste, je reconnais le rôle du gouvernement fédéral dans la modernisation qu’a connue le Québec. Où est-il d’ailleurs, aujourd’hui, cet État fédéral qui coupe les vivres de celui du Québec, et n’a de cesse de le court-circuiter ?

Mais la menace plane.

Il y a quelques jours, un groupe de personnalités québécoises, dont un ancien premier ministre élu alors sous la bannière du Parti québécois, accusait les Québécois de manquer de lucidité, parce qu’ils ne veulent pas faire le sacrifice de leur modèle de société, fondée davantage sur la solidarité que le modèle de société de leurs voisins de l’Amérique du Nord, je le rappelle.

Notre faiblesse économique, notre endettement, le vieillissement de la population et la concurrence des pays émergents - au premier plan desquels la Chine et l’Inde - préparent un avenir sombre pour nos enfants, disent-ils. Il faut s’y attaquer résolument.

Je vais vous étonner, mais je suis en accord avec ce groupe, lorsqu’il affirme que les solutions à nos problèmes reposent sur la lucidité, la responsabilité et la liberté.

Je garde l’espoir.

L’espoir que nous aurons la lucidité de maintenir au coeur de nos choix de société l’amélioration du sort des plus démunis, et une répartition équitable de la richesse que nous produisons.

L’espoir aussi que nous aurons la responsabilité de résister à la tentation du désengagement de l’État et de la défiscalisation. La situation désastreuse de millions de pauvres américains devrait suffire à nous dissuader d’emprunter cette voie sans issue.

L’espoir enfin que nous conserverons la liberté, malgré les forts vents contraires, de continuer d’édifier une société plus juste pour tous, peu importent leur provenance culturelle, sociale.

Pourquoi continuons-nous à fermer les yeux sur la situation déplorable des autochtones, des sans-abris, des handicapés intellectuels, etc. ? Nous n’avons pourtant pas la pauvreté des sociétés sous-développées comme excuse.

Oui, nous devons opérer un changement radical dans nos façons de voir, mais pas le changement que prône ce groupe de personnalités.

Depuis quelques années, nous laissons aller à l’abandon nos sytèmes publics d’éducation et de santé et nos autres services publics.

Depuis quelques années, nous flirtons dangereusement avec l’idée que le chacun pour soi vaut mieux que la solidarité.

Il faut nous ressaisir. Cela ne sera pas facile. Des sacrifices nous attendent. Il est tellement plus simple d’accepter béatement les baisses d’impôt. Il est tellement plus simple de croire que nous serons plus libres avec moins d’État.

Pour ma part, je préfère rêver d’un monde où l’enrichissement personnel, par ailleurs légitime, ne se fait jamais au détriment de l’enrichissement de tous.

Pour ma part, je veux léguer à ma fille un Québec, et un monde, lucidement solidaires.


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11 réactions à cet article    


  • Alexandre Santos Alexandre Santos 24 octobre 2005 13:28

    Oui mais que se passe-t-il concrétement au Québec ?

    Je ne connais pas la situation politique au Québec, mais j’ai l’idée que le parti nationaliste a longtemps eu le pouvoir avec l’agenda autonomiste, et qu’il a utilisé souvent la question autonomiste pour étouffer le débat sur d’autres questions de société.

    Je ne connais pas les autres partis et je ne sais pas quels sont leurs agendas.

    Donc, pourquoi les citoyens votent des partis qui pratiquent le désengagement de l’état ?


    • Lise (---.---.157.248) 24 octobre 2005 17:10

      Monsieur Monette pourquoi être inquiet ?

      À écouter la go-gauche et les syndicats, tout va tres bien dans la province de Québec. La population est tout simplement victime d’une campagne de lavage de cerveau.

      Notre système de santé est efficace et offre des services de haute qualité. Dans nos écoles l’éducation offerte à nos enfants se fait dans un environnement sain et propice aux apprentissages. Et puis si le taux de décrochage est si élevé dans la province c’est la faute du Fédéral ! Donc, il faut s’empresser de faire l’indépendance pour transformer instantanément le Québec en Eldorado. Voyons c’est évident !

      Bien sur ceux, qui osent, remettre en question ces idées sont des menteurs, des illettrés ou pire des hommes et de femmes de la droite.

      Le manifeste de Lucien Bouchard va très vite tomber aux oubliettes, car le débat est tout simplement impossible. Il est entierement mobilisé par les défenseurs d’un dogme qui ont le monopole de le vertu et du bon sens.

      Donc, pourquoi s’inquiéter pour l’avenir ? Tout va merveilleuse bien dans la province !


      • Manu (---.---.77.234) 24 octobre 2005 20:55

        J’espère que beaucoup de lecteurs de cet article seront français ; car on a beau être de l’autre côté de l’atlantique, les même périls nous menacent...


        • Guy Bouchard (---.---.15.87) 24 octobre 2005 21:27

          Je veux bien soutenir ce que vous dites (je suis québécois et fut souverainniste), mais où peut-on prendre les sous pour faire tout cela (aider les pauvres, les autochtones, etc).

