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Accueil du site > Tribune Libre > Radio France à Berlin sur la chute du mur : le leurre de la vaccine (...)

Radio France à Berlin sur la chute du mur : le leurre de la vaccine !

À qui aura-t-il échappé que Radio France « (a) fait le mur  » ? Tel était le slogan douteux d’une opération gigantesque de propagande, annoncée depuis des semaines à grands sons de trompe, et dans laquelle son nouveau directeur, M. J.-L. Hees, a fourvoyé le service public de la radio, à l’occasion du 20ème anniversaire de la chute du mur de Berlin. Est-ce vraiment pour ne rien cacher de l’événement, comme le proclame à la cantonade l’échafaudage de restauration de sa tour centrale (1) ?
 
Toutes les chaînes de Radio France, de minuit à minuit, ont diffusé le même programme indigent et bavard, le 9 novembre 2009. Impossible d’y échapper, qu’on passe de France Info à France Inter ou France Culture  !
 
Slogan indécent, information donnée et information indifférente
 
Pouvait-on trouver, d’abord, jeu de mots pour slogan plus indécent, quand on songe à ce que signifie l’expression de potache « faire le mur » au regard des évasions qu’au péril de leur vie, tant de Berlinois de l’Est ont tentées, réussies ou manquées. Radio France n’a couru ici que le risque du ridicule et de l’indécence. Et à quoi bon cette mobilisation uniforme de toutes les antennes de la maison sans exception ? Pour apprendre quoi ? Peu de chose !
 
Les mêmes versets ou sourates ont été répétés à satiété par journalistes ou invités interviewés sur les circonstances qui ont précédé l’événement, la bévue d’un apparatchik de RDA donnant le signal prématuré de la ruée vers l’Ouest, les moments de liesse sur le mur, le prélèvement de morceaux à coups de marteau, les conséquences économiques avec les masses financières investies à l’Est par l’Ouest de l’Allemagne, la persistance d’une disparité de niveau de vie, l’existence d’une « ostalgie » chez des Allemands de l’ancienne RDA regrettant une certaine protection sociale aujourd’hui disparue, ou encore le marché aux souvenirs que l’anniversaire fêté a engendré. Que faisiez-vous il y a vingt ans ? était la question rituelle posée aux invités, sans que la réponse présente le plus souvent le moindre intérêt. Mais ça occupait le temps d’antenne !
 
Les plages touristiques, ménagées pour souffler un peu entre les informations ressassées, ne présentaient, quant à elle, guère plus d’intérêt. Un reporter, apprenait-on, était sur PostdamerPlatz pour célébrer une architecture de verre et d’acier comme celle du Sony Center encore tout étincelant de lumières avant le lever du jour ; un autre se promenait sur Unter den Linden ; tel autre arpentait AlexanderPlatz, ou dans l’ancien Berlin-Ouest, le Kurfürstendamm, dit le Kudamm. Ou encore on suivait un reste de mur ici et là, voire seulement la trace de son emplacement inscrite au sol pour mémoire. Quand on s’est soi-même promené dans Berlin à vélo, seul moyen de locomotion approprié en raisons des divers centres éloignés les uns des autres, on n’apprenait pas grand-chose à l’écoute de ce dépliant touristique stéréotypé.
 
Et forcément, la place d’honneur était réservée aux cérémonies officielles, avec les délégations au plus haut niveau venues du monde entier, à une exception près, celle des Etats-Unis, puisque le président Obama s’était fait seulement représenter par sa secrétaire d’État, Mme Clinton.
 
À quelles variétés appartenaient ces informations qui étaient ainsi diffusées ? À la variété de l’information donnée dont la particularité est de comprendre une part de promotion de l’émetteur et à la variété de l’information indifférente qui permet d’envahir le temps de diffusion pourtant exigu et donc de rejeter tout autre information, selon un procédé de censure discrète.
 
Le leurre de la vaccine
 
Une telle force de frappe médiatique déployée invite forcément à s’interroger sur les objectifs poursuivis. Une radio aurait suffit sur place. Pourquoi toutes les chaînes ont-elles été réquisitionnées littéralement et en plus pour un programme unique ? Des allusions relevées ici et là ou carrément des professions de foi ont progressivement levé le voile.
 
