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Redonner une nouvelle jeunesse aux relations Afrique-France

La France ne s’intéresse plus guère à l’Afrique. Et l’Afrique le lui rend bien. A l’heure où les chefs d’Etats se retrouvent à Cannes pour le XXIVème Sommet Afrique-France, le désamour est palpable. Sur le plan politique d’abord, où la France, perçue comme arrogante, est de plus en plus incomprise sur le continent. A tort ou à raison, sa présence ou son activisme - réel ou supposé - exaspère une partie des opinions publiques locales. Sur le plan diplomatique ensuite, les voix africaines dans les diverses instances internationales ne sont plus systématiquement acquises comme autrefois à la France. Paris en a fait l’amère expérience lors de la désignation de la ville hôte des JO de 2012 ou plus récemment lorsque la candidature de Bernard Kouchner à la direction générale de l’OMS a été écartée dès le premier tour.

Sur le plan économique, enfin, la France n’est plus en terrain conquis dans son ancien pré-carré. Faute de véritables concurrents, elle y a longtemps jouit d’une situation de quasi-monopole. Mais le temps du tête-à-tête exclusif entre la métropole et ses anciennes colonies est définitivement révolu. Même si la France reste le premier partenaire européen des pays d’Afrique - elle totalisait 26 % des exportations européennes et 17 % des importations du continent en 2004
- , ces derniers - il faut s’en réjouir - se sont depuis ouverts à d’autres : la Chine bien évidemment, mais aussi les Etats-Unis, le Brésil, la Russie, l’Inde, sans compter le renforcement des relations économiques entre pays africains. Les entreprises sud-africaines et marocaines, en particulier, trouvent de plus en plus sur le continent un terreau propice à leur développement.

Il est donc loin le temps où l’Afrique n’avait d’yeux que pour la France. Avec l’arrivée au pouvoir d’une nouvelle génération de dirigeants, une page se tourne dans son ancien pré carré. À Madagascar où depuis l’élection en 2002 du nouveau président Marc Ravalomanana, formé aux États-Unis, la France n’est plus qu’un partenaire comme les autres. Et même au Sénégal, où le tropisme américain très « business » de l’entourage du président Wade détonne avec le style très «  administration française » de ses prédécesseurs, Abdou Diouf et Leopold Sedar Senghor.

D’autant que la France ne peut plus guère compter sur ses « réseaux  » d’antan, officiels et officieux, qui ont beaucoup vieilli. Car l’une des causes principales du délitement des relations entre la France et l’Afrique est certainement à rechercher du côté du renouvellement des générations. Un tournant dont on a ni anticipé ni évalué correctement les effets, tant on pensait éternel l’attachement de la France à l’Afrique. Les « africanistes » et « les fous d’Afrique » appartiennent à une génération qui s’en va. Ceux qui dirigent la France aujourd’hui n’ont guère la fibre africaine. Qu’ils soient dans les ministères ou dans les entreprises, leur tropisme les pousse davantage à se tourner vers l’Union européenne, l’Amérique du Nord, la Chine ou l’Inde.

C’est donc à un profond renouvellement des relations entre l’Afrique et la France auquel il faut s’attendre dans les années à venir. Du côté des hommes, le processus est en réalité déjà amorcé. Signe révélateur, les partis politiques français, de droite comme de gauche, ont récemment confié à une nouvelle - et jeune - génération la responsabilité des questions africaines. Au PS, le successeur de Guy Labertit, le Monsieur Afrique (73 ans) est tout juste âgé de 27 ans. A l’UMP, c’est une jeune française d’origine sénégalaise et d’à peine 30 ans qui s’est vu confier le portefeuille de secrétaire nationale à la francophonie. Deux exemples loin d’être isolés car bien d’autres, à des postes divers, fourbissent leurs armes en coulisse.

Les baobabs et les Cassandres, par condescendance ou aveuglement, n’y verront certainement que des cautions aux responsabilités de façade. Trop jeunes, pas suffisamment expérimentés et, de toute façon, tout a été verrouillé par leurs ainés, pensent-ils. Mais, qu’ils le veuillent ou non, le temps faisant son œuvre, c’est entre les mains de cette nouvelle génération que se dessineront les contours de la nouvelle politique de la France en Afrique, dépouillée de ses oripeaux « françafricains » et résolument tournée vers l’avenir. Pour rompre avec les vieilles pratiques, il lui faudra renouveler les méthodes : moins de passionnel, plus de rationnel ; moins de compassion, plus de responsabilisation ; moins de belles paroles, plus d’actes concrets. Et surtout, développer une vision guidée par des intérêts dument identifiés et clairement affichés et assumés. Car, comme le souligne Stephen Smith et Antoine Glaser, ce n’est que « le jour où, au lieu de se targuer d’une « politique africaine » censée faire le bonheur du continent noir, il existera une politique française en Afrique, qu’on pourra présenter aux citoyens-électeurs-contribuables français comme étant de leur intérêt, [que] la France aura tourné la page de son passé colonial ». C’est ce à quoi doivent s’atteler ceux qui pensent, des deux côtés de la Méditerranée, qu’entre l’Afrique et la France, l’Histoire n’est pas encore tout à fait terminée.


