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Accueil du site > Tribune Libre > Sauver le capitalisme : s’en remettre à ses seins, plutôt qu’à (...)

Sauver le capitalisme : s’en remettre à ses seins, plutôt qu’à Dieu (I)

L'actualité qui entrechoque les nouvelles, avouez que parfois cela prête à sourire. Depuis des mois, on nous rabat les c... avec une crise du capitalisme qui ne veut pas avouer son nom. Celle où les gens s'aperçoivent crûment que les banquiers sont fondamentalement des escrocs déguisés en Père Noël en cravate et costard IBM. Ces derniers jours, on a eu droit à de belles phrases, dont celle par exemple d'une ex-championne de natation synchronisée qui nous a affirmé que pour maintenir la tête hors de l'eau, l'économie mondiale aura bien du mal. Ayant hérité de son poste par défaut, en raison de l'abandon de son patron un peu trop porté sur la palpation mammaire et la satisfaction rapide de ses besoins sexuels compulsifs (New-York n'étant pas la Belgique), elle est censée savoir de quoi elle parle, la naïade zen du FMI, pendant que la France entière fait la plonge en douce pour arrondir ses fins de mois, à gagner moins en travaillant plus. Mais la meilleure est sans celle provenant de l'avocat du fabricant-boucher de prothèses mammaires, qui vient de nous balancer sans rire que son client n'avait fait, finalement, que suivre les règles les plus élémentaires du capitalisme... Ce en quoi il n'a pas tort, tant la gonflette semble être aussi un des piliers du système, qui nous a promis il n'y a pas si longtemps des monceaux de billets à jouer aux investisseurs de salon comme on joue au casino à qui perd gagne. Le capitalisme, en dehors de la chirurgie plastique (celle qui a ravagé le minois de Meg Ryan) et de ses patrons recherchés par Interpol, serait-il à ce point obsédé par la poitrine féminine ? Plusieurs exemples tendraient à le prouver, le meilleur exemple étant en effet celui d'un... avionneur célèbre.

A ce tableau édifiant s'ajoutent ces derniers jours ces scēnes de foire et ces émeutes pour acheter un bête sac 600 livres sterling au lieu de 1000, une horreur qui doit bien être achetée 5 euros à des chinois de 10 ans, ou ce tir de pistolet lors d'une vente de pompes grotesques achetées pas beaucoup plus cher à l'usine d'à coté, estampillées "Air Jordan" du nom d'un champion de basket, qu'on rangera tous deux sans hésiter dans la catégorie capitalisme sauvage. Un gamin belge orné deouis deux jours d'un superbe cocard à lœil a fait les frais de la même méthode de vente.... musclée. Pour l'ouverture à New York du magasin "éphémère" de Lady Gaga, rebelote : on y apprend que les cadeaux qu'on y trouve varient du stylo quatre couleurs à 8 dollars à parfois plus de 1000 dollars : en voilà une qui a tout compris au petit commerce de proximité (mais faut prendre l'avion Bezons-New-York pour acheter le 4 couleurs). Elle, ce sont plutot ses méthodes de management qui sont celles du capitalisme effréné (de l'esclavagisme, dit-on même). Pas d'émeute en revanche à la vente des dessous de Marylin Monroe : les gens riches ne se marchent pas dessus (ils engagent en fait des tueurs pour supprimer leurs opposants et se font livrer chez eux- n'est-ce pas Benoît Poelevoorde - une info qui a ensuite été démentie par des responsables de la justice belge, il est vrai). On est loin, très loin des façons de vendre des avions d'un Howard Hughes, puisque tel est le nom de notre fabricant d'engins volants.

