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Accueil du site > Tribune Libre > Sarkozy et la françafrique : le défi togolais

Sarkozy et la françafrique : le défi togolais

Alors que Nicolas Sarkozy tarde à mettre en oeuvre la rupture tant vantée dans nos relations avec les pays africains, les prochaines élections législatives au Togo pourraient être l’occasion de soutenir une ouverture vers la démocratie dans ce pays longtemps dirigé d’une main de fer par le général Eyadéma avec l’appui de la France.

Le Togo, c’est ce petit pays d’Afrique de l’Ouest, qui a subi une des plus longues dictatures de la Région, avec le soutien inconditionnel de la France, puisque le général Eyadéma est resté au pouvoir de 1967 à 2005, date de sa mort.

C’est ce pays, dont les téléspectateurs français ont vu, lors des dernières élections de 2005, des images de militaires emportant des urnes, pour "les mettre à l’abri" soi-disant.

C’est un pays, jadis surnommé la "Suisse de l’Afrique", et dont la situation s’est peu à peu dégradée dans les années 90, tombant littéralement en ruine alors que les pays voisins connaissaient des alternances politiques leurs permettant de bénéficier d’investissements importants de la part des bailleurs de fonds.

La France renverse Olympio et installe son homme de main

Tout a commencé en 1960, alors que le Togo, ancienne colonie allemande, passée sous tutelle française après la Première Guerre mondiale, accède à l’indépendance. Sylvanus Olympio devient son premier président. Il a fait ses études à la London School of Economics et a ensuite été cadre pour Unilever dans la sous-région. Jaloux de l’indépendance chèrement acquise de son pays, il cherchera à faire sortir le Togo de la zone franc ce qui ne plaira pas, on l’imagine, aux autorités françaises de l’époque.

Il est donc décidé de l’éliminer. Cela se fera par l’intermédiaire d’anciens militaires togolais ayant servi dans la Coloniale et démobilisés depuis l’indépendance de leur pays. Nombre d’entre eux ont fait l’Indochine et l’Algérie, notamment celui qui prendra la tête de l’Etat, le sergent Etienne Eyadéma. Foccart et ses hommes de main exploiteront l’erreur politique d’Olympio, qui avaient refusé de réintégrer ces soldats, autant parce qu’il estimait que les ressources du pays devaient d’abord servir au développement économique du pays que parce qu’il ne voulait pas de militaires fidèles à la France ayant lutté contre l’indépendance d’autres peuples colonisés.

Un commando, dont les actions sont directement coordonnées par l’ambassadeur de France, prend le contrôle des lieux-clés de la capitale le 13 janvier 1963 et assassine Olympio devant les grilles de l’ambassade des Etats-Unis, dans laquelle il s’était réfugié. Eyadéma se vantera plus tard auprès de journalistes américains d’avoir lui-même tué Olympio.

S’ensuit un intermède de quatre ans, pendant lesquels Eyadéma devient chef d’Etat-Major alors qu’un métis bon teint, Nicolas Grunitzky, est nommé président. Celui-ci ne tardera pas à montrer ses limites et le 13 janvier 1967, quatre ans après l’assassinat d’Olympio, Eyadéma s’installe au pouvoir pour ne le quitter qu’à sa mort, le 5 février 2005.

Ce long règne est marqué par la répression de toute opposition et un culte de la personnalité de plus en plus marqué, dont les méthodes s’inspirent du modèle nord-coréen (qui prêtera son assistance technique dans ce domaine). Cependant, du point de vue économique, dans un contexte de guerre froide où appuyer financièrement des dictateurs n’est pas un problème et grâce à des cours élevés des matières premières (dans les années 1970), l’argent coule à flot.

