Reprenons le passeport de Depardieu et régularisons les travailleurs sans-papiers
Plus de 8 millions de personnes vivent aujourd’hui sous le seuil de pauvreté dans notre pays, près de 4,5 millions sont à la recherche d’un emploi, plusieurs centaines de milliers de travailleurs sans-papiers sont exploités, des familles entières de roms dorment dans la rue et pourtant, une partie de la classe politique et des médias trouve le moyen de défendre l’exil fiscal de Gérard Depardieu. Ceux-là même qui faisaient hier de l’amour de la France la pierre angulaire du vivre ensemble, se rangent aujourd’hui derrière un homme qui méprise l’ensemble des français, en fuyant le fisc et en annonçant renoncer à sa nationalité. La France on l’aime ou on la quitte, c’est ça ? Visiblement Depardieu a fait son choix. Pendant ce temps, des milliers de travailleurs ne peuvent défendre leurs droits pour la simple raison qu’ils sont eux sans papiers. Contrairement à Copé, Morano ou Parisot c’est envers eux que j’exprime ma solidarité.

« Ceux qui s’en vont n’ont qu’une patrie, l’argent¹ ».
A en croire l’UMP ou le Medef, Gérard Depardieu serait une victime de notre système fiscal. Rappelons tout de même que le patrimoine de l’acteur, réalisateur, producteur et chef d’entreprise français avoisinerait, d’après le Wall Street Journal, les 120 millions d’euros. Son hôtel particulier parisien, mis en vente récemment, est annoncé quant à lui à une valeur de 50 millions d’euros (en voilà un beau logement vide à réquisitionner !). Alors que notre pays n’a jamais été aussi riche, le Smic passera seulement à 1121 euros net en janvier 2013 (merci Ayrault !). Qui sont donc les victimes du système ? Les « pauvres » riches ou les autres ?
« La haine de l’état redistributeur, le refus d’apporter sa contribution à la nation, le rejet de la solidarité avec ceux qui gagnent moins », voilà ce qui pousse Depardieu et consort à quitter la France. « Ceux qui s’en vont n’ont qu’une patrie, l’argent² ». En soutenant Depardieu, l’UMP et le Medef donnent du grain à moudre à tous ces rentiers qui, comme Bernard Arnault, sont tentés par l’exil fiscal, et font ainsi du chantage au départ. De son coté, en ne faisant rien, le PS consent. Parisot parle de « climat de guerre civile, qui s’apparente à 1789³ », mais cela n’est qu’une ineptie de plus, car même Sarkozy et le bouclier fiscal n’ont pas empêché le départ d’une partie des riches.
La taxation différentielle vite !
Une seule solution pour lutter contre l’exil fiscal, la taxation différentielle. Elle n’empêchera personne de quitter la France, chacun est libre de se déplacer là où bon lui semble. Cependant il n’y aura plus aucun intérêt à partir pour des raisons fiscales. En effet, tout français vivant à l’étranger paiera ses impôts dans le pays où il réside, mais devra aussi payer à l’Etat français la différence (si il y a différence) avec ce qu’il aurait du payer s’il était resté en France. Ainsi l’impôt sera rattaché à la nationalité et non plus au lieu de résidence. C’est ce que le Front de gauche proposait dans son programme, l’Humain d’abord. Pour le gouvernement, il ne s’agit cependant que d’une « piste » envisageable. Tout reste donc à faire !
Quant à Gérard Depardieu, s’il venait à changer de nationalité, pour devenir belge ou russe ou quoi que se soit d’autre, il ne serait plus concerné par cette mesure. Dans ce cas, une chose à lui répondre, « on va se démerder sans toi4 ».
« On bosse ici ! On vit ici ! On reste ici ! »
Pendant que la droite et le patronat s’offusquent parce que l’on demande davantage d’efforts aux privilégiés et que Depardieu annonce de façon éhontée renoncer à sa nationalité, des milliers de travailleurs sans-papiers sont exploités en France. Le Bureau international du travail (BIT) estime à 400 000 leur nombre sur notre territoire. Pour l’écrasante majorité ce sont des travailleurs. « Ils travaillent, ils construisent nos immeubles, réparent nos rues, posent les rails de nos tramways. Ils nettoient nos bureaux, font le ménage dans nos appartements, s’occupent de nos malades et des plus vieux d’entre nous. Ils lavent la vaisselle et les cuisines de nos restaurants, s’occupent de la sécurité de nos grands magasins, sont la main d’œuvre secrète de nos agences d’intérim… »5.
Cependant, bien que travaillant (pour un salaire de misère), cotisant (à pure perte), payant des impôts, ils ne bénéficient pas des mêmes droits que les autres travailleurs, simplement parce qu’ils sont sans-papiers. Repensons un instant à la totale ignominie dont fait preuve Depardieu lorsqu’il dit vouloir renoncer à sa nationalité ! Car ces personnes se retrouvent à la merci d’employeurs peu scrupuleux qui les exploitent sans craintes ou de marchands de sommeil qui profitent de leur désarroi. C’est ce que l’anthropologue français, Emmanuel Terray, nomme la délocalisation sur place. On aimerait entendre la patronne du Medef s’offusquer de cette pratique plutôt que de s’apitoyer sur le sort de Depardieu.
La régularisation des travailleurs sans-papiers vite !
Le mythe de l’immigration, fardeau économique de la France, est aujourd’hui balayé. L’étude de l’économiste et universitaire lillois Xavier Chojnicki l’a prouvé, les immigrés « coûtent« 48 milliards d’euros par an en dépenses sociales et publiques et « rapportent« plus de 60 milliards d’euros en cotisations et impôts. Rien donc, ne justifie cette absence de réaction des pouvoirs public (sinon les reconduites à la frontière) sur la question des sans-papiers ! A la différence de Depardieu, eux veulent rester ici, vivre dignement et participer à la contribution commune. Pourquoi donc leur refuser cela ?
La régularisation des travailleurs sans –papiers « est la seule manière d’arrêter le dumping social6 ». C’est ce que le Front de gauche proposait dans son programme, l’Humain d’abord. Cependant, sur cette question comme sur tant d’autres, le gouvernement est aux abonnés absents. Quant à Depardieu, son attitude s’apparente à celle des émigrés qui, durant la Révolution, quittaient la France pour se soustraire aux volontés de la nation. Il ne mérite que notre mépris le plus profond.
¹ AFP, 12/12/2012
² Monique Pinçont-Charlot, Latribune.fr, 19/12/12
³ Laurence Parisot, Europe 1, 21/12/12
4 Philippe Torreton, Libération, 17/12/2012
5 Extrait du manifeste du collectif des cinéastes pour les « sans-papiers »
6 Jean-Luc Mélenchon,Des paroles et des actes, France 2, 12/01/2012
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