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Accueil du site > Tribune Libre > 3. Qui sont les trafiquants : Le syndrome DeLorean

3. Qui sont les trafiquants : Le syndrome DeLorean

 Le six octobre 1982, le créateur visionnaire de voitures DeLorean, à court de capitaux pour construire sa propre usine essaya de passer un accord avec des trafiquants de cocaïne en achetant 100 kilos de cette drogue. Manque de pot, les vendeurs étaient des agents du FBI. Il a été filmé en prononçant la phrase restée dans l’histoire « c’est mieux que de l’or ». Il fut cependant acquitté pour deux raisons : il a été « prouvé » que la DEA et le FBI l’avaient incité à passer à l’acte et que les vingt cinq kilos trouvés dans sa voiture de sport étaient « pour usage personnel » ! Play boy clinquant et exubérant, marié à un modèle, il eut la chance de tomber juste avant que la cocaïne ne devienne aux Etats Unis un produit « politiquement et culturellement incorrect ». 

Depuis, et plus particulièrement après la chute du mur de Berlin, les hommes d’affaires qui ont été mêles à des scandales mêlant toute une série d’activités (Agroalimentaire, infrastructures portuaires, industrie pétrolière, transports, immobilier, etc.) et le trafic de drogues sont innombrables.

Les américains Marc Ritch (amnistié par Clinton sous l’excuse officieuse qu’il était un correspondant honorable du Mossad), Oscar Wyatt (nourriture contre pétrole et détournement de l’embargo sud-africain), les russes Mogilevitch, Fisherman et le fameux Bout (armes, pétrole, etc. ), le président bolivien putschiste Hugo Banzer, Vladimir Montessinos, « conseiller » chargé de la sécurité du président du Pérou Fugimori, R. Spandaro roi des casinos et ancien de la Mafia (Saint Marin), Deniz Oscan (casinos aux Caraïbes en Chypre du nord et en Azerbaïdjan), et je n’indique que les milliardaires plus importants. 

Parallèlement, et tandis que les administrations américaines successives déclarent la continuité du slogan Reaganien de la « guerre à la drogue » la CIA utilise la drogue pour alimenter tous les conflits latino-américains (et pas seulement celui des contras). La drogue distribuée à Los Angeles par exemple (et à laquelle le « San José Mercury News » attribue l’origine du boom du crack entre la population noire) était déposée dans les bases aériennes du Salvador. De là elle était transférée dans des avions de tourisme jusqu’à des aéroports au Texas, avec la protection de la CIA. À la fin de 1981, la structure avait obtenu de faire introduire une tonne de drogue de la contrebande. Blandón, qui reçoit toujours un salaire du gouvernement américain comme agent spécial de la DEA, a admis que entre 1981 et 1988 il introduisait jusqu’à 100 kilos de cocaïne par semaine.

La coïncidence de dates, acteurs et lieux géographiques permettent de suggérer qu’une partie de la drogue manipulée par Blandón, avec l’autorisation de la CIA, fût approvisionnée par les narcotrafiquants boliviens, même après le renversement de García Meza en Bolivie, et de la restauration démocratique en Argentine en 1983.

Les Argentins ont aussi été les pionniers de la structure qui a ensuite été utilisée par le gouvernement de Ronald Reagan, pour canaliser l’aide cachée aux Contras. Les agents du Batallón 601, Raul Guglielminetti, alias une "Mayor Guastavino", Leandro Sánchez Reisse, alias "Lenny", et Jorge Franco, alias "Fiorito", se sont spécialisés dans le blanchiment d’argent des fonds provenant du trafic de drogues. Franco a voyagé dans deux occasions en Amérique Centrale, une d’elles avec son identité réelle.

« Les services de police nord - américains connaissaient parfaitement les relations des hommes politiques latino-américains avec les mafias, mais se sont tus. On peut le constater dans une note de M. John Negroponte, ambassadeur des Etats-Unis au Mexique à l’époque, au secrétaire d’Etat, sur l’enrichissement illicite de certains fonctionnaires « Je ne pense pas que nous devions publiquement mettre à l’épreuve la résolution de Carlos Salinas de Gortari [de lutter contre le narcotrafic]. Il veut améliorer la coopération. Mais il doit le faire de manière à ne pas affecter sa base politique. » Quelle était sa base politique ? Raul Salinas de Gortari (condamné plus tard pour trafic de cocaïne) Francisco et Mario Ruiz Massieu (idem), Luis Donaldo Colosio (idem), le général Gutierrez Rebolledo, principal responsable de la lutte antidrogue, et incarcéré au début de 1997. 