« Le jeu des mille euros », par exemple, qui s’est tenu au Centre culturel français sur le Kudamm, a veillé à inscrire ses questions dans le contexte du jour : ainsi a-t-il été demandé aux candidats pourquoi le nom de « Check point Charlie  » avait été donné à un des points de passage entre Berlin Ouest et Berlin Est, ou encore dans quel ouvrage on retrouvait cet œil qui observe tout le monde appelé « Big Brother ». Il est vrai qu’on ne pouvait mieux rappeler la sinistre Stasi dont le film « La vie des autres  » de Florian Henckel von Donnersmarck a stigmatisé les crimes et les turpitudes en 2007. Sutout, l’actualité française a été soumise à la métaphore berlinoise : la journaliste C. Servajean du journal de 13 h a ainsi parlé du « mur d’incompréhension entre la direction et les syndicats en grève  » à la RATP. Et il a fallu que le flagorneur porte-parole de l’UMP, F. Lefebvre, ne trouve rien de mieux, pour célèbrer le bilan du président Sarkozy à mi-mandat, que de parler de «  la chute du mur de l’immobilisme » !
 
À l’évidence, la célébration emphatique de la chute du mur de Berlin par Radio France a poursuivi un but de propagande politique dans la période de crise économique actuelle. On y reconnaît la stratégie du leurre de la vaccine, analysé par R. Barthes, qui agit comme le vaccin dont les germes inactivés inoculés, dans un premier temps, doivent susciter, dans un second temps, des anticorps salvateurs. La vaccine, elle aussi, procède en deux temps.
 
- Dans le premier, on admet un peu de mal. Ainsi la crise économique avec ses conséquences sociales tragiques pour beaucoup est-elle une évidence reconnue. On la décrit, on la déplore.
 
- Mais c’est pour, dans un deuxième temps, rappeler qu’il n’y a pas d’alternative à l’ordre social existant si dur soit-il. Il reste le meilleur. La preuve ? La chute du mur de Berlin ! Ne pas oublier qu’il ne se franchissait que dans un seul sens, d’Est en Ouest, preuve s’il en est que le système communiste de la RDA était bien pire que le capitalisme de l’Ouest qui connaît, sans doute, des crises, mais sait se rétablir et se régénérer. Comment oublier la liesse des Allemands de l’Est se ruant vers l’Ouest au soir du 9 octobre 1989 ? Ainsi, pour ceux qui souhaiteraient un changement économique et social, le régime de la RDA est-il donc agité comme un épouvantail pour nier toute possibilité d’une autre voie que celle de l’ultra libéralisme. Qui souhaiterait, en effet, vivre dans un tel régime policier ? Mais l’ultra-libéralisme est-il pour autant le seul avenir de l’homme ?
 
Le comble, tout de même, dans cette mobilisation insensée de toutes les chaînes de Radio France, n’est-il pas, par le symbole de ce programme unique, d’avoir offert, pour dénoncer le régime de liberté d’expression muselée qu’était la RDA, une imitation du fonctionnement de ses médias réduits à n’être que la voix unique de son maître unique, le parti communiste ? Paul Villach
 
(1) « C’est bien la première fois que nous avons quelque chose à vous cacher », lisait-on cet été sur l’échafaudage qui enveloppe la tour centrale de la Maison de Radio-France en travaux :
 
Paul Villach, « Ce leurre pernicieux que de son échafaudage Radio France répand dans Paris », AgoraVox, 31 août 2009.

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31 réactions à cet article    


  • Thierry LEITZ 10 novembre 2009 10:32

    Cher Paul,

    Votre décorticage de ce tapage médiatique autour de la chute du mur a le mérite de nous rendre attentifs au risque que constitue la référence à l’Histoire pour marquer les consciences ou tuer l’esprit critique.

    Si la chute du mur est un événement historique majeur, elle s’inscrit dans le processus plus long et plus complexe de la décadence du régime soviétique, lequel est lui-même le résultat de phénomènes sociaux et politiques profonds en Russie ainsi qu’à l’habileté de M. Gorbatchev à naviguer dans ses eaux troubles.

