Quel que soit le candidat élu le 6 mai, le troisième tour se passera dans la rue
Alors que le premier tour aura lieu dans dix jours, pas un mot sur le MES et le TSCG qui imposeront 135 milliards d'économie.
Qui peut comprendre ?
On peut le constater, pas un candidat n'aborde le traité instaurant le Mécanisme européen de stabilité (MES) ni le TSCG, traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance de l’Union économique et monétaire, alors qu'il s'agit d'un véritable coup d'état contre la démocratie, puisqu'il s'agit de détruire toutes les conquêtes sociales, la démocratie et la souveraineté du pays.
Il convient encore une fois développer le contenu de ces deux traités pour en comprendre la gravité.
LE MES Mécanisme européen de stabilité
Tout a été très vite : le 2 février, les gouvernements de la zone euro ont signé à Bruxelles dans la plus grande discrétion un nouveau traité européen qui institue une sorte de Fonds monétaire international pour l’Europe, appelé Mécanisme européen de stabilité (MES) dont ces votes ont validé la ratification en France.
1- Le MES, nouvelle institution créée spécialement pour l’Europe, est un clone du FMI, basé à Washington, sous la direction de fait du gouvernement américain et des multinationales, avec lequel il collaborera étroitement pour imposer partout en Europe des plans d’austérité déments, comme en Grèce, sous couvert d’assistance aux Etats membres. En Grèce, aujourd’hui, il existe déjà, pour mettre le pays à genoux, une coopération entre le FMI, la BCE et la Commission européenne, ce que l’on appelle la ” troïka “. Avec ce traité, plus besoin de troïka. Et ce qui était présenté comme une procédure exceptionnelle pour la Grèce deviendra la norme. Le MES devient ainsi un rouage institutionnel du FMI, donc de l’impérialisme américain, incorporant les exigences de la Réserve fédérale américaine. L’Union européenne joue ainsi jusqu’au bout son rôle d’agence au service de l’impérialisme.
2- Surtout, sur le plan juridique, il introduit dans le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne une notion majeure : la conditionnalité, qui est le principe de base du FMI.
Le FMI, basé à Washington, s’est illustré, en particulier depuis trente ans, en imposant dans les pays dominés, dits du tiers monde, des mesures d’une brutalité inouïe pour les contraindre à rembourser une dette fabriquée de toutes pièces et à s’ouvrir au pillage des multinationales. Le FMI accorde des prêts, en exigeant des gouvernements complices qu’ils appliquent des programmes d’ajustement structurel meurtriers, dictant privatisations, baisses des salaires, diminution des dépenses publiques. Le FMI résume cette politique dans un principe appelé la conditionnalité. Le traité fondant le MES reprend mot pour mot le même schéma. Mais pour l’Europe cette fois !
Entre la manière dont le FMI a procédé dans les années 1970-1980 pour dépecer les nations d’Afrique, d’Asie, d’Amérique latine et la manière dont le MES va opérer chez nous, il n’y a finalement que deux différences : là où le FMI avait commencé par créer la dette pour étrangler les peuples, le MES ira directement au but, puisque la dette écrase déjà toutes les économies nationales d’Europe ; et cette fois, c’est au coeur des principales puissances capitalistes, hormis les Etats-Unis, que la machine va frapper.
Concrètement, le soutien apporté par le MES à un pays membre sera subordonné à une stricte conditionnalité qui peut prendre la forme, notamment, d’un programme d’ajustement macroéconomique. En Grèce, ils ont exigé la baisse de 20% du Smic !
3- Par ailleurs, le MES est totalement imbriqué dans un autre traité, celui sur la stabilité, la coordination et la gouvernance dans l’Union européenne, TSCG, qui doit être ratifié, en France, après les élections présidentielles.
Simplement, il faut préciser ici que le TSCG fait obligation d’inscrire dans les Constitutions nationales une règle interdisant les déficits, la fameuse ” règle d’or “ ; il exige aussi une réduction de 5% par an des dettes publiques. En France, cette dette publique est d’environ 1 700 milliards d’euros. Le traité impliquerait donc de dégager pour la diminution de la dette 85 milliards d’euros par an, sans compter le paiement des intérêts courants d’une cinquantaine de milliards, soit le cinquième du budget de l’Etat !
4- Qui dirigera le fonctionnement du MES ?
Le siège du Mécanisme européen de stabilité (MES) se situera au Luxembourg, avec la garantie de l’impunité et du secret.
C’est la Commission européenne qui sera chargée de négocier avec le pays concerné un protocole d’accord définissant la conditionnalité, c’est-à-dire les mesures de rigueur à appliquer. C’est elle qui signera ce protocole d’accord au nom du MES et c’est encore elle, en liaison avec la BCE et le FMI lorsque cela est possible qui sera chargée de veiller au respect de la conditionnalité.
Le FMI, dirigé de fait par le gouvernement américain qui y dispose du plus grand nombre de parts, la BCE et la Commission européenne seront donc les véritables maîtres du fonctionnement du MES, même si le conseil des gouverneurs et le conseil d’administration du MES seront composés de membres désignés par les gouvernements.
5- Le gouvernement français sera potentiellement redevable de 143 milliards au MES.
Les défenseurs du système pourraient objecter que la France n’aura peut-être jamais besoin de recourir à l’aide du MES. Rien n'est moins sûr !
Une chose est sûre : le MES coûtera de toute façon très cher à tous les pays membres.