Cet homme est en effet l'un de ceux qui a réalisé le plus de profits avec l'armée américaine, en réussissant à lui fourguer tout ce dont elle n'avait pas nécessairement besoin. Et ceci même en se fâchant avec elle ! Comme capitalisme en effet on ne fait pas mieux : les militaires n'ont pas besoin de publicités alambiquées pour acheter un matériel : chez eux, ça écrase, ça volatilise, ça éparpille ou ça tue, ou ça transporte un peu plus loin, et c'est tout. Marché conclu. L'investissement en pub est nul, et en recherche et développement pareil : depuis que Blériot a traversé la Manche et Sikorsky réussit à s'élever un peu avec sa machine de toile et de tubes, tout le reste n'est qu'améliorations successives, ou presque. Pas besoin auprès des militaires d'un long laïus pour fouguer la camelote, et pas d'émeute non plus : ces gens- là sont par définition très disciplines et restent vissés le cul sur leur chaise quand on fait exploser à quelques encâblures une bombe atomique, même "mini". Le visage un peu rougi, et le cancer naissant, ils signent aussitôt pour des centaines de caisses du produit, pas besoin d'enrober le tout dans une publicité Séguéla (tiens, au passage, observez bien la forme du nuage, çaz vous fera peut-être penser à quelque chose, qui sait). Les derniers récalcitrants étant convaincus par un arrosage de patrimoine façon Balladur, dont je suis certain que la villa ressemble le soir par nuit de grande lune au profil d'un sous- marin pakistanais. Non, Howard Hughes, est un milliardaire devenu fou assez tôt, c'est pourquoi sans doute il a plus autant aux militaires. Et lui aussi sintéressait aux seins des femmes, mais pas de la même façon que DSK. C'est que je vais tenter de vous expliquer aujourd'hui, et dans les jours à venir.

 Howard avait eu de la chance dès la naissance : son père était riche (mais sa fortune fort récente). Pour se faciliter grandement la vie, Howard Hughes avait en effet d'abord hérité d'une belle fortune, celle de son père, Howard Robard Hughes, Sr. Qui avait repris en son nom la découverte d'un chercheur dénommé Walter Benona Sharp, celui qui avait imaginé le premier trépan rotatif à deux cônes, appelé industriellement "Sharp-Hughes Rock Bit". D'autres avaient semble-t-il eu la même idée, mais c'est Robard Hughes qui avait pensé à déposer le brevet qui avait révolutionné la recherche du pétrole : son invention forait dix fois plus vite que la concurrence. Il esrt mort tôt, fortune faite, en 1924 alors que son fils unique Howard n'a que 19 ans, ce dernier améliorant l'invention en 1933 en lui ajoutant un troisième cône, lui donnant l'allure qu'on lui connaît aujourd'hui. Pendant longtemps, l'engin universel et archétypique de la recherche du pétrole, en quelque sorte, ce fut un trépan Hughes. On compte que de 1934 à 1951, la société de Hughes fournissait l'intégralité de tous les têtes de forage dans le monde. Ce qui explique les revenus faramineux du jeune ingénieur, immensément riche, chaque tête de trépan, équipée de métaux rares, se vendant des dizaines de milliers de dollars, voire des centaines. Le début du siècle est en effet marqué par une frénésie pétrolière qui atteint tourte la planète.

Howard Hughes, obligé de se rendre dans le monde entier pour vérifier le fonctionnement de ses trépans, deviendra vite actionnaire majoritaire dans la compagnie d'aviation TWA, qui fera elle aussi une partie de sa fortune, grâce à un de ses design, celui du magnifique Constellation dont il possédera longtemps un superbe exemplaire blanc et métal. Et pas n'importe lequel : il s'était mis de côté le seul exemplaire de la lignée a être équipé de moteurs différents : des R-2800 de Pratt&Whitney à la place des Wright R-3350 Duplex-Cyclone du même constructeur, en qui il avait moins confiance. Il voulait bien un avion d'affaires, mais à sa démesure : l'engin emportait 44 passagers. L'engin est le premier à être intercontinental (presque il le sera en 1946 avec le même appareil et ensuite dans sa version L1049) : en décembre 1945, le premier avion livré à TWA vole de Washington à Paris, via Gander et Shannon. Comme publicité, il avait avant tout lui-même, car le jeune homme était au départ doté d'un charisme évident, bien que mauvais orateur, et de capacités de pilote, développées tôt chez lui. Il avait volé dès 14 ans. Dés 1932, il a déjà créé sa compagnie d'aviation personnelle pour sastifaire ses désirs de voler et se faire une publicité supplémentaire en battant des records de vitesse ou de distance. Enfin, c'est ce qu'il a longtemps pensé, avant de s'emplafonner le 7 juillet 1946 trois maisons américaines de suite aux bords du golf de Beverly Hills (en bois !), aux commandes d'un de ses avions mythiques... L'engin devenu allumettes (et non ferraille !), en lui-même, résume en fait parfaitement l'individu.

