Pourquoi le gouvernement va tomber
En trois ans de gouvernance compulsive, tous les ferments d’une révolte profonde ont été jetés. Revenons sur quelques temps forts de ces trois dernières années, qui illustrent comment, à chaque fois, le pouvoir politique a été mis au service de ceux qui le détiennent et non au service du peuple, renforçant petit à petit un sentiment d’injustice qui prend aujourd’hui sa véritable ampleur. Les langues se délient, la prise de conscience est collective. La chute du gouvernement est proche.
La crise financière. La spéculation immobilière aux Etats-Unis, la mondialisation de la finance, l’introduction d’opérations informatiques quasi-instantanés dans les places boursières, et la dérégulation des échanges opérée depuis une trentaine d’années aboutissent à une crise financière majeure en 2008. Des banques américaines parmi les plus importantes font faillite, la panique gagne les marchés, les Etats sont obligés d’introduire des sommes massives d’argent pour sauver l’économie et éviter le défaut de liquidités. Partout les entreprises licencient, le chômage augmente, les salariés écopent. Les états doivent tous passer par une cure d’austérité, sous la pression du marché et des agences de notation qui menacent d’abaisser les notes attribuées aux dettes souveraines avec la bénédiction du FMI. Résultat aujourd’hui : les banques ont été sauvées avec l’argent public, mais le chômage persiste, et les pratiques de la finance n’ont pas évolué d’un iota. Les états ont donc prêté aveuglément, perdant une franche occasion de rétablir des règles. Sarkozy, malgré tout ses discours, n’a rien fait. Cette année, les invraisemblables bonus accordés par les banques aux traders, vont encore battre des records. Le commun des mortels, lui, se serre la ceinture.
La main-mise sur les médias. Depuis son accès au pouvoir, Nicolas Sarkozy. n’a de cesse de lutter contre l’indépendance des médias. Pour affaiblir le service public et servir sur un plateau des contrats publicitaires à ses amis Bouygues de TF1, il annonce avec fracas la fin de la publicité sur France Télévision. Revoir ici la jubilation juvénile que lui inspire la stupéfaction du parterre de journalistes lors de l’annonce qu’il en fait en janvier 2010.
http://www.youtube.com/watch?v=mdHJP5z4nK8  ;
Il réussit également à obtenir la nomination du directeur de France Télévisions et celle du directeur de Radio France. Il désigne Hees pour la Maison Ronde en appuyant Val pour Inter. Au printemps 2010, Guillon et Porte, les deux humoristes vedettes de la matinale d’Inter, qui n’hésitent pas à critiquer vertement l’action gouvernementale sont virés. Au cours de la même période, l’Elysée tente également imposer son choix pour la reprise du conseil de surveillance du Monde. Contre le trio Bergé-Pigasse-Nielle, réputés moins enclin à défendre le Sarkozysme, il soutient plutôt l’offre de Claude Perdriel, patron du Nouvel Obbservateur associé à l’espagnol Prisa, déjà au capital du Monde et de la société Orange (France Télécom). D’intrigues en imbroglio, l’Elysée ne parviendra pas cette fois à ses fins. Mais la seule volonté de peser dans la désignation des repreneurs du plus emblématique quotidien de France montre cette volonté de maîtrise de l’espace médiatique. Et n’oublions pas la charge gouvernementale à l’encontre du site d’information Mediapart qui révèle le scandale Sarkozy/Woerth/Bettencourt. Xavier Betrand n’hésitera pas à qualifier leurs méthodes de fascistes, Nadine Morano dénoncera un complot hitléro-trotskystes ? Sait-elle seulement que ce vocabulaire fut employé pour la première fois lors des purges Staliniennes ? L’anecdote ne manque pas de sel pour ce pouvoir tendant chaque jour un peu plus vers le totalitarisme.
Le bouclier fiscal La réalisation la plus concrète et la plus emblématique de ce gouvernement est celle du bouclier fiscal. Celle-ci garantit aux riches une taxation maximale de 50% de leur revenus. Le prétexte en était un alignement sur la politique fiscale européenne, l’Allemagne étant soit disant dotée d’un tel système. Ses effets cette année ont été les suivants : remboursements de centaines de millions d’euros à quelque centaines des foyers les plus riches. L’injustice sociale est avérée. Et le plus drôle se joue maintenant : au vu de l’agitation ambiante, et du sentiment de plus en plus prégnant d’injustice, après avoir défendu bec et ongles cette mesure faite pour s’assurer les services du « premier cercle », le Prince consent à revenir dessus... tout en abolissant l’Impôt Sur la Fortune (ISF) ... et en arguant du fait que ce dispositif n’existe pas en Allemagne, et qu’il est important d’aligner la fiscalité Française sur celle de ses voisins (Le Canard enchâiné du 6 octobre 2010). Le même argument servant pour justifier une mesure et son abrogation, voilà qui est digne d’une société Orwellienne. L’accaparement des médias favorise l’amnésie collective, et la perte totale de sens. De plus, la suppression du bouclier alliée à celle de l’impôt sur la fortune ne rétablit pas la justice fiscale : elle creuse de nouveaux écarts.