L’Echec de la démocratisation dans les années 1990

Après le discours de la Baule de François Mitterrand, conditionnant l’aide au développement à la démocratisation, le Togo entre dans une période d’incertitude. Des manifestations et des grèves poussent, comme dans les autres pays de la sous-région, le pouvoir à organiser une Conférence nationale, chargée de rédiger une nouvelle Constitution et de préparer des élections démocratiques. Un gouvernement de transition est nommé, mais celui-ci rencontrera sur son chemin une partie de l’armée, qui n’accepte pas les réformes en cours et souhaite le retour d’Eyadéma. Fin 1992, celle-ci prend d’assaut la résidence du Premier ministre, causant de nombreuses victimes, puis l’oblige à passer un accord avec Eyadéma, pour que celui-ci reste au pouvoir. S’ensuit une grève générale qui durera un an et qui causera la ruine d’une économie qui ne s’en est toujours pas relevée.

Notons ici, que si la tentative de démocratisation n’a pu aller jusqu’au bout, à l’inverse du Bénin voisin, l’opposition togolaise porte une part de responsabilité dans cet échec, du fait de ses querelles internes et en ayant cédé à ses représentants les plus extrémistes. Ceux-ci à peine installés au pouvoir lors de la Conférence souveraine parlaient ouvertement de l’éliminer alors que tout n’était pas joué. Il eût été plus sage de lui accorder l’immunité, comme cela a été le cas au Bénin, et d’effectuer une transition en douceur.

Depuis la reprise du pouvoir par Eyadéma, l’histoire récente du Togo est émaillée d’élections truquées et de répressions lorsque la population manifeste. En 1998, l’armée tirera sur la foule ce qui entraînera la suspension de la coopération entre le Togo et les principaux bailleurs. Seule la France, reprendra après une pause d’un an son aide au Togo.

Un nouveau départ ?

La mort d’Eyadéma en 2005 a donc suscité beaucoup d’espoirs, mais des craintes également. Après un imbroglio juridico-constitutionnel, au cours duquel l’armée avait illégalement placé au pouvoir le fils d’Eyadéma, Faure, celui-ci s’est retiré sous la pression internationale et des élections présidentielles ont été organisées. Malheureusement, celles-ci ont encore une fois été émaillées de fraudes et suivies, après l’annonce des résultats, d’une répression violente. Les estimations vont de 500 morts selon l’ONU à un peu moins de 1 000, selon les organisations togolaises de défense des droits de l’homme. De nombreux togolais se sont alors réfugiés dans les pays voisins.

Cette élection contestée de Faure Gnassingbe a donc sonné le glas des espoirs de beaucoup de Togolais. Cependant, on a pu remarquer un changement de style et une certaine amélioration dans la pratique du pouvoir. Cela s’est manifesté dans la signature d’un Accord politique global en août 2006 entre les principaux partis, qui a été suivi par la formation d’un gouvernement d’Union nationale, dirigé par un des opposants historiques à Eyadéma.

Une des missions principales de celui-ci est de mener le pays à des élections législatives, libres et transparentes, qui garantiront la reprise totale de la coopération avec l’Union européenne et avec les autres principaux bailleurs de fonds internationaux.

Souhaitons donc que celle-ci se passe le mieux possible et qu’en cas de fraudes la France ne s’illustre pas une fois de plus en soutenant un candidat rejeté par les urnes. Ce serait là une véritable rupture !

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16 réactions à cet article    


  • TSAKADI Komi TSAKADI 12 octobre 2007 13:42

    Salut Estaban,

    Merci pour ton article. Je viens de le lire depuis Lomé. Nous sommes en pleine campagne électorale et tout ce passe bien. Nous espérons que le vote se passera bien dimanche et que le peuple ne se verra plus voler sa victoire par les dirigeants et la francafrique. Komi


    • Esteban Manchego Esteban Manchego 13 octobre 2007 17:05

      Salut Komi,

      J’ai entendu dire en effet que la campagne s’était plutôt bien déroulée. J’ai oublié de préciser dans mon article que les élections auront lieu le dimanche 14 octobre. On ne peut qu’espérer que les élections se déroulent au mieux demain et qu’il en ressorte une majorité représentative des volontés des togolais.

      L’enjeu de ces élections est aussi la reprise totale de la coopération avec l’UE et les autres bailleurs, ce qui est vraiment nécessaire. Cette élection représente aussi un test de la capacité de Faure à maîtriser l’aile dure du RPT.

