• AgoraVox sur Twitter
  • RSS
  • Agoravox TV
  • Agoravox Mobile

Accueil du site > Tribune Libre > Qui s’immisce au Soudan  ?

Qui s’immisce au Soudan  ?

JPEG

L’un des aspects les plus étranges du récent conflit soudanais est le jeu de blâme auquel se livrent de nombreuses personnes, qui accusent des «  acteurs extérieurs ». Certains pointent du doigt les pays du Conseil de coopération du Golfe, d’autres les nations occidentales et le groupe Wagner soutenu par la Russie. D’autres encore accusent Israël et d’autres entités régionales d’attiser le conflit au Soudan.

Chaque partie justifie ses affirmations en répétant que les puissances régionales ou mondiales ont un intérêt direct au Soudan et qu’elles soutiennent l’armée soudanaise ou les Forces de soutien rapide (FSR) pour atteindre leurs propres objectifs. Cependant, il est évident que de nombreuses parties ont des intérêts dans des pays spécifiques, que ce soit en raison de leur situation géographique, de leurs ressources naturelles ou de leur influence géopolitique.

Volker Perthes, chef de la mission des Nations unies au Soudan, a officiellement déclaré qu’il n’y avait aucune preuve tangible d’ingérence extérieure dans le conflit soudanais et qu’il s’agissait simplement d’une lutte pour le pouvoir entre factions militaires, et non d’un conflit entre militaires et civils. Toutefois, les médias et les réseaux sociaux brossent un tableau différent, indiquant qu’il n’y a pas d’intervention «  concrète  » dans ce conflit, ce qui implique qu’il n’y a pas de soutien militaire apporté à une partie plutôt qu’à l’autre. Ce point est essentiel car on ne peut nier que des parties extérieures peuvent avoir un parti pris pour l’un des groupes militaires au Soudan. Si les FSR ne sont pas affiliées à des groupes tels que Daesh ou Al Qaida, leur chef est une figure active de la politique et de l’armée soudanaises depuis des années et s’est ouvertement engagé auprès d’acteurs régionaux et internationaux, établissant des liens sous le contrôle officiel des institutions soudanaises. Il est donc déraisonnable d’accuser un parti de collusion avec l’armée ou avec ceux qui, selon l’armée, préparent un coup d’État contre elle.

Il ne s’agit pas de défendre ou de justifier des liens extérieurs avec l’une ou l’autre des factions, qu’il s’agisse du général Mohammed Hamdan «  Hamidati  » Dagalo ou du général Al Burhan. Il est évident que les acteurs régionaux et internationaux tiennent à préserver leurs intérêts stratégiques au Soudan ou dans tout autre pays du monde. Toutefois, il incombe aux citoyens et aux entités actives d’un pays de protéger leur patrie contre toute intervention extérieure susceptible de nuire à leurs intérêts. Le défi consiste néanmoins à établir un consensus national et à forger des partenariats solides fondés sur des principes nationaux, ainsi qu’à persuader toutes les factions du pays de trouver un terrain d’entente.

Il convient de noter que tous les acteurs régionaux et internationaux ont travaillé intensément à l’obtention d’un cessez-le-feu humanitaire temporaire pour une brève période au cours des derniers jours, et pas nécessairement pour mettre fin au conflit. Pourtant, tout le monde a vu comment ces cessez-le-feu s’effondrent dès qu’ils sont déclarés, les deux parties s’accusant mutuellement de bombardements et de tirs, démontrant ainsi leur manque d’intérêt pour le bien-être des personnes pour lesquelles elles prétendent se battre - y compris l’accès à la nourriture et à l’eau, la sécurité et la stabilité.

Il est inconcevable qu’un acteur régional comme l’Égypte, par exemple, puisse fermer les yeux sur la situation actuelle chez son voisin du sud, compte tenu de la géographie et de la géopolitique communes. En outre, le Nil est un lien vital entre les deux pays, ce qui implique que toute agitation au Soudan pourrait menacer la sécurité de l’eau de l’Égypte et entraîner une crise des réfugiés, entre autres conséquences.

Il en va de même pour d’autres acteurs régionaux, tels que les pays du Conseil de coopération du Golfe, qui doivent faire face à l’influence de puissances rivales dans le monde arabe, y compris le Soudan. En outre, certains pays du CCG ont des investissements considérables au Soudan, et la sauvegarde de ces investissements ainsi que la promotion de la stabilité dans le pays correspondent à leurs intérêts stratégiques. Il est impératif d’empêcher le Soudan de devenir un autre État arabe en déliquescence, plongé dans la tourmente et la violence, d’autant plus que la région est déjà aux prises avec de nombreuses crises.

L’impact du conflit soudanais dépasse les frontières du pays, car il affecte les pays voisins qui ont leurs propres problèmes de sécurité et d’économie. La grande taille du Soudan et sa proximité avec d’autres nations africaines en font un acteur régional, et tout problème auquel il est confronté aura des répercussions sur l’ensemble du continent.

En outre, la prévalence du terrorisme, du trafic d’armes et des conflits internes dans les pays voisins fait que ces questions sont également liées à la situation du Soudan. Ces questions sont d’autant plus pertinentes que l’Afrique continue de s’interroger sur les systèmes de gouvernance et sur le choix entre démocratie et dictature, en reconnaissant que chaque pays possède ses propres complexités culturelles, ethniques, historiques et civilisationnelles qui nécessitent une réflexion et une préparation approfondies avant tout appel à la transition vers la démocratie.

La situation au Soudan est principalement une question de responsabilité interne. La crise est d’autant plus préoccupante qu’elle se déroule entre militaires et non entre civils, et que les deux parties connaissent parfaitement les secrets, les alliances, les réseaux internes et externes, les capacités, les zones de déploiement et la propagation de l’autre.


Moyenne des avis sur cet article :  1.2/5   (15 votes)




Réagissez à l'article

2 réactions à cet article    


  • bertin 5 mai 2023 08:21

    Il faudra par la suite réunifier le Soudan et le Sud-Soudan, dans une sorte de fédération, ce qui profitera aux deux parties.


    • DLaF mieux que RN ou Z / Ukraine BOLLORé... Président ! 6 mai 2023 14:45

      Peace & Love :

      « Kiss a Miss » au Soudan

       smiley

Ajouter une réaction

Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page

Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.


FAIRE UN DON



Publicité



Les thématiques de l'article


Palmarès



Publicité