Présidentielles 2017 : Podium inédit pour deux, soupe et ciguë pour d’autres
Qui aurait pu imaginer, il y a encore à peine plus d’un an, que l’alternance rituelle Gauche - Droite dominée par le PS et LR qui rythmait chaque élection Présidentielle depuis l’avènement de la cinquième république serait balayée par un duel au second tour entre un « novice » en politique de 39 ans devenu leader d’un mouvement aux contours pour le moins assez imprécis et une femme, héritière d’un commerce politique familial particulièrement controversé, situé à la droite extrême de l’échiquier politique Français. Cette femme, bien qu’encore jeune (48ans), adopte souvent une attitude et un style politique qui ferait plutôt penser à « Tartine Mariol » personnage de bande dessinée, créée par Guilio CHIERCHINI (http://www.bd-anciennes.com/blog/tartine-mariol-la-meme-presque-invulnerable/), Autrement dit, après un podium inédit au premier tour, au second tour les Français vont devoir départager un combat électoral entre Emmanuel MACRON dans le rôle de « Popeye » et Marine LE PEN dans celui de « Tartine Mariol ».
Plus sérieusement, pour départager les deux concurrents, faute de pouvoir faire un vote de conviction, il faudrait faire un vote de raison, c'est-à-dire voter pour Emmanuel MACRON.
A l’issue du premier tour de ces élections Présidentielles, une partie de l’électorat de Gauche, en particulier celui de MELANCHON, de même que celui de Droite qui a voté pour FILLON, semble partagé entre le désir de l’abstention ou celui d’un vote protestataire de sanction, voire d’adhésion au volet social-sécuritaire anti Europe du programme de Mme. LE PEN. Mais attention, entre une certaine continuité politique, bien que controversée, représentée par MACRON qui accepte de se plier aux exigences de la démocratie et devra très rapidement faire face aux diverses oppositions à sa future politique que cela suppose, notamment au traités transatlantiques CETA et celui du TAFTA dont on devrait reparler à l’automne et auxquels il est favorable, et un régime autoritaire de replis identitaire, qui le conduira à isoler notre pays et à réagir violemment aux conflits qui ne manqueront pas d’éclater en opposition, en particulier, aux effets de la quatrième révolution industrielle, dite du « Big Data ». Tant par ses aspects culturels, sociaux, économiques avec sa horde de nouveaux chômeurs, écologiques, avec l’équation impossible à résoudre entre : croissance démographique – réduction de l’espace territorial vital, épuisement des ressources énergétiques fossiles et rejets de gaz à effet de serre responsable du dérèglement climatique que va générer la quatrième révolution industrielle, vu la logique politique qui anime Mme. LE PEN et ses ami(e)s, la raison devrait conduire à s’opposer aux choix de société formulés par la candidate FN…
Le soir du premier tour de cette élection présidentielle inédite de 2017, face à un échec pour l'un et une déroute électorale pour l'autre, on ne peut que souligner et apprécier la dignité, dont on fait preuve les deux candidats FILLON et HAMON qui n'ont pas hésité à placer les valeurs de la république et de la démocratie au dessus de leurs intérêts boutiquiers ou de l’amertume qu’ils pouvaient ressentir, en appelant à voter pour Emmanuel MACRON. On ne peut en dire de même pour MELANCHON qui lors de sa prestation télévisé, particulièrement agressive, a fuit ses responsabilités en prétextant une consultation des "450 000" personnes qui l'on aidé... Mais enfin ! Oui ou non n'était-ce pas lui qui était candidat ?...