      Bon courage et tiens nous au courant.

      Cordialement,


    • Romain Baudry 12 octobre 2007 16:31

      La Françafrique est une institution que le peuple français, dans sa majorité, n’approuve pas (même si ça ne l’empêche pas de dormir non plus) et dont on nous a à de multiples reprises annoncé la fin sans que cela donne lieu au moindre changement perceptible. Les visites de Sarkozy à Omar Bongo ont vite montré que sa fameuse rupture ne s’étendait pas à ce domaine-là. Bref, il ne faut pas trop compter sur le gouvernement français pour se rendre utile (ou même éviter de nuire) cette fois encore.

      Bonne chance aux démocrates togolais !


      • Esteban Manchego Esteban Manchego 15 octobre 2007 03:05

        Effectivement, concernant Sarkozy, je ne suis pas très optimiste, vu la vitesse à laquelle sa rupture, concernant la politique africaine, est passée à la trappe ! smiley

        C’est bien dommage, car il avait été un des rares à critiquer les conditions d’élection de Faure Gnassingbe en 2005 mais ça devait être surtout pour contredire Chirac qui avait été un des premiers à le reconnaître officiellement.

        Par contre, pour le Togo, je suis relativement optimiste car à présent il y a pas mal de facteurs (reprise de la coopération) qui font que la majorité des acteurs ont intérêt à ce que les élections se passent bien. Reste toujours l’aile dure du RPT qui ne veut rien lâcher, mais apparemment, ils n’ont pas eu le dessus.

        Il faut dire aussi que l’enjeu s’il est important en terme symbolique et économique, reste limité sur le plan politique, le président conservant l’essentiel du pouvoir face aux députés.

        J’ai entendu sur RFI qu’il y avait eu pas mal de couacs techniques, dans le déroulement de l’élection. On verra la proclamation des résultats mardi ou mercredi. Affaire à suivre.


      • Esteban Manchego Esteban Manchego 15 octobre 2007 03:14

        J’ai retrouvé la dépêche parlant de la réaction de Sarkozy à l’élection de Faure Gnassingbe, ça vaut son pesant de cacahuètes ! Il faudra comparer cela à ce qu’il dira par la suite :

        CERGY, Val d’Oise (AP) - Nicolas Sarkozy a critiqué mardi la réaction de la France à l’élection présidentielle au Togo, en y voyant « une parodie d’élection ».

        « Je pense qu’il n’y avait aucune matière à se féliciter de ce qui est une parodie d’élection », a déclaré le président de l’UMP lors d’un débat avec les étudiants de l’Essec à Cergy-Pontoise (Val d’Oise).

        Nicolas Sarkozy était interrogé par un étudiant sur la réaction de la diplomatie française face à l’élection le 24 avril de Faure Gnassingbé, fils du dictateur Gnassingbé Eyadéma, décédé le 5 février dernier. Contestée par l’opposition, cette élection avec 60% des voix a été entérinée par la France.


      • hurlevent 14 octobre 2007 17:13

        L’idée selon laquelle c’est la France qui a soutenu le coup d’état de Eyadéma est du délire pur et simple, et ne repose sur aucune preuve.

        C’est incroyable de voir des articles de si mauvaise foi. La France n’a aucun intérêt à aider tel ou tel dirigeant et s’est engagé pour conditionner l’aide à l’Afrique sur des critères démocratiques.


        • Esteban Manchego Esteban Manchego 15 octobre 2007 02:32

          Du délire, vraiment ? On ne doit pas vivre dans le même monde, alors. De plus, vous donnez vraiment l’impression de ne pas connaître grand chose à l’Afrique et à la politique de la France là-bas.

          Pour ce qui concerne le soutien de la France à Eyadéma, c’est tellement du délire que même Foccart, ce pourfendeur bien connu du néocolonialisme, ne s’en cache pas dans ses mémoires (cf. « Foccart parle » tomes I et II), donc renseignez-vous un peu avant de dire n’importe quoi.

