Quel avenir pour LREM et les Verts, récents phénomènes politiques « disruptifs » ?
Si en ce début d’année, toute l’attention de la vie politique Française se concentre sur la pandémie du Covid-19, on peut s’interroger sur le devenir de ces phénomènes « disruptifs » qui ont marqué la présidentielle de 2017 avec Emmanuel Macron et LREM, ou à un degré moindre les Municipales de 2020 avec les Verts ?
Pour LREM le phénomène « disruptif » de 2017 serait-il à ranger dans les placards de l’histoire ?
Au vu de l’évolution de la vie politique du parti Présidentiel LREM, on ne peut pas dire que le phénomène « disruptif » qui avait maqué la présidentielle de 2017, avec en final l’élection d’Emmanuel Macron, ait atteint ses objectifs, par rapport aux ambitions qui étaient les siennes.
Ce qui a créé les conditions permettant le phénomène « disruptif » d’Emmanuel Macron aux présidentielles de 2017, comme à un degré moindre celui de Mélenchon avec la FI à gauche, résultait essentiellement d’un raz le bol et d’un rejet de la classe politique traditionnelle, à cause, notamment, toutes les « affaires » qui ont marqué pendant des décennies, tant la gauche PC-PS que la droite UDI-LR, voire le RN, même si le populisme qui caractérise ce parti les a occulté. Le problème pour LREM, c’est qu’en son sein les vieux démons qui hantaient les partis politiques traditionnels n’ont pas disparu, si on se réfère au nombre de ministres ou députés contre lesquels des procédures pénales ont été ou sont engagées.
Des « bourdes » verbales Présidentielles qui occultèrent les bonnes mesures et creusèrent un peu plus l’écart, entre LREM et une partie de l’opinion, dont ses électeurs
On ne peut pas dire que les déclarations et les choix idéologiques de l’économie libérale au début du mandat d’Emmanuel Macron aient servi de support promotionnel à LREM. Avec des citations telles : « les premiers de cordée » sous entendu, les privilèges dont certains très riches bénéficiaient, voire abusaient, c’était normal et justifiait, par exemple, la suppression de l’impôt sur la fortune (ISF), alors que l’impôt sur la fortune immobilière (IFI) qui le remplaçait pouvait concerner des personnes peu fortunées. La déclaration : « ceux qui ne sont rien », fut ressenti comme un mépris des citoyens et ceux qui n’étaient rien ont voulu être quelque chose où plus exactement « quelqu’un » en se dotant d’un « gilet jaune » pour invertir rues et ronds points, parfois de façon violente…Sans oublier la remarque faite à un jeune : « pour trouver du travail, vous n’avez qu’à traverser la rue », ou la gestion catastrophique de l’affaire « Benalla »...
La situation de LREM auprès des citoyens est telle aujourd’hui que que les bonnes mesures prises semblent totalement oubliées : suppression de la taxe d’habitation, abandon de projets inutiles, coûteux et destructeur de l’environnement comme l’aéroport de Notre Dame des Landes, arrêt du projet minier « Montagne d’or en Guyane, Europacity, ce méga complexe de loisirs et de commerces à Gonesse, à 15 kilomètres au nord de Paris, l’autoroute A45 St. Etienne-Lyon, ou la mise en place de débats citoyens nationaux, ainsi que la convention citoyenne pour le climat ( bien qu’elle « patine », avec une cinquantaine de propositions retenues sur 146 )
Entre réformes controversées, votes de contestation, échec aux municipales et tribulation de sa vie parlementaire où des députés se mettent en dissidence, mauvais temps pour LREM
On se souvient de la réforme de la SNCF ou celle des retraite qui fut suspendue pour cause de Covid-19. Résultant d’erreurs évidentes de pédagogie et de concertations préalables, elles avaient mis des centaines de milliers de personnes dans la rue, ce qui n’en doutons pas eût un impact sur les municipales.
Lorsque l'Assemblée nationale a approuvé en juillet 2019 la ratification du très controversé traité de libre-échange entre l'Union européenne et le Canada (Ceta), par 266 voix contre 213, et 74 abstentions, ce fut un record de contestations au sein du groupe LREM. Si la majorité des députés LREM a voté pour, 52 se sont abstenus et surtout 9 ont voté contre le texte.
Un texte n'avait jamais généré autant de contestations au sein de la majorité présidentielle. Bien que le scrutin sur la proposition de loi « anticasseurs », début février 2019, ait donné lieu à cinquante abstentions, aucun élu LREM n'avait voté contre. Et que dire aussi des articles 22 et 24 de l’actuel projet de loi « sécurité globale » qui sont loin de faire l’unanimité au sein du parti et contre lesquels de nombreuses manifestation ont cours.
