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Accueil du site > Tribune Libre > Quand l’anti-capitalisme devient rentable...

Quand l’anti-capitalisme devient rentable...

Nous vivons vraiment une époque formidable : en moins de trois ans, la lutte (ou l’éveil à cette lutte) contre l’hégémonie du capitalisme a fait de si grands bons que certains idéologues osent à nouveau parler d’un des plus grands sujets de société : le capitalisme.

Il faut dire qu’avec la multiplication des « affaires » rendues publiques, de Madoff à Kerviel, en passant par les paradis fiscaux, les parachutes dorées et autres bonus mirobolants, sans oublier madame Bettencourt et monsieur Woerth, le bouclier fiscal ou le renflouement des banques, nous avons de quoi réfléchir au point commun reliant toutes ces affaires les unes aux autres : l’argent.

On peut même voir à quel point les journaux, tous bords confondus, et les médias en général, puis les industriels leur emboitant le pas, surfent actuellement sur le sujet, à travers la conjugaison des deux problèmes essentiels de notre monde, c’est à dire l’état de la planète et le partage des richesses : aujourd’hui on nous vend du micro-crédit, de l’éthique, du durable et de l’équitable, du bio et de la décroissance (comme Leclerc qui nous vend le « zéro papier » en se déchargeant de la dépense “publicité papier”).

Mais le paradoxe de tout ça, c’est qu’au lieu de faire réfléchir les hommes sur ce que ces notions, leurs imbrications, leurs conséquences et leurs réalisations signifient, cette espèce de mode du « retour moral » anti-capitaliste devient peu à peu un marché comme les autres, c’est à dire axé sur la rentabilité.

Et c’est bien là toute la force du capitalisme, qui possède la capacité incroyable d’anéantir toute opposition à son fonctionnement par l’intégration de sa critique dans le système propre où s’effectue cette critique. En d’autres termes, critiquer le capitalisme revient à utiliser le capitalisme pour le dénoncer, ce qui rend cette critique sinon obsolète, au moins sujette à caution.

Ce fonctionnement est une spécificité du capitalisme, et nuit depuis son avènement aux luttes contre son hégémonie, car en définitive celui qui travaille contre en vient inévitablement à le servir, qu’il le veuille ou non. En effet, comment ne pas se soumettre à son pouvoir alors qu’il est tout puissant ? que l’on désire construire un logement, monter une association ou simplement vivre librement, tous les évènements de la vie, même les plus insignifiants, se retrouvent à un moment ou à un autre confrontés à la monnaie, que ce soit par le biais du marché ou celui de l’Etat ( par les impôts, les aides,…)

Cette impossibilité de faire sans le capitalisme résout définitivement la fameuse question de savoir s’il vaut mieux combattre le capitalisme de l’intérieur ou à l’extérieur, car en réalité peu importe, ou presque : il n’y a pas (ou plus ?) de “extérieur” au capitalisme.

C’est face à ce mur infranchissable que s’arrêtent la plupart des gens, qui finissent par se rendre, bon gré mal gré, à l’évidence de l’échec de la lutte. A moins que de vouloir se désocialiser totalement, voire mourir de faim, il vaut mieux coopérer. Et puisque l’heure est à la contestation sociale, alors vendons de la lutte, du social, et nous nous enrichirons. Lorsque nous serons riches, nous changerons d’avis sur notre lutte, en même temps que ceux qui y ont participé se désolidariseront de cette lutte. Il se sera fait alors une séparation d’intérêts, désormais divergents, qui fera entrer dans le giron capitaliste un adepte de plus. La lutte sera réduite à néant. Et le capitalisme aura encore gagné.

Caleb Irri

http://calebirri.unblog.fr


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13 réactions à cet article    


  • Jean-Pierre Llabrés Jean-Pierre Llabrés 11 octobre 2010 10:00

    "Et c’est bien là toute la force du capitalisme, qui possède la capacité incroyable d’anéantir toute opposition à son fonctionnement« 
     »Il n’y a que deux manières possibles pour combattre le système [capitaliste] :
    Le premier consiste à s’infiltrer à l’intérieur de l’actuel pour le faire changer, ou imploser.
    Le second mène ses attaques de l’extérieur pour le renverser, c’est à dire le faire exploser« .

    Il n’y a pas lieu de faire imploser ou exploser le capitalisme. Il est parfaitement possible de le faire changer, évoluer (ce qui n’a rien à voir avec son implosion). Pour y parvenir, Il convient de faire évoluer le Capitalisme »ordinaire« vers un Capitalisme intrinsèquement Écologique, Anthropocentrique, Philanthropique et Équitable grâce à l’instauration d’une Allocation Universelle transitoire suivie de la génération d’un Dividende Universel permanent et évolutif, »fonds de pension national et privé", sorte de coopérative-capitaliste, solidairement et collectivement géré par une structure spécifique, indépendante de l’État et représentative des citoyens-électeurs-contribuables qui résoudra le problème du chômage et permettra l’Acquisition Citoyenne du Pouvoir Économique.
    (cf.
    Mémoires présidentiels : 2012 - 2022)
    Un nanti capitaliste (monomaniaque & sans complexe).


    • Francis, agnotologue JL 11 octobre 2010 10:17

      Très bon article qui va dans le sens de ce que Frédéric Lordon décrit dans son ouvrage récent :et dont on peut se faire une idée . Frédéric Lordon nous y parle de servitude volontaire incontournable et fait un distingo subtil et pertient entre la servitude volontaire joyeuse et la servitude volontaire triste. Mais au fond, entre les deux, il semble que dans le capitalisme, la servitude joyeuse soit perspective la moins réjouissante des deux : « Nous n’avons encore rien vu de ce dont le capitalisme est capable » prévient-il.

