Le doc en entier (la source n’est peut-être pas communiste ?) :
La guerre secrète des espions atomiques
Depuis 1942, des agents à la solde de l’URSS ont infiltré les
milieux scientifiques américains. La course à l’armement atomique
débute ainsi, entre les deux blocs Est et Ouest. Au fil des années,
plusieurs pays vont lancer les espions « atomiques » dans la mêlée afin
de rejoindre le très fermé club nucléaire. Après la France, la Chine et
Israël, vient le tour de l’Irak, de l’Inde...
Le 6 septembre 1945, un mois, jour pour jour, après la bombe atomique
d’Hiroshima, un chiffreur de l’ambassede d’Union soviétique à Ottawa
fait défection dans des circonstances mouvementées. En poste depuis
deux ans, Igor GOUZENKO travaillait pour le GRU, le service secret de
l’armée rouge. D’où cette manne de feuillet multicolores qu’il vient de
subtiliser dans le coffre de l’attaché militaire soviétique et que les
deux animateurs de l’Intelligence Division de la Royale Canadian
Mounter Police, effarés, dépouillent dans leurs locaux du camp X, au
nord du lac Ontario. Ils prouvent l’existence d’un réseau d’espionnage
bien implanté au Canada. Ses ramifications internationales, très
étendues, comprennent notamment des savants engagés dans la course à
l’arme atomique. Sans se faire prier, GOUZENKO donne des détails
complémentaire. Il explique ainsi comment son chef à Ottawa, le colonel
Nikolaï ZABOTINE, a fait parvenir à Moscou des échantillons d’Uranium
enrichi glanés à Port Hope, où le GRU a infiltré la Canadian Radio
& Uranium Corporation, ainsi que de nombreux rapports sur létat des
recherches atomiques au Canada et ailleurs. Le 4 février 1946,
Mackenzie KING, le Premier ministre canadien, informe le cabinet de
l’existence de ce réseau. Il confie à haut magistrats le soin de
diriger une commission d’enquête sur les arcanes de l’affaire. Le 4mars
1946, Un savant britannique qui bénéficie de l’accès aux secrets de la
fabrication de la bombe atomique, le Dr Allan NUNN MAY (pseudonyme
Alek), en poste à Montréal, est arrêté pour espionnage.
C’est de cette manière presque fortuite que l’Occident découvre
l’existence et l’ampleur des opérations d’espionnage menées par les
Soviétiques dans le but de s’appropier les secrets de fabrication de
cette arme nouvelle qui vient de prouver sa terrifiante efficacité
contre les Japonais.
Une des taupes de Cambrige
Photo de Donald MACLEAN, l’une des célèbres taupes de Cambrige, en contact avec les Russes dès 1941
De leur côté, cela fait déjà quatre ans que les Soviétiques savent que
les Occidentaux sont engagés dans la construction de la bombe. Donald
MACLEAN, l’une des célèbres « taupes de Cambrige », avertisait dès la fin
de l’été 1941 son officier traitant londonien du NKVD, Anatoli GORSKI,
de la décision britannique de lancer le programme de fabrication d’une
bombe à l’uranium. Quelques mois plus tard, le président du NKVD à San
Francisco, Grigori HEIFETZ, informait à son tour Moscou que les
Etats-Unis venaient d’unir leurs efforts à ceux des Anglais (futur
projet Manhattan) et que pour des raisons matérielles, les
expérimentations se dérouleraient sur le sol américain. De prime abord,
ni STALINE ni BERIA, le tout-puissant chef des services spéciaux, le
NKVD, ne croient au bien fondé des informations de leurs agents. Ils
pensent d’abord à une manoeuvre de désinformation. Mais les détails
s’accumulant grâce à l’activité intense des réseaux anglais et
américains du GRU et du NKVD, ils finissent par changer d’avis. En
février 1943, un comité spécial chargé aux fins militaires est créé par
STALINE. Il sera présidé par Molotov, le ministre des affaires
étrangères, qu’assiste Béria.