L’espoir semble désormais vain pour LREM d’être une force politique nationale à tous les niveaux du territoire, les élections municipales le confirmèrent
LREM espérait ne pas être simplement une force nationale servant « d’écurie présidentielle » à Emmanuel Macron, mais devenir peu à peu une force politique présente dans les territoires (régions, départements, communes), au plus près des électeurs. Par rapport aux scores tout à fait impressionnants qu’Emmanuel Macron avait pu réaliser dans les grandes métropoles, en particulier dans ces grandes métropoles, que ce soit Paris, Lyon, Marseille, là aux municipales, ce fut un échec et parfois même un échec qui a tourné presque à l'humiliation.
Lorsque LREM s'en tire, c'est par une stratégie classique d’accord politiciens. Soit, elle s'est associée assez souvent avec la droite et parfois avec la gauche. Si elle a pu réussir à obtenir des postes de conseillers municipaux, c’est quand elle était associée à la droite le plus souvent, ou éventuellement à la gauche.
LREM a aussi un réel problème avec les territoires, mauvaise augure pour les élections régionales et départementales
En tant que force autonome, au fond, trois ans et demi après la victoire d'Emmanuel Macron, c'est un véritable échec. Ce parti, beaucoup plus que d'autres partis présidentiels dans le passé, a un véritable problème avec les territoires et plus généralement avec une partie importante des citoyens. Dans les faits, c'est un parti qui aura des difficultés en 2021. En particulier avec le scrutin départemental qui reste un scrutin important dans des territoires très traditionnels que sont les cantons.
LREM peut espérer trouver un espace aux régionales, car aux régionales, il y a une dimension un peu plus nationale et la circonscription est aussi plus large, ainsi que le mode de scrutin proportionnel avec un correctif majoritaire. Il peut donc y avoir en effet une capacité pour LREM d’exister. Mais de là à pouvoir prétendre emporter telle ou telle région, même des régions très urbanisées, c'est un projet qui semble difficile à satisfaire aujourd'hui. Ce parti, par son fonctionnement interne et sans réelle originalité idéologique est aujourd’hui particulièrement affaibli. Le phénomène « disruptif » LREM qui a caractérisé l’élection présidentielle de 2017 risque ainsi d’être qu’un souvenir de l’histoire politique Française .
Créé par et pour Emmanuel Macron, ce parti ne peut survivre sans lui
En cas de refus de se représenter aux Présidentielles ou en cas d’échec d’Emmanuel Macron, voire son retrait de la vie politique, l’existence même de LREM est compromise. Dans un passé assez récent, tous les partis politiques ou mouvements qui se sont constitués autour d’un présidentiable comme « écurie présidentielle », parfois sans réelle originalité idéologique n’ont pas vraiment survécu lorsque leur champion se retirait de la scène politique ( Mouvement pour la France De Villiers, Mouvement des citoyens de Chevènement et demain il en sera de même pour Dupont-Aygnan et Mélenchon )
L’autre phénomène « disruptif » de la vie politique Française fut Les Verts et l’environnement lors des municipales 2020, phénomène durable ou éphémère ?
Grâce à ses alliances avec les partis de gauche, FI, PC, PS, autres divers, EELV a raflé la mise lors des élections municipales marquées par un tsunami abstentionniste. Mais, on peut considérer qu’il y a eût un phénomène « disruptif » Vert dès lors que EELV a souvent devancé ses partenaires de gauche au premier tour et pris le contrôle de grandes villes.
Nul doute qu’il y eût un phénomène de vase communicant entre le PS et EELV, avec report des voix du PS sur les Verts ce qui permit très souvent à EELV d’arriver en tête dès le premier tour des élections, devançant parfois très largement leurs partenaires de gauche, comme à Lyon.
Indépendamment des divisions ou parfois règlement de compte au sein des partis traditionnels, y compris LREM comme à Lyon, ceci s’explique avant tout par la mobilisation de l’électorat « Verts » qui est un électorat plus militant, du moins beaucoup plus sensible aux questions d’environnement avec l’impact de certaines activités humaines et qui se déplace plus facilement au bureau de vote, contrairement aux autres électorats de partis souvent divisés qui y sont moins sensibles et se sont donc moins mobilisés. Au premier et au second tour de cette élection municipale c’est plus un électorat populaire qui vote traditionnellement à gauche ou à droite qui a fait défaut, soit par crainte de l’épidémie Covid-19, ou considérant qu’il y aurait forcément un second tour, et au second tour parce que ceux qui restaient ou les fusions ne leur convenaient pas, voire pour d’autres raisons … Mais à cette élection municipale on ne peut nier que pour l’électorat qui s’est déplacé vers les urnes, la question environnementale a bien été l’une des préoccupation dominante.
