Rex Tillerson ou la goutte d’eau qui a fait déborder le gaz
Ni sa bonhomie ni son tempérament calme et discret encore moins d’homme bosseur et pondéré n’auront été d’un grand secours à Rex Tillerson que son président Donald Trump a jeté comme un mégot de cigarette.
Poutine a remis en 2013 à Tillerson la décoration russe de l'Ordre de l'Amitié.
Ni sa bonhomie ni son tempérament calme et discret encore moins d’homme bosseur et pondéré n’auront été d’un grand secours à Rex Tillerson que son président Donald Trump a jeté comme un mégot de cigarette. Alors en pleine tournée officielle en Afrique où il bataillait notamment pour recoller les morceaux du vase que l’éléphant Trump a pulvérisé en qualifiant publiquement certains Etats du continent noir émetteurs d’immigrés de « pays de merde », Tillerson apprit qu’il a été viré mardi dernier de son poste de chef de diplomatie américaine par un méchant tweet présidentiel comme Trump sait et adore en publier. Exit Tillerson. Bonjour Mike Pompeo ! Le jusqu’alors directeur de la CIA est le nouveau secrétaire d’Etat. Mais qu’a fait de si méchant le malheureux Tillerson pour mériter un tel désaveu ? Apparemment rien sauf ce que dit Trump lui-même et tout le gotha médiatique qui a pignon et pognon sur rue ; à savoir des discordances de vue entre le limogé et le chef de la Maison Blanche sur les dossiers iranien et nord-coréen. C’est possible. Le Texan est tout sauf un va-t-en-guerre, et comme l’indique la nature du poste dont il a été déchu c’est un diplomate, et comme les grands diplomates chevronnés viennent souvent du monde de l’entreprise et non de celui de la télé comme Trump, Tillerson est issu d’ExxonMobil, major du pétrole et du gaz. D’ailleurs Donald Trump lui-même dira de lui quand il l’a proposé au poste de ministre des affaires étrangères qu’ « il est bien plus qu'un chef d'entreprise : c'est un joueur de classe mondiale. » Alors pourquoi l’a-t-il alors viré d’une façon humiliante ce 13 mars ? A moins de 10 jours de son jour d’anniversaire où il bouclera ses 66 ans et à une semaine de la visite très attendue du prince héritier saoudien Mohamed Ben Salman aux Etats-Unis où il sera reçu par Trump et dont le menu comprend quelques commandes d’armes made in USA. En fait l’homme traîne un chapelet de casseroles aussi sonnantes et trébuchantes les unes que les autres. Autrement dit, il pue le gaz pour ses détracteurs qui sont légion, aussi bien à l’intérieur des Etats-Unis qu’à l’étranger. D’abord au sein du parlement américain. Sa confirmation par le sénat le 1er février 2017 a été ric-rac. Il est confirmé par 56 voix contre 43, soit la plus faible majorité de confirmation d'un secrétaire d'État des États-Unis ! Hors frontières, chez les alliés inconditionnels de Washington, il ne semble pas non plus beaucoup séduire. A cause de sa neutralité et surtout prudence sur le conflit entre l’émirat du Qatar et le quartet arabe, dirigé par l’Arabie saoudite, quartet qui comprend outre le royaume wahhabite le Bahreïn, les Emirats et l’Egypte, et qui accuse le Qatar de soutenir le terrorisme. En effet, bien que Tillerson ait arraché le 11 juillet 2017 un accord avec le Qatar qui s'engageait à lutter contre le financement du terrorisme, ce quartet lui signifiera le lendemain dans la capitale saoudienne, Jeddah, que ses efforts ne sont pas suffisants . En langage diplomatique ce terme alambiqué signifie parfois « ne sont pas les bienvenus ».
Mieux, le quartet qui a mis le Qatar sous en embargo total depuis le 5 juin 2017 soupçonne ce minuscule émirat gazier de connivence avec Tillerson qui avant de faire partie de l’équipe de Trump dirigeait ExxonMobil du 1er janvier 2006 jusqu’à sa nomination par Trump en février 2016. ExxonMobil est en fait très impliqué au Qatar. Non seulement le groupe pétrolier s'est associé à Qatar Petroleum pour développer le plus grand champ de gaz naturel non associé au monde mais il a l’habitude d’y cofinancer certains des grands événements culturels et sportifs organisés à Doha, dont la fameuse exposition qui retrace toute l'histoire des Jeux, de l'Antiquité aux Jeux modernes, organisée en 2013. Mais s’il n’y avait que cette tâche noire sur le CV on dirait ça va. Mais il y a pire : sous Tillerson, le pétrolier ExxonMobil a fait des affaires avec les grands méchants que sont l'Iran, la Syrie et le Soudan, par le biais d’une filiale européenne, révèle le journal à grand tirage USA Today, citant des sources boursières. Pire encore : Israël accuse Tillerson d’antisémitisme. Le rapport annuel publié le 19 juillet 2017 par le Département d'Etat américain sur le terrorisme en 2016 était jugé sévère avec Israël « en ignorant en grande partie le soutien financier de l'Autorité palestinienne aux terroristes. » Certes le rapport a été élaboré sous le prédécesseur de Tillerson mais il a été rendu public sous ce dernier… Ainsi emmuré, si le Texan retrouve son fauteuil de patron d’ExxonMobil, c’est que les miracles existent, d’autant que la pétrolière a également fait des business en Russie sous sa présidence, particulièrement en mer caspienne. Sacrilège !
http://chankou.over-blog.com/2018/03/rex-tillerson-ou-la-goutte-d-eau-qui-a-fait-deborde-le-gaz.html
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