A peine sorti de son tour du monde victorieux en Lockheed 14 N-2, il s'était en effet mis en tête de fabriquer le bombardier le plus rapide du monde. Cette véritable tête de mule sachant que l'armée lui imposera nécessairement la lettre "B" pour désigner, et les avions de transport étant affublés du "C", il l'appela le D-2. Pure provocation, peu appréciée par les militaires. Il se mit à le construire dans le plus grand secret : la seule photo à peu près acceptable que l'on aît est celle d'un atelier, où on distingue sa configuration et ses bâtis moteurs en tube. L'avion est reconnaissable : comme design, fortement impressionné par le Fokker G.I Jachtkruiser,   construit en 1936 par deux ingénieurs assez géniaux, Marius Beeling et Erich Schatzki, dont Hughes avait suivi de près les travaux. Il avait en effet retenu la formule dite "bipoutre", ce qui lui permettra de dire pendant des années que l'atelier des Skunkworks de Lockeed lui avait pillé l'idée (alors que leur projet de P-38 Lightning avait été proposé deux ans auparavant).   Plus original, craignant une pénurie à venir d'aluminium si la guerre arrivait, il avait sélectionné le bois, comme matériau principal, imprégnée des routes premières résines fiables que l'un de ses laboratoires venait de mettre au point. Il avait baptisé (et fait protéger par brevet, comme son père lui avait recommandé de faire) ce contreplaqué imprégné de plastique le "Duramold". Son bombardier, pour aller vite, était très étroit, au point d'avoir à faire ses trois trains d'atterrissage repliables avec les roues à plat, ce qui était un difficulté technique supplémentaireà fabriquer. Chez Hughes, la solution simple n'avait pas bonne presse.

Pour propulser l'engin, il avait retenu les moteurs les plus puissants disponibles : les fameux RD-2800-49, qui prirent du retard â être produits. L'avion prit lui aussi du retard, mais jugé très rapide sur le papier, l'armèe le qualifia en 1942 comme chasseur, devenant le XP-73. Ne sachant pas comment s'entretiendrait dans le temps l'appareil, elle finit par lui préférer le XP-58 assez voisin mais en métal et aux lignes bien plus classiques : il n'aura d'ailleurs aucun succès et sera abandonné, handicapé par des moteurs "Tornado" défectueux. Mais Henry "Hap" Arnold, ce général visionnaire, convaincu par Hughes, décida quand même d'accepter de continuer à développer l'avion de Hughes, aux frais de l'armée. Les retards, hélas, s'accumulèrent. Le premier vol n'eut lieu que le 20 juin 1943 et fut marqué par toute une série de problèmes. Arnold, qui souhaitait davantage de "Mosquitos" anglais pour la reconnaissance photo notamment, renouvela sa confiance à Hughes, qui prit pourtant en grippe les changements qu'il lui demandait de faire. Résultat, l'armée cassa net le contrat, laissant Hughes avec un engin qu'il rebaptisa aussitôt XF-11. En fait, il avait déjà, en secret développé une variante destinée à la reconnaissance photo, et un coup du sort lui donna un coup de main pour le révéler plus vite que prévu (et le ré-proposer à Arnold) : l'autre brûla intégralement dans son hangar touché pa la foudre (d'une certaine maniéré, Hughes avait toujours subli le sort, mais cette fois il pouvait se dire que ça l'avait aidé !) le XF-11, devenu D-5 avait toujours la cote chez les militaires les plus intéressés par les progrès techniques, comme chez Arnold et même aussi chez Roosevelt, via le fils du président que Hughes "arrosait" copieusement, il est vrai. Il avait beau être confiant dans ses appareils... il n'en assurait pas moins la couverture : c'est un procédé qu'il fera toute sa vie. Son père l'avait éduqué dans la méfiance de la concurrence et du non-partage du pouvoir.