          La question de savoir dans quel intérêt nous l’avons fait c’est une autre question, mais il y a plusieurs pistes : peut-être pour garantir nos intérêts économiques (Bolloré, Total...), géostratégiques (Lomé est la base arrière de l’opération Licorne en RCI) ou tout simplement pour éviter de lâcher des gens qui en savent beaucoup sur le financement occulte des partis politiques français... Je dis ça...


        • ernst 15 octobre 2007 00:07

          On commence sérieusement à en avoir marre de constater que tout ce qui arrive à l’Afrique de l’Ouest, c’est la faute de la France. Marre d’entendre à longueur de journée que la Colonisation a été un martyre épouvantable. Personnellement, j’ai entendu Senghor (lequel voulait une réciprocité de nationalité) et Diouf regretter cet heureux temps qui protégeait l’arachide. Que les africains se prennent en main et sortent de la colonisation, bien plus évidente et séculaire, de la corruption.

          Tant que l’Afrique vivra sur son mode ancestral de royautés familiales, qu’elle ne compte pas s’en sortir.L’Afrique est le deuxième continent le plus riche (demandez aux chinois) et son chantage au malheur colonial commence à faire long feu...


          • Esteban Manchego Esteban Manchego 15 octobre 2007 02:53

            Vous déformez mes propos : j’ai simplement dit qu’il fallait que la France arrête de soutenir des régimes dictatoriaux et de tenir des discours du genre : l’Afrique n’est pas mûre pour la démocratie. Cela ne signifie pas que la France est responsable de tous les malheurs de l’Afrique. Les Africains ont aussi leur part de responsabilités (corruption, népotisme...). D’ailleurs, si vous avez bien lu mon article (ce dont je doute), vous verrez que j’ai souligné les responsabilités de l’opposition dans la reprise en main du pouvoir par l’armée et Eyadéma en 1991.

            Simplement, il est difficile de se développer lorsqu’on n’est pas maître de son destin et que l’on vit sous une dictature appuyée par une puissance industrielle étrangère (ce qui a été le cas du Togo).

            Quand à votre couplet sur « le mode ancestral des royautés familiales » africaines, cela traduit simplement, comme le commentateur précédent, votre méconnaissance de l’histoire africaine. Les régimes prédateurs africains s’apparentent plus en effet à une administration coloniale qu’à une hypothétique royauté ancestrale. Les administrations post-coloniales se sont moulées dans les structures existantes sans les transformer fondamentalement.

            Maintenant, je suis d’accord pour dire que les Africains se prennent en main mais qu’on les laisse le faire et qu’on regarde en face notre passé colonial, sans crier au scandale dès qu’on ressort un squelette du placard !


          • Nobody knows me Nobody knows me 15 octobre 2007 13:30

            En vous lisant ernst, j’ai failli tomber à la renverse. Je suis effaré par tant de mauvaise foi (bien française elle). Votre manière de retourner les choses n’est pas très fine. Vous faîtes dire à l’auteur que la France est responsable de tous les maux en Afrique et par la suite hop ! Elle n’a plus aucune responsabilité, c’est de la faute des africains...

            Vous en avez marre d’entendre ça à longueur de journée ? Que les choses changent et le problème sera résolu.


          • Act 16 octobre 2007 11:16

            Esteban et ceux de bonne foi,

            Si les relations France-Afrique ou l’immigration sont déjà des sujets difficiles à faire entendre raisonnablement, la Françafrique est quasiment inabordable. Mais c’est sa nature même de l’être puisqu’en tant que réseau politico-maffieux opérant au plus haut niveau, elle jouit de moyens énormes dont notamment le privilège des médias. De plus c’est une alliance objective entre la gauche et la droite et de nombreuses grosses associations grassement subventionnées. Le sort fait à cette vidéo de Bongo recevant Sarko avant la présidentiel est éloquent. http://www.dailymotion.com/video/x1im7c_sarkozy-et-bongo

            Elle constituait pourtant(constitue toujours d’ailleurs) un argument de poids antisarko pour la gauche et un mega scoop pour les médias. Elle a été mise sous l’éteignoir.