Eviter certains amalgames de « diabolisation » inappropriés
Concernant la candidate du FN, éviter toutefois les amalgames que certains auraient tendance à faire en la diabolisant à l’extrême, lorsqu’ils la comparent à HITLER. Il est vrai que le programme de Mme LE PEN, recouvert de vernis social pour attirer « le peuple de gauche », rappelle étrangement les méthodes de propagande du « Parti National Socialiste des Travailleurs Allemands » de 1933 (NAZI). En poussant à l’extrême sa rhétorique nationaliste de l’exclusivité et la supériorité du peuple Allemand, le parti NAZI promettait une utopie nationale solidaire, avec une place prépondérante aux populations modestes, ouvriers, paysans, artisans et petits bourgeois en général que l'on dénomme aujourd'hui « classe moyenne », tout en accusant également la concurrence et la finance internationale, pour ensuite mieux la servir et en préconisant un renforcement policier, ainsi qu'un réarmement massif. Ce programme pétri de contradictions aiguës aboutissait logiquement au délire raciste que l'on sait. Les mêmes symptômes que présente incontestablement aujourd'hui le parti de Mme. LE PEN et ceux qui lui sont comparables chez nos voisins Européens ... Toutefois assimiler la candidate du FN et son programme à celui de la férocité du régime Hitlérien est totalement inappropriée, car le FN et Mme. LE PEN ne remettent pas en cause les institutions démocratiques, et en 2017 nous ne sommes pas dans la même configuration que dans l’Europe de 1933. Assimiler l’aspect, parfois autoritaire, que sous jacent le projet de la candidate du FN au parti Hitlérien, ce serait d'ailleurs banaliser l'ignominie et les horreurs du régime NAZI, dont les chambres à gaz furent une abominable réalité et non un détail de l'histoire, comme pu le prétendre le père de Mme.... S’il est hors de question d’établir le moindre parallèle entre les théories et les méthodes d’extermination culturelles et cultuelles du régime HITLERIEN et le projet du FN ou celui de sa candidate, mais, ATTENTION, bien que la forme puisse en être différente, LES MÊMES CAUSES PEUVENT, PARFOIS PRODUIRE LES MÊMES EFFETS...
Plutôt que diaboliser la candidate du FN par des comparaisons excessives et inappropriées c’est son projet politique, ses contradictions et ses conséquences qui doivent être mises en évidence. Avec la sortie de l’Europe, de l’euro et la fermeture totale des frontières cela conduirait inévitablement la France à une « Albanisation », telle que ce pays, l’Albanie, fut du temps de l’Union Soviétique. Ce n’est pas compatible avec l’idée que l’on peut se faire de notre pays. Par ailleurs, comment peut on vouloir redonner à la France son rôle de grande puissance qui pèserait sur la scène politique internationale en voulant traiter d’égal à égal avec les USA et les Russes ou les Chinois, ce qui suppose un changement radical de politique à l’égard de ces pays ou en Syrie en renouant avec le gouvernement légal de ce pays pour mieux combattre le terrorisme Islamique, ou encore en sortant de l’OTAN comme le souhaite Mme. LE PEN et faire de la France une sorte de « blockhaus », avec dans le meilleur des cas un pays qui serait à l’image de l’Espagne Franquiste des années cinquante ?...
Autres conséquences à propos des institutions, par rapport aux propositions de Mr. MACRON et Mme LE PEN ?
