Présidentielle : « une campagne électorale insipide, décaféinée et léthargique »
« une campagne électorale ‘’insipide”, “décaféinée” et “léthargique” », c’est ainsi que certains journaux Espagnol jugent la campagne électorale de l’élection présidentielle Française. Un constat que l’on ne peut que partager, ce qui devrait aussi expliquer en partie la démobilisation prévisible de l’électorat pour cette élection présidentielle.
La présidentielle focalise l’essentiel de la vie politique française, mais pour celle-ci, dont les sondages donnent Emmanuel Macron gagnant, il y a un risque de forte démobilisation
Pendant que les rues commencent à être parsemées d’affiches de campagne ( ce qui est illégal, mais toléré, sans compter le coût écologique ), tous les sondages donnent le sentiment qu’Emmanuel Macron va gagner « haut la main » et que tout est déjà joué. Si le président sortant, candidat à sa réélection, est en effet donné largement en tête dans les sondages et s’il doit surveiller ses concurrents à droite, extrême droite, comme à gauche qui appellent tous désormais au vote utile, la menace pour lui vient surtout de la démobilisation d’une partie de son électorat, faute de tension dans la campagne et à cause de cette impression majoritaire que le résultat est déjà acquis.
Dans le système de type « présidentialiste » Français, le président de la république concentre l’essentiel du pouvoir. Il est donc évident que la vie politique se focalise essentiellement sur élection présidentielle. Au cours des dernières élections, les Français ont peu voté aux élections régionales et encore moins aux élections Européennes, et votent de moins en moins aux élections municipales. Mais, à l’élection présidentielle qui représente un temps fort de la vie politique nationale la participation dépassait les 75 % au premier tour et, pour cinq des neuf élections présidentielles, se situait à 80 % au second tour. Selon des estimations, cette année, la participation pourrait se situer entre 63 % et 71 %. Autrement dit, l’abstention pourrait dépasser son record de 2002 où Seuls 71,6 % des Français s’étaient alors rendus aux urnes pour élire le président de la république.
Cette démobilisation prévisible de l’électorat traduit surtout une offre politique très fragmentée qui exclue également toute projection d’avenir sur les impacts des problématiques fondamentales qui vont concerner notre devenir. Qu’il s’agisse des rapports population – territoire – espace vital disponible, évolution de la révolution numérique, remboursement d’une dette qui sera à terme supérieure à 3000 milliards d’euros ( plus de 120 % du PIB). Situation écologique dramatique avec dérèglement climatique, sixième extinction des espèces, dont l’homme est le seul responsable par son nombre et son développement économique exponentiel … A cela s’ajoute une crise politique structurelle qui fait que les citoyens n’ont plus confiance dans la classe politique et les institutions, à quoi il faut ajouter la lassitude provoquée par la pandémie du Covid-19 et le rôle de la guerre en Ukraine déclenchée par la Russie, dont l’impact se fait ressentir dans la vie quotidienne des Français (augmentation du prix des carburants, de certaines denrées alimentaires…)
Les discours des candidat(e)s qui se veulent mobilisateur, mais sont « d’un creux » désespérant
Comment peut-on mobiliser l’électorat quand tous les discours des candidat(e)s ne dépassent pas de façon répétitive des formules stéréotypées extraites de la rigueur doctrinaire de leur parti ou mouvement politique, en ciblant systématiquement un responsable de nos problèmes. Là, pour les uns, c’est la société capitaliste et le patronat, là-bas c’est l’immigré qui sera accusé, parfois de façon scandaleuse de tous les maux dont souffre notre société. Chacun(e) ayant sa propre recette, ou croyant l’avoir, persuadé que c’est la seule qui vaille. Quand pour d’autres c’est en faveur du climat, pour lequel on n’en fait pas assez pour lutter contre son dérèglement. Notant au passage que leur recette pour protéger le climat passe par l’interdiction à terme du recours aux énergies fossiles, grâce au développement de la voiture électrique et des énergies renouvelables... Oubliant au passage que cela aura aussi un coût écologique avec un impact parfois plus important sur le climat…Pour tous, sans exception c’est, bien sur, Emmanuel Macron que chacun prend pour cible sur son bilan, dont certains reproches peuvent être d’ailleurs justifiés …
Il est toutefois regrettable que les candidat(e)s à l’élection présidentielle « oublient » que nos sociétés vont être confrontées à la raréfaction des énergies et ressources fossiles à cause des besoins, fussent-ils minimaux, ce qui est loin d’être le cas dans les pays riches, mais aussi d’une surpopulation explosive, d’une révolution numérique, avec une évolution, dont les impacts culturels, sociétaux, économiques, sociaux bouleverseront en profondeur nos vie quotidienne par rapport à la situation actuelle. Certes, avec des avantages certains par rapport à notre vécu actuel, en particulier la réduction des mobilités grâce au télétravail et une nouvelle façon de réaliser ses achats à distance, mais aussi avec des inconvénients majeurs qui peuvent être à l’origine de conflits violents.
