Résoudre la démocratie paradoxale : ne pas réformer le capitalisme mais l’homme
Les sociétés agissent et réagissent parfois de manière incompréhensible. Nous connaissons tous les effets pervers. On promulgue une loi pour améliorer dans un sens et l’effet obtenu est inverse. En fait, une société humaine est un système tellement complexe, avec des agents imparfaitement connus si bien que quelques phénomènes et pas les moindre, échappent à toute logique. Alors bien souvent, les analystes simplifient.
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Thèse. Prenons le cas de la récession économique. On voudrait une explication simple. Et on la trouve. Les coupables, ce sont les banquiers et d’ailleurs, il y a un lien de causalité temporel évident. Première phase, la crise financière, seconde phase, la récession et le chômage, la baisse des productions industrielle et de la consommation. Euréka, on a trouvé les causes. Alors l’opinion n’a plus besoin de réfléchir et les populistes n’ont plus qu’à lancer de bonnes intentions. Moraliser le capitalisme. Et pour pallier au plus pressé, relancer la croissance. En injectant de l’argent quitte à creuser les déficits. Et maintenant, le bon peuple attend de voir ce qui se passe.
Alter thèse. Maintenant une autre version. Ce n’est pas la finance qui a causé la récession mais en fait, les processus sont systémiques. Autrement dit, le système économique vivait dans un état de déséquilibre. Trop de pression, de crédit. Et à un moment, les niveaux des indicateurs paniquent et un nouvel état s’installe. Correspondant à l’économie réelle. Il y a eu trop de crédits distribués, trop de produits spéculatifs, trop de déséquilibre dans les solvabilités, si bien que ceux qui ont trop d’argent ne le dépensent pas et ceux qui pourraient le dépenser pour des biens basiques ne le peuvent pas parce que la monnaie a été siphonnée par une caste économique supérieure et transnationale. Autre ajustement, l’emploi. Compte-tenu de la structure du système, il n’y a un excès de travailleurs par rapport aux emplois nécessaires pour entretenir le système et lui faire produire pour les besoins des classes moyennes, ajoutés aux désirs des classes supérieures. Le chômage est lui aussi une variable qui se réajuste et correspond à la mise en place du nouveau régime de croissance molle, voire de modeste récession.
Interrogation. Posons-nous la question de ce déséquilibre. Nous savons que ne pouvant augmenter les salaires, les Etats ont encouragé la distribution des crédits pour que les gens achètent, pour la croissance, et pour le profit des banques. Mais les gens n’ont plus pu rembourser. Fred Foldvary, notre facétieux et génial éditorialiste de progress report, avait souligné que depuis trente ans à peu près, ou disons en étant prudent 20 ans, donc après le tournant Reagan, la courbe du salaire médian n’avait pas suivi celle de la croissance. Autrement dit, tous ces dollars créés en conjonction avec le système production, eh bien les gens n’en ont pas vu la couleur. On devine à qui a profité l’élévation du niveau matériel. A un cinquième du pays disons pour donner une évaluation. Cela peut être le tiers ou plus à la limite. Ainsi, 60 à 80 % des citoyens américains n’ont pas bénéficié des fruits de la croissance.
Explication. Ce qui nous conduit au paradoxe démocratique. Comment, dans un pays où on peut exprimer librement, où il y a des médias, des journaux, des bons professeurs, d’excellents journalistes, les citoyens conduisent au pouvoir des gouvernants dont le résultat au final est de favoriser la captation des richesses produites par une minorité ? Plusieurs explications sont plausibles et sans doute complémentaires. J’en soulignerai une. Le rêve américain. Chaque individu a besoin d’une motivation, d’un horizon pour avancer. En dépit d’une intense religiosité, l’Américain moyen a des rêves matérialistes. Qui ne peuvent se réaliser que dans une société économiquement inégalitaire. Mais le droit est essentiel. Il faut un jeu équitable. C’est d’ailleurs le principe du jeu. Il y a quelques gros gagnants parce qu’il y a beaucoup de perdants. Nous pourrions dire à la limite que le ressort de ce système capitaliste qu’on connaît, c’est la « dépravation » humaine. Dans les classes moyennes, c’est l’envie, et chez les élites, c’est la vénalité.
Les séries américaines semblent dévoiler ce marasme matérialiste. Mais qui sait si la vénalité ne dépasse par la fiction ! (5 centimes d’euros seront reversés à Bernadette)
Conclusion. Il ne s’agit pas de réformer, réguler ou humaniser le capitalisme. La seule solution, c’est une réforme, ou plutôt une transformation de l’homme, surtout intérieure, spirituelle. L’homme égaré dans le consumérisme qui ne sait plus inventer un bien vivre ensemble et pour tous avec des moyens conséquents mais pas démesurés. Juste en rapport avec les capacités productives du système capitaliste équitablement réparties.
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