            Il existe une muraille infranchissable faite de demi vérités décontextualisées et de gros mensonges qui abusent ou au à minima désintèressent de la question. Le livre de Stéphen Smith « Négrologie » (Grand prix France Télévision) puis Best seller, qui rend responsables et incurables les Africains en est un bel exemple. Les Français sont persuadés de sauver par leur générosité l’Afrique que les Africains eux-même s’évertuent à détruire. Cela rend inaudible tout discours sur la justice, et ça c’est la mission des associations et de la « coopération ». Je le mentionne dans un échange sur un article précédent.http://www.agoravox.fr/article.php3?id_article=29799

            Pour revenir au fond de l’article, il n’y pas rien à attendre de Sarko, roublard téméraire et complexé notoire, nourri de pasquaïsme et de chiraquisme. Surtout qu’il joue ostentatoirement le rôle de VRP/obligeur pour ses petits copains (Bolloré, Bouygues, Pinault, Arnault, Lagardère...) auprès des roitelets africains. La seule issue serait que son excès de zèle finisse pas déclencher une avanlache.

            Et puis la Chine finira pas éjecter cette France autiste. Les Africains y gagneront-t-ils ? Certainement s’ils peuvent prendre leur responsabilité comme l’AfSud, mais la France à coup sur perdra beaucoup.

            Enfin, merci de ne pas baisser les bras et bon vent aux démocrates togolais !


            • New Morning 17 octobre 2007 10:44

               smiley Excellent article résumant la situation depuis le coup d’état du diplomate Français Mazoyer. Pour ceux qui doutent des propos de l’article, liser « La Françafrique » de F.X. Verschaves, qui donne même le prix de la tête de S. Olympio (300 000 CFA). Ce livre est truffé d’accusation et n’a été attaqué que par le seul Charles Pasqua, qui a reçu 1F de dédommagement pour avoir été présenté comme le principal instigateur (alors qu’il n’était pas seul sur ce coup...)du rapprochement de la France avec le régime qui massacre aujourd’hui le Darfour après avoir massacré le Sud Soudan.

              L’ensemble de ces révélations est forcément choquant et difficile a supporter, car les présidents Français depuis De Gaulle jusqu’à Sarkozy ont su s’avancer en « amis de l’Afrique » devant les caméras tandis que leurs « hommes de l’ombre » (Foccart, Pasqua père et fils, Chirac en personne, Jean-Christophe Mitterrand, Roccard...) multipliaient les contacts troubles.

              Cela n’enlève en rien les responsabilités des Africains qui se sont laissé corrompre, si ce n’est que ce travail de sape à porté au pouvoir les plus corrompus et les plus criminels d’entre eux tandis qu’étaient écartés ou assassinés les plus prometteurs (nous venons de commémorer l’assassinat du président Burkinabé Thomas Sankara du 15 octobre 1987 par « mort naturelle » à l’arme de guerre...).

              Pour ce qui est de « compter » sur la « rupture » de Sarkozy, je pense que le double discours a au moins un aspect positif : celui de donner l’opportunité au peuple français de prendre conscience et de défendre cette rupture comme une promesse exigeant des actes (en l’occurrence, surtout des « non actes » car il convient d’arrêter de nuire) favorisant une transparence des élections, entre autre togolaises. Il suffirait peut-être d’un « coup médiatique » à jouer, comme dans le cas de l’affaire du juge Borel assassiné à Djibouti, pour que Sarkozy se mette en scène pour garantir la transparence des élections togolaises...