Par un de ces revirements complets qu'il affectionnait, le nouvel avion (ci-dessus en photo) avait abandonné le bois pour le tout métal et avait énormément grandi, tout en affinant sa ligne gènèrale. Il atteignait désormais 30 mètres d'envergure....pour un simple biplace, avec des hélices toujours classiques et non doubles cette fois. Ayant dire que Hughes n' en avait fait qu'a sa tête, oubliant toutes les contraintes liées à la guerre, dont celles de le faire décoller sur une longie piste et de l'entreposer dans un hangar de taille conséquente. Il pesait maintenant 21 tonnes à lui seul. Détail significatif : Hughes souhaitait un seul pilote, l'armée deux : pour ne pas se retrouver aux côtés d'un autre lors des essais, il dessina le second siège en retrait du sien, un peu plus bas. Le seul maître à bord, ce ne pouvait être que lui. Pour monter à bord, il devait passer par une échelle descendant du ponton moteur gauche, derrière la trappe de train : on avait fait mieux comme accessibilité. Mais un excentrique, il est vrai, ne peut monter à bord d'un avion normalement ! On est début 1944, et l'armée, qui a soutenu tout le programme se retrouve avec un avion totalement différent de ses espoirs. Un an et demi après, il n'a toujours pas volé. La guerre terminée, l'armée rompt le contrat avec Hughes, qui réclame 3 millions de dollars pour le développement du XF-11. Au final, le contribuable US avait réglé 14 155 235 dollars de sa poche et Hughes le quart seulement : l'homme était adroit, pour faire endosser à l'Armée une partie de ses lubies. En fait, l'homme des records n'était pas si bon pilote que ça, semble-t-il, ou alors il était poursuivi par la poisse : certains pilotes racontent que pour le H-1, il aurait pu se poser avant le crash, de même que pour le superbe X-11, qui aurait pu se poser plus tôt sans encombre également, malgré son problème d'hélice évident (un de ses doublets s'était mis en reverse en plein vol !), une fuite d'huile ayant été discernée à bord pendant le début du vol, mais Hughes, ce jour-là choisira de rester en l'air et de connaître la fin de vol plus que mouvementée, sinon dramatique, que l'on connaît. A ce sujet, le film Aviator basé sur ces exploits en fait beaucoup trop en présentant un super-pilote. L'avion de Hughes, avec ce film particulèrment raté, était plutôt atterri parmi les navets.

Il en sortira vivant de justesse, mais ce crash ruinera sa vie à jamais. Ce terrible accident, qui était alors le troisième grave accident de sa carrière de pilote,l'obligera en effet à prendre des doses de plus en plus fortes de valium et de codéine, avant de passer à la cocaïne : Howard Hughes passera désormais le reste de sa vie à se droguer, pour supporter les intenses douleurs provoquées par son accident.  A tout bien compter, il avait bien battu auparavant plusieurs records du monde, mais tous n'avaient pas eu la fin espérée : le 13 septembre 1935, Hughes à bord de son H-1 surnommée la "balle ailée" (Winged Bullet) ou la balle d'argent (Silver Bullet - ici sa réplique) avait atteint 352 miles à l'heure (566 km/h) à Martin Field, près de Santa Ana, en Californie. Mais il avait aussi fini sans essence en se vautrant dans un champ de betteraves, en ayant déjà à cette occasion subit un énorme choc à la tête et aux cervicales. Un atterrissage pas vraiment glorieux. Il resta néanmoins longtemps détenteur du record sur circuit fermé de 3 kilomètres en moteur à piston sur avion de moins de 3 tonnes avec son avion de records. Un record vient tout juste d'être battu (le 10 octobre dernier) par un Yak 3 "Steadfast" piloté par Will Whiteside, un avion au moteur à pistons soviétique d'origine, largement modifié par l'ingénieur qui avait conçu les réacteurs du SR-71... Howard Hughes jouera effectivement de malchance sur plusieurs de ses tentatives.  Lors du tournage du lors du tournage de son premier film, "Hells' Angels", nouvel accident à bord d'un biplan cette fois qui semblait en effet lui avoir abîmé une partie du cerveau (on le découvrira après sa mort seulement), faisant désormais de lui un véritable monomaniaque. En 1943, un nouveau crash, celui de son hydravion Sykorsky S43 dans le Lake Mead, en Arizona l'atteint à nouveau à la tête : a l'époque, aucune médecine ne peut résoudre ce genre d'atteinte gravissime (et aujourd'hui cela poserait encore problème, mais les médicaments en résoudraient une partie). Et de trois ! Celui de 1946 l'avait effectivement définitivement amoché : il en était sorti vivant, mais bel et bien déjà fou à lier... 