Ne pas porter un regard sur ces problématiques fondamentales avec leurs impacts prévisibles, relève d’une totale irresponsabilité à ce niveau, où manifestement les candidat(e)s à la présidentielle confondent la mission à laquelle ils aspirent avec une élection législative dans une circonscription rurale.
Le rapport population-territoire-espace vital, avec dilapidation des terres agricoles, exclue de la pensée de tous les candidat(e)s à la présidentielle
Ce ne ne sont pas les visites que font les candidat(e)s aux maires des communes rurales qui les éveilleront sur la question démographiques dans le rapport population-territoire-espace vital et leur impact. Il est vrai qu’aborder les aspects budgétaires, les compétences et les moyens qui en découlent pour les maires et les intercommunalité, avec des promesses s’ils sont élu(e)s leur semble plus rémunérateur sur le plan électoral. Dés lors ils excluent totalement de leur pensée la question démographique en France, alors qu’avec 68 millions d'habitants la France (deuxième pays le plus peuplé de l’Union Européenne, derrière l’Allemagne 83 millions) n’échappe pas à la problématique population-territoire-espace vital, notamment avec la dilapidation des terres agricoles.
la France est en Europe le pays pour lequel le rythme de recul des terres agricoles est le plus élevé. La France a en effet perdu près de 9 millions d’hectares de surface agricole utile (SAU) entre 1960 et 2010 (ou 90 000 km², plus que la superficie de la Guyane 86 504 km2), soit une baisse de 25%, tandis que cette perte ne se limite qu’à 2 millions d’hectares (20 0000 km2) en Allemagne, soit une baisse de 11% (source : Momagri, 2012). La France perd ainsi en moyenne 82 000 ha de terres agricoles chaque année ( 820 km2, plus que le territoire de Belfort 609 km²) soit une perte de 0,3% par an. Cette surface perdue équivaut à une perte nette de près de 225 ha par jour, (Agreste, 2011)
Ne pas oublier, par ailleurs, que la France vit exclusivement de ses importations de pétrole, de gaz, uranium et minerais divers... Nos capacités d’autonomie énergétique sont quasi-inexistantes alors que nos besoins sont démesurés.
La guerre que la Russie fait à l’Ukraine vient nous rappeler tristement cette réalité. A ce rythme de croissance démographique, pourra-t-on encore longtemps dépendre du pillage du reste du monde pour sauvegarder notre niveau de vie ? Que se passera-t-il lorsqu’on ne pourra plus drainer des ressources d’autres régions de la planète ? Voir l’association « Démographie ,Responsable (DR) », dont le travail de recherche et de vulgarisation est très enrichissant concernant la question démographique : https://www.demographie-responsable.org/qui-sommes-nous.html.
Nos candidat à la présidentielle ne pensent pas que par son nombre à l’échelle mondiale, l’homme affecte de très nombreux événements météorologiques et climatiques
Il y a désormais une certitude, l’Homme par son nombre affecte de très nombreux événements météorologiques et climatiques extrêmes (vagues de chaleur, pluies torrentielles, sécheresses, cyclones tropicaux…), rendus plus fréquents, plus intenses et qui ne peuvent que s’amplifier. Sans compter la 6e extinction des espèces, dont l’homme, contrairement aux cinq précédentes, est le seul responsable.
Faut-il rappeler que le rapport du GIEC estime, par exemple, que les pluies extrêmes vont grimper de 7% à chaque degré supplémentaire. Pour Alok Sharma le président de la COP26 qui se déroula à Glasgow en Novembre 2021, ce rapport est « l’avertissement le plus sévère » jamais lancé sur le fait que le comportement humain accélère de manière alarmante le réchauffement climatique ».
