Quelle compatibilité entre islam et démocratie ?
Il faut se rendre à l’évidence, qu’il s’agisse dernièrement du Pakistan, de l’Algérie, on voit bien que l’islam en tant que tel, c’est-à-dire cette loi constitutionnelle par excellence puisqu’elle se veut l’émanation même du divin et sous laquelle l’on ne peut qu’être soumis, ne peut être discuté ; ce qui est tout le contraire du régime démocratique moderne qui rime avec séparation des pouvoirs, à commencer le politique du religieux. Dire le contraire revient à professer un islam occidentalisé, amoindri au rang d’une philosophie, ce qu’il n’est pas puisqu’il n’y a rien à interpréter, sinon la manière d’appliquer la loi. On connaît l’objection : ce propos est identique à celui des islamistes, qui n’auraient rien compris à l’islam... donc rien ne prouve l’incompatibilité, et dire le contraire serait islamophobe, voilà où nous en sommes semble-t-il.
Sauf que l’on va un peu vite en besogne en avançant que les islamistes n’auraient rien compris à l’islam (ce sont des enfants, parfois sympathiques, on les dépeint quelquefois ainsi, un peu victimes de la société consumériste et permissive) ; pourtant, "on" réitère, "on" le clame ici et là, jusqu’à Tony Blair et Georges W. Bush dernièrement : ce n’est pas le "vrai" (true) islam. Et l’on ajoute, tout fier de cette réfutation qui a, il est vrai, toujours pignon sur rue malgré les efforts d’un Redeker, si les islamistes, qui se trompent donc, se déchaînent c’est uniquement en raison de causes sociales (Algérie, Maroc), ou parce qu’on les provoque (attentats de Londres, Madrid : c’est "à cause de" l’Irak, l’Afghanistan, Israël...) et le 11-Septembre 2001 ? A cause de la politique américaine en général. La généralité fonctionne encore un peu ici. Par exemple dans un récent numéro de Newsweek (24 décembre 2007, p. 41), la journaliste demande à Pervez Musharraf si ce déchaînement ne provient pas de l’activité militaire occidentale accrue, en particulier américaine, en Afghanistan. Musharraf tempère quelque peu cette relation réductrice de cause à effet, mais ajoute au détour d’une phrase que s’il n’y avait pas le conflit en Palestine...
Personne, ou presque, ne se demande s’il n’y a pas une relation de cause à effet entre l’islam prêché pleinement, politiquement donc, et le fait que ceux qui y adhèrent veulent voir ceci être réalisé également pleinement. Les cas algériens et pakistanais sont exemplaires. L’islam est religion d’Etat et ses adeptes veulent que l’islam devienne l’Etat même comme il est écrit noir sur blanc. On objecte qu’il ne faut pas interpréter littéralement "comme le font les islamistes". Sauf que ceux-ci ont bon droit de rétorquer qu’il est difficile de ne pas prendre au pied de la lettre des propos "incréés".
J’ajouterai ceci : plus des concessions ont été faites en matière de droit de regard sur les moeurs, la culture, l’éducation, plus l’appétit vient en mangeant ; et l’état, général, de la société aidant, l’islam apparaît comme la solution ; ce qui n’est cependant pas le cas lorsque l’on veut plutôt la démocratie. Parce que la Constitution de celle-ci, en général, présuppose que le Droit soit consubstantiel à la souveraineté individuelle, elle-même représentée par diverses institutions qui l’encadre et la protège comme la nation, la République, etc. Qu’il y ait débat entre cette souveraineté et sa représentation, c’est le lot de la démocratie moderne. Une telle discussion est impossible en islam car elle est close depuis que Mahomet y est venu apporter le Discernement (Koran) rectifiant ce qui a été dit de la Parole Divine (le Livre) par les juifs et les chrétiens, qui se sont trompés de tout au tout (Abraham n’est pas l’ancêtre des juifs mais des musulmans, Ismaël n’est pas Egyptien mais Arabe, etc. Jésus n’est pas Dieu fait homme mais prophète, etc.).
Rares sont ceux qui se disent que l’islam qui est professé en Occident par des intellectuels musulmans généralement occidentalisés ou très diplomates ne correspond pas à la Lettre même de l’islam. Pourtant, il n’y a aucune raison de penser que les islamistes seraient des enfants ou des idiots, ce qui serait offensant et pour le coup réellement islamophobe parce que l’on ne voit pas pourquoi tant de lettrés qui sont à la tête du Hamas, du Hezbollah, de Al Keida, voire à la tête d’Etat comme Iran, en Arabie saoudite, se tromperaient, à ce point, sur le contenu, réel, du Koran et de la Sunna. Or, ceux-ci, et c’est dit et écrit, sont incompatibles avec des pratiques non musulmanes, c’est-à-dire qui n’auraient pas été réglées au préalable par le Discernement et sa Vie.
Que faire ? Relire Lénine ne nous serait d’aucune utilité pour le coup. Par contre, commencer à se poser des questions sur les concessions faites de plus en plus à l’islam sous prétexte d’intégration alors que celles-ci apparaissent plutôt comme autant de conquêtes territoriales (car le spirituel est lui aussi un "terrain", ne dit-on pas même un " champ" ?...) ne serait pas inutile... Par ailleurs demander avant toute concession que la réciprocité existe réellement en terre islamique pour les chrétiens, les juifs et tous les autres également, athées, bouddhistes, hindouistes, paganistes, ne serait pas un luxe. Bien au contraire, la construction d’une église chrétienne à la Mecque, ou, mieux encore, la possibilité, à nouveau, comme ce fut le cas avant Mahomet, que des juifs, des chrétiens, des animistes puissent prier, dans leur religion, autour de la Pierre Noire, prouverait justement la compatibilité entre islam et démocratie : chiche !
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