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9 réactions à cet article    


  • Pierre R. Chantelois Pierre R. - Montréal 22 février 2007 11:47

    Je me suis beaucoup intéressé à l’Afrique. Je m’y intéresse encore. Une question fondamentale : la France peut-elle rivaliser avec les grands investisseurs qui déversent des milliards en Afrique ? La Chine notamment. Les États-Unis pour des raisons plus géostratégiques et pour leurs intérêts économiques.

    Mon intérêt pour l’Afrique - outre pour des raisons personnelles - est d’ordre économique et stratégique. Une question : que peut faire la France en Afrique ? La France est-elle en mesure de revoir son plan avec la franchise qu’il faut et de remettre en question ses vieilles aspirations coloniales ? La France peut-elle s’orienter vers une modernité toute nouvelle dans ses relations avec les pays d’Afrique ?

    Il ne m’appartient évidemment pas d’y répondre.

    Pierre R. Montréal (Québec)


    • (---.---.38.189) 22 février 2007 12:09

      Nous avons assez à faire avec nos propres difficultés pour aller soutenir maladroitement ceux qui en ont plus encore.

      Nous sommes en voie de sous développement donc désormais incapables d’aider le tiers monde.

      Le seul pays dominant qui a largement les capacités de former des alliances constructives avec les Etats Africains est la Chine. Elle s’y emploie.

      Lorsque nous ferons partie du tiers monde, ce qui ne saurait tarder, la Chine s’occupera alors également de nous.


      • Plus Robert que Redford (---.---.170.61) 22 février 2007 12:23

        Quoi de plus logique qu’une telle évolution de la situation ?

        Notre pays paie les erreurs et déconfitures d’une politique coloniale, puis post-coloniale et enfin néocoloniale sur le continent Africain. le désamour et l’usure des sentiments arrivent logiquement après une longue relation, la france ne fait plus le poids devant les mastodontes économiques Chinois, Américain, Indien... qui ont au moins l’avantage de n’avoir aucune arrière pensée culpabilisée ou paternaliste parce que n’ayant aucun passé sur place.

        En outre, il est extrêmement pratique pour des dirigeants africains corrompus, clanistes, voire incompétents, de brandir l’ancien colonisateur comme bouc émissaire à tous les maux du continent.

        C’est râpé pour nous là-bas, il est temps de quitter les lieux avant d’y laisser sérieusement des plumes.

        Rendez-vous dans trente ans, quand les suivants auront fait leurs preuves et montré que seules les ressources de ces pays et l’argent gagné peuvent les intéresser !


        • LE CHAT LE CHAT 22 février 2007 15:20

          @Arthur

          pour permettre à tes amis yankees de placer leurs rois nègres ?


        • LE CHAT LE CHAT 22 février 2007 17:00

          @arthur

          tu dois connaitre mon pote ou-chat-mat (palairsolidecédeutour) smiley smiley

          à kaboul , un zgeg se dit gan , car quand on lave gan y s’tend ! smiley

          faut envoyer Sarko là bas , il va la retrouver la mobylette du mollah omar ......


        • seb59 (---.---.180.194) 22 février 2007 17:41

          @ l’auteur

          « La France ne s’intéresse plus guère à l’Afrique »

          Vous avez raison ! Et c’est tant mieux.

          Lorsqu’on s’interessait à l’afrique, on nous reprochait notre colonialisme.

          Je vois pas ou est le probleme ?


          • faxtronic (---.---.127.45) 22 février 2007 17:49

            C’est vrai, j’en rien a foutre de l’afrique, et je souhate que l’afrique nous foute la paix.


            • moebius (---.---.139.173) 23 février 2007 01:30

              Par contre les chinois ne leur veulent que du bien ! Mais vous oublier les nombreux français d’origine africaine et les couples mixtes... pour le meilleurs et pour le pire... je serais plutot optimiste.


              • seb59 (---.---.180.194) 23 février 2007 10:21

                On les oublie pas , mais que veut tu qu’on fasse ?

                Ils sont en france, tant mieux.

                Ils voudraient revenir en afrique, pas de probleme.

                Ils veulent revenir en france, revenez !

                Ils peuvent encore se deplacer, non ?

                LA France n’a pas à s’occuper de l’Afrique (occupons nous deja de nous), l’Afrique n’a pas à s’occuper de nous (occupez vous deja de vos problemes et d’installer democratie et gouvernement)

                Mais rien n’empeche la France d’aimer l’afrique et l’Afrique d’aimer la France.... smiley

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