    Mais bon, médiatiquement, il faut faire simple, pour que tout le monde comprenne, et comprenne quoi ? Que le communisme, c’est mal, que le socialisme, c’est nul, c’est Trabant et rationnement, que l’égalité c’est la pauvreté pour tous. La Preuve, l’ex-RDA symbole pratique de l’echec du communisme.

    Partant, la messe est dite. « L’ouest » capitaliste reste la panacée. Tous les autres systèmes sont des échecs. Donc, laissez en paix ce brave capitalisme, qui sait parfaitement « s’autoréguler », qui ne peut être contraint par la règle sinon « c’est le retour à l’URSS » et vous avez vu le résultat ?

    La schématisation crée le réflexe, mais nuit à la réflexion et à l’éclairage des faits.


    • taktak 10 novembre 2009 10:33

      Bon article.

      Effectivement hier nous avons eu droit à un retour de Radio paris.
      Effectivement, la célébration médiatique d’hier, sans une once d’esprit critique ou de contradiction, a été général tant sur le service public (radio france) que parmis la presse, sans compter la « fete » place de la concorde payé par nos grandes entreprise sous l’oeil humide de notre dernier ministre.

      Bref, oui, la chute du mur est un événement historique important. Mais ce n’est pas l’événement historique dont on a parlé hier. Comme vous le faite remarquer, c’est bien une campagne de propagande anti - communiste et même plus généralement pro libérale et pro intégration européenne qui a été organisé.
      Preuve s’il en est que dans nos « démocratie » le parti unique capitaliste ne tient pas à la pluratité d’expression.

      Propagande, vous me direz que le mot est fort pourtant :
      -dire que la chute du bloc de l’est a apporté la paix, c’est nier la guerre du golfe qq mois plus tard, c’est nier le retour de la guerre en europe dans les balkans, puis la montée du terrorisme islamique et les guerres du moyen orients (afganisthan, seconde guerre d’irak, liban, palestine...)
      - présenter les pays de l’est comme unaniment onnis par leur population, c’est oublier les sondages qui dise avec constance depuis vingt ans que pour une majorité de ces peuples le socialisme avait aussi des cotés positifs (voir par exemple http://www.lepetitjournal.com/content/view/43081/1030/), http://www.cyberpresse.ca/international/europe/200911/02/01-917691-20ans-apres-la-chute-du-mur-le-desenchantement.php )
      - c’est oublier la décadence économique et le pillage, l’augmentation de la criminalité et des trafics, la baisse de la natalité et de l’espérance de vie qui est advenu avec le capitalisme, ainsi que les inégalités persitantes entre Est et Ouest, y compris en Allemagne réunifié.
      - dire que la contre révolution s’est faite sans violence, c’est oublier les chars d’eltsine bombardant la maison blanche abritant le parlement légitimement élue, faisant ainsi plus de mort que le mur n’en avait fait en vingt ans, c’est oublier la « révolution roumaine » ressemblant d’avantage à un sale coup d’état... S’est oublier l’épuration, bien plus efficace contre les communistes qu’elle ne fut menée contre les nazis ;
      -dire que cette chute du mur a apporter la liberté, c’est oublier que l’on peut aujourd’hui en europe appliquer des lois décider en catimini en une comission européenne, imposer, au mépris de l’avis des peuples, une constitution européenne violant la souveraineté des peuples et érigeant les principes libéraux ; C’est oublier l’uniformité de ton et d’opinion de nos médias, c’est oublier l’interdiction (en tchéquie par ex avec la KSM) de parti d’opposition, c’est oublier nos lois migratoires, anti terroristes, sur l’économie numérique ou sur le fichage de chacun, proprement liberticide ;
      - et tant d’autres...

      Et si l’on peut être en désaccord avec ces différents arguments, il n’en reste pas moins que l’on n’a pas pu entendre le moindre début d’un débat sur ces thèmes dans nos média, méprisant ainsi les principes de la liberté d’expression, tel qu’avait pu l’exprimer Voltaire, pourtant si célébrée en ce jour.

