Protection présidentielle US : les temps forts du Secret Service
« Je veux remercier le Secret Service » chargé de la protection des présidents et ex-présidents, et toutes les forces de maintien de l’ordre, pour leur réaction rapide aux tirs qui viennent de se produire à Butler en Pennsylvanie. (...) Surtout, je souhaite présenter mes condoléances à la famille de la personne au meeting qui a été tuée » D. Trump.
Samedi 13 juillet 2024 le candidat républicain Donald Trump commence sa dernière allocution de campagne à Butler Farm Show Inc ( Pennsylvanie). A 18 h 08 il est atteint par un tir à l'oreille droite avant de se « tasser » au sol derrière le pupitre aussitôt rejoint par des agents du Secret Service. « On a vu beaucoup de gens se jeter à terre, l’air confus. J’ai entendu les coups de feu, ça sonnait comme quelque chose entre des pétards et un pistolet de petit calibre ». Après quelques secondes D. Trump se relève entouré par des agents, le poing levé, avant d'être escorté jusqu’à sa voiture sous les acclamations de ses partisans. Dix-sept secondes après les premiers tirs, une septième détonation retentit, l'assaillant vient d'être abattu par le tir d'un contre-snipeur. Les tirs ont tué un spectateur et en ont blessé deux grièvement. L’agresseur a « tiré à plusieurs reprises depuis une position élevée et se trouvait en dehors du périmètre de sécurité où se déroulait le rassemblement. Je ne sais pas comment il est arrivé à l’endroit où il se trouvait, mais il était à l’extérieur » déclaration du procureur du comté de Butler à CNN.
En 1894 l'United States Secret Service créé en juillet 1865 pour enrayer la contrefaçon du billet vert reçoit des informations laissant craindre à un attentat contre le président Grover Cleveland. Le chef du USSS prend l'initiative de détacher deux agents pour assurer la sécurité du président. Lors de la déclaration de guerre contre l’Espagne (21 avril 1898), quatre agents assurent la sécurité du président McKinley. Le 6 septembre 1901 le président est atteint par deux balles au thorax tirées par un homme la main dissimulée par un bandage. Le président décède le 14 et son assassin est exécuté sur la chaise électrique un mois plus tard. Le 14 octobre 1912 Théodore Roosevelt blessé par une balle au poumon décide de finir son discours avant d'être transporté à l'hôpital. Son agresseur sera déclaré irresponsable et interné à vie dans un hôpital psychiatrique. La guerre terminée, le président Roosevelt reçoit de nombreuses lettres de menaces de morts. L'USSS craint que des anarchistes n’attentent à sa vie. Les projets de la protection du président se heurtent à l’esprit de liberté et d’indépendance des Américains. La confier à l’armée ? c’est s'apparenter à une dictature, la confier à une garde présidentielle évoque la monarchie. L'USSS est le seul à rester en lice. Pour de nombreux parlementaires il s’agit d’une garde prétorienne et l’accès à la Maison Blanche doit prévaloir sur la sécurité présidentielle. Une loi est votée, toute menace contre le président constitue un crime, et le Congrés décide d’étendre la protection du président à sa femme et à ses enfants.
En 1922 la force de police de la Maison Blanche, récemment créée, est placée sous l'autorité du président lui-même. Le président Harding très soucieux de son intimité peut faire venir ses maîtresses dans son bureau... En 1930 un homme s’introduit dans The White House et parvient à atteindre la salle à manger privée du président Herbert Hoover qui s’en offusque et demande des explications à l'USSS, le directeur lui répond qu’il n’a pas en charge le contrôle d’accès ni autorité sur la police de la Maison Blanche. Le 1 juillet cette unité de police devient officiellement la Division en uniforme du Secret Service. Une cinquantaine d’hommes va veiller désormais sur la sécurité de la Maison Blanche, du président et de sa famille.
