Quelques précisions sur le MoDem et les municipales
« Ils l’ont fait, comment ont-ils osé !? ». Ceci n’est pas une exclamation réprouvant un comportement des plus injurieux. Ceci n’est pas l’expression indignée censurant la plus haute licence. Cris d’orfraies, simplement, damnant l’attitude d’un MoDem dialoguant librement, entre deux tours d’une municipale, avec des hommes de droite et des hommes de gauche. Volée de bois vert. Ces lignes revendiquent cet attentat à la fausse pudeur.
Le projet du Mouvement Démocrate est là. Il est ici, inédit donc menaçant, audacieux donc intolérable. Nous avons en effet choisi de déployer notre projet au-delà des lignes de partage politique qui voudraient le contenir. Nous avons choisi, le temps d’une municipale, de former des alliances, nouées autour d’idées, sur la seule foi desquelles certains responsables politiques nous paraissent plus fréquentables que d’autres. Mais oncques. Quel outrage. Fronde ! Hérétique que nous sommes. Un rapprochement d’idées mériterait-t-il pourtant le blâme sous le seul prétexte des origines politiques de tel homme ? Non. Nous ne distinguerons pas plus entre les couleurs de peaux que nous ne discrimineront parmi les couleurs politiques. Qui peut dignement prétendre que, sur le fondement des priorités municipales, un rapprochement, au-delà des fausses fractures partisanes, serait impossible. Même s’il se trouvera toujours homme à affirmer que la priorité est à droite et que le danger vient toujours de la gauche, le sens de la circulation, la propreté des trottoirs, n’appelleront d’approche doctrinale que sous l’ambition d’y faire déambuler à cette même altitude ses propres convictions.
Si la droite et la gauche ont un sens aujourd’hui, il n’est pas politique. Faut-il que notre classe politique soit désorienté pour qu’elle tienne à ce point à ne pas perdre sa boussole. Droite vs gauche. Obédiences quasi-religieuses. Trouble obsessionnel.
Ces dix dernières années, l’ensemble de nos élites, intellectuelles, médiatiques n’ont eu de cesse de dénoncer le partage entre une droite et une gauche qui, s’il eût sa pertinence, avait fait son temps, qui devenait, disaient-ils, caduc. Mais la réaction fiévreuse, fanatique répudiant notre attitude d’entre les deux tours, atteste d’un pays sous l’aimantation hypnotique de sa droite et de sa gauche. Névrose, mouvement perpétuel, valse à deux temps qui sonne faux.
Ainsi, le PS, refait de partout, bestiaire interlope où se mêlent et s’entremêlent Fabius, Royal, Mélanchon, Emmanuelli, Moscovici. Tous favorables à l’économie de marché et à l’économie de Marchais. Ainsi se suggèrent-ils qu’ils s’« entendent » bien. Tous acteurs énigmatiques jouant certes sur la même scène, mais des pièces différentes. Tous fils de Mitterrand, sans que cela ne les rende frères pour autant.
Il se trouve infiniment plus de différences entre la frange modérée et la gauche dure du PS qu’entre nous et la première. Et, pourtant, nous n’avons pas le droit de nous parler.
De la même manière, l’UMP est tendu entre une tendance modérée, emmenée par Juppé, Méhaignerie, plaidant des réformes davantage sociales et avec lesquels nous saurions dialoguer, et de l’autre des libéraux durs incarnés par Novelli ou Longuet.
Bien entendu, les forces en présence ne trouvent aucun interêt à faire bouger les lignes et barbotent avec satisfaction dans leur propre bourbillon. Mais bourbillon utile. UMP ou PS, tout à la fois label vendeur et cache-misère, artillerie lourde capable d’assurer postes, honneurs et élections. Plus subtilement, la polarisation forte entre une droite et une gauche reste enviable puisqu’elle seule permet de reconduire des oppositions dont la seule tension tient lieu d’idéologie et assure un discours. Hobbes le disait déjà, le gladiateur tire son rôle et sa fonction de son double.
Remodeler notre espace politique n’est pas un caprice de convenance du Mouvement Démocrate. C’est une nécessité, saine pour le débat en France. On demande souvent où le MoDem se situe. Demandons-nous, tous ensemble, où nous sommes.
C’est dans cet esprit que nous nous proposons de déplacer les lignes de foi, que nous voulons revoir le tracé des chemins bien tracés et construire ainsi des liens par-delà les bornes que prescrivent les habitudes.