      Oui ce 9 novembre n’était pas une commémoration mais bien une vacinnation, voulue et en partie payée par nos élites, contre toute véléité en ses temps de crises de vouloir remettre en cause la domination et l’exploitation des peuples


      • french_car 10 novembre 2009 10:43

        Comme vous je n’apprécie pas Hees, je n’apprécie pas du tout la prise en main des médias par l’exécutif mais je ne vois pas ce que l’on peut reprocher à France Inter à propos de cette journée.
        Munis de vos gros sabots quotidiens vous sous-tendez que comme pas mal d’entre nous vous connaissez bien Berlin - j’y étais également fin 1989 juste après la réunification, j’y suis retourné en 1994 et 2002. J’en profite pour vous signaler que Berlin est fort bien doté en transports U-Bahn, S-Bahn et que le vélo n’est pas indispensable ...

        Je ne crois pas que cette célébration vise à effacer la dureté des temps puisque, comme vous le mentionnez, on en profite pour rappeler que l’Est connaissait le plein emploi et la protection sociale, les places de crèches pour tous et que derrière le mur le plongeon dans les eaux du libéralisme en a déçu plus d’un. Au delà des libertés politiques certains n’y ont pas gagné grand-chose. 

        Et d’ailleurs entendre Sarkozy chanter au pied du mur donne la nausée pour qui a vécu l’époque Mitterrand.


        • ZEN ZEN 10 novembre 2009 12:13

          Léon, tu n’as pas lu l’article , apparemment..
          Derrière les mots, les idées...
          R.Barthes n’était pas pédant, mais un subtil analyste


        • Paul Villach Paul Villach 10 novembre 2009 12:26

          @ Pauvre Léon, je suis désolé de contribuer à l’entretien de votre mélancolie !

          Faites vous une raison : il y a plein de leurres. L’univers médiatique est constitué structurellement de leurres et d’illusions. Le problème, c’est que vous ne les connaissez pas et donc ils vous échappent. C’est comme ça que le poisson se fait ferrer !

          Le leurre de la vaccine est une trouvaille de Roland Barthes : lisez donc « Mythologies », vous découvrirez l’analyse qu’il fait de la publicité pour la margarine Astra !!!

          Vous voulez en savoir plus ? Un bon tuyau :
          http://www.agoravox.fr/culture-loisirs/ouvrages-agoravox/
          Paul Villach


        • Paul Villach Paul Villach 10 novembre 2009 18:24

          @ Chanteclerc

          Excellent ! Je n’avais pas fait le rapprochement ! Les jeux de mots sont extraordinaires pour dynamiser la pensée en la dynamitant ! Pas mal non plus, non ? PV


        • Gazi BORAT 16 novembre 2009 08:13

          Le sage à son disciple :

          « Tout en ce monde n’est que leurre.. »

          Aussitôt apparait un tigre terrifiant.

          Le Sage s’enfuit en courant et rejoint prestement un arbre sur lequel il trouve refuge..

          Une fois le tigre parti.. Le disciple va au pied de l’arbre et s’adresse à son Maître..

          « Ô Sage, si tout en ce monde n’est que leurre, pourquoi avoir fui devant ce tigre s’il n’était lui aussi qu’un leurre ? »

          « Détrompe-toi, ignorant ! J’ai opposé à ce leurre du tigre le leurre de l’arbre »

          gAZi bORAt

          "


        • ZEN ZEN 10 novembre 2009 12:11

          Merci Paul pour cet article qui met le doigt là où ça fait mal

          "Ainsi, pour ceux qui souhaiteraient un changement économique et social, le régime de la RDA est-il donc agité comme un épouvantail pour nier toute possibilité d’une autre voie que celle de l’ultra libéralisme. "
          Bien vu !

          j’ai écouté FI , hier, une partie de la journée par nécessité (long parcours automobile) : saturé !
          La langue de bois qui frisait l’indécence
          Berlin , vu par les Bobos...
          On n’a pas parlé du chômage massif dans la ville


          • Paul Villach Paul Villach 10 novembre 2009 12:20

            @ Cher Zen

            Eh oui, d’autres lecteurs, en privé, me disent aussi dans leur courriel que c’était insoutenable !