Le capital de départ du MES est fixé à 80 milliards d’euros, mais il pourra être augmenté jusqu’à 700 milliards, soit cinq fois l’actuel budget annuel de l’Union européenne.
Chaque pays de la zone euro devra contribuer à ce capital à hauteur de son PIB, soit, pour la France 20,4% du capital total. Le gouvernement français est donc redevable, potentiellement, de près de 143 milliards d’euros au MES, soit plus du tiers du budget de l’Etat !
Les Etats signataires s’engagent de manière irrévocable et inconditionnelle à verser le capital exigé dans les sept jours suivant la demande formulée par le directeur général du MES.
On nous rassure : “ Chaque fois qu’une décision engageant les finances de l’Etat sera prise par le conseil des gouverneurs, le Parlement français sera informé “. C’est l’abdication totale de toute souveraineté nationale.
Le TSCG, traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance de l’Union économique et monétaire.
Quand les dirigeants de l’Union européenne parlent de stabilité, ils évoquent la stabilité de l’euro et non, bien sûr, la stabilité du travail et des garanties collectives.
Ce traité devra être soumis à ratification immédiatement après les élections présidentielles et législatives. A la différence du traité sur le MES, le TSCG nécessitera, pour être ratifié, la convocation du ” Congrès “, la réunion des députés et des sénateurs à Versailles, ou un référendum, car il modifiera la Constitution. Il est prévu qu’il entre en vigueur d’ici au 1er janvier 2013.
Par ailleurs, contrairement aux autres traités européens qui nécessitaient pour entrer en vigueur la ratification de tous les pays membres de l’UE ou de la zone euro, le TSCG bénéficiera de conditions curieusement dérogatoires : le traité pourra commencer à entrer en vigueur même si tous les pays signataires ne le ratifient pas immédiatement. En effet, un seuil minimum de 12 pays sur les 25 signataires a été fixé, même si le pacte pourrait être durablement affaibli si les 17 pays de la zone euro n’y adhéraient pas (cas, par exemple de l’Irlande qui a fait le choix du référendum pour se prononcer sur ce nouveau traité budgétaire européen).
Ce traité a vocation à encadrer la politique du gouvernement qui suivra, quel qu’il soit !
En quelque sorte, le TSCG généralise les conséquences du principe de conditionnalité à tous les Etats de la zone euro, qu’ils aient ou non demandé une assistance financière.
Il fait, sous peine de fortes amendes, obligation d’inclure dans les Constitutions nationales l’interdiction des déficits, la “règle d’or”, et pour le moins la limitation de ces déficits à 0,5% du PIB, contre 3% prévus par le traité de Maastricht.
Cela signifie qu’en France le déficit de l’Etat ne pourrait excéder 10 milliards d’euros. Il était de 90,8 milliards en 2011. Il devra donc être inférieur de 80 milliards, ce qui reviendrait à couper l’équivalent de 1,3 fois le budget de l’enseignement primaire et secondaire, retraites des personnels comprises !
En cas de dépassement, un ” mécanisme correctif immédiat “ entrera immédiatement en action, obligeant les parties contractantes à l’application de mesures destinées à corriger les écarts sur une période de temps définie.
Le TSCG institue également l’obligation de réduire de 5% par an la dette de l’Etat. La dette publique française se monte aujourd’hui à environ 1 700 milliards d’euros. La réduire de 5% par an (un vingtième) signifie donc trouver 85 milliards d’euros par des coupes budgétaires et/ou des impôts supplémentaires, soit 20% du budget de l’Etat ! Chaque année ! C’est la même potion mortifère que l’Union européenne et le FMI imposent au peuple grec.
On notera au passage que les traités européens sont signés par les représentants des gouvernements avant d’être soumis à ratification dans les différents Etats concernés. Donc, il n’y a pas d’amendement possible. Puisque le traité est signé, vous ne pouvez rien modifier : vous ne pouvez qu’approuver ou désapprouver.
L’argument de François Hollande qui affirme : ” Je vais renégocier le traité “ n’est pas sérieux !
Une fois qu’un traité est signé au niveau de l’Union européenne, il est signé ! Après, on ratifie, ou on ne ratifie pas !
En février 1994 à Washington, Taffazul Hussain, responsable ouvrier du Bangladesh, interpellait les représentants du FMI en ces termes : ” La clause de conditionnalité qui accompagne vos prêts ordonne les plans d’ajustement structurel qui saignent les peuples, piétinent la démocratie, et bafouent la souveraineté des nations disloquées. “
Dix-huit ans plus tard, le traité instaurant le Mécanisme européen de stabilité (MES) a recours aux mêmes termes. Les prêts y sont subordonnés à une stricte conditionnalité qui appelle des plans d’ajustement structurel, tandis que le conseil des gouverneurs est doté de tous les pouvoirs : prêter ou ne pas prêter, imposer ses conditions, les renforcer, les durcir… bref, conduire chaque pays d’Europe dans une situation pire que celle de la Grèce aujourd’hui. “
Les considérants du TSCG constatent que les objectifs du traité de Maastricht de 1992 n’ont pas été atteints, du fait que la lutte des classes les a empêchés d’aller jusqu’au bout.
Aujourd’hui, par ces traités, il s’agit même pour eux d’en aggraver les critères exigés en tentant de franchir un cap supplémentaire, décisif.
Mais la lutte de classe continue, et la classe ouvrière n’a pas dit son dernier mot !
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