Président absolu
De l’utile au futile, il veut tout régenter ! Il veut gérer notre temps disponible pour le consacrer prioritairement au travail, cela sans nous demander notre avis. Il s’immisce sans aucune gêne dans notre vie privée au prétexte qu’il rend la sienne très voyante. Il entre dans nos maisons par la télévision pour s’occuper de nos cerveaux disponibles. Il lit dans notre carte génétique. Président absolu, il n’est pourtant pas de droit divin, bien qu’il soit allé à Latran chercher la bénédiction du pape. Pas de droit divin, juste élu par le peuple !
Sa casquette de "président de l’Europe" (titre qui n’existe pas et qu’il s’attribue abusivement) lui donne davantage encore la grosse tête et voici qu’il s’arroge le droit d’aller donner la leçon aux Irlandais. Il y aurait du Napoléon dans cette attitude à prendre l’Europe un peu de force ! Mais il y a surtout du Bonaparte dans ses manières, ses petites ambitions personnelles et son arrivisme qui le pousserait à se compromettre avec tous les Talleyrand du monde, pourvu qu’ils ne s’affichent pas contre lui. Car "on est avec moi ou contre moi" déclare notre monarque républicain en phase d’absolutisme qui voudrait un peuple héliotrope dont il serait le seul soleil. Heureuse perspective que cette unique alternative et ce seul point de mire !
Il se veut président absolu, mais ne fait rien pour être le président de tous les Français, ce qu’exige pourtant de lui la Constitution. Chef du clan UMP, ami des riches, aimant les uns et méprisant les autres : les Corses sont bien, les Bretons sont des "connards". Les policiers sont bien, les militaires de l’état-major sont des amateurs (et pire encore, mais… censuré). Ceux qui le saluent bien bas sont de bons Français, les autres sont des "pauvres cons".
Mais qu’est devenu le peuple le plus libre de la terre pour se donner corps et âme à cet imposteur ?
Avec la pseudo-réforme des institutions, il ne reste plus au monarque qu’à placer la cerise sur le gâteau en renforçant l’Exécutif, enfin en renforçant sa fonction au détriment de celle de Premier ministre. Une hypertrophie de la présidence en somme et, s’il est question de renforcer le pouvoir du Parlement, c’est un leurre. Il s’agit seulement de consolider la majorité présidentielle et la bipolarisation. Dans cette optique, le mode de scrutin à la proportionnelle est donc naturellement rejeté. La France est diverse, mais on fera comme s’il n’y avait que deux clans : l’UMP et le PS. On s’arrange entre nous pour que la réforme passe. L’expression "UMPS" n’aura jamais pris autant son sens.
Sarkozy est tout bonnement en train de redessiner la constitution en modifiant les équilibres qu’elle prévoyait. Au prétexte de réajuster, on amplifie jusqu’à la caricature les défauts de la Ve République. Ce qui fait hurler bien évidemment quelques gaullistes purs et durs qui voient l’œuvre du général massacrée par cet apprenti sorcier avide de pouvoirs toujours plus étendus.
Dès avant le vote, François Bayrou a annoncé qu’il votera contre cette réforme en forme de mascarade, dénonçant "l’ambiance de marchandage" que Sarkozy et l’UMP ont fait régner dans les rangs des parlementaires pour obtenir leurs votes. Des pressions très fortes avec gratifications à la clé ont été faites. Des parlementaires du parti de De Villiers en ont témoigné dans la presse. Comme le souligne le PCF, au dernier moment, une utilisation fallacieuse des instituts des sondages est venue couronner cette vaste manipulation, leur faisant dire n’importe grâce à de savantes manipulations de l’opinion publique qui est très peu au fait de la question des institutions. Et comme si les sondages avaient une légitimé démocratique ! Si on voulait consulter le peuple, on pouvait le faire avec un référendum. Mais ce mot de "référendum" est à jeter désormais aux oubliettes. C’en est fini et bien fini des espoirs d’une démocratie plus mature, plus éclairée, plus citoyenne.
Les chiffres tombent à l’instant où je rédige : Nombre de votants : 905. Votes exprimés : 896. Majorité des trois cinquièmes requise pour l’adoption du texte : 538. Pour : 539. Contre : 357. La réforme est adoptée de justesse. Les marchandages, menaces et offres de récompenses ont produit leurs fruits, les traîtrises, reniements de certains députés qui étaient opposés, aussi. La collusion UMPS est plus forte que jamais. Mais le ver est dans la pomme.
La fonction de "monarque républicain" a bien reçu une touche d’absolutisme et nous avons maintenant un "président absolu", non pas absolu au sens de l’Ancien Régime, mais d’un absolutisme nouveau. Absolu parce que tirant son pouvoir exorbitant de la majorité absolue qui imposera la légitimité du courant le plus fort encore plus brutalement qu’avant, parce que nous n’aurons plus de Premier ministre, mais, à sa place, un hyperprésident concentrant tous les pouvoirs et qui ne va pas se priver de les exercer. Nous verrons très bientôt un changement de ton s’opérer, qui de séduisant va devenir arrogant. Par exemple, Martin Hirsh peut d’ores et déjà enterrer son projet de RSA. L’hyperprésident n’a plus besoin d’utiliser ce subterfuge pour gagner les faveurs des parlementaires de gauche. Il a obtenu la majorité renforcée qu’il voulait, il a les mains libres pour faire tout ce qu’il veut. Combien se seront fait avoir dans cette affaire et surtout combien de souffrances le peuple va-t-il désormais devoir endurer ?
Le monarchisme républicain absolu est né ! Finalement ce n’est pas pour rien que le congrès se tenait à Versailles...
75 réactions à cet article
Ajouter une réaction
Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page
Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.
FAIRE UN DON