Roche : la nouvelle brebis galeuse de Big Pharma
L’Agence européenne du médicament (EMEA) vient d’engager une procédure sans précédent contre le groupe pharmaceutique suisse Roche. Celui-ci a en effet failli à son devoir de pharmacovigilance en ne transmettant pas à l’agence européenne plus de 100 000 rapports médicaux de patients concernant les effets secondaires de 19 médicaments (contre le cancer, des anti-viraux dont l’Oseltamivir, des antirétroviraux et une médicament pour maigrir…) ainsi que 600 dossiers de patients en essai clinique.
Sur les 103 600 rapports, 15 161 concernent des décès de patients.
L’EMEA pourrait infliger une amende se montant à 5% du chiffre d’affaires annuel de l’entreprise en Europe qui s’élevait à 13 milliards d’euros en 2011). Réponse de l’EMEA d’ici avril 2014 sans écarter celle du CODEM, (émanation déontovigilante du LEEM, créé il y a un an) qui pourrait également le sanctionner.
Petit retour en arrière (concernant l’Oseltamivir ou Tamiflu® visé dans la plainte).
S’appuyant sur les recherches et les brevets sur le Relanza® déposés en 1989 par le Centre de recherche scientifique et industriel du Commonwealth de Melbourne, Gilead Science, petit laboratoire californien de biotechnologie met au point le Tamiflu® en 1994.
Un moment soupçonné d’avoir manipulé le dossier d’accréditation, Gilead Science - dont le président était un certain Donald Rumsfeld qui en détient encore 5 à 25 millions de dollars d’actions -, pouvant à peine financer sa recherche, est incapable d’assurer le développement industriel et commercial de sa molécule. Il cèdera donc en 1996 sa licence d’exploitation et de commercialisation au géant pharmaceutique Roche pour 50 millions de dollars et des royalties comprises entre 12 et 20% sur les ventes.
Dès 1999, l’Antiviral Drug Products Advisory Commitee (ADPAC) avait déjà vainement recommandé à une très large majorité que le Tamiflu® et son concurrent le Relanza® ne soient pas approuvés par la FDA en raison de leur faible efficacité, et de leur coût très élevé (100 $ le traitement !).
Deux ans plus tard, deux rapports de l’Office canadien de coordination de l’évaluation des technologies de la santé (OCCETS), confirment en tous points l’expertise de l’ADPAC.
Alors que Roche avait obtenu les autorisations nécessaires dans 64 pays occidentaux, il ne diffusera sa molécule que dans 24 pays, et surtout au Japon, sans développer une réelle campagne de marketing ce qui lui sera reproché par Gilead avec lequel le partenariat sera revu à la hausse au bénéfice de Gilead…. Une rumeur laissait même entendre que le laboratoire Roche pensait à le retirer du marché.
Les crises H5 N1, avortée, puis HIN1 ont alors boosté considérablement les actions de Roche et … de Rumsfeld (le chiffre d’affaires généré passant de 330 millions de francs suisses en 2004 à 1 558 en 2005, 2 627 en 2006, 3 941 en 2007 avant une baisse significative en 2008 pour remonter à 3 200 Frs suisse en 2009 avant de redescendre à 873 puis 359 millions de frs suisses en 2010 et 2011.)
En 2005, une étude portant sur l’analyse de 28 essais cliniques justifiait l’utilisation du Tamiflu dans le traitement de la grippe commune. Or, les résultats de 8 de ces essais avaient été gardés secrets par Roche. En refaisant l’analyse sur les 20 études restantes, le Nordic Cochrane Center de Copenhague et le British Medical Journal (BMJ) concluaient, en 2009, que le Tamiflu® ne prévenait pas les complications de la grippe. Roche s’était alors engagé solennellement à publier les données manquantes. Promesse non tenue 3 ans plus tard.
Entre temps, en 2006, le Japon faisait état de plus de 100 complications neuropsychiatriques graves dont plus de 50 suicides. Le Tamiflu® fut dans un premier temps innocenté par un chercheur qui reconnut avoir reçu 86 000 de dollars de Roche et un autre 25 000 dollars.
Le 29 octobre 2012, la rédactrice en chef du BMJ publie une lettre ouverte au laboratoire Roche lui demandant de publier l’intégralité des études réalisées sur le Tamiflu®. Roche rétorquera : « Nous n’acceptons pas et ne sommes pas d’accord avec le contenu de cette lettre mettant en cause notre manque de transparence. Nous nous sommes conformés à l’ensemble des exigences légales en la matière » en rendant l’ensemble des données publiques. Nouveau mensonge.
Un mois plus tard, le BMJ, sous la plume d’un chercheur du Nordic Cochrane Center de Copenhague suggère aux gouvernements concernés d’attaquer le laboratoire en justice, et à ses confrères de boycotter l’ensemble des médicaments fabriqués par le groupe suisse « jusqu’à ce qu’il publie l’intégralité de ses données concernant l’oseltamivir »…
Interrogé par la presse, le Pr. Bruno Lina, en conflit d’intérêts avec l’OMS et les labo pour la grippe, avouera mensongèrement qu’« il n’existe pas à ce jour d’étude en double aveugle et contre placebo concernant l’efficacité du Tamiflu® sur les formes graves de la grippe ». Or, au Vietnam, avec l’utilisation du Tamiflu®, la mortalité pour la grippe H5N1 a été multipliée par deux.
Dr Marc VERCOUTERE
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