            Voyez comme Léon est aveuglé par l’animosité. Sans doute n’a-t-il jamais lu « Mythologies » de Barthes. C’est là que j’ai trouvé son analyse du leurre de la vaccine avec la margarine Astra !
            Barthes ne répugnait pas à ainsi analyser la vie quotidienne avec des outils acérés ! C’est le Barthes que je préfère, évidemment !

            Il est stupéfiant de voir des gens sensés découvrir que l’univers médiatique est structurellement constitué de leurres et d’illusions ! Paul Villach


          • ZEN ZEN 10 novembre 2009 17:51

            Ce n’est pas bien de douter , Léon
            Comme tu disais....


          • Paul Villach Paul Villach 10 novembre 2009 18:40

            @ Cher Zen

            Le problème de Léon, c’est qu’il n’arrive pas à digérer de découvrir si tard que l’univers médiatique est constitué structurellement de leurres et d’illusions !

            Ceux qui ont pour fonction la manipulation de l’opinion, connaissent tous ces leurres sur le bout des doigts. Les services de renseignement anglais ont fait des merveilles pendant la Seconde Guerre mondiale. Connaissez-vous « l’Opération Mincemeat » qui est un cas d’école fabuleux, avec le leurre de l’information donnée déguisée en information extorquée ? Redoutable ! Il m’est arrivé d’y faire référence dans un ou deux articles. Même les services nazis ont été roulés ! Ce n’étaient pourtant pas des enfants de choeur !

            Cela ne date donc pas d’hier. Mais on se garde bien d’enseigner l’information sous cet angle dans les écoles ou dans les médias.
            Où irait-on si le pêcheur trempait sa ligne avec un beau ver appétissant au bout et que le poisson s’amusait à mordiller le fil de nylon, histoire de le faire enrager et de lui faire comprendre : ton hameçon, je l’ai vu ! Tu peux te le mettre là où je pense !  ? La pêche ne nourrirait plus son homme ! Paul Villach


          • ZEN ZEN 10 novembre 2009 20:40

            Je viens de lire
            Hallucinant !


          • Paul Villach Paul Villach 11 novembre 2009 10:26

            @ Léon

            « Le problème avec vous n’est pas que ce que vous racontez soit faux, mais évident, » écrivez-vous.

            Je ne m’attendais pas à trouver sous votre plume pareil hommage ! Vous connaissez la formule : ça va de soi, mais ça va encore mieux en le disant !

            « Les vérités premières, dit Camus dans »La Chute« , ce sont celles que l’on découvre après toutes les autres ! »
            Vous n’êtes pas au bout de vos peines, pauvre Léon !  Paul Villach


          • Bardamu 10 novembre 2009 12:21

            Très bonne analyse !

            Je vais, quant à moi, opter pour la simplicité en mes explications, la spontanéité empreinte d’une certaine d’ingénuité -de celle prêtée aux enfants-, convenant parfois plus à l’exercice de la vérité que bien des discours calculés !

            Aussi anecdotique que cela puisse paraître donc, pour faire état de ce mur -en sa chute-, j’aimerais évoquer quelques faits glanés çà et là, et semblant bien plus parlants que ces antiennes médiatiques.

            Dans le film : « Moi, Christiane F... », on y suit le parcours d’une jeune Berlinoise dont le malheur s’inscrit justement dans les dérives d’une Allemagne de l’Ouest sans repères, sans idéologies, pays cédant aux impératifs du désir : divorces faciles, sexe payant, drogue sur fond de rock’n roll faussement rebelle !

            Christiane dira, au plus profond du gouffre : « J’aurais préféré croire en quelque chose, voire même en ce nazisme révolu »

            Dans la série de ces excellents films édités sous le titre d’« Heimat », là aussi l’accent est mis sur une réunification difficile, où ceux de l’Est auront beaucoup à perdre en l’affaire.
            La simplicité et la gentillesse de ces gens de l’Est s’y oppose de front aux calculs et à l’intérêt exacerbé de ceux de l’Ouest... déjà, s’y dessine la désillusion, passée l’euphorie des premiers moments.

