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Que reste-t-il du « Maroc hospitalier » ?

Du Maroc hospitalier, des Marocains accueillants… il ne reste plus grand-chose. Et là où des foyers hospitaliers persistent encore, les gens sont accueillants plus par superstition que par charité, gentillesse ou bonté.

Du Maroc hospitalier, des Marocains accueillants… il ne reste plus grand-chose. Et là où des foyers hospitaliers persistent encore, les gens sont accueillants plus par superstition que par charité, gentillesse ou bonté. Mais, et c’est vrai, quelques familles et individus font encore de la résistance à l’air du temps en acceptant de nourrir ou d’héberger un étranger local ou extérieur pour plusieurs jours sans contrepartie et même si les conditions matérielles ne le permettent pas. Ces spécimens en voie de disparition ne sont pas toujours les plus aisés. La tradition de l’hospitalité est devenue l’un des attributs du Maroc comme la sardine, les phosphates, la tomate ou l’orange. C’est désormais une carte postale tout ça… Une image haute en couleur à l’adresse des touristes étrangers ! Visiteurs d’outre mer qui sont toujours les bienvenus pour l’Etat comme pour l’habitant. Des familles marocaines indigentes ou aisées prêtes à recevoir tout sourire un touriste ou un groupe de touristes chez elles se comptent par centaines de milliers. Et il y a de quoi. Pour les riches, le touriste d’ailleurs représente la civilisation, l’assurance, le bon et savoir vivre, qualités qui font défaut chez leurs compatriotes sans le sou. Pour les pauvres, le visiteur aux chevaux blonds, c’est l’espoir d’une vie meilleurr, une carte de séjour mobile et personnifiée qu’il est bon de côtoyer. Comme si l’aisance et le bien-être sont contagieux par promiscuité. Les inondations sans précédent de mémoire d’un sexagénaire qui ont sinistré le sud du Maroc la semaine dernière, en faisant une cinquantaine de morts et plusieurs centaines de routes, ponts et maisons détruites, ont été encore une fois l’occasion pour tester le « coefficient hospitalier » du Marocain. Déplorable. Des milliers de villageois encerclés par les eaux ou coupés du monde par les crus ont été surpris de voir leurs compatriotes, mieux lotis, tenter de les enfoncer davantage plutôt que de les secourir. Le kilo de tomate a atteint 20 dirhams (2 euros) au lieu de deux dirhams dans les ragions non touchées par les intempéries. De même la galette de pain sec, de farine ordinaire et pesant moins de 100 grammes leur a été proposée par opportunistes charognards à des prix variant entre 10 et 15 dirhams, au lieu de 1 dirham en temps normaux. Tout ça sous les yeux bienveillants des autorités dépassées par les évènements. Alors que les touristes occidentaux, surpris par les fortes averses, quand ils n’ont pas été secourus et évacués illico par hélico ont été hébergés par les habitants à l’abri des crus. Quelle discrimination diraient certains ! D’autres parleront d’auto-xénophobie. Peu importe. Le pays a beaucoup changé depuis ces 20 dernières années. Dans le mauvais sens. Le sens du matérialisme, de l’occidentalisme, de l’individualisme, purs et durs. Bêtes et méchants. Au point que certains hôpitaux refusent de prêter assistance à des malades désargentés (*) Néanmoins, ce changement dans la tradition hospitalière marocaine ne date pas vraiment des deux dernières décennies. Ses racines plongent au début du siècle précédent. Le fait que le changement ne soit plus visible et perceptible que depuis le milieu des années 1990 est dû au fait que les mauvaises graines semées n’ont germé que près d’un siècle plus tard. Durant près de 100 ans, le patriotisme et le nationalisme des générations disparues ont bloqué la germination de ces graines qui ont introduit ce que d’aucuns nomment les « vices de l’Occident ». Un fait évoqué dans Discours royal à l’adresse de la 69e assemblée générale de l’ONU. « (…) Le colonialisme a causé de grands préjudices aux Etats qui en ont subi la tutelle. Le colonisateur y a entravé le processus de développement pendant de longues années. Il a exploité leurs richesses et les potentialités de leurs enfants, tout en altérant en profondeur les coutumes et les cultures respectives de leurs peuples. Il a instillé les ferments de la division entre les composantes d’un même peuple, et planté les germes du conflit et de la discorde entre les Etats du voisinage(…) », est-il souligné dans ledit Discours.