L’état-major du NKVD et tout spécialement l’homme de confiance de
BERIA, Pavel SOUDOPLATOV, est chargé de collecter prioritairement
toutes les informations disponibles sur les travaux des savants
occidentaux. Ces éléments sont immédiatement transmis à l’équipe
qu’anime Igor KOURTCHATOV, le jeune scientifique en charge côté russe
du programme nucléaire militaire. Lequel, dès mars 1943, fait savoir au
Kremlin que la qualité des renseignements fournis permettra aux savants
soviétiques de réaliser la fission de l’atome "dans un temps beaucoup
plus court" que si l’URSS n’avait dû compter que sur ses seuls moyens.
Les meilleurs agents russes sont affectés à cette tâches. On comprend
alors que STALINE n’ait guère été surpris quand TRUMAN l’a prévenu que
les Etats-Unis disposaient d’une « force de destruction sans précédent ».
Le tout est de rattraper le retard sur les Américains. C’est pourquoi
la guerre finie, les réseaux continuent de s’activer bien qu’ils
n’aient plus d’excuse de la nécessaire solidarité contre l’ennemi
hitlérien. Ainsi FUCHS fournit-il aux Russes de nouvelles informations
sur la production américaine d’Uranium 235. Facteur-clé dans cette
période troublée : elles permettrons à STALINE de connaître les limites
de la supériorité occidentale en matière nucléaire.
En août 1949, l’URSS fait éclater sa première bombe A. En 1950,
l’arrestation par le FBI d’Harry GOLD conduit à celle de David
GREENGLASS, de Morton SOBELL et des époux ROSENBERG. D’autres suspects
parviennent à prendre la fuite ou sont « exfiltrés » par le NKVD. Dans un
contexte marqué par la guerre de Corée et les sévères pertes de l’US
Army face aux communistes, les révélations sur l’espionnage soviétique
traumatisent l’opinion publique américaine. Persuadée que les réseaux
d’espionnage ont ouvert à l’URSS les portes de la puissance nucléaire,
ce n’est pas inexact, elle voit en eux la cause possible d’un
holocauste atomique qui heureusement n’aura pas lieu.
Le FBI, lui, cherche avant tout à prouver son efficacité. Faute de
pouvoir remonter toutes les filières pour raison d’Etat, peut-être, J.
Edgar HOOVER et ses G-Men nourrissent de leur mieux les dossiers
d’accusation de ces agents de liaison au rôle important mais pas
essentiel. Ainsi exploitent-ils habilement les aveux de David
GREENGLASSS qui mettent en cause son propre beau-frère, Julius
ROSENBERG. Agent soviétique, ce dernier a agi pour des motifs
idéologiques. Comme il re fuse de parleer, le FBI imagine, afin qu’il
« craque », d’impliquer dans le dossier espionnage atomique sa femme,
Ethel, qui vient d’accoucher. Dramatique faux pas. Ethel a peut-être
aidé Julius mais aucune preuve matérielle ne l’établit. Or,
courageusement, elle refuse de se désolidariser de son mari. De jeune
femme un peu falote qu’elle était, voilà qu’elle se transforme en
véritable héroïne communiste. Pour avoir trop voulu en faire, le FBI
est dans l’impasse. Mais il est trop tard pour stopper l’engrenage
mortel. L’enjeu grossit avec la surrenchère soviétique. Pour "sauver
les ROSENBERG" (en fait, gagner la bataille de la propagande), Moscou
mobilise les gros bataillons au travers du COnseil mondial pour la
paix. Pétitions, manifestations, appels contribuen à présenter les
Etats-Unis comme en proie à l’antisémitisme, thème évidemment sensible
quelques années seulement après la chute d’HITLER. Condamné à mort, le
couple ROSENBERG meurt sur la chaise électrique le 19 juin 1953.
Pour préserver le secret nucléaire, une véritable chasse à l’espion
atomique se déchaîne dans un climat extrêmement tendu. Le symbole de
cette chasse aux sorcières fut incarné par le couple ROSENBERG. Après
le rejet de sept recours en grâce, malgré une opinion internationale
divisée, les ROSENBERG furent exécutés sur la chaise électrique dans la
prison de Sing-Sing en 1953
Un mois plus tard, l’armistice est signé en Corée. L’équilibre de la
terreur Est-Ouest instauré, chaque camp recrute ses informateurs en
arguant du fait qu’il ne doit en aucun cas être rompu en faveur de
l’adversaire sous peine de disparition de l’humanité tout entière.