              Je rêve, car il reste beaucoup de travail à accomplir dans la prise de conscience française de son implication africaine, mais c’est le rôle d’un article comme celui-ci qui en a fait réagir quelques-un(e)s... L’affaire dépasse le simple sentiment humaniste, car il faut bien comprendre que la corruption Africaine n’est que le miroir de la corruption qui grignote nos institutions. Elle a entre autre été initié pour assurer le financement des partis politiques français, et certains chefs d’Etat africains en savent long sur nos propres gouvernants. La déclaration d’Omar Bongo en dit long sur son pouvoir de nuisance sur Sarkozy, lorsqu’il déclare que si les relations venaient à se détériorer entre la France et ce dictateur, il répondrait calmement « allons, ce n’est pas sérieux Nicolas... »

              La démocratie Française est d’ailleurs clairement remise en question devant l’opacité des relations Franco-africaine, puisque 75% des députés et quelques ministres de l’époque (dont Sarkozy) ont signé le projet de « loi de Survie » de l’association qui en a pris le nom (http://survie-france.org/)... Et qu’elle n’a jamais été mise à l’ordre du jour après 20 ans de militantisme !

              Cette loi avait pour objet la transparence des quelques 10 milliards d’euros annuels (l’équivalent du « trou » de la sécu) d’aide publique au développement, dont l’Afrique est censé être le principal continent bénéficiaire. La triste réalité est que cet argent finance des résidences parisiennes de luxe pour les chefs d’Etats « amis de la France » (et de ses partis politiques), lorsque cela ne paye pas les armes des guerres civiles permettant de les (re)mettre en selle.

              Accepter de lire un « média citoyen », c’est aussi accepter de laisser derrière soi toutes les belles illusions dont nous bercent les autres types de médias...


            • Esteban Manchego Esteban Manchego 17 octobre 2007 16:45

              @ New Morning,

              Merci pour votre commentaire, il semble en effet, que beaucoup de nos concitoyens aient du mal à regarder la vérité en face et contestent les faits parce qu’ils ne correspondent pas à leur vision des choses.

              Le point positif concernant les discours de campagne de Sarko sur la rupture dans nos relations France-Afrique, c’est que cela crée une attente et qu’un jour ou l’autre, il aura à s’expliquer. Il devra alors la mettre en application ou accréditer le fait que ce n’étaient que des promesses creuses... Vu l’état des médias, à part quelques exceptions, il ne faut pas trop compter sur eux pour mettre Sarko face à ces contradictions, mais bon gardons espoir...

              Pour ce qui est des élections togolaises, il semblerait qu’elles se soient globalement bien déroulées, d’après les communiqués de presse et mes contacts sur place. Une très forte participation (environ 80%), quelques incidents techniques (pénurie de timbres d’authentification dans des bureaux de Lomé ayant entraîné l’annulation de quelques milliers de bulletins) mais pas de violences à déplorer comme cela avait été. Les résultats devraient être communiqués d’ici la fin de la journée.


            • New Morning 19 octobre 2007 10:08

              Apparemment, le chemin de la démocratie est encore long pour le Togo... 42 ans de françafrique ne s’effacent pas en un scrutin smiley

              « Contrairement au code électoral, cette élection a donné lieu à la plus vaste entreprise de corruption et d’achat de conscience aussi bien au niveau des responsables des structures locales qu’au niveau des populations », a dit Péré, ancien baron du parti au pouvoir, le Rassemblement du peuple togolais (RPT), qui, selon les résultats provisoires partiels publiés mercredi soir, rafle 49 des 81 sièges à l’Assemblée nationale.

              source : http://www.letogolais.com/article.html?nid=3270


              • Esteban Manchego Esteban Manchego 19 octobre 2007 12:25

                Comme beaucoup de togolais, je suis un peu sous le choc des résultats...

                Evidemment, le premier réflexe est de crier à la fraude ce qui n’est pas à exclure, mais certains analystes soulignent l’impact du découpage électoral qui même dans des conditions de transparence assure la victoire du RPT aux élections. Il faut en effet, dans certaines régions acquises au RPT 40 000 voix pour remporter une élection quand il en faut 300 000 à Lomé. Selon eux, l’opposition n’a pas fait son travail en laisssant cette question importante de côté lors des négociations de l’accord global. Par ailleurs, l’influence du mode de scrutin qui avantage les gros partis a certainement joué son rôle et aurait dû amener les partis de l’opposition à s’allier ou à conclure des accords.