A l’entrée en guerre des États-Unis, la protection du président est renforcée, la Maison Blanche est protégée par des défenses périphériques et périmétriques. Des guérites sont échelonnées le long de la clôture, des mitrailleuses sont installées sur les toits, des itinéraires d’évacuation sont arrêtés, et les journaux ont interdiction de publier tout ce qui se rapporte aux déplacements présidentiels. Des mesures sont prises contre un sniper, un raid aérien ou un assaut aéroporté ! L’abri antiaérien est renforcé et transformé en abri anti-atomique.
Le 1 novembre 1950, le président Truman loge à Blair House en raison de travaux à la Maison Blanche. Deux portoricains ont décidé d'en forcer l'entrée et tuer le président. À peine sont-ils arrivés que l’un d’entre eux abat un policier en faction. Vingt-sept coups de feu sont échangés sans que les agresseurs ne parviennent à entamer la protection périphérique. Le 25 mai 1951 la chambre des Representatives vote à l’unanimité une résolution visant à confier au Secret Service la mission permanente de la protection du président et du vice-président.
Le 13 mai 1958 le vice-président Richard Nixon accompagné de sa femme arrive à Caracas pour une visite officielle. Le couple présidentiel y est accueilli par une foule hostile. La limousine blindée se retrouve immobilisée, des manifestants ont l’intention de la renverser puis d’y bouter le feu. Des cocktails Molotov ont été dissimulés à proximité. Les agents spéciaux font preuve d’un sang froid exemplaire et tentent de repousser, à mains nues, les assaillants. Un camion transportant des journalistes surgit et fonce sur la foule qui n’a que le temps de s’écarter, ouvrant la voie à la limousine. Les agents Spéciaux se voient décerner the Exceptional Civilian Award avec mention pour leur héroïsme.
Le 22 novembre 1963, Air Force One en provenance de Fort Worth se pose sur l'aérodrome de Dallas à 11 h 38. La procédure est toujours identique, avant le décollage ou après le décollage d'Air Force One, tout le trafic aérien est interdit pendant quinze minutes ; Air Force one décolle le premier suivi quinze minutes plus tard des avions composant la suite présidentielle qui le rattrapent et le dépassent en vol de manière à atterrir quinze minutes avant Air Force One afin que leurs occupants soient au pied de l’appareil pour accueillir le Président. Le cortège s'ébranle à 11 h 55, limousine présidentielle en tête du cortège suivie par le véhicule transportant huit agents spéciaux suivi des voitures du vice-président, de la presse, des parlementaires, des invités de marque et celle du médecin personnel du président. Le convoi est fermé par le véhicule des transmissions chargé des liaisons avec Air force One qui assure le relais avec la Maison Blanche. Dans ce dernier véhicule se trouve également plusieurs enveloppes scellées, il s’agit des procédures pour joindre les chefs d’États étrangers et le code de feu nucléaire.
L'itinéraire que doit emprunter la limousine comporte pas moins de 20.000 fenêtres, chaque bloc d’immeuble est placé sous la surveillance d’un policier en civil, et de nombreux policiers en uniforme jalonnent l'itinéraire. Il y a cependant un « trou ” dans la haie d’honneur et de protection. A la hauteur du virage en « S » la ligne de policiers est clairsemée car on y attend moins de spectateurs... A 12 h 34 les téléspectateurs du monde entier peuvent voir les images de l’assassinat de J.F. Kennedy. L’enquête relèvera : l'absence de hard top sur la limousine présidentielle, l'absence d’agents spéciaux sur les marchepieds, le choix d’un itinéraire obligeant à des ralentissements, de longs tronçons de lignes droites bordés de points hauts environnants, les motocyclistes faisant des allers et retours entre les véhicules du convoi au lieu d'encadrer le véhicule, la surcharge horaire des agents, la voiture suiveuse plus éloignée que les consignes le stipulent, et la communication de l'itinéraire à la presse...