Dans son programme, MACRON consacre une page à la « démocratie rénovée ». Ses propositions concernent essentiellement la moralisation de la vie publique, interdiction pour les parlementaires d’exercer des activités de conseils, interdiction pour les élus et ministres de recruter des membres de leur famille, interdiction de se présenter à une élection en cas de casier judiciaire et la limitation du cumul des mandats dans le temps à trois mandats identiques consécutifs. Le candidat d’En Marche ne propose pas de changement institutionnel majeur, si ce n’est l’obligation absolue de parité pour la présentation des candidats par les partis et la réduction d’un tiers environ du nombre de parlementaires, mesures qui ne nécessitent pas de révision constitutionnelle pour être applicables. A noter que sans pour autant revenir explicitement sur l’interdiction du mandat impératif, il souhaite mettre en place de nouveaux moyens d’évaluation du travail législatif par des biais qui resteront à définir. Il souhaite faire de la procédure d’urgence (une seule lecture devant chaque assemblée) la procédure par défaut d’adoption des lois. Bref, surtout des aménagements techniques, mais pas de grands bouleversements qui nécessiteraient une réforme constitutionnelle. Pas de réformes territoriales particulières à l’horizon, la France conservera son mille feuille avec ses 36 000 communes, ses départements, son bicamérisme parlementaire où l’on conserve un Sénat qui ne sert désormais plus à grand-chose, du fait que l’on dépend à 75 ù des lois Européennes et pas de remise en cause de la fonction et des pouvoirs du Président de la République qui détiendra toujours la fonction de chef de l’Etat et se trouve de fait chef de l’exécutif, une exception en Europe…
Mme. LE PEN se distingue surtout par sa méthode et l’accent mis sur la symbolique identitaire en faisant passer l’ensemble de ses mesures par un référendum « dès les premiers mois » de son quinquennat. Elle souhaite ainsi inscrire dans la Constitution trois principes : défense de l’identité du peuple, priorité nationale et lutte contre le communautarisme. Elle souhaite supprimer le titre XV de la Constitution consacré à l’Union européenne. Elle envisage aussi de revenir à la « doctrine Matter » qui consisterait à réduire considérablement l’application du droit international en acceptant la primauté des traités sur les lois qu’à condition que les premiers soient postérieurs aux secondes (révision de l’article 55 de la Constitution). Cette logique s’appliquerait aussi aux cours de justice internationales, notamment, la Cour européenne des droits de l’homme, dont l’autorité serait remise en cause au profit des juridictions françaises. Elle est par ailleurs favorable à une réforme territoriale qui supprimerait les régions et les EPCI à fiscalité propre. Elle plaide pour le septennat non renouvelable, pour la suppression du Conseil économique, social et environnemental, pour la diminution du nombre de parlementaires et pour l’élection des assemblées nationales et locales au scrutin proportionnel (modéré par une prime majoritaire), ce qui existe déjà pour les élections Municipales et Régionales. Par réaction à l’adoption du Traité de Lisbonne malgré le vote des Français lors du référendum de 2005, son programme prévoit de rendre le résultat de ce type de consultation « inviolable », c’est à dire incontestable par aucune assemblée ou juridiction. Juridiquement, ceci conduirait à la création d’une distinction hiérarchique entre lois référendaires et lois adoptées par le Parlement. Par ailleurs le référendum verrait son champ d’application élargi à l’ensemble du domaine de la loi et pourrait être convoquée par une initiative populaire (500 000 signatures d’électeurs). Elle veut aussi en finir avec la procédure de l’article 89 de la Constitution (Congrès) pour que toute révision constitutionnelle soit approuvée par référendum. Enfin, Marine Le Pen se prononce en faveur de la rédaction d’une Charte des Libertés Numériques annexée à la Constitution, sur le modèle de la Charte de l’Environnement de 2004).
Si Mme. LE PEN évoque bien le référendum d’initiative populaire et que sa proposition de saisine soit alléchante, la réalité de son application peut s’avérer plus complexe, voire impossible. Elle fait du recours référendaire surtout un outil au service de sa politique, dont elle serait de fait l’utilisatrice prioritaire. Dans les démocraties, un référendum est organisé par les Gouvernements sur des questions qui décident à long terme du destin de la population, au delà des questions politiques quotidiennes. Il peut concerner une décision portant sur l’adhésion à un organisme international (UE, OTAN), la décision d’appartenance territoriale d’une collectivité donnée, ou à propos de questions idéologiques ou morales : divorce, avortement, utilisation d’une langue qui touchent directement ou indirectement tous les membres de la communauté nationale ou régionale. En même temps, à côté des questions de large portée, de long terme, un référendum est de plus en plus souvent organisé dans tel ou tel pays sur des questions qui touchent plutôt les actualités politiques quotidiennes de court terme et cela n’est pas sans rapport avec l’affaiblissement de la confiance des citoyens dans la démocratie représentative et avec le renforcement du populisme. Dans les régimes autoritaires que sous-jacent le projet du FN, souvent sous couvert de « démocratie participative ou directe » le référendum est l’un des moyens les plus efficaces de manipulation et de dictat du pouvoir. Non seulement parce que le référendum légitime toujours plus un pouvoir, là où le débat démocratique par voie parlementaire l’aurait contesté et affaibli, mais aussi parce que la campagne qui précède le vote crée des conditions favorable au pouvoir, ne serait-ce que par la façon de poser les questions avec les réponses espérées qui lui assure la possibilité de mieux manipuler l’opinion publique.
