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Accueil du site > Tribune Libre > Sarkozy : le maillot jaune du Tour de France

Sarkozy : le maillot jaune du Tour de France

 Contraint de reconquérir une majorité d’électeurs déçus, le président Sarkozy rejoue la carte de l’insécurité qui lui a tant réussi. Mais il soigne toujours autant les images qu’il choisit de livrer de lui. On garde en mémoire l’avertissement méprisant mais fondé qu’il a lancé lors de sa conférence de presse à l’Élysée du 8 janvier 2008 au parterre réjoui de journalistes accrédités : quand vous êtes à mes basques, leur a-t-il dit en substance, c’est que je vous ai sifflés ; quand je ne le veux pas, vous ne pouvez pas m’approcher.

 
Le journal Le Monde a ainsi publié en première page dans son numéro du 24 juillet dernier une des photos officielles que le président et ses conseillers ont composées au cours de son intrusion inopinée dans le Tour de France dont il a suivi en voiture la 17ème étape, le 22 juillet. Quelle meilleure occasion trouver que de se mettre sous les spots d’une des manifestations sportives les plus populaires pour tenter de capter un peu à son profit de la faveur qu’elle suscite ? Le futur vainqueur de l’étape pouvait se démener comme un beau diable sur sa machine, le héros du jour n’était pas lui mais le président dans une voiture de la caravane qui le suivait.
 
Un leurre de la métonymie trop voyant 
 
Pour autant, la scène photographiée qui immortalise cette association d’un président de la République avec cette course centenaire vénérable est-elle si heureuse ? Ne respire-t-elle pas à plein nez le suint d’une mise en scène grossière, dopée pour tout dire comme il sied au Tour de France ?
 
Une première métonymie est d’abord exploitée de façon trop voyante : on voit le président, assis dans sa voiture, tendre avec jovialité par la vitre baissée le bras, main ouverte, vers le hors-champ ; c’est l’effet d’une cause supposée - car invisible - que le lecteur est sommé de déduire : les acclamations d’une foule rassemblée dont on ne voit pourtant pas le moindre représentant. Ainsi la popularité du président est-elle affirmée sans indices probants ! 
 
Un leurre de l’information donnée déguisée en information extorquée trop évident
 
Le leurre de l’information donnée déguisée en information extorquée saute ensuite trop aux yeux, lui aussi. À l’évidence, le président prend une pose étudiée qui doit livrer de lui l’image d’un responsable en relation chaleureuse avec son peuple : c’est une information donnée. Mais, on sait que, par nature, cette variété d’information n’est pas fiable, car obligatoirement mise au service des intérêts de l’émetteur. Le président feint donc d’être photographié à son insu et/ou contre son gré en ignorant l’objectif du photographe pour faire croire à une information extorquée qui, elle, est beaucoup plus fiable, puisqu’elle échappe au filtre de l’autocensure de l’émetteur. 
 
Les couleurs ne paraissent pas non plus avoir été laissées au hasard : à défaut du drapeau national français dressé traditionnellement à proximité du président, on en retrouve l’assortiment de couleurs : la voiture est rouge, la publicité de la carrosserie, blanche et la chemise du président, bleue comme il est d’usage pour aussi, par contraste, faire ressortir au mieux la carnation du visage. Ce pastel patriotique peut rendre le lecteur plus réceptif.
 
Une seconde métonymie contradictoire
 
Mais cette mise en scène se heurte à une contradiction insoluble. Cette immixtion du président dans le Tour de France présentait le risque de faire croire qu’il n’avait pas mieux à faire dans un contexte de crise économique sévère que de perdre une journée à s’amuser à jouer les suiveurs de la course. Sans doute est-ce la raison d’une seconde métonymie : on le voit tenir à son oreille son téléphone d’une main tandis que, de l’autre, il salue ceux qui l’acclameraient. Cet effet exhibé doit trouver sa cause cachée dans le travail d’information et de décision que le président ne cesse pas d’accomplir pour autant. Il n’est pas allé, en effet, jusqu’à revêtir un maillot de coureur : il a seulement tombé la veste, pour n’être qu’en chemise et cravate, ce qui est autant la tenue de la détente que celle du travail de bureau.
Seulement, peut-on faire deux choses à la fois ? Témoigner en les saluant du respect que l’on a pour ses fans et écouter en même temps au téléphone un interlocuteur qui vous entretient des problèmes de la France et du monde ? Qui trop embrasse mal étreint. À vouloir faire les deux choses à la fois, en est-il une qu’on accomplisse convenablement ? Ou le président écoute au téléphone son interlocuteur et son geste amical de la main, comme son sourire et son regard, n’est que simulacre. Ou c’est le contraire, il réserve son attention à ses fans et n’écoute pas son interlocuteur et, dans ce cas, le téléphone ne sert qu’à faire croire qu’il continue à travailler sérieusement dans cette foire divertissante qu’est le Tour de France.
 
Cette photo du Président révèle du coup l’incongruité de sa présence dans la caravane du Tour. Impossible de masquer les leurres grossiers dont la mise en scène est dopée ! Elle devient le symbole de l’opération démagogique qui consiste à venir se mêler aux réjouissances d’une manifestation populaire séculaire, assombrie depuis un certain nombre d’années par la fraude du dopage ! Sans doute est-ce pour tenter de faire contrepoids à une autre fête aussi incongrue : le dîner du Fouquet’s parmi les milliardaires le soir même de son élection en mai 2007.
 