            Il y a aussi l’exemple de cet homme, H.Bismann qui a tenté de s’évader de RDA.
            Actuellement PDG d’une « belle et grande » entreprise, on ne peut le soupçonner de communisme, c’est certain !
            Il dit ceci :
            -« Je reste fier d’être Allemand de l’Est.
            -Les gens de l’Est sont plus simples et plus honnêtes. »

            Et puis ce sondage aussi, réalisé auprès des Allemandes, le sexe ici -comme à l’habitude-, étant bien plus révélateur que bien des théorisations en série :
            -« Celles de l’Est avaient plus d’initiatives au lit, et plus d’orgasmes, nous dit-on. 
            -Celles de l’Ouest, elles, dissertent beaucoup à propos de l’acte, mais ne savent pas se laisser aller comme leurs consoeurs supposées pudibondes. »

            Bardamu, voyez-vous, aime remettre les choses un peu à leur place, démythifier et démystifier !
            Oui, lorsque l’on part d’un lieu, l’on ne sait jamais trop bien ce que l’on quitte, n’est-ce pas !
            Et la chute de ce mur a bien l’apparence d’une bonne cuite... avec des maux de tête à la clef le jour suivant.
            Ce régime n’était pas idéal, certes ! ô, loin s’en faut ! Mais, triompher du nôtre !... quelle fanfaronnade !

            Actuellement, 54 % des ex-Allemands de l’Est sont nostalgiques de la RDA, de celle de « Good Bye Lenin », si imparfaite, mais... pas aussi mauvaise que l’infâme brouet libéral servi à l’heure actuelle dans l’assiette des nombreux peu nantis parmi eux !
            Certaines soupes -même populaires !- sont meilleures que des disettes, qu’on se le dise !

            Pour finir, je vais parler de mon expérience personnelle, précisant que je ne suis pas communiste -histoire de devancer les mauvaises langues !
            Mes parents, il y a bien longtemps de cela -avant la chute du mur-, connaissaient des Polonais, ayant quitté leur pays et venus s’installer en France -pour préserver leurs biens.
            Grâce à eux, nous avons visité leur pays -pays qu’ils continuaient à chérir !-, en traversant la RDA.

            Premier constat, les enfants que nous sommes -quatre enfants, chez nous !- étions particulièrement déçus au passage de la frontière est-allemande : des miradors, certes, mais des gardes souriant qui ne s’offusquèrent même pas des nomreuses grimaces faites à l’ennemi anti-impérialiste.
            A contrario, kalachnikov en main, le mal incarné nous salue, un large sourire dessiné sur le visage.
            Nous devons pas quitter l’unique route traversant ici la RDA, mais au loin dans la campagne, je me souviens de jolis petits villages, avec des maisons un peu semblables... mais, que des maisons !
            Puis l’arrivée en Pologne ! 
            Cette gêne de fréquenter les meilleurs endroits -nos amis étaient riches ici !
            Trop aisés, pensions-nous alors !
            Dans le bus, à Varsovie, nul ne trichait.
            Pas de contrôle, mais tout le monde oblitérait son ticket.
            Nous, nous ne le faisions jamais, et ne subissions pour autant aucun reproche... nos tricheries passaient comme lettre à la poste -celle d’avant !

            Ensuite, nous sommes allés dans un camp de vacances -de ces camps insanes où le séjour de l’ouvrier était -comble du mauvais goût !- payé par l’usine, et où les enfants du directeur côtoyaient ceux des petites mains... tous logés à la même enseigne !

            Quelle surprise :
            -un bel environnement au bord d’un lac, des gens sympas, heureux, des activités gratuites pour tous... enfin pas le goulag préalablement craint, loin s’en faut !
            Le soir, enfants d’ouvriers et fille du patron -mon premier amour !- et nous-mêmes discutions et rions de bon coeur.

            Voilà, je tente ici de faire comprendre qu’entre l’apparence et la réalité, il y a bien un mur !
            Et, si ce régime d’oligarques pataugeait dans la bureaucratie. 
            Si le stalinisme corrompu y imposait une lourdeur parfois mortifère... il n’était pas que cela !
            En RDA, comme en une Pologne subissant le joug des Soviétiques, il n’y avait pas de pauvreté, l’accès à l’emploi et à un logement était garanti.
            Les gens faisaient d’interminables queues pour se ravitailler, mais ils riaient aussi.
            Bref, ils vivaient !
            Je conclurai en soulignant que cet « Eldorado » libéral critiquant sans vergogne ce satané communisme a paradoxalement les mêmes structures  :
            -en URSS, si peu de journaux différents.
            ici, des quotidiens appartenant à un même groupe !