La drogue ainsi ne sert pas seulement à financer les conflits ; elle sert comme levier financier pour tous les pays qui jouent le jeu des privatisations : Une étude du FBI intitulée « L’économie politique du commerce des drogues », rédigé par James Moody, chef de la Section Drogues de la Division du Crime organisé, et rendu public au Mexique le 9 mai 1995 indiquait que, depuis, le gouvernement de Salinas a mis en place une série d’incitants pour attirer le capital étranger. Un de ceux-ci - d’après ce document - « est la vente d’entreprises parastatales à des investisseurs privés, des entreprises telles que d’importantes institutions financières, des fabriques et des commerces industriels et des services d’avant-garde ayant une valeur de plusieurs milliards de dollars ». Dans ce programme de privatisation « il y a eu corruption et blanchiment d’argent impliquant d’influents financiers mexicains.... Des entreprises parastatales ont été achetées par des organisations de narcotrafiquants. »

Vingt cinq ans plus tard, les « Cartels » mexicains, après avoir corrompu l’ensemble des institutions de ce pays en toute impunité, deviennent une « menace pour Washington »… Trop tard.

Il en va de même en Asie Centrale, en Russie, au sud-est asiatique (Thaïlande en particulier) et, si on inclut la contrebande pétrolière, la contrefaçon et les pierres précieuses, on peut difficilement faire une cartographie mondiale des affaires qui soit indépendante de l’économie criminelle. A suivre.


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19 réactions à cet article    


  • morice morice 30 mars 2010 13:24

    c’est Rich et non Ritch je pense celui dont vous parlez avec Clinton. Dans son histoire tortueuse on tombe sur un Antonov 124..


    Several historical facts first. AN-124-100 « Ruslan » airplane, state registration number UR-82007, serial number 19530501005, property of the state enterprise Aviation Research-and-Design Complex named after Antonov (ARDC), was attached in the Canadian Goose Bay Airport on 28 June. It had delivered there a cargo of ammunition and equipment for Italian Air Force carrying out annual military exercises in Canada. The plane was seized by Canadian authorities executing the respective decision of the Arbitration Institute of Stockholm Chamber of Commerce dated 30 May 2002 in the case brought byTMR Energy Ltd. Company against the State Property Fund of Ukraine.

    Over the last month, the press has discussed every detail of the debt, for which the « Ruslan » plane was seized, but there still are several inconsistencies in the story. In 1992, the state-owned enterpriseLysychansk Oil Refinery and Swiss Маrc Rich & Refining АG (one of the group of companies belonging to a notorious millionaire Marc Rich) incorporated a Joint Venture Lysmarc. In 1993, the company was restructured (part of the millionaire’s assets was purchased by his partners and renamed into Glencore Inc.), and his share in the joint venture’s authorized fund was referred to a Cyprian subsidiary of Rich’s holding called TMR Energy Ltd., while the joint venture was re-registered as Limited Liability CompanyLysoil. The Lysychansk Oil Refinery and Lysoil concluded a contract on the enterprise modernization and operation, which was never fulfilled (the reasons should be discussed separately). Prior to privatization, in 1994, the Lysychansk Oil Refinery was corporatized into a Public Joint-Stock CompanyLyNOS. According to the effective legislation, the State Property Fund was an assignee of all long-term investments of the enterprise under corporatization, including its debts and shares in the authorized fund, such as a 50% share of the Lysychansk Oil Refinery in the Limited Liability Company Lysoil. In July 2000, the TNK-Ukraine [Tiumen Oil Company] bought 67% of the Public Joint-Stock CompanyLyNOS for USD 53 million, after which TMR Energy Ltd. filed a claim for USD 42.3 million with the Arbitration Institute of Stockholm Chamber of Commerce.

    • Michel Koutouzis Michel Koutouzis 30 mars 2010 13:52

      Absolument, vous avez tout à fait raison...


    • dapeacemaker911 30 mars 2010 13:37

      Ca y est.... on touche enfin le coeur du probleme.

      Et oui, les memes qui nous rabachent que la droguent « c est mal » et qui multiplient les peines lourdes pour les simples usagers sont trop souvent partie prenante du traffic internationnal.

      Vivement le prochain episode.... 4:L afghanistan ?


      • morice morice 30 mars 2010 14:47

        Et oui, les memes qui nous rabachent que la droguent « c est mal » et qui multiplient les peines lourdes pour les simples usagers sont trop souvent partie prenante du traffic internationnal.

        c’est évident !

      • Francis, agnotologue JL 30 mars 2010 13:53

        Excellente série d’articles. En lisant votre première phrase, j’ai pensé à Alphonse Allais :

        « Un criminel est une personne avec des instincts de prédateur et qui n’a pas assez de capital pour fonder une société. »

        Ceci explique cela !


        • HELIOS HELIOS 31 mars 2010 11:09

          ... ni assez de bagout pour devenir homme politique....


        • jakback jakback 30 mars 2010 15:19

          Il est utile de rappeler les faits, pour confirmer que le poisson pourri toujours par la tête.


          • sisyphe sisyphe 30 mars 2010 16:04

            Merci, pour votre série d’articles, tout à fait édifiants sur les véritables trafiquants.

            Tout ceci se pratique, non seulement en toute impunité, mais, avec le concours actif, évidemment, des politiques, et des agences de renseignement..

            La CIA mêlée à tout ça ? Quelle surprise !! smiley

            Quand même, à propos de de Lorean , les 25 kilos pour « usage personnel » ; trop fort !
            Plus fort que Scarface !
             smiley


            • jmcn 31 mars 2010 07:42

              Faut-il rappeler que la production de pavot a explosé en Afghanistan depuis que les américains y sont ?