Paul Villach
 
 

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11 réactions à cet article    


  • brieli67 3 août 2010 11:02

    Cette fois_ci on l’a, on le tient !! on ne le lâche plus !


    Pas de leurre, 100 façons !

    en chemise bleue :  c’est DW

    • Alpo47 Alpo47 3 août 2010 11:13

      Bien entendu, c’est une mise en scène, comme d’habitude ...

      J’ai regardé la fin de cette étape, et j’ai trouvé que, contrairement à ce qui se fait habituellement pour les politiques qui viennent pour s’y montrer, Sarkozy n’apparaissait pas, debout, au travers du toit ouvrant, mais restait confiné à l’intérieur de la voiture, plutôt soucieux de rester discret. Il n’est apparu que sur quelques scènes en fin de course, contrôlées par la sécurité, pour féliciter Amstrong ou autre... Et, surtout pas sur le podium.
      Il y a longtemps déjà que les déplacements de notre, hélas, président, provoquent un éloignement forcé des « vrais citoyens » pour laisser venir seulement une « claque » d’encartés UMP.

      Et il y a de moins de moins de gens crédules de ces manipulations.


      • Pyrathome pyralene 3 août 2010 12:16

        Bien vu Paul, il est meilleur que sa femme question comédie tragique...


        • L'enfoiré L’enfoiré 3 août 2010 14:15

          Popaul,

          Moi, qui croyait à un nettoyage par le vide en vacances....
          En vacances, on se ressource, non ?
          Que vois-je ?
          métonymie , leurre de l’information....
          Berlusconi ne vous a pas donné des leçons ?
          Non, vous avez encore acheté Le Figaro pour écoutez Dallas
          Quand on va dans un pays, on écoute et on regarde ce qui s’y passe en observateur. On change de m...
          Le maillot jaune, c’est qui encore ?

          Déçu.... smiley


          • Lapa Lapa 3 août 2010 17:39

            leurre trop voyant, puis leurre trop évident.

            on peut se poser finalement la question si l’homme invisible qu’on voit mérite encore d’être appelé homme invisible ?

            en tout cas le leurre a disparu du titre de l’article, la rédaction a dû trouver que ça faisait trop et nuisait au propos.


            • docdory docdory 3 août 2010 17:55

              Cher Paul Villach

              Il y a fort à parier que Nicolas Sarkozy se fiche totalement du cyclisme en général et du Tour de France en particulier.
              Rien ne l’indisposerait plus que de se retrouver attablé en compagnie d’afficionados de la petite reine vêtus de shorts , chaussettes dans des nu-pieds et casquette Kronenbourg, à côté d’un camping car, devant un verre de Ricard ou de rosé mal refroidi, à attendre pendant des heures au son d’une télé mal réglée, sous un soleil de plomb, les quelques dizaines de secondes de vociférations exaltées et de frénésie photographique occasionnées par le passage des coureurs de la grande boucle !
              Nous sommes là devant un sommet de l’hypocrisie qui n’a rien à envier en altitude à celle du col du Tourmalet !

              • Paul Villach Paul Villach 3 août 2010 18:15

                @ Cher Docdory,

                Joli, votre instantané saisi sur la route du Tour !

                J’ai vu passer une fois, quand j’étais adolescent, le Tour en Bretagne, du côté de Maël Carhaix. La caravane n’en finissait pas de défiler, jetant aux badauds par poignées des tracts publicitaires , des casquettes ou des échantillons sur lesquels tous se jetaient comme sur des reliques.
                Quand le peloton a surgi, annoncé par un tintamarre de motos pétaradantes et de klaxons à l’italienne, il filait si vite, emporté dans une même bourrasque, qu’on a pas eu le temps de voir les coureurs tous identiques sous leurs casaques de couleurs couvertes de logos. Paul Villach


              • L'enfoiré L’enfoiré 3 août 2010 19:48

                Je me demandais combien de temps et de « caresses » fallait-il pour obtenir une réponse de l’auteur.
                Ouf, la réponse est là. Je me demandais si Popaul n’avait pas contracté une berlisconite aigüe.
                 smiley


              • kitamissa kitamissa 4 août 2010 10:27

                je n’aurai qu’une réponse vis à vis de cet article ...

                pfffffffffffffffffff !.....pfffffffffffffffffffff !

                que de l’entortillade pour boucher le creux du mois d’Aout .

                un peu comme les navets qu’on nous ressert en été à la téloche !


                • ZEN ZEN 8 août 2010 19:58

                  Ah non, je proteste, Nicolas a manqué sa vocation
                  Dommage pour nous !
                  Il a un fin coup de pédale
                  Merci Martine !


                  • Causette Causette 8 août 2010 23:28


                    en 2012, j’irai voté pour la première fois de ma vie pour une présidentielle ;

                    je voterai Nicolas ben oui, moi j’commence à m’attacher smiley
                    et pis s’il est pas là sur qui j’vais bien pouvoir me défouler ? hein !


                    (bon pour le vote c’est pas sûr, Nicolas il a l’air de bien se débrouiller, il a rallumer les sirènes sécuritaires)

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