            -en URSS, deux marques de voiture.
            Ici, la Rolls même n’est plus britannique !
            Et l’on peut continuer à l’infini.
            Jusqu’à l’entreprise, lieu de travail hyper-encadré en terres libérales, avec un patron désormais maître de nos vies.
            Alors, arrêtons de stigmatiser ceux-là !
            Oui, quand chez nous, tout incline à croire que ça va devenir largement... PIRE ! 


            • taktak 10 novembre 2009 13:04

              Non vous avez tort.

              A l’est, les gens n’avaient rien, que leurs immeubles gris où ils restaient enfermés sous surveillance quand ils n’étaient pas à faire semblant de travailler dans des usines obsolètes.


            • Bardamu 10 novembre 2009 13:26

              Facile, et... sans fondements !
              Je vous fait part d’un vécu, de faits réels, partagés au travers de témoignages cinématographiques ou d’écrits !
              Et vous m’y opposez de l’apophtegme (sentence courte), sans développement aucun ; du ressenti teinté de conditionnement... bref, du vide !
              Un vide libéral, dirais-je, ou l’emballage cache un bien maigre contenu, suivant le principe publicitaire du slogan.
              Un peu pathétique tout de même, et d’autant immature !


            • french_car 11 novembre 2009 08:26

              Bardamu il faut être raisonnable.
              Tout n’était pas négatif et chacun sait qu’il y a de nombreux nostalgique.
              Mais enfin il y avait la police politique, les pénuries.
              Et vous parlez de sexe tarifé et de divorce facile à l’Ouest ? Mais on divorçait tout autant à l’Est et le sexe était tarifé pour ceux qui avaient des devises ! Je l’ai vu en 1979 à Moscou dans les hotels à touriste, je connais également fort bien quelqu’un qui a passé ses 20 premières années en Pologne et a vécu tout l’état de siège, avec ses oncles, ses amis emprisonnés.


            • pepin2pomme 10 novembre 2009 13:29

              Bravo Paul pour ce coup de gueule.
              Je ne suis pas contre cette liesse organisée autour de cet anniversaire, mais je n’ai pas supporté non plus cette façon qu’a eue Radio-France de nous imposer l’actualité. Pas moyen de se réfugier sur France-Musique pour échapper à cette diarrhée journalistique.


              • Triodus Triodus 10 novembre 2009 14:17

                Merci de le souligner Pépin, c’était en effet ce qu’il y avait de plus insupportable en cette journée.

                Cordialement,
                T.


              • Geneste 10 novembre 2009 13:41

                Quand le mur de Berlin est tombé, je m’étais posé la question à l’époque de savoir s’il ne s’était pas ouvert pour englober l’Europe de l’ouest. La propagande que nous avons vécue ces jours-ci n’a rien à envier à celle de la Pravda de l’union soviétique. Le soviétisme s’est donc bien infiltré par le mur démoli et Radio France est son plus fervent fer de lance.


                • ZEN ZEN 10 novembre 2009 13:59

                  Rien compris , Calmos....


                  • Bardamu 10 novembre 2009 14:10

                    L’Allemagne de derrière le mur n’est stigmatisée que pour mieux cacher celle qui aujourd’hui nous conduit droit dedans !
                    Un mur mis de côté, pour aller s’écraser dans un autre... la belle affaire ! 


