Sanofi : le démantèlement programmé de la R&D et ses dégâts collatéraux
De 2008 à 2012, Sanofi avec à sa tête Christopher Viebacher pourrait avoir donné le coup mortel à l’avenir de l’industrie pharmaceutique en Europe et plus particulièrement en France avec la fermeture de la moitié de ses sites de R&D. Si l’on peut s’indigner des 4000 chercheurs et techniciens de recherche supprimés en quelques années pour augmenter les dividendes de quelques fonds de pensions et des prochains milliers déjà annoncés par la direction, le problème n’est plus tant là ! Le problème devient sociétal. Il n’est désormais plus tant dans la suppression de postes mais dans leur non création. Le capitalisme boursier de manière historique supprime des postes pour les recréer ailleurs mais ici, il s’agit d’une restructuration majeure et mondiale de l’industrie pharmaceutique qui ce faisant n’intègre plus dans ses rangs de jeunes générations.
Sanofi en cela, n’est pas unique mais emblématique, 8,8 milliards de bénéfices mais aucune embauche « effective ». N’entendez pas en cela que Sanofi n’embauche personne. Non Sanofi intègre des managers, comptables, contrôleurs, gestionnaires, des vice-présidents de tout et de rien. Sanofi enrichit sa pyramide par le haut mais supprime les bataillons de fourmis qui l’alimentent : les derniers chercheurs et techniciens de recherche ont été intégrés avant 2008. N’entendez pas non plus que Sanofi n’embauche nulle part. Non Sanofi intègre encore dans sa R&D de nombreux cadres dirigeants et managers dans les pays émergents ou aux USA où son centre de gravité se déplace inexorablement. Sanofi seule coupable ? Non Pfizer, GSK, Roche, Astra Zeneca et bien d’autres ont déjà abandonné l’Europe et Sanofi ne leur emboite que le pas. Les entreprises pharmaceutiques externalisent leurs risques, achètent de la recherche, sous-traitent leur développement, se séparent de leurs fourmis laborieuses : chercheurs, techniciens développeurs, chimistes et embauchent des gestionnaires de risque et de portfolio.
Les dégâts collatéraux se font déjà sentir. Quid des jeunes diplômés de DUT, Masters Pro et doctorat en biologie, chimie ou pharmacie ? Seul le vide et le néant leur semble désormais promis ! Sanofi comme d’autres n’intègre plus grand monde mais reçoit sans contrepartie des centaines de millions d’aide directe et indirecte sous la forme entre autres de Crédit Impôt Recherche, de prix aménagés pour ses médicaments et de niches fiscales nombreuses et variées. En effet, Sanofi comme d’autres ne semble ne même plus jouer son rôle de formateur : les jeunes doctorants effectuant une thèse de recherche dans ses murs pourraient bientôt se compter en France sur les doigts d’une main. Les équipes de recherche internes en manque de perspectives devant les changements stratégiques incessants et les resserrements de budget réfléchissent à deux fois avant d’offrir le moindre stage de BTS, DUT ou de masters Pro. Combien de post-doctorats financés dans Sanofi ? Combien de thèses publiques financées par Sanofi en France ? Pourquoi à Sanofi seuls les stages des rares filières en alternance de BTS, DUT et licence trouvent-ils encore grâce si n’est que ce type de filière est largement subventionné par l’état ? Pourquoi, ces stagiaires en alternance autrefois intégrés pour être formés semblent désormais considérés comme des CDD voire des intérimaires ?
En France, les Masters Pro de biologie, chimie ou pharmacie ferment faute de débouchés à offrir à leurs étudiants, les IUT se questionnent, les écoles doctorales se réorganisent en vain… les chercheurs de Sanofi pleurent leur passion passée de la recherche et la fierté qu’ils avaient à la transmettre…
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