Ainsi, Georges PAQUES, haut-fonctionnaire français au service du KGB,
restera-t-il persuadé jusqu’à sa mort, en décembre 1993, qu’il a
préservé le monde de la vitrification nucléaire. En sens inverse, et
avec une efficacité bien plus grande en ce qui concerne l’arme atomique
et son utilisation, le recrutement ddu colonel PENKOVSKY s’effectue
pour des raisons un peu similaires. Officier du GRU, membre du Comité
d’Etat pour la coordination de la recherche scientifique (en charge de
l’espionnage technologique), Oleg PENKOVSKY est un proche du maréchal
VARENTSOV, futur patron de l’artillerie et de la force balistique.
C’est de son propre chef qu’il entre en contact avec le MI6 britannique
par l’intermédiaire de Greville WYNNE, officiellement un simple homme
d’affaires en visite à Moscou. En avril 1961, PENKOVSKY est à Londres
tout à fait officiellement dans le cadre d’une délégation scientifique
et commerciale. Là, il rencontre les officiers de la CIA et du MI6 qui
superviseront désormais son travail. Et quel travail ! Une fantastique
navette commence entre l’officier soviétique et ses traitants.
PENKOVSKY (nom de code Arnika) fournira aux Occidentaux sous forme de
micro-films la bagatelle de 5000 pièces à conviction. Beaucoup d’entre
elles concernent l’état réel d’avancement des recherches soviétiques en
matière de missiles. Démasqué par le KGB, il sera condamné à mort et
exécuté le 16 mai 1963. Sa mort ne provoquera pas la même vague
d’indignation que celle des ROSENBERG dix ans plus tôt. Ce n’est pas
PENKOVSKY, mais des vols d’avions espion Loockeed U-2 qui ont appris
aux dirigeants américains la nature exacte des « remorques de camion » ou
des véhicules transportant « de très longs tubes » que plusieurs agents
de la CIA, soupçonnés dans un premier temps d’hallucination, ont répéré
à Cuba. Il s’agit bien entendu des missiles balistiques à moyenne
portée que KHROUCHTCHEV a accepté d’installer chez son allié CASTRO
tout en les gardant sous contrôle soviétique.
A l’heure de l’espionnage
Posées sur le bureau de John F. KENNEDY, les photos prises par les U-2
pousseront le président américain à décider le blocus maritime de Cuba,
bras de fer dont les Etats-Unis sortiront victorieux. Les avions
espions ne servent pas seulement à surveiller les progrès bucléaires du
bloc de l’est. Les sites d’expérimentation française qui sont installés
en Polynésie inquiètent Washington et, dès 1964, photographie sur
photographie sont prises des atolls de Mururoa ou de Fangataufa.
L’année suivante, en juillet, un RF-101 basé en Allemagne survole à
trois reprisses sans autorisation la zone interdite de Pierrelatte,
dans la Drôme, et prend la bagatelle de 175 photographies avant d’être
intercepté. D’autres moyens seront utilisés pour percer les secrets
nucléaires français, par exemple l’écoute des téléphones de l’ambassade
française à Londres par le contre-espionnage britannique dont les
procès-verbaux sont transmis à la CIA.
Le Canadien Mackenzie KING. En 1946, il est le premier à mesurer
l’ampleur des opérations d’espionnage menées par les SSoviétiques
durant la Deuxième Guerre Mondiale dans le but de s’approprier l’arme
nucléaire.
La Chine aussi succombe à la tentation de se doter de l’arme atomique.
