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Accueil du site > Tribune Libre > Que plus jamais de sang n’abreuve nos trottoirs

Que plus jamais de sang n’abreuve nos trottoirs

Pas envie d’y croire, d’abord. Entendre des chiffres gonfler. S’inquiéter pour les autres, s’inquiéter des rumeurs, s’inquiéter pour soi-même.

Pas envie d’avoir peur, mais sentir son sang se glacer. Face à une kalachnikov, on ne pèse pas bien lourd.

En vie, par hasard. Pourquoi lui ? Pourquoi elle ? Pourquoi pas moi ? Ça ne tient à rien. À un quartier, plutôt qu’un autre.

Envie de pleurer.

Envie de leur cracher à la gueule. C’est humain mais ça ne mène nulle part. Pitié, pas de représailles aveugles.

Envie de se taire. Se recueillir au son du silence.

Envie de chanter, ensuite. Des paroles qui ont une résonance particulière.

Avec Brassens, pour Paris :
"Ses fluctuat nec mergitur, ce s’ra pas d’la littérature,
N’en déplaise aux jeteurs de sort, aux jeteurs de sort."

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© Seth

Avec Ferré, pour Paname :
"Si tu souriais, j’aurais ton charme,
Si tu pleurais, j’aurais tes larmes,
Si on t’frappait, j’prendrais les armes."

Même la Marseillaise, en modifiant juste son dernier vers :
"Que plus jamais de sang n’abreuve nos trottoirs."

Être à fleur de peau. Sursauter au premier bruit suspect. Pleurer de rire pour n’importe quelle bêtise (ma préférée : "Il faut pas qu’ils oublient qu’on a fait la JAPD").

Besoin d’écrire. Des mots. Juste des mots. Sans longues phrases chaloupées. Pas la force.

Pas envie de leur répondre. Même pas envie de les nommer.

Pas envie de géopolitique de comptoir, d’histoire du terrorisme pour les nuls ou de polémiques politiciennes.

Pas envie non plus de s’enorgueillir de notre liberté de vivre comme on l’entend. Certains le font très bien. Ça ne fera que réconforter ceux qui sont déjà convaincus. C’est déjà beaucoup.

Envie de penser aux autres, ceux qui ne se reconnaissent pas dans cette France, ceux qui n’étaient pas Charlie et qui ont pu se sentir visés par les attaques, ceux qui vont être regardés de travers dans les prochains mois, ceux qui balancent entre deux camps et qui basculeront un jour d’un côté ou de l’autre.

Envie de peser sur la balance. Parfois, ça ne tient qu’à un détail. Un regard. Une main tendue. Une transcendance trouvée dans je-ne-sais-quoi des choses de la vie. Un "eux" transformé en "nous". L’alliance du glaive et de la plume, dans les cités, dans les écoles, dans les prisons, dans les mosquées, sur internet, partout. Tenter de ne pas les perdre, par tous les moyens. Échouer, souvent, puis recommencer. Ne jamais renoncer.

Pas envie de céder à la compassion sélective. Que ça se passe à Paris, Beyrouth, Abuja ou New York, on est tous dans le même bateau battu par les flots.

Envie de croire qu’il ne sombrera pas. Bien sûr, du sang va couler à nouveau. Il n’y a aucune raison d’être optimiste. C’est justement pour ça qu’il faut l’être.


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2 réactions à cet article    


  • soi même 25 novembre 2015 15:58

    Veux Pieux de Don Quichotte de la Mancha ... !

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