 

(*) Un exemple parmi des dizaines d’autres similaires. Mais Dieu merci ! dans les hôpitaux publics comme dans les cliniques privés la gangrène de l'appât du gain n'a pas atteint tout le monde : des milliers de toubibs et d'infirmiers s'acquittent merveilleusement et vaillamment de leur devoir.

http://chankou.over-blog.com/2014/12/que-reste-t-il-du-maroc-hospitalier.html


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15 réactions à cet article    


  • Txotxock Txotxock 9 décembre 2014 12:53

    Que dire de cette plaie du monde qu’est le tourisme ?


    • Surya Surya 9 décembre 2014 17:10

      Ce sens de l’hospitalité qui décroit pourrait-il être dû, en partie, en grande partie, ou en totalité, au comportement de certains touristes qui prendraient un peu trop pour argent comptant une hospitalité qui ne demande rien en retour ? Il est si facile de débarquer dans un pays dont on sait que les habitants offrent l’hospitalité sans contrepartie, se faire inviter puisque c’est la coutume, et prendre, et prendre encore, sans rien offrir en retour... 

      Combien de ces touristes ont ensuite rendu la pareille en invitant chez eux ces familles marocaines qui les avaient si bien reçus ?
      Je me pose cette question car lorsqu’on voit le comportement de certains touristes, on ne peut s’empêcher de se la poser, même s’il ne faut jamais mettre tout le monde dans le même panier évidemment. 
      Plus généralement, j’ai l’impression que le monde dans son ensemble est en train de devenir plus fermé, plus replié sur lui-même. 

      • Abdelkarim Chankou Abdelkarim Chankou 10 décembre 2014 00:02

        Malheureusement oui ! Et certains touristes, une minorité, se sentent en terrain conquis et abusent
        de l’« hospitalité » d’habitants vivant dans le besoin et qui ont honte de demander une petite contrepartie


      • Emmanuel Aguéra Emmanuel Aguéra 10 décembre 2014 01:51

        Famille : néocolonialisme, Abdel.
        Branche : Tourisme,
        Pretexte : Variable, culture, humanitarisme, ethnologie...
        Spécialité : Variable, exotisme, sexe, 4x4 « écolo », etc...
        Inconvénient majeur : misère difficile à ignorer, mais avec de l’entrainement on y arrive,
        Avantage : police efficace, peu d’égorgeurs, niveau de sécurité tout à fait acceptable.
        Problème : des arabes partout.
        Je ne pense pas être loin de la vérité, qu’on me pardonne. Et c’est même la raison qui m’empêche de visiter ce pays, pourtant la terre natale de mes parents...


      • Philippe VINSONNEAU Philippe VINSONNEAU 9 décembre 2014 17:16

        l’accueil avec le sourire a disparu depuis avant 1985. Si le rite s’est maintenu c’était avec l’hypocrite intention soit d’obtenir un aller pour la France pour la fille, le fils le cousin.. soit de vous attendre l’année suivante en vous remettant la liste des cadeaux a rapporter et pas des moindres... Depuis presque une dizaine d’années c’est carrément l’indifférence, une population attablée devant les chaines étasuniennes captées par la parabole, des mac do dans les grandes villes ( certes hallal... mais bon un gros pain gras sucré reste toujours un gros pain gras sucré ) les jeunes sont dans la mondialisation, ils veulent ressembler à des teens yankees, bref ils ont été cancérisés par le libéral capitalisme. Peu à peu ce cancer ronge d’ailleurs toute la planète et détruit une à une les cultures, standardise le quotidien avec la sale arrière pensée d’exploiter et d’enrichir plus encore ceux qui le sont honteusement trop


        • Abdelkarim Chankou Abdelkarim Chankou 10 décembre 2014 00:05

          Assez d’accord avec vous Philippe VINSONNEAU ! Les valeurs partent les voleurs restent.