Les scandales et la main-mise sur la Justice. L’arrivée de l’été 2010 a vu l’émergence d’un scandale d’état d’une ampleur inégalée en France. L’affaire Bettencourt/Woerth/Sarkozy met en lumière les rapports consanguins entre riches, puissants, et membres de l’UMP. Tentaculaire, le scandale révèle le comportement indigne d’un homme cumulant les fonctions de ministre du Budget, trésorier du premier parti de France, qui place sa femme à la tête du cabinet de gestion de la plus grosse fortune de France, et décore l’ami qui a intercédé en sa faveur de la légion d’Honneur. Il révèle aussi les modes de financements de l’UMP et de ses membres éminents, à la tête de parti de poche, recevant les enveloppes de généreux donateurs. Et la collusion avec certains représentants de la Justice apparaît dans les enregistrements clandestins : le juge Courroye, en charge des investigations sur l’affaire Woerth, est un ami assumé de Nicolas Sarkozy. Depuis la révélation du scandale, il s’accroche à son dossier. Contre l’avis du plus haut magistrat de France, aucun juge d’instruction indépendant n’a été encore nommé. Juge d’instruction dont le statut a été attaqué en règle par Nicolas Sarkozy dès l’année 2008. Etait-ce en prévision de cette affaire, ou de celle, encore plus trouble, et plus critique pour le pouvoir, de l’attentat de Karachi, liés au financement de la campagne de Balladur en 95 ? Il semblerait en effet que les commissions liées à la vente de sous-marins Agosta l’ait alimentée, et que la cessation du versement des rétro-commissions aient entraîné l’attentat commis sur le bus des employés Français au Pakistan. La réponse de Sarkozy à cette éventualité évoquée par un journaliste est édifiante.
http://www.dailymotion.com/video/x9mqjs_sarkozy-affaire-karachi_news
Le racisme au sommet de l’Etat et le tout sécuritaire. Enfin, la création d’un ministère de l’immigration et de l’identité Nationale, confiée à Eric Besson, ancien socialiste plus Sarkozyste que Sarkozy lui-même, l’accès au hautes sphères de personnages tels que Patrick Buisson, Maurassiste, ancien journaliste de Minutes, aujourd’hui conseiller à l’Elysée très écouté, Brice Hortefeux, fidèle porte-flingue, ou Nadine Morano, ultra-catholique secrétaire d’Etat chargée de la Famille et de la Solidarité, marque un tournant du pouvoir vers l’extrême droite. Le débat national sur l’identité National décrété à la fin 2009, révolte l’opinion. C’est un flop. Mais il permet d’agiter des thèmes populistes qui assurent et solidifient l’ancrage à l’UMP des électeurs provenant du Front National. De la même façon, Brice Hortefeux, alors ministre du Travail, est surpris, lors de l’université des jeunes UMP, en flagrant délit de blague raciste à l’encontre d’un jeune militant au teint basané. Il s’en sort d’une pathétique pirouette sur les auvergnats. Regain de popularité assuré auprès des sympathisants du Front National. Finalement, pour se sortir du scandale Sarkozy/Woerth/Bettencourt, on ressort le tout-sécuritaire, et on désigne en bouc émissaire la communauté les Roms, quitte à s’attirer les foudres de la commission des droits de l’homme de l’ONU et du Parlement Européen.
La révolte en marche. Ce rapide rappel n’est pas à la mesure du nombre d’échecs qui parsèment le chemin parcouru depuis l’élection de Nicolas Sarkozy. Il faudrait notamment ajouter la casse systématique de la fonction publique. La politique menée contre l’éducation nationale, par la suppression de dizaines de milliers de postes de professeurs en est à ce titre une excellente illustration. Mais quelques conclusions peuvent être cependant tirées. Tout d’abord, l’action politique du gouvernement Sarkozy est le sacre du court-terme. Les personnes qui nous gouvernent n’ont aucun projet pour la France. D’agitation fébrile en véhémences ostentatoires, les actions concrètes qui sont menées visent toutes à renforcer le pouvoir présidentiel et satisfaire les exigences d’une caste de nouveaux riches, le Premier Cercle. En sapant les principes de la République et la séparation des pouvoirs. En empêchant l’expression libre et la critique par le contrôle des médias. En consacrant l’injustice fiscale et l’exemption d’impôts pour les plus riches. En massacrant le service public et en favorisant l’ouverture des marchés à la concurrence pour le plus grand bonheur des riches entrepreneurs du Premier Cercle. En détournant des vraies questions de justice sociale par l’agitation scandaleuse de la polémique raciste et la désignation de communautés comme bouc émissaires. Finalement, que nous reste-t-il de ces trois années ? La certitude d’une arrogance innommable et d’un mépris sans fin envers l’intelligence des citoyens Français. Tous les jours, ces pitres nous insultent. Mais c’est précisément cet aveuglement qui va être causer leur perte. Le mouvement social qui vient de s’enclencher ne vas pas s’arrêter à la simple abrogation du projet de loi sur les retraites. Il va aller bien plus loin, jusqu’à la démission intégrale du gouvernement. Car ce projet de loi n’est que le catalyseur d’un mouvement qui s’élève contre l’ensemble des injustices commises impunément depuis trois ans. Incrédules, ils virent le peuple se réveiller...
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