Quel avenir pour les transports électriques ?
Le développement des véhicules électriques est inéluctable. Pourtant, une question d’importance demeure : à quel rythme ? Investir massivement dans les véhicules mais aussi dans les routes et le déploiement des bornes de recharge parait incontournable dans l’optique d’obtenir des résultats tangibles et rapides dans la lutte contre la pollution et le changement climatique. Or, aujourd’hui, les moyens réellement consentis par le gouvernement ne semblent pas à la hauteur de cet enjeu.
Sur le papier, la mobilisation est forte. La loi du 24 décembre 2019 d’orientation des mobilités réforme en profondeur le cadre général des politiques de mobilité pour intégrer les enjeux environnementaux. Sortir de la dépendance automobile, accélérer la croissance des nouvelles mobilités, réussir la transition écologique et programmer les investissements dans les infrastructures de transport : tels sont les objectifs affichés. La loi prévoit l’interdiction d’ici 2040 des ventes de voitures à énergies fossiles carbonées (essence ou diesel). Elle favorise le déploiement des véhicules électriques et fixe l’objectif de 100.000 bornes de recharges publiques d’ici fin 2022 – une échéance qui a même été avancée à fin 2021 par le gouvernement après la promulgation de la loi.
Véhicules électriques : la technologie écologique la plus aboutie
Aujourd’hui, en attendant que l’hydrogène prenne éventuellement le relais, les véhicules électriques s’imposent en effet pour les trajets routiers comme la solution de mobilité la plus écologique et la plus compatible avec les objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre pour lutter contre le réchauffement climatique.
Une enquête récente, réalisée par l’ONG bruxelloise Transport & Environnement (T&E), vient d’ailleurs de montrer à quel point les voitures électriques polluent moins, tout au long de leur vie, que les voitures essence et diesel. Cette étude confirme d’abord que les voitures électriques utilisent 58 % moins d’énergie que les voitures thermiques et émettent, tous coûts inclus, 64 % de CO2 en moins. Mais elle tord surtout le coup à une idée reçue, véhiculée par certains lobbies, selon laquelle la consommation en matières premières de la batterie des véhicules électriques en ferait un mal pire que ses homologues à moteur thermique.
Environ 30 kg de métaux sont perdus au cours du cycle de vie de la batterie lithium-ion, contre 17.000 litres de pétrole pour les véhicules thermiques, selon les calculs de T&E. Certes, la production de batteries occasionne à court terme un accroissement des extractions de lithium, de cobalt et de nickel, mais l’utilisation plus importante de ces métaux a un coût écologique moins élevé que l’extraction du pétrole. D’autant que, selon l’ONG, les progrès technologiques permettront de réduire de moitié la quantité de lithium requise pour fabriquer une batterie... Et en 2035, plus d’un cinquième du lithium et du nickel et près des deux tiers du cobalt nécessaires à la fabrication d’une nouvelle batterie pourraient provenir du recyclage.
Booster le déploiement des bornes de recharge électrique
Aujourd’hui, les ventes de véhicules électriques s’envolent, notamment sous l’effet des primes à l’achat. D’après une étude réalisée par l’Union française de l’électricité (UFE), la France comptait fin décembre 2020 un total de près de 450.000 véhicules électriques et hybrides rechargeables en circulation sur les routes, dont près de 200.000 ont été immatriculés en 2020. A ce rythme, le parc automobile français de véhicules électriques et hybrides rechargeables pourrait atteindre le million d’unités en 2022. Mais pour que les véhicules électriques deviennent la norme, il faut que les infrastructures de recharge suivent. Or, la France comptait moins de 35.000 points de recharge fin décembre 2020. Bien loin de l’objectif des 100.000 bornes visé fin 2021.
Certes, une nouvelle enveloppe de 100 M€ a été débloquée par Barbara Pompili et Jean-Baptiste Djebbari, les ministres respectivement en charge de la Transition énergétique et des Transports, dans le cadre du programme Advenir, pour équiper les villes. Une enveloppe de 100 M€ a également été mobilisée pour installer des bornes de recharge rapide sur les aires de service du réseau d’autoroutes et des routes nationales. Mais ces investissements semblent largement insuffisants au regard du chantier colossal qui se présente.
Or, l’équipement des routes en bornes de recharge est essentiel pour le développement de la mobilité électrique. Aujourd’hui, malgré le développement de la mobilité douce dans les villes, 74 % des déplacements domicile-travail s’effectuent encore en voiture. Même pour les distances inférieures à cinq kilomètres, la voiture représente encore 60 % des déplacements. Et pour les longs trajets, utiliser un véhicule électrique reste aujourd’hui un pari très risqué du fait de l’incapacité à effectuer le plein d’électricité en itinérance.
D’après l’UFE, 85 % des propriétaires de véhicules électriques ont déjà rencontré une borne en panne et 83 % ont fait face au moins une fois à un défaut de recharge. Bornes mal entretenues, faibles puissances des points de recharge installés avant 2017 (qui représentent encore la moitié du réseau), grands « vides » dans le maillage territorial… La situation actuelle appellerait une action publique plus énergique et des moyens beaucoup plus conséquents que ceux qui ont été réellement consentis derrière les effets d’annonce.
Le défi est immense d’autant que parallèlement, il s’agit de préparer l’avenir en développant la technologie hydrogène qui ne manque pas d’atouts pour s’imposer dans le futur. Les modèles alimentés par une pile à combustible ont en effet une autonomie de 500 ou 700 kilomètres, et leur ravitaillement ne prend que quelques minutes. Ils peuvent ainsi s’affranchir d’un réseau public tardant à se constituer. Selon l’Association française pour l’hydrogène et les piles à combustible (Afhypac), 400 véhicules légers hydrogène circuleraient aujourd’hui en France. Et dans le monde, 15 000 à 18 000 voitures et camionnettes et 3 000 autobus à hydrogène seraient déjà sur les routes. Aujourd’hui, les coûts encore très élevés et le bilan environnemental posent encore problème, mais les professionnels annoncent l’arrivée prochaine d’un hydrogène vert à prix compétitif et une baisse des coûts de la pile à combustible et du réservoir, qui devraient aider l’hydrogène à prendre son envol. C’est donc aussi sur cette énergie que mise un acteur de la route aussi important que Vinci Autoroutes. Le société concessionnaire d’autoroutes « se tient prêt à déployer des stations hydrogènes » et a par ailleurs répondu à un appel à manifestation d’intérêt (en s’associant à l’Agence Régionale Energie Climat de la Région Occitanie) pour construire et exploiter une station hydrogène vert près de Toulouse. Les initiatives privées commencent à fleurir, mais il est vrai que beaucoup dépendra de la mobilisation de l’État.
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