        • cedricx cedricx 9 décembre 2014 18:41

          La bonne blague que cet article ! Le bon peuple serait coupable de manque de compassion envers son prochain, et l’état marocain qu’a-t-il fait pour les sinistrés ?jusqu’à dernièrement il n’a pas décrété l’état de catastrophe naturelle, les populations durement touchées sont complètement abandonnées à leur sort, il est vrai qu’on est loin des circuits touristiques pour étrangers (vous vous trompez si vous imaginez que les touristes se font des illusions sur l’hospitalité marocaine !) 



          • Vipère Vipère 9 décembre 2014 19:30


            Abdelkarim

            Vous ne me surprenez pas du tout ! partout dans le maghreb, l’hospitalité de l’étranger s’est perdu... comme si l’occident avait déteint sur ces pays chaleureux, on le regrette et déplore ces valeurs perdues.

            Un ami marocian m’avait dit, il y a trente ans que nous en arriverions à ce stade et que l’argent allait tout détruire, je ne l’ai pas crû, à cette époque, il n’y avait aucun des signes alarmants tels que la crises des subprimes, le chômage de masse, l’Europe de la conccurence etc..


            •  Mohamed Takadoum M Takadoum alias Bouliq. 9 décembre 2014 22:17

               « Le kilo de tomate a atteint 20 dirhams (2 euros) au lieu de deux dirhams dans les ragions non touchées par les intempéries ». 


              Vous voulez dire les régions touchés parceque pour le srégions non touchés la tomate est toujours en moyenne à 4 et 5 dh et la gallette de pain à 1,20DH

              • Abdelkarim Chankou Abdelkarim Chankou 10 décembre 2014 00:08

                A peu près oui !


              • Emmanuel Aguéra Emmanuel Aguéra 9 décembre 2014 23:24

                Bravo et merci. Article instructif et... courageux. 100% d’accord. Je vous plante un lien sur mon facebook.


                • Abdelkarim Chankou Abdelkarim Chankou 10 décembre 2014 00:09

                  Merci Emmanuel


                • Emmanuel Aguéra Emmanuel Aguéra 10 décembre 2014 01:54

                  Pas de quoi Abdel, votre lucidité mérite plus que mon soutien smiley


                • dixneuf 11 décembre 2014 11:21

                  «  Le colonisateur y a entravé le processus de développement »

                  On le voit bien en Algérie, depuis le départ des pieds noirs le pays bénéficie d’une prospérité qui ne doit rien au pétrole.

                  • Abdelkarim Chankou Abdelkarim Chankou 12 décembre 2014 02:02

                    @ 19 : Le colonisateur français au Maroc (1912-1956) n’a pas été le même pendant ces 44 ans, entre 1938 et 1944, la résidence générale était vichytiste. Raciste et brutale elle ne pensant qu’à soutenir l’effort de guerre du gouvernement de Vichy en puisant sans retenue dans les richesses minières et agricoles du Maroc qu’elle expédiaient en France de Vichy. Des familles de notables Marocains collabos ont été propulsé à des postes administratifs importants où leurs rôle était de mater les récalcitrants... Alors que ces familles collabos vivaient dans l’aisance, le gros du bataillon crevait de faim, de froid et de maladies mortelles. Cependant je ne dis pas que la présence française a été totalement négative. Des routes, des villes, des chemins de fer, des hôpitaux, des fermes, des écoles, des barrages... ont été construits. Mais ces infrastructures dont a profité le Maroc après son indépendance (négociée à Aix-les-Bains) étaient destinée avant tout à servir les colons français et à la France métropolitaine.
                    Moi même qui qui neveu d’un soldat qui a participé à la compagnie d’Alsace où il a été blessé au pied par un éclat de mine et qui a survécu jusqu’à sa mort il y a 10 ans avec un pension d’invalidité de 15 euros par mois !, moi même qui qui suis petit fils d’un chef d d’une commune du Sud-est marocain sous l’occupation , j’en sais quelque chose.

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