      J’aimerais poster ici une citation qui va bien :

      Il faut prendre le slogan de la « moralisation du capitalisme » pour ce qu’il est : la rationalisation d’une croyance prise en défaut par les faits, et non pour une analyse scientifique des causes de la crise (…)le credo néolibéral n’existe pas seulement dans les têtes, loin s’en faut. Il existe aussi et surtout sous des formes institutionnalisées, encore plus résistantes au démenti empirique : espaces de négociation politique (OMC, Conseil européen), puissantes bureaucraties nationales et internationales (ministère des Finances, BCE, Commission européenne, etc.), règles sanctuarisées (Pacte de stabilité « et de croissance », principe de « concurrence libre et non faussée »), catégories objectivées (taux de non emploi, taux d’inflation, etc.), instruments d’action publique. »

      « La croyance s’affranchit très aisément du principe de non-contradiction » (Frédéric Pierru, La)

      L’objectif ultime des grandes sociétés qui forment le cœur du complexe (« complexe du capitalisme du désastre »), c’est d’introduire le modèle de gouvernement à but lucratif – qui progresse rapidement dans des circonstances extraordinaires – dans le fonctionnement ordinaire, au jour le jour, de l’Etat. Autrement dit, il s’agit de privatiser le gouvernement. ((Naomi Klein, « La stratégie du choc », page 22)


      • easy easy 11 octobre 2010 23:43


        En 1548, La Boétie avait écrit le Discours de la servitude volontaire.
        Il avait alors
        18 ans.



      • Francis, agnotologue JL 12 octobre 2010 09:14

        On sait, easy, on sait !


      • liberta 11 octobre 2010 10:55


        Pour ceux qui ne connaitrait pas l’action des «  »LES YES MEN REFONT LE MONDE«  » je recommande de voir le lien cidessous

        http://www.artehtml.tv/fr/Comprendre-le-monde/Les-Yes-Men-refont-le-monde/A-l-Antee/2825938nn.

        Ils proposent dans un film-documentaire les solutions et les bases du capitalisme démocratique 
        On peut se procurer le film à la FNAC mais en anglais


        • liberta 11 octobre 2010 11:02


          erreur sur le lien

          voici un résumé ici-------www.hns-info.net/spip.php ?article19276


        • zelectron zelectron 11 octobre 2010 11:44

          et la corruption ? vous ne croyez pas qu’elle est pire que le capitalisme, le gauchisme, le libéralisme et le communisme réunis en attentant que l’écologisme ne les rejoingne...


          • Scribouille 11 octobre 2010 13:17

            et la corruption ?

            Tout à fait d’accord avec vous, Zelectron, je crois bien que tout est là. Car elle s’insinue à tous les étages de la société, et jusque dans les plus nobles associations caritatives, cette gangrène de la corruptibilité, qui peut trouver plus insidieusement son terrain d’action dans le goût du pouvoir ou de la notoriété que dans celui, plus grossier et visible, de l’argent.
            Il n’y a qu’à constater comme elle œuvre assidûment depuis les plus antiques républiques et tentatives de démocraties pour s’en convaincre. Jusqu’au message christique qu’on voit détourné pour enrichir le Vatican ! C’est tellement facile de titiller le nerf de l’envie pour dissoudre les scrupules et obtenir un serviteur dévoué. Voire lui faire croire, à ce serviteur, qu’il œuvre pour la « bonne » cause.
            Comme le suggère cette réplique finale de Satan, dans L’Associé du diable : « La vanité est vraiment mon péché préféré ».
            La corruption ne serait-elle pas précisément le nerf, la condition même du capitalisme ?


          • zelectron zelectron 11 octobre 2010 16:21

            Oui, d’accord avec vous et puis le capitalisme vous tue en vous regardant dans les yeux, certaines doctrines politiques vous embrassent à vous étouffer, d’autres encore vous promettent la lune pour demain, demain, demain...
            En somme on peut se demander qui ne suce pas le sang du peuple ?

            (réponse : ceux qui ne briguent pas le pouvoir et ce n’est pas sûr non plus...)


          • Scribouille 11 octobre 2010 17:54

            (réponse : ceux qui ne briguent pas le pouvoir et ce n’est pas sûr non plus...)

            Justement, ceux qui ne briguent pas le pouvoir seraient peut-être ceux qui seraient le mieux à même de l’exercer. Mais allez savoir pourquoi, ça ne les branche pas ! Les milieux politiques ne semblent certes pas faits pour allécher les gens bêtement honnêtes et pacifiques !
            Gasp, sob, rhâââ, et toute cette sorte de choses !


          • Cogno2 11 octobre 2010 15:39

            Gelone est un âne d’une immense bêtise qui fait dans la provocation, rien de plus.


          • kemilein 11 octobre 2010 13:59

            c’est pas le capitalisme qui créer l’enrichissement et la croissance
            c’est la production et la création monétaire (finance des banques)


            • FYI FYI 12 octobre 2010 01:57

              Le capitalisme mourra de sa gangrène principale : la monnaie. Lorque le systeme subira la banqueroute universelle, les peuples n’auront plus confiance au régime, aux politards, aux lois etc ... et donc à l’argent.
              Les peuples, tous les peuples commenceront à comprendre que l’argent c’est le symbole de l’asservissement perpetuelle, une dette qui n’en fini pas et qui engendre la corruption, la polution, la misère car basée sur le profit immédiat etc... ainsi l’électrochoc de fin de confiance en ce système basé sur une « élite » de circonstance et parasitaire va engendrer une élévation de conscience basée sur une économie à la recherche de l’abondance et non sur la rareté comme maintenant.

              Pour mieux me comprendre voir ce documentaire très intéressant.

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