Quand Royal dézingue, ça chauffe !
Voilà que les bonnes pages du livre-entretien (est-ce vraiment un livre ce genre littéraire ?) de la sulfateuse du Poitou (nouveau surnom) avec pour complice François Degois (il faut le faire car si je ne m’abuse dégoiser n’est pas un mot étranger au contenu du livre) sont sorties dans Bakchich.info, puis le Nouvel Observateur et aussi Le Figaro. Bonne presse donc. Cela s’appelle Femme debout, chez Denoël (sortie le 5 février et non le 25 décembre).
![](http://www.agoravox.fr/local/cache-vignettes/L300xH401/449px-Meeting_Royal_2007_02_06_n11-edit1-a567d.jpg)
Il faut bien sûr prendre toutes les précautions d’usage. Ce livre (enfin ce dialogue imprimé) fait un nombre respectable de pages et ce ne sont que des extraits sortis de leur contexte et cela donne un concentré qui n’est pas forcément la teneur globale de l’opus. En attendant, pour ce que l’on peut en lire, notre Madone n’y va pas avec le dos de la cuillère comme l’on dit chez Bocuse. Elle sulfate à tous vents comme la souffleuse du Larousse, mais ce sont des obus de 45 qu’elle crache.
Tout le monde y a droit, et ce n’est pas de la petite bière. Enfin pour les extraits qui font la bonne bouche des lecteurs. Pour le moins on peut dire qu’elle n’a pas la langue dans sa poche et qu’elle est affûtée comme une dague damasquinée et vénitienne. Du peu que l’on peut en lire on découvre un langage direct, sans fioritures et massif. Là pas de détour, pas de mots à circonvolutions, de faux semblants. La cible qui est visée est atteinte sans détour.
Autant vous le dire tout de suite, lorsque Royal dégomme notre Kondukator, j’applaudis des deux mains. D’autant que lorsque l’on entend des Axel Poniatowski dire qu’avant c’était pareil mais hypocrite (comme le chef de l’Etat chef du parti majoritaire) et que le benêt de journaliste ne lui cite même pas l’exemple qui devrait lui clouer le bec jusqu’à la fin de ses jours, celui de Chirac président de la République et Sarkozy président de l’UMP qui est vraiment le contraire de l’UMP aux ordres du Président de la République. Il n’a pensé qu’à Juppé ce bon reporter, mordant comme tout. Tout comme il n’y a plus aucun président à l’UMP (c’est à mourir de rire) il y a un Premier Vice président. Elle est bonne celle-là et contraire aux statuts de l’UMP (L’équipe dirigeante de l’Union est composée du Président, du Vice-Président délégué et du Secrétaire général.) Et les godillots acceptent ! Alors si notre Sulfateuse prend son bazooka pour envoyer des scuds contre l’autocrate qui nous gouverne (lire ce petit précis de déplacement de préfet quand il déplaît au suzerain - ce qui s’ajoute à l’affaire corse -, et c’est vrai car c’est dans le Figaro), ce n’est par pour me déplaire. De plus je suis friand de ses phrases sur celui qu’elle a qualifié « d’imposteur, de menteur sans foi, ni loi » et moqué pour son « manque d’allure ».
Voilà quelques bordées :
« Quand il m’a reçue à l’Élysée, peu après la défaite, pour parler de l’Europe, je l’ai trouvé assez médiocre dans le comportement. Il n’y avait pas de hauteur, d’allure, d’élan, de fair-play. (...) Il était là, les bras ballants, à m’offrir des chocolats, à essayer de me faire parler de ma séparation d’avec François Hollande, à dauber sur des journalistes, à exhiber sa montre et à me dire qu’il était là mais qu’il aurait pu être ailleurs, à faire du fric », raconte-t-elle.
Mon petit commentaire pour l’occasion est que cela ne peut que conforter l’image du Mamamouchi qui s’est trouvé à la tête de la France par erreur et par mensonge. Chocolats, montres, affaires privées, critique. Petit en somme. Cette première baffe à la volée est suivie d’une autre assez drôle :
« Il est bien plus fade qu’on ne le croit. Sa force vitale est impressionnante, mais c’est vraiment un m’as-tu-vu (...) Un petit gamin heureux d’être au milieu de ses nouveaux jouets, vous savez, le môme qui a gagné le pompon sur le manège. Avec sa petite étoile de shérif et son pistolet en plastique, son déguisement de cow-boy », se moque Ségolène Royal. « Il est monté sur le plus grand cheval et il a décroché le pompon ».