De nouvelles mesures vont être adoptées à posteriori. Parmi celles-ci : amélioration de l’instruction, renforcement de la coopération avec les autres services de police et révision du renseignement. Le groupe renseignement recueille les informations des éléments précurseurs et celles des divers fichiers police, les vérifient, les recoupent, procèdent à leur évaluation et les transmettent au bureau des opérations. Le 5 juin 1968 le sénateur Robert Kennedy qui a remporté les primaires à la présidence quitte l’hôtel Ambassador (Los Angeles) entouré de gardes du corps privés et en passant par les cuisines pour éviter la foule agglutinée devant l’hôtel. Soudain, un homme surgit et le blesse gravement. La protection des candidats à la présidence sera désormais assurée par l'USSS.
Lors de la campagne présidentielle de 1972 du sénateur George Wallace d’Alabama, la sécurité est assurée par des agents spéciaux et des membres du parti. Le sénateur porte un gilet pare-balles, et son équipe transporte partout où il doit prononcer un discours, un pupitre blindé. Le 5 mai le temps est chaud et très humide, G. Wallace décide de ne pas porter de gilet pare-balles. Après avoir prononcé son discours dans un centre commercial, il ôte sa veste et se dirige vers la foule pour y serrer quelques mains. Un spectateur surgit et tire. Le sénateur est atteint de plusieurs projectiles, et deux agents spéciaux et un spectateur sont touchés. Les agents parviennent à maîtriser le tireur que la foule veut lyncher. Wallace transporté à l'hôpital sera sauvé. Si le groupe renseignement avait soigneusement examiné les films des apparitions publiques précédentes du sénateur, ils auraient eu leur attention attirée par le zèle outrancier de ce supporter filmé à plusieurs reprises et dans plusieurs États.
Août 1973, le Secret Service déconseille au président Richard Nixon d’accomplir le voyage prévu à la New-Orléans. L'USSS a été averti que des Black Panthers préparaient l’assassinat du président. Les informations se révèleront totalement fausses, il sera fait grief au Secret Service d’avoir annoncé à la presse l’imminence d’un complot. Force est de constater que les priorités des deux parties sont diamétralement opposées. Les politiciens apprécient une certaine visibilité alors que la protection préfère la discrétion.
Le 5 septembre 1975 le président Gerald Ford en visite à Sacramento (Californie) s’arrête pour serrer quelques mains, une jeune femme extirpe un Colt .45 de sous sa cape rouge. L’Officer in Charge (agent chargé de la protection immédiate) s’interpose et saisit l’arme à pleine main tandis que ses collègues entourent et évacuent le président. Aucun coup de feu n’a été tiré. Sur certaines armes, le fait de forcer le canon vers l’arrière a pour résultat de mettre l'arme en sécurité. Le 22, c’est à peu près le même scénario qui se reproduit. La foule est amassée le long d’une rue de San Francisco pour apercevoir le président quitter son l’hôtel. Une détonation retentit, l’agent spécial couche immédiatement le Président au sol avant de le placer entre les sièges de la limousine et de le couvrir de son corps. L’enquête établira que Sara Jon Moore avait appelé la police pour lui expliquer qu’elle allait procéder à un test destiné à évaluer la protection du président ! Entendu la veille, une arme et des munitions avaient été saisies, estimant qu’elles ne présentaient pas une menace sérieuse, elle avait été laissée en liberté. Aussitôt libre elle avait acheté une autre arme.