Concernant le vote lui même, l’équation est simple : pour un potentiel électoral constant, ce qui est le cas généralement pour EELV, par exemple : avec 1000 électrices et électeurs inscrits, un parti politique qui a un électorat constant de 100 voix cela représentera 10 %. s’il n’y a que 45 % de votants soit 450 électrices, électeurs, si toujours 100 voix cela fera 22 % des inscrits… Ainsi un parti ou mouvement politique qui a un électorat de base constant qui se mobilise, plus il y a d’abstention, plus cela le favorise en pourcentage des voix.
Le phénomène "disruptif" Verts toutefois submergé par le tsunami abstentionniste
Jamais dans l’histoire de la 5e république, lors d’une élection municipale, un tel taux d’abstention ne fut atteint. Il faut constater que depuis 1983, où le taux de participation était de 78,42 % au premier tour et 79,68 % au second, les Français se sont très progressivement désintéressé de cette élection jugée cependant comme « l'élection des élus préférés des Français ». Toutefois, jusqu’en 2014 où le taux de participation était de 62,13 % au premier tour et 63,55 % au second, c’était une large majorité de l’électorat qui se déplaçait, alors qu’en 2020, du jamais vu, à peine plus du tiers de l’électorat s’est déplacé au premier tour : 36,67 % et avec 44,66 % au second tour on est encore assez éloigné de la majorité. Il est vrai que l’épidémie du Covid-19 a sa part de responsabilité dans ces défections, avec un premier tour de tous les risques sanitaires et un second tour trois mois après le premier, ce qui pouvait poser un problème de Droit.
Pour d’autres raisons que LREM, mais le phénomène « disruptif » Vert des municipales ne suivrait-il pas la même courbe ?
Il est évident que seul, EELV, y compris en rassemblant toutes les organisations écologistes politiques non Verts, n’aurait pu faire tomber les grandes villes conquises le 28 Juin 2020. L’exemple le plus frappant est celui de Marseille. Michèle Rubirola, élue Maire (aujourd’hui démissionnaire) , avait été exclue d’EELV pour s’être associée au premier tour des municipales au mouvement d’union de la gauche le « Printemps marseillais », dont elle pris la tête de liste. Dès lors, EELV avait soutenu un candidat qui n’a pas pu se qualifier pour le second tour (8,94 % des suffrages) et s’est résolu au second tour à faire reporter ses voix sur Michèle Rubirola, laquelle avait fait le plein des voix de gauche.
Dans des communes de moindre importance démographique, les candidats Verts se sont souvent associés dès le premier tour à divers mouvements citoyens de gauche, voire très à gauche comme le parti de Benoît Hamon : Génération/s, le Parti communiste, la France insoumise. Après leur victoire, nul doute que ces professionnels de la politique exigeront leur tribu, alors qu’idéologiquement, très généralement ils sont productivistes, pro-natalistes, pro-croissance, pro-nucléaires qui sont les antithèses de l’écologie…Mais il est vrai que les « Verts » se sont rendus compatibles avec l’idéologie de ces organisations politiques depuis longtemps, notamment sur la croissance qu’ils veulent » sélective », mais croissance quand même, et la question démographique qui reste un sujet tabou, alors que c’est l’une des problématiques fondamentales de l’écologie.
Contrairement à LREM, les Verts ont une implantation sur le terrain et depuis longtemps des élu(e)s : dans des conseils municipaux depuis 1983 et régionaux depuis 1992, plus récemment dans des Conseils départementaux. A deux reprises ils participèrent à des gouvernements PS (Jospin 1997-2002 et présidence de Hollande 2012- 2017 où ils ne laissèrent pas une trace indélébile) ils ont des parlementaires au Sénat, après avoir eût des députés. Contrairement à LREM, ils sont durablement installés dans la vie politique des territoires, mais par une participation normale de l’électorat il n’y aura probablement pas pour eux de nouveau phénomène « disruptif ». Comme au début de son mandat le fit Emmanuel Macron, certains nouveaux maires Verts de grande villes se sont mis beaucoup de citoyens contre eux, à cause de « bourdes » verbales ou décisions peu heureuses comme à Bordeaux ou Lyon, ce qui ne manque pas de se répercuter sur l’ensemble de ce parti…
Pour conclure
La pandémie Covid-19 et l’obligation de maintenir normalement les prochaines échéances électorales ne devrait-elle pas emmener le gouvernement à revoir les modes d’élection ? Vu l’évolution de la pandémie, si l’on veut revenir à une situation normale de l’expression électorale, tout en prenant les dispositions de protection sanitaire dans les bureaux de vote, ne serait-il pas souhaitable que le gouvernement envisage de mettre en place parallèlement les dispositifs permettant le vote électronique par internet ? Le vote électronique ne devant pas pour autant remettre en cause le vote par correspondance, qu’il convient de simplifier tout en garantissant les sécurités nécessaires.
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