Pourquoi la Gauche déteste-t-elle l’argent... privé ?

La haine de l’argent et de la réussite sert-elles la cause (des pauvres) qu'elle prétend défendre ?
Il est entendu que la Gauche (en France) n’aime pas l’argent ("l’argent qui corrompt..", "mon seul ennemi c'est la finance"…). Tout imprégnée d’un catholicisme traditionnel et immuable (où le pauvre est une icône et la pauvreté une vertu) la Gauche n’a de cesse de critiquer la quête de richesses et le souhait de réussite sociale de certains (les plus méritants, courageurx ou adaptables).
Conspuer l'Europe (libérale comme si le communisme ne l'avait pas guérie de tout autre choix), la monnaie unique, les banques (des « bankster »), les riches, les Etats-unis, Israël, les pays anglo-saxon et leur morale protestante (construire sur le travail et l'activité ) ou encore les Chinois (et leur supposée déloyauté) permet de ne pas trop réfléchir à ses propres rapports avec l'argent mais aussi et surtout avec le travail (ne pas en faire trop) ou le simple développement (comment se développer sans l'argent ni travail ?).
L'argent public ne peut plus faire grand chose aujourd'hui dans le monde
L'argent est peut être ce mauvais maître mais il peut servir de baromètre en révélant la vraie valeur de chacun : son courage, son efficacité ou sa compétence professionnelles. Ses capacités aussi de projection dans l'avenir (spéculer signifie d'abord imaginer le futur) et enfin sa confrontation avec le réel (c'est à dire les autres, confrontation pacifique quand elle est économique et financière).
L'argent est donc principalement la mesure de notre capacité à nous coltiner avec la réalité, à la comprendre, à nous y adapter et à prouver ce que l'on vaut sur un marché (il vaut mieux sans doute servir tout en étant mal payé que tenir les murs de son HLM en attendant son RSA ou ses allocations).
A croire la littérature économique de Gauche et ses quelques références (Thomas Piketty et sa prose aussi indigeste qu'un petit "Capital") l’argent (ou plutôt son absence) serait le vrai et seul handicap de notre pays, ce manque serait provoqué artificiellement par de méchants capitalistes qui spolieraient les Français des fruits de leur activité, des avantages acquis accumulés par leur glorieuse histoire (Saint Louis, Colbert, Jaurès ou Mitterrand) pour écraser les pauvres et abaisser les classes moyennes en leur faisant perdre dignité, avantages sociaux et travail même.
Petit florilège des idées "progressistes"
- Ce serait l’Euro la cause de tous nos maux et de notre chômage (partager une monnaie avec des voisins industrieux et ingénieux est certes difficile car nos piètres résultats économiques font tâches !)
- La mondialisation (qu’il faudrait combattre de toute la force de nos 120 millions de petits bras gaulois) plomberait notre pays (ne parlant pas anglais et ayant une aversion naturelle et ancienne au risque nous avons certes des difficultés à vendre aux autres…mais pas à leur acheter)
- Les banques feraient des profits sur notre dos, elles ne seraient pas là pour faire tourner l’économie mais vivre comme des parasites (notamment des Français qui seraient spoliés de leur travail et de leur épargne par de méchants loups à Wall Street ou à la City)
- Seul l’argent public (l’argent que l’Etat prélève sur la richesse des Français) serait légitime et bien utilisé
- L’argent privé serait tout juste tolérable (en attendant que l’humanité accède enfin au socialisme partageur)
- Notre modèle social resterait une référence pour le monde entier. Les 1,5 milliard de Chinois, les 1,2 milliard d’Indiens, les américains, les russes, les brésiliens nous regarderaient avec envie (ou détestation) car nous symboliserions de la réussite sociale collective, un petit pays qui pourrait donner des leçons économiques et sociales à la terre entière
- Les riches (surtout étrangers) seraient la cause de la plupart de nos maux, des désastres à la surface de la terre (la faim dans le monde, l’environnement dégradé, les guerres, les tensions politiques et sociales…)
- Le mur de l’argent empêcherait notre pays de se développer, il ferait obstacle au socialisme (le capitalisme ne supporterait pas la confrontation avec un socialisme pouvant faire le bonheur de l’humanité)
- Le patronat français accaparerait les richesses des hommes
- Les actionnaires seraient des profiteurs, des fainéants qui attendraient en dormant (« s’enrichir en dormant ») que les profits (forcément indécents) des entreprises tombent dans leur escarcelle
- Les grosses entreprises (surtout étrangères) seraient des prédateurs, elles optimiseraient (un quasi vol) leurs impôts et charges, elles détourneraient leurs caisses de la France, elles exploiteraient les petites entreprises, elles rendraient leurs salariés malades de leur travail, elles les jetteraient comme de Kleenex à la première occasion
- Les Français auraient la meilleure productivité du monde, ils seraient des modèles pour l’humanité entière : travailleurs, ingénieux, débrouillards ils feraient des merveilles grâce à un système social extraordinaire (que personne n’ose copier tant il est génial)
- Les 35 heures auraient dû créer des millions d’emplois mais de cupides patrons les ont détournées pour s’en mettre plein les poches
- En limitant le travail (sa durée hebdomadaire comme le temps travaillé durant une vie) on répartirait équitablement les richesses et le travail dans le pays (évitant que des accapareurs s’approprient le travail des autres en multipliant par exemple les heures supplémentaires et leurs revenus)
- Le travail serait passé d'époque, grâce aux machines et aux gains de productivité il serait possible de ne travailler que 3 heures par jour (Cf : Léon Paul Fargue)
- Les aides seraient toutes indispensables mais toujours trop faibles et insuffisantes (les patrons en seraient d'ailleurs les premiers bénéficiaires)
- La fraude fiscale et sociale représenteraient bien plus que tous les déficits sociaux cumulés. Sans cette fraude (des patrons) notre pays vivrait heureux et riche sans avoir besoin de personne (ni d'emprunter)
- Les logements sociaux devaient être construits en plus grand nombre, pour toute la population (pour faire disparaître cette survivance du XX ème siècle qui est le propriétaire bailleur)
- Le RSA devrait être augmenté fortement (comment peut-on vivre avec moins de 1 000 euros par mois et par personne ?) le SMIC devrait passer à 2 000 euros (comment peut-on vivre avec 1 200 euros par mois ?)
