PSA : chronique d’une catastrophe économique
Avec l’annonce mi-juillet par le constructeur de l'arrêt de la production sur le site d'Aulnay en 2014, et un impact conséquent également pour le site de Rennes, ce sont 8000 emplois qui sont menacés. Retour sur un coup de massue pour les travailleurs français.
La principale mesure de restructuration annoncée par le groupe est la fermeture de l'usine d'Aulnay dès 2014, usine qui emploie tout de même 3.000 salariés. Si l’entreprise a promis le reclassement de 1500 emplois, de nombreux plans de départs volontaires sont également prévus dans ce qui ressemble davantage à une fermeture qu’à une restructuration du bassin d’emploi. La production de la C3, unique activité d'Aulnay, sera ainsi déplacée vers l'usine de Poissy.
Restructuration, le mot encore à la mode il y a quelques temps est aujourd’hui soigneusement évité, tant il véhicule des images péjoratives de migration d’emploi vers l’étranger. Les dirigeants préfèrent parler cash : "PSA perd 200 millions d'euros de cash chaque mois depuis un an", explique ainsi Frédéric Saint-Geours, directeur des marques du groupe. Pourtant, c’est à une forme de déplacement des emplois à laquelle compte se livrer PSA : la suppression ne toucherait que la France, alors que le groupe produit ailleurs dans le monde.
Le site de Rennes est durement touché, avec la suppression d’un quart des effectifs (1.400 postes supprimés sur 5.600). Enfin, PSA a prévu de revoir ses effectifs hors chaîne de production, avec la suppression annoncée de 3600 postes répartis sur l’ensemble de la France. En tout, ce sont donc près de 8.000 emplois qui vont disparaître, et les quelques 1500 reclassements ne sont pas vraiment suffisants pour relever ce bilan catastrophique.
8000 vies brisées : un poids que semblent supporter sans broncher les dirigeants de PSA
Les représentants de PSA disaient encore récemment à leurs salariés de Rennes, « vous êtes les meilleurs, nous vous regardons ». Pourtant, le témoignage d’un salarié de l’usine donne une autre version de cette histoire : « lorsque nous nous sommes inquiétés de ne produire que des berlines luxueuses que les salariés ne peuvent s’offrir, notre direction nous a rabroués », rapporte Noël Alix (délégué CGT) dans le Marianne 797 du 28 juillet 2012.
Un double discours destructeur pour l’image de l’entreprise, surtout en comparaison du nombre de personnes qu’elle emploie à travers le monde, et qui auraient pu faire l’objet de ce plan de suppression, avant nos salariés français. En effet, le groupe produit 1,93 millions de véhicules à l’étranger, pour une production en France de 1,23 millions de véhicules.
Certes, l’effort était louable, car la production française est tout de même 4 fois plus importante chez PSA que chez Renault. Mais les décideurs ont vite changé d’avis : face au pouvoir des chiffres, l’humain est bien peu de chose. Peugeot-Citroën semble donc vouloir faire marche arrière, et placer toutes ses billes dans un jeu bien connu des salariés français : celui de la mondialisation.
Pour justifier son choix, PSA met en avant les effets de la crise économique en Europe, qui pèserait sur l’achat de véhicules pour les particuliers. Cela fait en effet déjà un an que le groupe voit ses ventes de véhicules baisser sur le continent, avec une perte de 700 millions d'euros, au premier semestre.
Si l’argument paraît acceptable, comment justifier que des groupes étrangers tiennent le cap dans la tempête, comme l’exemple Volkswagen qui voit son résultat net augmenter de 36%, malgré la crise ?
Produire Français quand on doit faire face à un problème de surproduction (plus précisément de surcapacité dans le cas présent) est un engagement qui ne peut économiquement pas être tenu, nous expliquent les dirigeants.
Le gouvernement prend très au sérieux l’affaire, puisque le ministre en charge du Redressement productif, Arnaud Montebourg, voit rouge dans l’histoire. Ce dernier ne mâche pas ses mots : « erreurs stratégiques », « dissimulation », et « maladie imaginaire » sont autant de reproches faits à la famille Peugeot. Elle serait trop centrée sur l’actionnaire selon le ministre, un mal qui est courant au sein du Cac40. Pour le ministre, le combat n’est pas seulement un combat pour l’emploi des salariés français mais véritablement une lutte contre la mondialisation.
L’UMP a fortement réagi à ces charges, qualifiant l’attitude d’Arnaud Montebourg « d’irresponsable », « risquant l’emploi de milliers de salariés français ».
Une fois de plus, les citoyens pourront constater que la classe politique française n’arrive pas à avoir de débat serein sur le comportement de certains de ses grands groupes. L’UMP, comme toujours, prend le parti du puissant et des chiffres : PSA ne peut pas faire autrement. Le PS, également dans son rôle habituel, charge médiatiquement ces mêmes patrons, tout en sachant pertinemment que la marge de manœuvre du gouvernement est très réduite voire nulle. Entre compromission vis à vis des puissants, et effet d’annonce, les salariés de PSA se retrouvent bien démunis, dans une lutte pour ce qui devrait être un droit naturel pour eux : celui du respect venant de l’entreprise à laquelle ils participent.
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