                    • QuidNovi QuidNovi 10 novembre 2009 14:39

                      Bon article et tout à fait d’accord avec l’intervention de Tarnak. Tant d’entreprises dans les médias pour marquer cette commémoration m’ont aussi paru de toute évidence, une extraordinaire occasion pour discréditer l’idée communiste.
                      Déjà quelques jours avant, on pouvait voir à la télé des reportages dans lesquels des jeunes écoliers allemands étaient formatés à l’anti-communisme en leur faisant visiter des ex-prisons politiques et ces jeunes disaient qu’ils avaient eu de la chance d’échapper à cet enfer communiste.
                      Jamais je n’ai entendu une parole positive sur le communisme ces derniers jours à la télé.
                      Et pourquoi il y a 10 ans, cette commémoration n’avait pas fait la Une ? certainement parce qu’aujourd’hui le capitalisme se sent bien d’avantage menacé et a besoin de faire une piqure de rappel aux jeunes générations afin qu’ils chassent de leur têtes toute tentative pour rêver d’un autre systéme, plus juste, plus épanouissant, plus ouvert, plus citoyens.


                      • Lorenzo extremeño 10 novembre 2009 14:46

                        @Paul Villach,

                        merci, je suis d’accord,une seule station de Radio France aurait suffit pour
                        célébrer l’évenement,et comme l’a dit dit si bien Stéphane Guillon ce mardi matin
                        ça permettait de faire sauter une chronique qui énerve profondément JL. Hees,mais comme l’a monté Guillon ce matin, c’était reculer pour mieux se faire égratigner.

                        Cordialement.


                        • Fergus Fergus 10 novembre 2009 17:24

                          Excellent article, Paul, et salutaire coup de gueule.

                          Ce que j’ai ressenti est parfaitement résumé dans ces quatre mots : « programme indigent et bavard ». J’aurais même ajouté « redondant » tant on nous a resservi les mêmes témoignages, voire les mêmes clichés, à longueur d’antenne.

                          Affligeant et indigne du service public de qualité que Radio France prétend incarner ! 

                          Bonne journée.


                          • ramonjimenez ramonjimenez 10 novembre 2009 17:51

                            Merci pour cet article qui reprend ce que j’ai pensé en essayant d’écouter ce programme !

                            Ce qui m’a le plus frappé c’est qu’a aucun moment il n’est remis en question l’économie de marché , qui sort victorieuse de cette émission.

                            pourtant c’était le moment ou jamais d’être un peu plus critique sur ce qu’est devenu le coté ouest de Berlin depuis la chute du mur...


                            • Jocelyn 10 novembre 2009 20:53

                              Beaucoup de bruit pour rien.


                              • docdory docdory 10 novembre 2009 23:45

                                Cher Paul Villach


                                Ce jour là , j’ai juste eu le temps d’écouter la radio en voiture en allant au travail et en rentrant ,j’ai été effaré par l’ennui qui se dégageait de ce « programme spécial » , et j’ai vite zappé mon auto-radio vers la concurrence !
                                Votre analyse tape en plein dans le mille !

                                • Ropi 11 novembre 2009 06:00

                                  Quoi ?? Le mur de Berlin a chuté ??????????

                                  Moi qui écoute potrtant franceinter, je ne le savais pas !


                                  • logo22 12 novembre 2009 18:59

                                    une fois n’est pas coutume, mr VILLACH, cette fois justement, permettez moi de prendre mes distances sur votre propos. Je n’ai pas - loin s’en faut - votre connaissance ni votre capacité d’analyse, mais il se trouve que je suis un auditeur très régulier de France-Inter.
                                    Le deplacement de Radio-France à Berlin , sous le pretexte j’en conviens, de cet anniversaire, m’a au moins forcé à ecouter d’autres voix que les habituelles de France-Inter. Certes tout cela reste formaté « maison », mais si vous aviez eu la curiosité de zapper ne serait-ce que quelques minutes sur les ondes concurrentes et commerciales, vous n’auriez constaté que la mediocrité des propos , sur un sujet rabaissé au rang de quizz à peine digne de TF1. Je crois que nous touchons là précisément aux limites d’un élitisme qui me hérisse parce que justement je me sens parqué du mauvais coté ! Mon mur de Berlin à moi peut être ?


                                    • pierrot123 15 novembre 2009 15:27

                                      En effet, cette « commémoration » totale, unilatérale, et univoque, n’a pris cette tournure que par le désir de nous faire rejeter toute idée d’alternative à la société qui s’installe chez nous en ce moment...
                                      Et la nouvelle direction de Radio-France, bon toutou à sa mère, a eu à coeur de prouver à ses maîtres sa bien pensance en la matière...

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