Avec ça, elle ne va se faire des amis du côté du château. On connaît déjà l’argumentation, qu’à ma grande surprise Bakchich a reprise à son compte par son auteur : elle ferait n’importe quoi pour faire parler d’elle. Elle est aigrie. Elle a perdu et ne le sait pas. Elle se venge bassement. Et, mais là ce n’est peut-être pas infondé, elle fait exploser le compteur geiger de l’ego. Quoiqu’il en soit, qu’elle soit remerciée de ces coups d’estoc et de taille qui va faire monter la tension du Caput Capitis qui est à la tête de la destinée des pauvres de nous.
Du côté du PS, elle semble ne pas aimer la dame du nord (qui le lui rend bien). Cette dernière paraît bloquée sur son passé, lorsqu’elle était la chef de Ségolène. Bon, aujourd’hui elle est quand même la chef du PS. Et même si au premier tour de l’élection interne au Parti Socialiste, elle était derrière la Sulfateuse :
Elle [Aubry] « me regarde toujours comme quand j’étais sa sous-ministre. Elle le pense vraiment. Il y a eu une primaire, une campagne présidentielle, un score plus qu’honorable et je suis sa sous-ministre. Elle ne me regardera jamais autrement »
C’est sans doute pour faire bonne mesure que les journalistes considèrent qu’elle attaque aussi violemment Lionel Jospin que les autres - Avant de lui lancer une ultime salve, comme aux autres - alors qu’elle trouve qu’ « il a été un très grand premier ministre, il est très bon sur beaucoup de dossiers » et seulement qu’il « devient irrationnel sur le parti. Il mute et perd toute sa grandeur ». Vous avouerez que c’est bien peu par rapport aux qualificatifs western de la Lumière du monde.
Et bien moi je la trouve pertinente quand elle parle des éléphants : « la décomposition du PS, au fond, ils s’en moquent (...) Ils pensent que l’agonie sera tellement lente qu’ils ramasseront inévitablement la mise. »
Evidemment cela paraît n’être qu’une offensive tous azimuts où il peut apparaître quelques contradictions comme d’avoir eu Djack Lang pour conseiller quand elle en dit : « Je ne supporte pas les manipulateurs et les geignards... Le summum, c’est Jack Lang qui a instauré le harcèlement en stratégie de conquête. Dix, vingt, trente coups de fil, matin, midi et soir. On finit toujours par céder. Très efficace mais totalement insupportable »
Bon elle ne supporte pas Lang, comme elle en a marre des banques. Et là on la comprend.
Et bien évidemment, dans son ouvrage elle parle d’elle. C’est aussi fait un peu pour ça, non ? Malgré tout cela ne va pas arranger ses petits papiers après sa sortie sur Obama. Finalement, elle ne voit personne lui contester le leadership pour 2012. « S’il y en a un de meilleur que moi, qu’il y aille, je ferai même sa campagne. Mais pardon, pour le moment, je ne vois pas ».
Mais ce livre est aussi autre chose comme le montre l’Express qui ne prend pas le même biais que Le Figaro. Car on y lit aussi ceci :
Deux mois après la désignation de Martine Aubry au poste premier secrétaire du PS, au terme d’un vote des militants au résultat controversé, Ségolène Royal demeure convaincue qu’elle aurait dû l’emporter.
"Je continue à penser que je suis majoritaire", dit-elle. "Quelles que soient les circonstances de la désignation de Martine, je reste persuadée que j’avais la victoire au début de la nuit et qu’elle s’est volatilisée au petit matin".
Le soir du vote, raconte-t-elle, le premier secrétaire du PS François Hollande, son ancien compagnon, avait appelé son attachée de presse "en disant que la victoire était nette et incontestable".
"Je crois que c’est l’inversion des résultats, telle qu’elle s’est déroulée, qui a été le plus dur à vivre", ajoute-t-elle.
Quels que soient ses défauts, son ambition (montrez moi un seul homme politique (homme ou femme bien entendu) qui n’ait aucune ambition, le tout est une question de degré et de coïncidence ou non avec les intérêts supérieurs de la nation) qui apparaît bien disproportionnée, elle a du courage (ce qui m’a foi n’est pas non plus étrange), sans doute beaucoup plus que Sarkoko et ses gardes du corps, ses tireurs d’élites et ses CRS. Et moi j’aime bien quand cela vole non pas bas - car tous les coups ici ne sont pas sous la ceinture - mais vite et fort, que ça rentre dans le lard. Sans doute cette prose ne va-t-elle arranger les bidons des royalistes au sein du PS, mais qui sait, sa ténacité aura peut-être raison après tout.
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