Nul doute que le dérèglement climatique aidant et l’épuisement ressources fossiles qui vont devenir de plus en plus chères, on peut s’attendre à une prolifération de conflits régionaux et des vagues migratoires vers l’Europe très importantes. Des mesures préventives d’urgence doivent être prises, mais encore faudrait-il que nos candidat(e)s à la fonction suprême de notre pays s’en préoccupent...
On peut dès lors regretter que cette problématique n’effleure la moindre pensée de nos candidat(e)s à la présidentielle, y compris chez EELV qui se réclame de l’écologie, dont ils en sont d’ailleurs très éloignés, car ils sont devenus un parti de gauche classique en concurrence avec la FI de Jean-Luc Mélenchon pour assurer le leadership de cette gauche...
Le numérique, autre problématique délaissée voire totalement ignorée par les candidat(e)s
Il est évident que la nouvelle révolution numérique offre des avantages concernant, notamment, la réduction des mobilités domicile- travail avec le travail à distance (télétravail) qui permet de réduire l’usage de la voiture. A cet effet, il faudrait encourager la mise en place d’espaces « coworkings » en toujours plus grand nombre pour une pratique plus aisée et plus importante du télétravail, car ces espaces individuels au plus près du domicile dans un un ensemble collectif offrent les avantages de sociabilité au travail qui existent en entreprise et supprime les inconvénients du télétravail à domicile. Se retrouver autour d’une machine à café ou autour d’un casse-croûte est un temps de convivialité que l'on ne peut retrouver au au domicile.
On peut comprendre aussi que cette nouvelle « révolution numérique » des mégas données suscite des craintes justifiées, tant sur le plan économique et sociétal, voire culturel, ainsi que sur le plan environnemental et énergétique. N’oublions pas que les terres rares (qui ne le sont pas toutes) dont sont issus les métaux rares indispensables aux « intelligences artificielles », mais aussi à l’éolien et au photovoltaïque, ou à la voiture électrique, dont la production de la majorité de ces véhicules relève d’une aberration, sans compter l’usage quotidien des ordinateurs, smarphone, télévision, appareils ménagers etc. sont une ressource fossile qui n’est pas inépuisable. Quand on sait que la Chine détient plus de 90 % de la production mondiale et se trouve en bonne position pour exploiter celle de l’Afghanistan des Talibans, on peut imaginer les difficultés qui nous attendent...
A terme des entreprises robotisées fonctionneront sans intervention humaine
Avec le changement de statut des robots par internet et l’interconnexion entre eux, aujourd’hui on peut faire fonctionner des entreprises (dites entreprises 4.0) sans peu d’intervention humaine, ce qui va s’amplifier demain avec la 5 G et l’informatique quantique.
A terme, par les robots avec leur interconnexion et internet, les entreprises seront totalement dispensées d’intervention humaine. Les nouvelles habitudes d’achat et des nouveaux moyens de livraisons (notamment par drones) vont inévitablement y contribuer.
Les effets en perspective de cette nouvelle révolution numérique
Faut-il rappeler qu’aujourd’hui on est en mesure de confier des taches sélectives de décision, notamment, pour la justice, la médecine, l’enseignement, mais aussi faire déplacer des véhicules sans chauffeur ou des drones-taxis sans pilote, y compris faire fonctionner des usines sans aucune intervention humaine grâce aux interconnexions de l’intelligence numérique entre les machines, avec toutes les conséquences d’éthique que cela suppose. Par exemple, s’agissant de la justice on peut rappeler que pour désengorger les tribunaux, lorsque cela ne relève pas de décisions concernant des jugements dans des situations complexes, où elles doivent être prises en « son âme et conscience », les robots peuvent très bien suppléer les magistrats pour prononcer des sanctions en fonction de critères très précis. c'est ce qui se fait déjà en grande partie pour traiter les amendes d'infractions routières...
Dans tous les domaines : entreprises, services, santé, hôpitaux, enseignement, transports, militaires etc. désormais « l’Intelligence artificielle « s’installe partout avec des applications de substitution totale de l’intervention humaine aux robots par phases successives. Il est évident que l’intelligence artificielle va susciter des espoirs, parfois surréalistes, mais aussi des craintes apocalyptiques, dont certaines peuvent être justifiées, compte tenu de notre culture actuelle.