Comme troubles significatifs, il développe alors une obsession pour la symétrie, par exemple, expliquent ceux qui ont pu le rencontrer avant qu'il ne chasse tout le monde de son appartement. Se servant de Kleenex pour s'essuyer constamment par crainte des microbes, une peur véhiculée depuis longtemps chez lui par une mère bien trop présente, il passait des heures à ranger ses boîtes et à les re-ranger de façon la plus élégante possible, de façon exclusivement symétrique. Il pouvait y passer la journée. Il devint particulièrement excentrique, dévoré par des tics et des tocs, déja visibles sur les documents filmés, notamment celui de son premier crash où il expliquait devant les caméras les circonstances de son atterrissage forcé de H-1. En prime, si ces affaires en aviation sont forissantes, un projet incroyable met un temps démesuré à se réaliser  : un gigantesque avion de transport fait de bois uniquement, du bouleau ("birch") et non du pin ("spruce"), à savoir en "Duramold" bien sûr) le Hughes H-4 Hercules "Spruce Goose", ou HK-1 (Hughes détestait le surnom que lui a donné la presse), l'avion toujours le plus grand du monde en envergure, aujourd'hui encore, avec 97,54m, qui n'arrivera pas à voler avant la fin de la guerre, alors qu'il était destiné à l'armée, lui aussi, destiné à emporter 750 soldats d'un seul coup.

"Le contrat initial d'octobre 1942 prévoyait la construction dans un délai maximum de 25 mois, de trois exemplaires, un pour les essais statiques et deux pour les essais en vol. Le matériau devait être le bois pour limiter au maximum l'utilisation de métal. Les difficultés techniques étaient énormes, néanmoins le premier prototype HK-1 pris forme lentement, la coque d'une largeur d'environ huit mètres pour une hauteur de neuf mètres pouvait loger 700 soldats, les moteurs étaient les plus puissants de l'époque, des Pratt & Whitney Wasp Major, ils entraînaient des hélices quadripales de 5,23 m de diamètre. En 1944, l'appareil ayant subi de nombreux retards n'était pas prêt, par ailleurs la situation militaire s'améliorant, les autorités ne voyaient plus l'intérêt stratégique de ce projet. La commande initiale fut ramenée à un exemplaire et en 1945, le projet fut purement annulé. Howard Hughes, en désaccord avec ses partenaires reprit le projet à son compte, l'avion fut rebaptisé H-4 Hercules, l'assemblage fut poursuivi en 1946 et achevé en septembre de cette année au hangar de Terminal Island à Los Angeles". 