          La lucidité veut dire simplement que nous n’avons pas les moyens avec la méthode actuelle de soutenir tous nos programmes sociaux, bien payer nos syndiqués et relever les défis d’avenir tel l’environnement. Il faut malheureusement faire attention dans notre vision de la répartition de la richesse. Outre les mécènes, les compagnies riches n’ont pas toutes la conscience sociale pour vouloir en donner plus à l’état.

          N’oublions pas que ces compagnies font souvent partis du porte-feuille d’obligation (actions, etc) des mêmes personnes qui leurs demandent d’en faire plus mais surtout pour cela ne pas réduire le rendement sur ces mêmes obligations. Plusieurs pratiques sont mutuellement impossibles. Comment alors ?


          • Lise (---.---.157.248) 24 octobre 2005 23:13

            Le probleme est, que beaucoup de personnes pensent que les solutions proviennent uniquement d’un État obèse et tentaculaire ! Pourquoi la seule issue est l’État ? Moi je préfère enseigner à mes deux filles l’autonomie et la coopération volontaire. Leur enseigner les moyens de trouver elle-même des solutions pour aider les autres ! Et je suis fier d’elles, car elles le font déjà au sein de différentes organisations.

            La solidarité ne passe pas nécessairement par l’État ! L’État est une belle excuse ! Lorsqu’on a besoin d’un Etat pour obliger la population à être solidaire on a un sérieux probleme ! Donc, certains vont regarder le train passé, d’autres vont sauter dedans et prendre des initiatives pour réussir ! C’est une démarche qui doit être individuelle pour ensuite influencer les autres.


            • Michel Monette 25 octobre 2005 00:31

              Je ne crois pas que le manifeste « Pour un Québec lucide » va tomber dans les oubliettes. Au contraire, il a le mérite de poser crûment la question du choix qui s’offre aux Québécois. Pour ma part, je crois que nous devons maintenir l’objectif d’une société de solidarités. Il faut surtout éviter de démoniser le privé, le public, les syndicats, les groupes populaires, etc. Sauf peut-être quelques égoïstes, nous avons tous à coeur le mieux être de nos concitoyens et de nos enfants. J’ai la conviction que nous ferons fausse route si nous remplaçons l’impôt par la tarification et que, tout compte fait, nous payons individuellement moins cher nos services publics que ce que nous devrions payer s’ils étaient offerts par le secteur privé. Ma fille travaille dans le privé, j’ai des amis qui travaillent dans le privé, je travaille dans le public. Nous faisons chacun à notre place oeuvre utile. Ce qui me chagrine, c’est le dénigrement envers des hommes et des femmes qui n’arrivent pas le matin au travail en se disant, « Tiens, je vais encore être payé grassement à me traîner les pieds aujourd’hui ». Les enseignants, les infirmiers, les préposés au malades, les ouvriers de la voirie, les biologistes du ministère de l’Environnement, et j’en passe, sont dévoués autant que n’importe quel salarié du privé. Qui sait par ailleurs que plus de 4 employés de l’État sur 10 n’ont aucune sécurité d’emploi et sont payés autour de 25 000$ par année ? Il est vrai que, curieusement, la majorité des employés de l’État sont des femmes. Ce qui me chagrine aussi, c’est de voir que les plus démunis de la société, encore là très fortement des femmes, voient leur situation se détériorer. Je reconnais d’ailleurs au groupe formé autour de Lucien Bouchard le mérite de rappeler que nous ne devons pas les laisser tomber. Je ne suis tout simplement pas d’accord avec l’idée que l’avenir de nos enfants passe par le désengagement de l’État. Nous ne retournerons tout de même pas à l’époque des dames patronnesses !


              • Lise (---.---.157.248) 25 octobre 2005 04:29

                Pour ma part, je suis une femme et je considère que l’avenir ne passe nécessairement par l’augmentation d’un État déjà beaucoup trop présent dans nos vies. S’en remettre uniquement a l’État pour régler tous nos problemes est une belle facon de se déresponsabilisé !

                L’État n’est pas la conclusion, c’est une idée qui peut-être remise en question. Penser uniquement en fonction de l’État c’est refuser de voir d’autres possibilités.


                • (---.---.189.38) 25 octobre 2005 06:52

                  • Lise (---.---.148.179) 25 octobre 2005 20:29

                     :)))) Quel beau site ! Aucune nuance :) Merci de me faire sourire !


                    • Michel Monette 26 octobre 2005 02:59

                      Je ne connaissais pas ce site. Je vais en faire une lecture attentive. Il va en couler de l’encre suite au manifeste des douze. Pourvu que nous gardions une saine attitude démocratique. Avec l’alliance annoncée d’Option citoyenne et de l’Union des forces progressistes, un bon débat se prépare aux prochaines élections québécoises.


                      • Michel Monette 26 octobre 2005 03:11

                        Vous aviez raison. J’ai cru par moment entendre le manifeste du FLQ lu par Gaétan Montreuil en 1970. Je crois qu’il vaut mieux dialoguer sur des bases plus respectueuses les uns des autres.

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