- Les inégalités seraient détestables et à combattre (comment accepter qu’une personne gagne plus qu’une autre ? ce sont toutes deux des humains après tout !)
- Les transports devraient être gratuits (et les avantages des cheminots conservés et même développés)
- La nourriture tout comme l'eau ou l'énergie devraient être gratuites (faire payer ce qui est essentiel à la vie est scandaleux)
- Les soins devraient être gratuits, tout comme l’éducation (jusqu’à 30 ans ou plus si nécessaire)
- Les épargnants, comme les consommateurs devraient être protégés de leur naïveté (par des lois et règlements qui les empêcheraient de commettre la moindre erreur de jugement)
- Les entreprises publiques seraient des modèles de bonne gestion, des parangons de vertu et l’Etat se comporterait toujours d’une façon exemplaire avec les sociétés dont il est actionnaire, les laissant se développer et ne prélevant pas de dividendes indus (dont il n’a d'ailleurs pas besoin tant il est bien géré)
- La bourse devrait disparaître car l’Etat et les banques (publiques) devraient financer l’économie sans faire appel à l’épargne publique
- Le retraites pourraient être payées jusqu'à la nuit des temps car c'est un droit imprescriptible des salariés
- Le Code du travail protègerait les salariés des comportements des patrons forcément un peu "voyous" (vouloir être patron est quand même un peu suspect)
- L’impôt devrait être le plus élevé possible car l’Etat serait le vrai et seul garant de l’équité sociale.
- L’ISF serait un bon impôt parce qu’il éviterait que de grosses fortunes puissent se créer et se pérenniser générations après générations (le capitalisme familial ne devrait pas exister, l'Etat devrait tout prendre à chaque génération)
- Il faudrait baisser encore et toujours l’impôt des plus « modestes » et augmenter à due proportion celui des riches (« les riches peuvent payer, leur profits valent moins que nos vies »)
- L’Etat serait LE stratège pour le XXI ème siècle, via ses entreprises (publiques), ses administrations, sa technocratie, il serait capable d’orienter l’économie, de garantir un développement harmonieux et juste pour tous
- Dans la devise de la République Française, le mot Liberté n'évoquerait pas la liberté de travailler et d'entreprendre mais la seule liberté du vote
- L'égalité serait en fait l'égalitarisme social, chacun devant être égal à l'autre et ne pas posséder plus que son voisin ou son collègue
Au final, l’argent ne serait même pas ce serviteur (et ce mauvais maître) que Horace décrivait, juste un obstacle, une contrainte sur la route du socialisme (ou du communisme).
Les limites et les calculs posées par les gestionnaires (limiter nos déficits à 3% par exemple) seraient une atteinte portée à notre souveraineté, une attaque contre notre naturel et légitime système social.
La Gauche française est une religion, elle lorgne toujours du côté de l'ex-URSS
En fait la Gauche française ne se heurte pas seulement (et invariablement) au mur de l’argent mais bien plutôt à celui de la réalité du monde (on ne peut vivre durablement au dessus de ses moyens). Son discours emprunté et recouvert d'un vernis social (mêlé donc à une vision sulpicienne du monde) trouve encore un écho que parce que nous ce pays reste profondément croyant. Les Français jacobins ont simplement remplacé la religion catholique d'Etat par une autre, encore plus miraculeuse, celle de l'Etat providence.
Comme le disait Coluche : "Les socialistes ont eu tort de venir au pouvoir. Ils auraient dû faire comme Dieu : ne jamais se montrer pour qu’on continue à y croire".
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