Excepté l’accent mis sur le volet identitaire, ce qui est inacceptable, dont les déclinaisons obligeraient la France à sortir de l’Europe (référendum ou pas) ou la suppression des Régions qui est une aberration, à l’instar de MACRON, il n’y a pas de bouleversements constitutionnels par rapport au système bicaméral, au nombre de communes ou à la fonction Présidentielle. Sauf qu’à trop gouverner par voie référendaire, le voile de la démocratie directe ou participative peut masquer une dérive politique autoritaire, voire dictatoriale…Dans le monde les exemples furent légions.
Au lendemain du premier tour de l’élection Présidentielle, de la soupe pour les uns, de la sigue pour d’autres
On peut dire que tous les cannibales de la politique, Droite, Gauche et ex Verts qui s’étaient invités au banquet du jeune MACRON ne sont pas allés à la soupe pour rien et dimanche soir ils pouvaient se « lécher les babines » et se réjouir de leur choix, surtout l’ex premier Ministre Manuel VALLS qui s’est ainsi vu vengé de son concurrent vainqueur des primaires socialistes et fossoyeur d’un soir, bien malgré lui, de son parti.
Après avoir été crédité de 30% environ des intentions de vote à l’issue des primaires de la Droite et du centre, des affaires peut être légales mais pas très morales et une promesse maladroite non tenue, FILLON s’est retrouvé dans les cordes en y entrainant son parti et toute La Droite. De même que HAMON parti plus modestement à 15 / 17 %, au lieu de progresser, a éparpillé son électorat potentiel entre MACRON et MELANCHON. Ses tergiversations d’une liste d’union avec le candidat de la « France insoumise » ou de celui des Verts auquel il a fait « un pont d’or » furent un repoussoir, bien plus que son programme. Ce qui devrait aujourd’hui inciter les Socialistes à méditer sur le bien fondé de leurs engagements auprès des Verts pour les législatives…
Il est évident que si les uns veulent rejoindre MACRON et ajouter ainsi leur nom à la longue liste des cannibales politiques qui se sont invités à son banquet, les autres veulent le démolir. Force est de constater que certains des électeurs FILLON, du reste assez nombreux estimaient dimanche soir qu’on leur a volé l’élection et peuvent se venger en jouant le pire.
Il sera difficile à FILLON qui a assumé la responsabilité de son échec et annonce son retrait de la présidence de LR, comme à HAMON au PS de survivre politiquement, l’un à Droite, pour lequel un échec électoral semblait impossible, l’autre à Gauche avec une déroute électorale pour les Socialistes que nul n’aurait pu imaginer à ce point… L’un comme l’autre peut toujours se dire que tant qu’il y a de la vie politique, il y a de l’espoir …Ainsi va la vie « cahin – caha » de la cinquième république… La soupe pour les uns, ou la ciguë politique pour les autres.
Pour conclure
Dommage que pendant cette campagne les postulant(e)s à la fonction suprême aient surtout débattu sur l’écume des choses en passant à coté de l’essentiel, à savoir les conséquences inéluctables de la nouvelle révolution du numérique que les experts du forum économique mondial de Davos dénomment « quatrième révolution industrielle » et dans laquelle nous entrons à marche forcée. Cette nouvelle révolution va avoir des conséquences aujourd’hui insoupçonnées sur le plan culturel, social, économique avec de nouvelles redéfinition du rapport au travail qui restent à imaginer, ainsi que sur le plan énergétique, environnemental et écologique dans toute sa dimension, dont l’absence d’une réflexion préalable augure mal de l’avenir, pour lequel nos enfants et petits enfants, risquent fort de ne pas nous dire merci.
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