Une évolution maîtrisée serait beaucoup plus efficace si elle est effectuée par étapes
Avoir une vision à plus long terme suppose aussi des mesures préventives par paliers. C’est indispensable si l’on veut éviter une fracture sociétale brutale et gagner du temps, car nul doute que de nouvelles activités, aujourd’hui insoupçonnables, apparaîtrons et plus compatible avec l’évolution de cette nouvelle révolution numérique qui va s’imposer. Au début des années 1990 nous ne pouvions imaginer l’existence des plateformes numériques et leur impact sur notre vie quotidienne actuelle, bien qu’elles puissent soulever d’autres problématiques, notamment sur le plan social.
Alors que la nouvelle révolution des « intelligences artificielles » va inévitablement nécessiter des activités dans le domaine de la production robotique, de la recherche et du traitement des déchets du numérique, la France devrait y avoir un rôle stratégique en jouant un rôle dynamique au sein de l’Union Européenne…
Mais attention ! si on se réfère aux experts du forum économique mondial de Davos, avec la nouvelle révolution numérique, nous entrons dans une quatrième révolution industrielle, dont leur crainte, si rien n’est entrepris par le pouvoir politique, c’est qu’à terme, les entreprises qui vont de plus en plus fonctionner avec très peu, d’intervention humaine, se traduira par plus de 5 millions de chômeurs supplémentaires en Europe en 2025 …
Il est regrettable et fort dommageable que cette nouvelle révolution numérique soit occultée des débats présidentiels par les candidat(e)s, alors que son évolution va impacter durablement notre vécu sur le plan culturel, sociétal, économique, environnemental et en approvisionnement des métaux rares.
A propos de la dette, l’autre problématique délaissée également par les candidat(e)s à la présidentielle
Pour rappel : À la fin du premier trimestre 2021, la dette s’établit à 2 739,2 Milliards d’€uros, soit 118,2 % du PIB. Après la diminution du quatrième trimestre 2020 (−23,7 Md€), la dette a augmenté nettement au cours de ce trimestre (+89,0 Md€), en partie pour financer les mesures de soutien liées à la crise sanitaire et le plan de relance. Près de la moitié de cet endettement alimente par ailleurs la trésorerie des administrations publiques, principalement celles de l’État et de l’Acoss. De ce fait, la dette nette des administrations publiques augmente moins fortement (+ 48,3 Md€) au premier trimestre pour s’établir à 104,0 % du PIB.
Le réveil ne risque-t-il pas d’être brutal quand il faudra rembourser ?
On ne pourra faire l’impasse sur le remboursement de la dette qui est abyssale et va encore progresser durablement, mais alors comment pourrait-on faire ?
- faire des coupes budgétaires (pour baisser ses dépenses) c’est à dire une forte politique l’austérité, ce qui semblerait inévitable ?
- augmenter les impôts (pour accroître ses recettes) ?
- s’endetter auprès de créanciers disposés à lui prêter de l’argent pour rembourser une partie de la dette ? Mais là n’est-ce pas s’engager encore plus dans des processus de cavalerie, ce qui est en partie le cas aujourd’hui et dans ce cas ces milliards qui « viennent du futur », ce sont les futures générations qui vont payer la note »…
-négocier avec les créanciers pour allonger la durée des remboursements ? Mais là encore ce sont les prochaines générations qui seront mises à contribution.
- parvenir à alléger la dette en réduisant les remboursements des taux d’intérêts ou en annulant une partie de la dette ?
Face aux problématiques posées par ce dossier, les candidat(e)s à présidentielle ne se bousculent pas pour s’y attarder par des analyse objectives et des propositions réalistes alimentant un débat. cela ne relève-t-il pas aussi de l’irresponsabilité ?...
Pour conclure
la « campagne électorale ‘’insipide”, “décaféinée” et “léthargique” » de l’élection présidentielle Française, comme la juge certains journaux Espagnol est une évidence. Sans débat et propositions alimentant des débats sur les problématiques fondamentales qui vont affecter le vécu futur de nos sociétés , cela ne peut que contribuer également à la démobilisation de l’électorat.
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