Procès à sens unique d’Esteban Morillo : quand la lutte des classes s’en mêle
L'affaire Méric fut ce fait divers qui égaya l'année 2013 avec le mythe de la "lutte contre la fascisme" en ligne de mire. Une bagarre entre deux bandes politisées, un mort, une couverture médiatique disproportionnée et un procès à sens unique ; bref une histoire révélatrice de l'air ambiant. Il n'est pas question dans cet article de remettre en cause une décision de justice, mais de faire le constat que la politisation de la magistrature et un conflit de classes sociales ont marqué la procédure.
A Paris, nous avons tous connu ces groupes de jeunes gens, peu matures donc peu conscients du sens d'un engagement politique à dix-huit ans, l'âge de révolte. A gauche, les fils de bonne famille, cultivés et aisés, qui cherchaient à s'encanailler en faisant le coup de poing contre les CRS durant les diverses manifestations. A droite, des gosses de familles pauvres, qui trainaient dans les tribunes des stades de foot, buvaient beaucoup, aimaient la baston et les fringues de marque. D'un côté, on se lavait peu, on portait des pantalons troués et on écoutait les Doors comme papa-maman en leur temps. De l'autre, on cherchait à compenser sa pauvreté par des vêtements "sportwears" et une coupe de cheveux bien réglée. Chez les "riches", c'était l'épanouissement personnel et le rejet de l'autorité, jugée inutile, qui prévalait. Le mai 68 des parents n'était pas si éloigné. Chez les autres, c'était la dureté de l'existence, les petits boulots, le hard rock (puis hélas le rap) et le hooliganisme. Les uns lisaient Charlie-hebdo et les inrocks', les autres ne lisaient pas, hormis l'équipe. Il y a vingt-cinq ans, les bandes de jeunes parisiens fonctionnaient ainsi. C'est toujours le cas : On rappelera qu'il y a quelques temps, des "antifas" furent interpellés par la police à l'issue d'une manifestation : il s'agissait d'un ingénieur et d'une étudiante HEC notamment. On est très loin de la lutte des classes et de l'anti-fascisme des résistants gaullistes et communistes qui, eux, prenaient de vrais risques face à des ennemis qui ne plaisantaient pas.
Les temps ont finalement peu changé sur Panam. A l'occasion d'une vente de vêtements Fred Perry, la marque préférée des gros costauds, les uns ont attendu les autres pour en découdre. Clément Méric, jeune leucémique affaibli, ne s'est pas relevé. Son opposant, Esteban Morillo, a fini en prison d'où il n'est pas prêt de sortir, puisque son procès a débouché sur onze ans de peine à son égard. L'un comme l'autre étaient manipulés par des "leaders" associatifs, plus ou moins liés aux service de police, qui étaient conscients de formater et de manipuler des jeunes influençables. Le véritable responsable de la mort de Clément, c'est d'abord celui ou celle qui l'a embrigadé. Mais ce n'était pas l'avis des jurés de la cour d'assises de Paris.
Pourtant, Morillo et Samuel Dufour, l'autre prévenu (sept ans de réclusion pour... complicité !), avaient fait profil bas et demander pardon à la famille de Méric. Ils avaient un bon avocat, Me Maisonneuve, et ils s'étaient relookés, en tirant un trait sur la politique. Cela n'a pas suffit, car l'acte violent n'est pas la seule raison de leur lourde condamnation. En comparaison, Jawad le logeur de Daesch n'a écopé que de huit ans de taule pour avoir massacré au hachoir son meilleur ami. Julien Quemeneur, jeune supporter du PSG abattu par un policier véreux devant le Parc des Princes un soir de match, n'a pas retenu l'attention de la justice qui a relaxé son assassin bien qu'il n'y avait pas légitime défense avérée...
C'est qu'il y a une dimension idéologique au procès. Morillo était un vilain "facho". Il faisait parti de cette ultra-droite groupusculaire qui fait fantasmer les bobos bien-pensants, au point que cinq cents manifestants se seraient rassemblés Place St Michel le jour du procès pour protester contre le fantôme du fascisme, un courant extrémiste qui n'a jamais perçé en France. En temps normal, pour une échauffourée qui aurait mal tourné, le prévenu aurait été condamné pour avoir donné la mort sans préméditation. Ici, le procès fut autre car il a été reproché au jeune rebelle de s'être défendu (car Méric avait attaqué le premier) et de ne pas s'être laissé corriger. Morillo a d'ailleurs déclaré qu'il aurait préféré être à la place de sa victime, ce qui lui aurait évité le sinistre carnaval qu'il endure depuis cinq ans...
L'aspect dérangeant de cette affaire, c'est le conflit entre de classes sociales antagonistes qui en découle. Durant le procès, les observateurs ont constaté les connivences entre les magistrats et la famille de profs et de journalistes aisés de Méric. Ces gens sont du même monde. Agnès Méric, sa maman, a appelé à "continuer la lutte contre le terreau de l'extrême-droite". Autrement dit, il faut combattre le "racisme", aider les migrants (qu'elle n'accueille pas à son domicile), lutter contre les "préjugés" et tout ce qui représente l'autorité (?). Professionnels de l'information, magistrats, enseignants du supérieur... Ces gens habitent les mêmes quartiers, fréquentent les mêmes lieux de vie (écoles, restaurants...) : ils sont déconnectés des réalités. Les jurés étaient tous parisiens : la transformation de la sociologie démographique parisienne ne laisse guère de doute quant à leur composition, très bourgeoise. Ces gens bien nés étaient entre eux pour juger les gueux qui eurent l'audace de ne pas penser comme eux et de rechercher le conflit de classes. Est-ce la peur de "fascisme" ou celle du peuple énervé, celui des stades de foot et des conflits ouvriers, qui a motivé inconsciemment le microcosme juridique ? Craignent-ils une révolution du lumpenprolétariat ?
Nos bourgeois bien nés auraient été plus indulgents face à un terroriste salafiste, à qui ils auraient accordé l'excuse sociale de prétendues discriminations. Dans le cas Morillo, pas de quartier ! Et un message clair : les gosses de la bonne bourgeoisie sont sacrés, ils ont tous les droits y compris celui de provoquer des violences de rue. Malheur à celui qui les remettra à leur place et qui en subira les sévères conséquences juridiques. Il ne s'agissait pas d'un procès politique entre ultras, mais bien d'un procès de classes sociales : l'ouvrier de l'Aisne Esteban Morillo a gagné dix ans de Bastille pour avoir tué un enfant de l'oligarchie parisienne. On comprend cette peur du peuple qui agite notre classe politico-médiatique effrayée par le populisme, c'est-à-dire le parti du peuple, et qui n'entend pas se laisser déborder. Le petit peuple n'a pas le droit d'être virulent, surtout à l'égard de ses maitres. Les beaux principes, c'est pour le décor. Quand on vous dit que le communautarisme est la norme en France, c'est à tous les niveaux, ethnique comme social...
source de l'article : https://france3-regions.francetvinfo.fr/hauts-de-france/aisne/esteban-morillo-principal-accuse-mort-clement-meric-j-aurais-voulu-que-ce-soit-moi-plutot-que-lui-1539392.html
PS : Clément militait parait-il en faveur des migrants, dont le quartier de ses parents était préservé. En cherchant sur google un article avec pour mots-clés "peur des bourgeois de la violence du peuple", vous tombez sur cet article très instructif issu de Sputniks : quand les prolos de toutes les origines saturent face aux protégés des antifas. Quand on vous dit qu'entre Morillo et Méric, il y avait bien un antogonisme de classe sociale :
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