Quel bulletin de vote face à l’extrême-centre ?
Ancien abstentionniste, je me suis reconverti dans le conseil en placement de voix. Les élections restent pour moi une des clefs de voûte du système. Pourquoi donc ?
Les élections procèdent, via un renouvellement possible des visages, d'une forme de rite d'approbation du capitalisme de connivence. In fine, malgré un désir majoritaire de justice et d'égalité, ce sont toujours les candidats de la fuite en avant européiste et mondialiste qui l'emportent. Ces élections législatives ne font pas exception, elles vont être remportées par les défenseurs de la loi travail XXL, comme l'indiquent les résultats des circonscriptions des Français de l'étranger.
Pendant les campagnes, des acteurs paradent sur les plateaux. Ils travaillent leur voix comme de vulgaires présentateurs météo. On les maquille, on les fait répéter. Ils passent devant un photographe avant de placarder leurs tronches dans le pays. Ils font la tournée des marchés. Tout cela est du théâtre. Parfois, leur conjoint leur a même appri à jouer.
Quelques jours avant la grand messe, on reçoit dans nos boîtes aux lettres des invitations à venir faire le tri parmi les prétendants. De nombreux critères entrent en confrontation, suivant des pondérations baroques et des algorithmes mystérieux, mais à la fin, un visage finit par sortir. En général celui avec les plus riches sponsors et la plus large couverture médiatique.
Face aux téméraires élus potentiels, la majorité des citoyens est sommée d'élire.
En son sein, on retrouve les indifférents et les boycotteurs conscients. Il y a aussi ceux qui choisissent de ne pas choisir par le vote blanc et ceux qui gribouillent un message ésotérique sur un bulletin qui compte pour nul. Ceux qui se portent sur les petits candidats assument voter par idéal. Et puis, enfin, on a ceux qui ont envie de compter réellement. Parmi eux, encore deux groupes. Ceux-ci préfèrent éliminer, par flemme de s'emballer ; ceux-là ont la flamme, et élisent avec enthousiasme.
Il ne m'est pas facile d'inviter mes homologues citoyens à participer aux grandes farces populaires. Pourtant, je sens une forme d'enthousiasme quand j'entends des militants, par nature optimistes, vouloir prendre le système à contre-pieds. On doit bien pouvoir trouver une faille... Actuellement j'en aperçois deux, deux minuscules fenêtres de tir.
Idéalement, le pouvoir législatif reviendrait au peuple
Ce que j'ai toujours cru et continuerai sans doute de croire, c'est qu'à l'ère d'Internet, on a point besoin de législateurs professionnels. Je ne parle ici que des parlementaires. Il est effectivement difficile d'imaginer une société moderne sans gouvernement ni administration. L’État doit protéger, et les lois être exécutées… il faut donc un exécutif et des fonctionnaires. Mais à une époque où la connaissance est accessible et partagée comme jamais, on est de plus en plus nombreux à s'interroger sur la nécessité d'un parlement élu. Preuve que ces idées montent Montebourg avait repris l'idée du tirage-au-sort de la chambre basse du Parlement.
On pourrait être plus radical et se demander pourquoi payer des gens à débattre et proposer des lois, alors que nous sommes des millions à le faire en permanence gratuitement.
La Suisse, avec son « Parlement de milice », ne paie pas vraiment ses députés. Une fois élus, ils continuent donc à travailler. Ce n'est pourtant pas le pays le plus mal en point.
On économiserait aussi du temps. Que de mois perdu en effet à débattre sur des personnes, des personnalités, des visages, des programmes ou des étiquettes, puis une fois l'élection passée à critiquer, applaudir, pétitionner et manifester.
Tout cela est une débauche d'énergie bien mal valorisée. Les satisfaits du statu quo se frottent les mains pendant que les deux tiers des citoyens, sur les bords de l'échiquier politique, maugréent contre le foutu système.
Pourtant, s'ils s'écoutaient, ils cesseraient de nier les points de rencontre évidents qui les rapprochent. Les tenants de l'ordre établi, celui du pognon et de l'impérialisme, s'entendent toujours tout en maintenant la fiction de leurs désaccords. C'est donc toujours l'extrême centre qui gouverne, au bénéfice des vainqueurs de la compétition économique et en osmose avec les exigences du capitalisme de connivence.
L'Union Populaire Républicaine : un parti au-dessus des clivages
L'UPR, à mon sens, est le seul parti politique qui propose d'oublier provisoirement les sujets qui divisient les [choisissez le terme] souverainistes / antilibéraux / patriotes. Pour Asselineau, la situation exige, sur le modèle du CNR, de ne plus continuer à s'écharper sur les sujets clivant et secondaires. Des référendums pourraient très bien les trancher. Le programme de l'UPR prévoit de laisser les Français voter directement au sujet de la dette, de l'immigration et de l'espace Schengen.
L'UPR défend la mise en place d'un outil central de la démocratie directe à la Suisse, avec le référendum d'initiative populaire. La démocratie directe a des partisans à gauche comme à droite. Seuls les aficionados du capitalisme de connivence s'y opposent.
Mais l'UPR possède les défauts de tout parti politique : hiérarchie, personnalisation, esprit godillot… La discipline et la ferveur des militants est à la fois une force et une faiblesse.
Radical sur la méthode : le mouvement citoyen Ma Voix
Aux législatives, dans 43 circonscriptions, il y a un autre mouvement, « Ma Voix », qui propose aux déçus du système de sortir du triptyque : promesses, élections, détresse.
Ma Voix est un mouvement horizontal sans porte-paroles. Ses candidats sont des citoyens tirés au sort qui une fois députés, rapporteront les avis des Français consultés sur chaque texte à l'Assemblée.
Exemple : prenons le sujet Y, sur la plate-forme où ils sont invités à s'exprimer, 70 % des Français se prononcent contre le projet de loi, 20 % pour et 10 % votent blanc. Alors sur 10 députés Ma Voix, 1 seul ne prendra pas position, 2 voteront pour et 7 s'opposeront.
Cette offre politique court-circuite le mandat représentatif des députés, et propose d'expérimenter une forme de mandat impératif (interdit par la Constitution).
L'époque n'est pas aux idéologies rigides. Désormais les gens butinent. Pourquoi s'obstiner à demander des programmes ? Il n'y a pas de raison de prendre un menu complet, si pour le même prix on peut décider ce que l'on veut au fur et à mesure du repas. Nous pouvons avoir une démocratie en continue, et ne pas exercer notre souveraineté un jour tous les cinq ans.
Nous aurons alors compris la leçon de Rousseau dans le Contrat Social, qui répondait aux philosophes prenant l'Angleterre pour modèle : « Le peuple anglais pense être libre ; il se trompe fort, il ne l'est que durant l'élection des membres du parlement. Sitôt qu'ils sont élus, il est esclave, il n'est rien. »
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