Sarkozy : un nouveau Robespierre ?
J’ai écouté sur BMF le discours du 29/04/07 de Sarkozy au palais de Paris-Bercy. Que ce discours soit « à droite toute » n’étonne nullement, Sarkozy ne pouvant se « recentrer » tant qu’il n’est pas assuré d’un désistement de Le Pen en sa faveur. Tout pas vers le centre donnerait prétexte au « Vieux » du FN.
Ce qui m’a frappé plutôt c’est la tonalité robespierriste de son discours.
Que racontait Robespierre ?
Robespierre a structuré son discours en identifiant à un mal absolu la « libéralité des mœurs aristocratiques », poison auquel cédaient les aristocrates mais aussi les autres révolutionnaires (Danton « en tête »). Ce poison, il fallait l’éradiquer grâce à l’amour de la loi, c’est-à-dire par la vertu. La tâche du politique consistait donc à traquer les individus contaminés par ce poison ; des individus dangereux car ils pouvaient se dissimuler sous toutes les identités, dans toutes les couches de la société. La Terreur avait pour « vertueuse » mission de les démasquer et de les retrancher du corps social. In fine, Robespierre instaura le culte de l’Etre suprême, qui symbolisait le triomphe de cette exigence de vertu, culte d’Etat dont il était le grand prêtre.
Qu’elle est la petite histoire que nous raconte Sarkozy ?
Sarkozy nous dit : « La morale, après 1968, on ne pouvait plus en parler. Pour la première fois depuis des décennies, elle a été au coeur d’une campagne". Il dénonce "les héritiers de 1968", (ceux qui sont encore contaminés par le poison) de répandre le "relativisme intellectuel et moral" : "il n’y (a) plus aucune différence entre le bien et le mal, le beau et le laid, le vrai et le faux, l’élève (vaut) le maître".
Le poison soixante-huitard contamine tout le corps social, du bas au sommet. Il y a les « fraudeurs » et tous ceux qui profitent du système « d’assistanat ». Mais pire, l’élite elle-même, est contaminée ! "La contestation de tous les repères éthiques a préparé le terrain des parachutes dorés et des patrons-voyous." Ainsi la capitaliste prédateur est l’enfant de mai 68 (j’ai songé avec pitié à André Glucksman, soutien de Sarkozy, présent dans la salle, et qui ne devait pas en mener large, vu que tout ça, c’est sa faute...)
"Nous conjurerons le pire en remettant de la morale dans la politique, éructe alors Nicolas Sarkozy. Le mot « morale » ne me fait pas peur." Et Sarkozy demande qu’on lui fasse confiance pour rétablir la morale par l’application d’une loi intransigeante.
La prière à Sarkozy
Grand prêtre de cette nouvelle rationalité, Sarkozy se légitime d’un appel du peuple : « Ce jour là il y avait dans la foule une attente qui se lisait sur les visages. Ce qui me frappa, ce furent l’écoute, l’attention - pardonnez moi le mot - ce fut la communion, ce fut la gravité presque religieuse, ce fut l’espérance, cette sorte de prière silencieuse que 100.000 personnes m’adressaient : "il faut faire quelque chose ! Ca ne peut pas continuer ainsi ! Nous devons changer notre façon de faire de la politique ! »
M. Sarkozy n’est pas qu’un démagogue, sinon il se contenterait d’évoquer quelques thèmes porteurs pour l’extrème droite. M. Sarkozy est réellement animé par une forme de pensée de combat fondé sur l’idée de pureté morale, analogue à celle de Robespierre.
Sources :
les discours de Sarkozy paraissent en principe sur le site de Sarkozy avec quelques jours de retard : http://www.sarkozy.fr/press/index.php?lang=fr&cat_id=3
Par contre la vidéo est déjà disponible, où on a les expressions de Sarko « en vrai » et elles ne trompent pas : http://www.sarkozy.fr/video/?intChannelId=1
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