Qu’attendre de la jacquerie grecque ?
Des émeutes ne font pas la révolution (européenne).
D’ailleurs, l’analyse d’Engels des jacqueries peut être encore opératoire. Les troubles paysans se caractérisaient par un manque de perspectives politiques et par un enracinement idéologique dans un substrat millénariste contenu dans la Bible. Nos émeutiers réagissent violemment en cassant les symboles de l’aliénation marchande (succursales banquières, magasins de luxe, antennes de ministères, supermarchés) et en pillant de ci de là, tout en manifestant, comme les émeutiers des banlieues françaises, inconsciemment peut-être, leurs frustrations de ne pouvoir consommer. Le cocktail Molotov remplace la fourche, mais il n’est qu’un objet rituel, qu’on exhibe comme le pétard de carnaval. On connaît le scénario par coeur : le système va récupérer le mouvement en agitant sa composante gauchère, avec des accents rhétoriques un peu plus appuyés. On ne réprimera pas trop en Europe, car on ne veut pas habituer à une violence dont on a perdu la saveur depuis des dizaines d’années (mai 68 était une fête de maternelle). On diabolisera un peu, par habitude, et tout semblera rentrer dans l’ordre.
Le système est encore assez fort pour contenir ce genre de soubresauts. Sa puissance provient en grande partie de la moraline néo-chrétienne qu’il a su insuffler dans les cerveaux. Tant que les Européens resteront attacher à des lubies bibliques, comme l’universalité, l’égalité, les droits de l’homme tous azimuts, ils resteront les mains liées, car c’est justement par cette idéologie que tient le système. Il faut ajouter que le vieillissement des pays occidentaux, et singulièrement de l’Europe et de la Russie, ne milite pas en faveur d’un soulèvement généralisé. Les Révolutions se font avec les jeunes, dans la fougue et l’enthousiasme des adolescents. Or, ces derniers, en passe de devenir moins nombreux que les vieillards, par mimétisme, en prennent toutes les tares, la pusillanimité, le repli sur des valeurs consensuelles, et ce ramollissement du cerveau (cette faiblesse de la cervelle, disait Rimbaud) qui a pour nom morale, laquelle rend confuse la réalité, et empêche de voir qui est le véritable ennemi.
Nous ne sommes donc pas près de sortir de ces flambées sporadiques. Il est probable, et il ne faut pas se faire d’illusions, que de semblables soulèvements vont se produire au fil des ans, à mesure que le système s’enfoncera dans la crise (il en sortira pour entrer dans une autre). Il se peut qu’il y ait une tentative de fédération, à l’échelle européenne, de ces mouvements qui se disent anarchistes (le terme cristallise bien l’absence de pensée). Mais cela n’ira pas bien loin : la mouvance écologiste a montré combien les bons sentiments aboutissent à l’impasse. Il ne faut pas rêver non plus : ces jeunes, bien conditionnés par les medias et leurs professeurs, ne nous rejoindront pas spontanément. Ils ont en horreur tout ce qu’on leur a désigné comme "fasciste", "raciste", "identitaire" etc. La seule solution proviendrait d’une aggravation spectaculaire de la situation, du sang et des larmes. Le système n’est pas si bête. Il est même prêt à faire entrer des représentants "anarchistes" dans ses cercles dirigeants, quitte à mette un peu d’huile radicale dans ses rouages.
Pour l’instant, le roi Arthur n’est pas en mesure de pointer le bout de sa barbe. Il faut être patient, et cela peut durer des dizaines d’années, le temps de redonner vie à des concepts plus proches de ce que doit être l’Europe. Cela demande un travail d’éducation, d’éclaircissement, d’expression, de persuasion. Il y aura des flux et des reflux. A mon sens, deux priorités s’imposent :
1) l’union à l’échelle continentale des forces identitaires et l’élaboration de buts communs ;
2) le rapprochement avec des forces eurasiatiques, notamment en Russie.
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