Le 30 mars 1981 le président Ronald Reagan doit prononcer un discours devant plusieurs milliers de personnes à l’hôtel Hilton de Washington. L’USSS a procédé à un travail considérable : réunions avec le personnel et les syndicats afin de définir les procédures de sûreté et sécurité, contrôle des accès, des couloirs, des halls, des ascenseurs, vérification des listes du personnel et clients présents, mesures d’identification des agents (badge et pin), reconnaissance de l'itinéraire pédestre et routier, vérifications auprès des responsables de la voie publique pour s’assurer qu’aucune manifestation, travaux, dérangements ne sont planifiés, reconnaissance du sous-sol et des égouts, coordination avec la police locale et une équipe cynophile a exploré la zone. Le président n’aura que quelques mètres à parcourir entre la limousine et l’entrée de l’hôtel, les journalistes seront sur une zone réservée et les badauds maintenus à distance par des cordes. Son discours terminé, le président s’apprête à monter dans la limousine et adresse un salut à destination de la foule. Six coups de feu claquent, un agent spécial s’interpose entre Reagan et le tireur situé à environ sept mètres, tandis que deux de ses collègues encadrent et poussent le président dans la limousine blindée. La scène n’a duré que quelques secondes. Le chauffeur quitte la zone sur les chapeaux de roues, de la spume sanguinolente sort de la bouche du président. L'agent crie au chauffeur de rejoindre l'hôpital de la ville. Le président atteint au côté gauche par une balle qui a ricoché sur le véhicule est immédiatement transporté en salle d’opération.
Mercredi 14 juin 2017 une rencontre de baseball entre des élus du Congrès se déroule au Eugene Simpson Stadium Park à Alexandria (Virginie). Une fusillade fait cinq blessés dont le député Steve Scalise, représentant à la Chambre pour la Louisiane et chef de file du Parti républicain est transporté à l'hôpital dans un état critique. L’auteur des tirs, originaire d'Illinois, abattu par les policiers du Capitol, était un supporter démocrate de Bernie Sanders ancien candidat à la Maison-Blanche. Selon le frère du tireur « Trump a détruit notre démocratie. L’heure est venue de détruire Trump et compagnie ». Le président Trump accompagné de sa femme Melania se rend au chevet de Steve Scalise et salue l’intervention de la police du Capitol : « De nombreuses vies auraient été perdues sans les actes héroïques des deux policiers qui ont mis le tireur hors d’état de nuire ».
L'United States Capitol Police créée en 1828 a en charge la protection du Congrès à Washington et celle de ses représentants. Ironie « politi-chienne », le 6 janvier 2021 plusieurs centaines de Républicains se ruaient à l'intérieur du Capitol pour tenter d'invalider la victoire de Joe Biden. Cet épisode a fait cinq morts dont un agent de l'USCP décédé de crise cardiaque, d'autres se suicideront dans les mois suivants...
Après la tentative d’assassinat contre Donald Trump, la sécurité du candidat Indépendant Robert F. Kennedy a été confiée à l'USSS. L’enquête sur les circonstances de l’attentat contre Donald Trump vont devoir prendre en considération des paramètres sociologiques, techniques (cercles de protection éloignée et très éloignée, « bulle aérienne ») et procéduraux (absence du dossier médical du candidat, etc.). « On a dit aux gens que c’était acceptable de haïr Trump, acceptable d’assassiner Trump » Newt Gingrich, ancien porte-parole de la Chambre à Fox News, et de pointer la pièce new-yorkaise Jules César de Shakespeare « dans laquelle le dictateur assassiné ressemble au président américain ». J.D. Vance, sénateur républicain de l'Ohio et colistier à la vice-présicence, incrimine le climat délétère : « Il ne s’agit pas aujourd’hui d’un simple événement isolé. Le postulat central de la campagne de Biden est de dire que le président Trump est un fasciste autoritaire qu’il faut arrêter à tout prix. Cette rhétorique a directement conduit à la tentative d’assassinat du président Trump ».
La Chambre des représentants : « mènera une enquête approfondie sur la tentative d’assassinat de l’ancien président américain Donald Trump. (...) Comment Thomas Matthew Crooks, 20 ans, a réussi à déjouer les mesures de sécurité pour monter sur un toit et de nombreux témoins ont déclaré avoir vu le tireur avant la fusillade et avoir alerté la police de Butler. (...) Le peuple américain mérite de connaître la vérité. Une correction, une précision, une remarque ?
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