Réforme des Réformes : les Playmobil Renaissance battent en retraite

« Un carreleur a aujourd’hui accès à des protections pour ses genoux qu’il n’avait pas il y a quinze ou vingt ans. Il a des pathologies qui sont moins fortes aujourd’hui. J’ai discuté avec des carreleurs qui m’en ont fait part et qui ont eu toute une carrière ».
Quelle joie, quel bonheur que d’entendre sur le service public un universitaire parisien de Sciences Po, lui même fils d’universitaire parisien, nous parler avec passion d’un métier qu’il connaît si bien, confortablement installé sur un fauteuil Habitat, et conversant aimablement avec des membres de sa caste dans un décor cossu. On appelle ça le charme discret de la bourgeoisie.
Diplômé d’HEC, ami d’Emmanuel Macron dont il fut le témoin de mariage et qu’il connut en 1999 à Sciences Po, avec qui il prépara le concours de l’ENA, dont il fut le conseiller économique lors de la campagne de 2017, conseiller de la Ministre du Travail Muriel Pénicault puis de Jean Casteix, enfin élu en juin 2022 député des français de la Suisse et du Liechtenstein : indéniablement ce grand bourgeois sensible aux questions de la pénibilité des professions manuelles dispose du parfait curriculum vitae pour porter leur parole sur nos plateaux TV. Une rencontre de quelques brèves minutes entre deux coups de fil avec le carreleur employé par Madame pour refaire le hall d’entrée lui suffit amplement pour se faire une idée et nous le faire savoir, avec toute la conviction du monde. Un concentré d’empathie, ce Marc Ferracci !
Ce bref extrait, plus navrant que ridicule, d’un débat ayant eu lieu en fin de soirée le 9 janvier dernier, n’est hélas qu’un exemple choisi parmi tant d’autres. Depuis que le Monarque a décrété la réforme des retraites cause d’entre toutes les causes, éditorialistes, députés, sénateurs, économistes, intellectuels et experts en tous genres ayant pour point commun de vivre dans le 7ème arrondissement de la capitale se poussent des coudes pour nous faire profiter de leurs pâles lumières sur le sujet de ces vies qu’ils connaissent mieux que les intéressés.
On se souvient tous de l’ébouriffante sortie du sénateur macroniste François Patriat en décembre dernier, qui le plus sérieusement du monde nous avait expliqué que l’âge de la retraite pouvait être reculé à 65 ans dans la mesure où les travailleurs manuels tels que les déménageurs et les couvreurs disposaient de meilleures conditions de travail notamment grâce à des exosquelettes. Pareille connaissance du monde du travail nous avait laissés pantois. Sans doute que ses travaux nocturnes au Palais du Luxembourg ne lui avaient pas laissé le temps d’apprendre que le chantier des JO de 2024 avait accumulé 87 accidents graves, ou bien que la France était le plus mauvais élève européen en matière d’accidents du travail avec 650 000 accidents par an dont plus de 700 mortels. Si seulement il avait songé en sortant de son 4 pièces à lever les yeux au ciel, sans doute aurait-il pu s’amuser à les compter sur les toits de Paris, ces exosquelettes.
Encore un qui confond les publi-reportages de l’Usine Nouvelle avec le réel …
Pas plus tard que ce matin sur l’antenne de Télé Drahi, ce fut au tout d’un député Renaissance du Val de Marne, en pleine récitation du missel de catéchisme, de jurer ses grands dieux que la Sainte Réforme voulue par le Luther de l’Elysée n’était que justice eu égard aux femmes et aux pauvres. Oubliant au passage que les femmes ayant eu des carrières hachées et s’interrompant pour élever leurs enfants allaient clairement y perdre, que la surcote entre 62 et 64 ans allait disparaître et que 20 % des français les plus pauvres avaient déjà passé l’arme à gauche à 65 ans.
Encore un qui a appris la vie dans les rapports de Bercy ...
On se pince, et on n’a pas fini de se demander comment pareils louveteaux aussi mal briefés peuvent se lancer sans filet dans l’arène, et se donner en ridicule devant la France entière. Le cabinet Mc Kinsey aurait-il dépêché une armée de stagiaires à Matignon pour que les argumentaires des Renaissance en mission se grillent aussi vite qu’une cigarette ? A moins que ce ne soit du fait de ces piètres représentants de cette bourgeoisie arriviste et d’eux seuls, habitués à lire en diagonale des Powerpoint rédigés par leurs petites mains cinq minutes avant que de rentrer en scène ?
Étonnant spectacle que de voir se succéder un à un ces pompeux sachants se prenant les pieds dans leurs sachoirs tels des débutants. A se demander parfois s’ils ne vont pas au charbon le pistolet sous la tempe, contraints conformément aux exigences de leur fiche de poste d’assurer le SAV sans avoir pu visionner le web-training prévu à cet effet ? Cette prétention à étaler une confiture qu’ils n’ont jamais goûtée transforment ces précieux ridicules en cibles à fléchettes pour citoyens atterrés de voir à quel point, à peine sortis de leurs récitations apprises par cœur, ces assistés du haut du panier dissertant sur la pénibilité battent en retraite sous les quolibets et les rires.
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