                Voici le lien : http://www.icilome.com/nouvelles/news.asp?id=51&idnews=8956

                Ceci étant dit, l’analyse des résultats par préfecture me laisse vraiment perplexe : autant les résultats dans la Kara et au Sud sont conformes aux attentes, autant les résultats dans la région des Savanes sont proprement incompréhensibles. Y ayant vécu un an et demi, je ne peux croire, quel que soit ce qu’on dit sur le mode de scrutin, que l’opposition n’ait obtenu aucun siège dans cette zone. Surtout dans la préfecture de l’Oti qui a toujours été foncièrement opposée au RPT. J’espère qu’on aura des résultats plus précis pour chaque circonscription afin d’en savoir plus.

                Par ailleurs, les observateurs ont relevé un certain nombre d’autres irrégularités comme la pénurie de timbres d’authentification, l’abus de procurations (Union Africaine) et je m’interroge sur le taux de participation de 95% qui, malgré une forte mobilisation visible, pourrait dissimuler des électeurs fictifs.

                Quoiqu’il en soit, les observateurs ont tous accordé leur satisfecit aux élections, même si c’est parfois avec réserves et cela ressemble un peu à un scénario écrit à l’avance : « vous organisez des élections à peu près propres, sans débordement et on reprend la coopération ». De toute façon, l’Union Européenne avait déjà commencé à débloquer les fonds des précédents FED et s’était déjà apprêtée à reprendre la coopération. Il aurait vraiment fallu de grosses manoeuvres visibles pour qu’elle interrompe le processus, ce qui n’a pas été le cas.

                Qu’il y ait eu fraude ou pas, ces élections nous rappellent que l’on trop tendance à sous-estimer le RPT, en les considérant comme des brutes sans cervelle, et sa capacité à rebondir à chaque fois et que pour les prochaines échéances, l’opposition ne doit plus se content d’une posture victimaire mais se plonger dans les rouages du pouvoir afin de s’attaquer à tous les points facilitant les injustices électorales. En particulier, la question du découpage électoral devra obligatoirement être remise sur le tapis.

                Malgré cela, bon courage aux togolais et bonne chance pour la suite.


              • New Morning 20 octobre 2007 13:23

                Certes il y a progrès, du moins en apparence. Mais l’implication de la France dans l’accession et le maintien d’Eyadema au pouvoir laisse craindre que les progrès démocratiques à accomplir ne soient uniquement du ressort des Togolais...

                Quelle est la part de la France dans cette élection « imparfaite » à 95% de participation, où des votes ont peut-être été achetés... et avec quel argent, si ce n’est le détournement devenu habituel de l’« Aide Publique au Développement » (APD) Française... soit « 70 dollars par an et par habitant » selon le gouvernement : http://www.diplomatie.gouv.fr/fr/actions-france_830/aide-au-developpement_1060/politique-francaise_3024/montant-apd_14035/aide-publique-au-developpement-apd_50391.html

                Je n’ai pas de réponses, seulement des doutes étayés par 4 décennies du « plus long scandale de la République [Française] ». Les déclarations d’intention du président Sarkozy, qui honore dans le même temps la mémoire de Foccart, ne me semble pas être le meilleur garant de la fin de l’ingérence Française.

                « Je sais, cher Robert, pouvoir continuer à compter sur ta participation à la politique étrangère de la France, avec efficacité et discrétion. Je sais que, sur ce terrain de l’efficacité et de la discrétion, tu as eu le meilleur des professeurs et que tu n’es pas homme à oublier les conseils de celui te conseillait jadis, de ’’rester à l’ombre, pour ne pas attraper de coup de soleil’’. Sous le chaud soleil africain, ce n’est pas une vaine précaution. Jacques Foccart avait bien raison. »

                Nicolas Sarkozy, remettant à l’avocat Robert Bourgi la rosette de Chevalier de la Légion d’Honneur, à l’Elysée, le 27/09/2007. Cité par Rue89, 02/10/2007.

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