            • rikiki 30 mars 2010 17:16

              « Nous savions déjà que l’argent de la drogue représente plus du tiers du flux de devises et des échanges boursiers mondiaux et que, sans elle, le système bancaire international s’effondrerait. En clair, le trafic de la drogue est indispensable à l’équilibre économique mondial. Si l’on ajoute le prix des substances nuisibles à notre santé et le gaspillage des dépenses d’armement, justifié également par l’équilibre de la terreur, on peut considérer que l’économie dominante, dite « libérale », est une entreprise de destruction ».
              Philippe Desbrosses, docteur en environnement, expert consultant auprès de la C.E.E. et du Parlement européen.


              • @distance @distance 30 mars 2010 18:13

                A qui profite le trafic des drogues
                pas forcèment aux pays producteurs ?
                Tout en déstabilisant les économies des pays producteurs en faisant reculer les investissements licites et en faussant le processus de décision macro-économique, l’industrie de la drogue en pervertit également les systèmes politiques. Les revenus tirés de la drogue permettent de financer des campagnes électorales, la corruption, l’insurrection, le terrorisme et la criminalité organisée.


                Citant l’Afghanistan, où l’apport de capitaux liés à la culture du pavot « est relativement important par rapport au Produit intérieur brut », l’OICS estime que « l’augmentation massive de la production d’opium au début des années 90, qui a fait du pays le premier producteur mondial, a servi à alimenter les guerres civiles mais n’a manifestement pas contribué au développement socio-économique ». « Cette observation vaut pour les autres pays » producteurs de drogue, a estimé le président de l’OICS Philip Emafo.

                « Nous n’avons trouvé aucun indice pouvant donner à penser que l’expansion des cultures illicites (de drogue) entraînait une amélioration de quelque indicateur de développement que ce soit », a-t-il ajouté.



                • Lisa SION 2 Lisa SION 2 30 mars 2010 18:44

                  Bonjour MK,

                  Carlo Slim, l’homme désormais le plus riche du monde Carlo Slim, http://www.monde-diplomatique.fr/carnet/2010-03-11-Carlos-Slim-l-homme-le-plus-riche&nbsp ; est également le n°1 du sexe. Ces gens là sont riches parce qu’ils ne paient pas d’impôts ; http://www.bakchich.info/Warren-Buffett-les-delires-d-un,03000.html . Voici leur méthode pour que circulent les fonds : http://www.agoravox.fr/actualites/economie/article/le-masque-du-blanchiment-vers-les-55891 Pour plus de détails voir Sisyphe.


                  • @distance @distance 30 mars 2010 20:56

                    tiens je vais peut-être me remettre à lire le Monde diplo smiley

                    avril 2010
                    Au nom de la lutte contre l’« argent sale »
                    Quand les banquiers informent la police
                    Longtemps la garantie du secret des transactions fut synonyme de respectabilité bancaire aux yeux des déposants les plus fortunés. Pourtant, dans le sillage de la lutte internationale contre le blanchiment de l’« argent sale » puis contre le financement du terrorisme, les banques ont dû évoluer. Elles recrutent désormais des membres des forces de l’ordre pour mettre en place une surveillance financière aussi étendue que méconnue.
                    Par Gilles Favarel-Garrigues, Thierry Godefroy et Pierre Lascoumes
                    http://www.monde-diplomatique.fr/2010/04/FAVAREL/18989


                    • yvesduc 30 mars 2010 21:13

                      Excellente série, merci beaucoup ! Vous apportez la réponse qu’il fallait aux propos de Zemmour (que je ne connais pas dans leur contexte, je précise).


                      • pierre60 pierre60 31 mars 2010 06:22

                        Merci pour ce petit retour vers le futur


                        • Jean Ô Lap 1 4 avril 2010 09:49

                          Joli, et on comprend bien avec quoi on doit remplir le réservoir.


                        • Defrance Defrance 4 avril 2010 08:35

                          Il est bien evident que l’argent de la drogue alimente les campagnes électorale et que de plus la drogue génère de « BONS ÉLECTEURS » ! !


                          • fredo45 4 avril 2010 23:34

                            Toujours aussi intéressant, bravo...
                            J’aimerais bien avoir le temps de lire les rapports donnés en référence.
                            En tout cas, on est bien loin de Tremblay-en-France...


                            • agent orange agent orange 7 avril 2010 10:13

                              MK

                              Qui sont les trafiquants ?
                              FYI quelques liens, au cas où cela vous aurait échappé.
                              http://www.wsws.org/articles/2004/aug2004/urib-a05.shtml
                              http://www.gwu.edu/ nsarchiv/NSAEBB/NSAEBB131/index.htm
                              http://www.gwu.edu/ nsarchiv/NSAEBB/NSAEBB131/dia910923.pdf (je vous recommande le n° 82 de la liste, un certain Uribe)

                              Bonne lecture.

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