Dès la naissance du nouveau régime, Mao ZEDONG charge Kang SHENG, le
chef des services secrets officiellement en disgrâce, et le président
de l’Académie des sciences Guo Moro, de cette tâche difficile. Piliers
de l’opération, deux anciens élèves du grand savant français Frédéric
JOLIOT-CURIE (le gendre de Pierre et Marie CURIE), Qian SANQIANG et sa
femme He CEHUI. Bien sûr, il faut ménager l’allié soviétique. Ainsi
convient-on de l’exploitation commune des gisements d’uranium du
Xinjiang, vaste région désertique occupée jusqu’en 1950 par l’armée
Rouge. En 1955, le directeur administratif du ministère de la Sécurité
publique, le Gonganbu, Zhuo XIONG, est nommé vice-ministre de la
Géologie. Il supervisera les camps de travail forcé où les condamnés du
Laogai, le Goulag chinois, extraient l’uranium ou bâtissent l’usine
atomique destinée à produire du plutonium 239. Pendant ce temps, Kang
SHENG mobilise ses réseaux pour rapatrier tous les scientifiques
procommunistes disponibles. La Chine populaire récupère ainsi le
physicien Wang GANSHANG, qui vivait aux USA, ou Qian XUESEN, l’un des
plus grands spécialistes mondiaux de l’aérodynamique (intercepté par le
FBI à Honolulu alors qu’il s’apprêtait à quitter le pays avec huit
grosses valises de documents, Qian XUESEN sera écgangé contre neuf
citoyens américains en 1955 et deviendra le bras droit de Qian
SANQIANG). Un deuxième physicien, Zhao ZHONGYAO, est rapatrié en 1951
après d’obscures négociations avec les Américains et les Taiwanais.
Plus la date fatidique approche, plus les services chinois s’activent.
Au début des années soixante, un millier de leur agents opère en Europe
dont le plus important est sans doute le troisième secrétaire
d’ambassade à Berne, Lin SHUHUA. Pour un résultat payant : le 16
octobre 1964, la Chine fait exploser sa première bombe atomique.
D’autres pays s’apprêtent déjà à faire leur entrée dans le club
nucléaire. C’est le cas d’Israël, que les Français ont beaucoup aidé en
matière atomique sous la IVème République. Son centre de recherches
ultra-secret de Dimona attire bien des convoitises. Celles de Mahmoud
KHALIL, chargé par Nasser des « Projets spéciaux de défense »
(fabrication d’armes modernes). Celles des Soviétiques qui, jusqu’en
1961, disposeront d’un agent particulièrement bien placé à cet égard,
Israël BEER, ami personnel du Premier ministre Ben GOURION. Celles des
Américains enfin. Dès le milieu des années soixante, la CIA informe la
Maison Blanche que l’Etat hébreu a la capacité de fabriquer la bombe.
C’est chose faite en 1966. Impitoyables pour préserver leurs secrets
nucléaires (kidnapping le 30 septembre 1986 à Rome de Mordechai VANUNU,
un technicien de Dimona qui a donné à la presse britannique des détails
sur le programme atomique israélien), les Israéliens le font aussi pour
retarder le programme des Irakiens : sabotage en avril 1979 à la
Seyne-sur-Mer des cuves de centrales nucléaires Tamuz 1 et 2,
bombardement le 7 juin 1981 du réacteur de recherches Osirak, fabriqué
en France. Le 22 mars 1990 à Bruxelles, le Mossad assassine l’ingénieur
Gerald BULL, qui travaillait Sur le projet de « super-canon » pour le
compte de Hussein MAJID, l’un des patrons des services spéciaux de
Saddam HUSSEIN en charge de l’espionnage technologique. BULL opérait
auparavant pour le compte des Sud-Africains, eux aussi dotés de la
bombe atomique. Recherche nucléaire et guerre secrète sont en effet
mitoynnes. Ainsi celle qui, à partir des années soixante-dix, oppose
dans l’ombre la Research & Analysis Wing indienne à l’Inter-Service
Intelligence pakistanaise, toutes deux acharnées à procurer l’arme
atomique à leurs pays respectifs. A cette époque, l’espionnage
nucléaire se répand de plus en plus hors du camp traditionnel
d’affrontement est-ouest même s’il en reste encore une donnée
importante (c’est en septembre 1992 qu’à été inculpé en France le
dernier en date des espions atomiques au service du KGB puis du SVR de
Boris ELTSINE découvert, un chercheur à la direction des applications
militaires du CEA). De ce fait l’effondrement du mur de Berlin et la
décomposition du bloc communiste marquent non pas la fin d’un demi-
siècle de guerre atomique secrète mais bel et bien son
approfondissement. La dissémination nucléaire, en particulier à partir
des pays de l’Est, multiplie les dangers qui menacent la planète en
même temps qu’elle complique la tâche des services de
contre-espionnage. Bref, pas question à l’approche du XXIème siècle de
rayer des tablettes le vocable « espions atomiques ».