Qatar, surenchères et affairistes de la cause
Son pays ne se joindra pas aux EAU et au Bahreïn pour établir des liens diplomatiques avec Israël « à moins que le conflit avec les Palestiniens ne soit résolu. » C’est ce que vient de déclarer la ministre des affaires étrangères du Qatar, Lulua Al Khater, me faisant songer au niveau de mensonge que peut atteindre la propagande qatarie.
Cela m’a rappelé que beaucoup font de la surenchère et de l’affairisme au détriment de la cause du peuple palestinien.
Le plus étonnant, Mme Lulua a poursuivi son discours de faux-semblant et de surenchère. « Nous ne pensons pas que la normalisation ait été au cœur de ce conflit et donc qu’elle ne puisse pas être la réponse. » « Le cœur de ce conflit concerne les conditions drastiques dans lesquelles vivent les Palestiniens » en tant que « peuple sans pays, vivant sous occupation. »
Cette histoire douce-amère s’ajoute à l’énorme surenchère médiatique et politique qui entoure les positions des EAU et du Bahreïn sur le lancement de relations diplomatiques avec Israël.
La ministre qui est entrée en scène politique qatarie il y a quelques années s’efforce de mettre en valeur la position de son pays. Cependant, la fraîcheur de son expérience, voire de son âge et de ses connaissances, ne l’aide pas dans ce registre, précisément parce qu’elle s’est investie dans une affaire parfaitement comprise dans notre région arabe.
Depuis 1996, date de l’ouverture du bureau commercial, votre pays entretient des relations officielles, bien qu’il n’ait plus de relations diplomatiques, avec Israël.
Votre chaîne, qui brandit la bannière du pan-arabisme, a toujours été la fenêtre de la normalisation et de la médiatisation d’Israël chez les peuples arabes depuis de longues années. La machine médiatique qatarie a même fait du porte-parole de l’armée israélienne Avichai Adarei une star des émissions célèbres.
Je ne rentrerai pas dans les détails des relations qataro-israéliennes, y compris celles que certains responsables et dirigeants qatariens ont jusqu’à présent entretenues sur les rives de Haïfa. Ces informations sont documentées et publiées en ligne. Il n’est pas la peine de les citer car, comme on dit, « qui peint la fleur n’en peut peindre l’odeur. »
La vice-premier ministre qatarie devrait se contenter de lire « Qatar – Israel – A file of secret relations » de Shmuel Revel.
Sammy Revel a été ministre délégué à l’ambassade d’Israël à Paris, anciennement directeur du bureau du directeur général du ministère des affaires étrangères d’Israël et directeur du bureau des intérêts entre les deux pays à Doha de 1996 à 1999. Le livre détaille les « services » qu’il a reçus du gouvernement qatari pour faciliter ses tâches. Il décrit tout aussi précisément le rôle qu’Israël a joué dans la définition du rôle régional du Qatar pendant cette période.
Le plus important à mes yeux, plutôt que de rappeler à Mme Lulua des détails sur les relations officielles de son pays avec Israël depuis 1996 (sans égards au petit jeu de la fermeture du bureau commercial israélien à Doha), est qu’elle s’est trop investie dans le rôle de dénonciateur de la décision souveraine des EAU et du Bahreïn.
Elle a carrément oublié que le Qatar ne peut pas nier ses relations avec Israël ou surenchérir sur celles qu’il entretient avec d’autres pays. C’est comme si la ministre s’était soudainement souvenue qu’il y avait des réfugiés palestiniens vivant sans État et sous occupation. Comme si cette situation n’existait pas lorsque les relations de son pays avec Israël sont passées par toutes les stations successives que tout le monde connaît bien depuis le début des années 1990.
Ces surenchères à la noix ne font que reprendre les positions de l’axe de surenchère irano-turc assisté de dirigeants de milices et d’organisations palestiniennes, dont certains fréquentaient des fonctionnaires israéliens plus que leurs propres familles.
Ce sont des surenchères motivées par l’affairisme et le chantage émotionnel exercé sur ceux qu’ils croient naïfs parmi le peuple palestinien frère. Ce qu’ils ne savent pas, c’est que ces gens ordinaires connaissent tous les rouages de l’affaire ; ils savent très bien qui les défend et qui trafiquent de leur douleur et se battent non pas pour leurs droits mais pour perpétuer leur situation actuelle non résolue.
La Turquie pratique lui aussi la surenchère. Ses relations d’alliance stratégique avec Israël depuis les années 1990 n’ont pas changé. Seulement, elles sont passées de la déclaration à la discrétion pour aller de pair avec le double jeu du régime du sultan.
Certes, l’alliance n’est pas active, mais le sultan Erdogan n’est jamais allé jusqu’à déclarer une bonne fois pour toutes que son pays est en rupture avec Israël. Le volume du commerce entre Israël et la Turquie, qui n’était que de 18 millions de dollars en 1987, est passé à 6,6 milliards de dollars en 2019.
Je vous parle pas des accords militaires, ou du chef des services de renseignement turcs Hakar Vidan, et ses rencontres régulières avec Yossi Cohen, le chef du Mossad israélien.
On ne manque pas d’exemples de surenchères. Mais je voulais juste signaler que la position qatarie est allée trop loin dans la surenchère. Les tactiques d’action ordinaires n’ont finalement pas réussi à lui donner une quelconque crédibilité, au point que ces déclarations commencent à devenir des blagues de mauvais goût.
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