Nous abattrons les cloisons autant que nous le pourrons. Allez, courage, fuyons, ces lignes Maginot, ces lignes de partage théorique, d’où tous les enjeux ont déserté.
Urgence pour que les clivages politiques recouvrent la réalité des courants d’idées qui les déterminent. Nous ne disons pas que les clivages n’existent plus. Nous disons qu’ils sont ailleurs.
Loin de la patristique habituelle, tentant d’enserrer chacun de nos enjeux de société par la droite ou par la gauche, il est un projet novateur qui se propose d’assurer les solidarités tout en servant la croissance, qui loin de les opposer, équilibrerait l’exigence de l’un par la nécessité de l’autre. Il s’agit alors de reconfigurer la place de l’Etat. Cet Etat surdimensionné qui, contraignant les initiatives locales, vient buter à l’entrée de chaque problème, cet Etat qui se mêle de tout, tourne en rond à force de circulaires, de décrets. Un monstre repus toujours à repaître. Nous plaidons à l’inverse un Etat stratège et responsable. Il nous faut donc démêler les compétences des collectivités locales, davantage concurrentes que partagées, supprimer les départements, clarifier les relations financières que l’Etat entretient avec les collectivités locales, raccourcir les délais entre la décision prise et le projet effectué et ainsi augmenter notre capacité réactive et valoriser nos territoires.
Dans un mouvement décentralisateur qui emporterait tous les freins et tous les archaïsmes, l’on voit poindre un citoyen souverain, conscient et maître des choix publics qui le concernent. En bref, au sens le plus constitutif, le plus impliqué, nous nous proposons de faire du citoyen un homme politique à part entière. Loin de la République des experts, une République imaginative, moderne, efficace, une République citoyenne et un nouveau contrat social noué autour de l’homme.
A l’écart de la multiplication gesticulatoire des fronts de réformes, la hiérarchisation de l’action publique autour d’axes forts doit trouver sa place. Dans un pays fracturé, disséqué par des inégalités toujours croissantes, il nous faut préserver et protéger toutes les solidarités : pourvoir aux besoins de financements de notre système de retraites, dont il est utile de rappeler qu’il absorberait, à situation constante, 9 points de cotisations sur les revenus d’ici 2020, revaloriser les petites retraites, développer et organiser un système de santé mité, incapable de trouver une solution de continuité entre les prises en charges sociales et sanitaires, entre la médecine ambulatoire et la médecine hospitalière. Tout à l’inverse du modèle des franchises, on peut responsabiliser les assurés dans leur ensemble, mais non les malades.
Conjurer les inégalités en créant de la croissance. La mondialisation, qui n’est pas en nature un mal, est sans aucun doute capable de créer des richesses, mais incapable de les répartir. Elle est sans aucun doute capable d’aller brutalement chercher de la valeur, mais est incapable d’en identifier le sens. Il faut donc accompagner la mondialisation, l’éduquer, l’humaniser et convertir ainsi l’économie spéculative en une économie durable, tournée vers le savoir, l’écologie et l’innovation, une économie de l’intelligence portée par des PME dont on aurait rendu l’environnement fiscal et juridique plus respirable. Nos PME doivent être notre principal vecteur de développement stratégique.
Aussi, à l’inverse du paquet fiscal, qui, si j’ose dire, aura achevé de vider les entrailles de la France, faudra-t-il ériger le désendettement de l’Etat au rang d’exigence absolue. Et ce, conformément aux objectifs fixés par l’Europe. L’Europe, notre chance. Il s’agit de sortir notre pays de son bain amniotique et l’oxygéner à l’air de l’Europe. Aujourd’hui première puissance commerciale au monde, il faut rappeler qu’elle est, à l’heure des économies émergentes et des Etats-monde, la seule unité de taille pertinente, à même de nous permettre de peser sur les choix de ce monde, et d’éviter de subir la loi du plus fort qui le cadence.
Mais avant de faire vivre ce projet, il nous faut redessiner notre carte politique, opérer, pour des structures partisanes ô combien éclatées, ce qui pourrait être une politique de regroupement familial. Après cinquante ans de droites, de gauches, la France est KO.
Nous défendons donc une praxis politique nouvelle ainsi qu’un humanisme pragmatique.
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