Un projet fou, au départ d'Henry J. Kaiser , le fabricant des célèbres Liberty Ships. H.Hughes montera aux commandes le 2 novembre 1947 et ne réussira qu'à lui faire faire une ligne droite de 2 km seulement par effet de sol, atteignant au maximum 21 mètres d'altitude.  L'avion, malgré sa taille, avait été construit en grand secret à un endroit précis trouvé par Noah Dietrich, son principal adjoint et choisi par Hughes parmi six propositions de ce dernier. Hughes, qui discutait toujours tous les prix (le capitalisme peut aussi être perçu comme du marchandage de tapis) avait retenu la plus chère au grand étonnement de Dietrich. L'endroit, alors désert, s'appelait Culver City. Aprés l'échec du Spruce Goose, Hughes, qui y avait perçu la possibilité de transformer l'endroit en port, revendra le terrain à l'Etat californien qui en fera Marina Del Rey, aujourd'hui un des ports de plaisance les plus huppés. À la revente, Hughes gagna 150 fois sa mise de départ. Pour son appareil géant construit à Culver City, dût être transporté dans le porte de Los Angeles pour pouvoir décoller : il fait 225 tonnes, et il faudra le démonter pour qu'une société de déménagement spécialisée, la Star House Movers, qui à l'habitude de déplacer.... des maisons complètes, va acheminer à 45 km de là, via de petites routes, après que l'option de le monter sur une barge à Redondo Beach ait été abandonnée. L'opération délicate à les honneurs de deux pages dans Mécanique Populaire de novembre 1946. Les deux pages vous sont proposées à la fin de cet article (*). Une firme existe toujours du nom de Star House Moving, mais elle n'est pas de Californie mais située à Grant, dans le Colorado.

Hughes était orienté vers l'innovation, et l'aviation en plein essor lui offrait un tremplin extraordinaire pour expérimenter. Son avion de course, imaginé dès 1933, le H-1, avait été réalisé par l'ingénieur Glenn Odekirk, le préparateur de ses biplans destinés au film Hell's Angels. Hughes, entré en sympathie avec Oderkirk, lui laissa carte blanche, non sans régulièrement venir mettre son grain de sel dans la construction du magnifique petit "racer". Sa fortune lui permettait tout : le H-1 fut ainsi testé dans la veine de la souflerie de Caltech, prestigieux centre de recherches qui sera l'un des premiers à se servir plus tard d'ordinateurs. Son premier essai fut un vrai chef d'œuvre de design d'avion. Obsédé par la forme, Hughes insista par exemple pour un aspect extérieur parfait : nous sommes en 1934, et l'idée des rivets noyés affleurants n'existait pas encore.. C'est Hughes qui l'imposa, créant de facto une nouvelle façon de construire les appareils volants. Si la coque est en aluminium, les ailes sont faites en bois, recouvertes d'aluminium. Fabriqué pour la vitesse, ce fut un des tous premiers avions à train rétractable, procédé, qui, on le sait, jouera un rôle vital dans la construction d'engins de guerre performants comme le Zéro japonais, qui avait copié un appareil américain acheté juste avant la guerre. Ce fut l'un des premiers faire abaisser ses volets et les ailerons à la fois, de 15°, tout le long de l'aile pour améliorer la portance à l'atterrissage (comme au décollage).  Par certains côtés, le H-1 rappelle des avions japonais, notamment le ... Howard Hughes, dont la prétention était vite devenue légendaire, clamera au sortir de la guerre que c'était son avion qui avait servi de modèle aux Japonais : "après la guerre, Hughes en outre affirmé qu '« il était bien évident pour chacun que le chasseur japonais Zéro avait été copié sur le Hughes H-1 Racer ». Il a noté à la fois la forme de l'aile, l'empennage, la conception de queue et la ressemblance générale du Zéro avec de son racer. Jiro Horikoshi, concepteur du Mitsubishi Zéro réfuta fermement l'allégation du H-1 de Hughes comme influence dans la conception des avions de chasse japonais". Des détails avaient tendance à corroborer Horikoshi, car on pense davantage que les japonais se sont inspirés du Vought V-143, et de son train rétractable (ici celui du H-1) comme j'ai pu déjà l'expliquer ici-même.  Chez Hughes, le fin du fin étant que le petit patin arrière de l'appareil lui aussi était rétractable, et que le capot moteur avait été calculé par le NACA !

L'avion, hélas, ne parviendra pas à battre le record du monde de vitesse, alors détenu par un monstre italien à deux moteurs en lignes mis bout à bout : le magnifique Macchi M.C.72 qui avait placé la barre très haut dès le 23 Octobre 1934 en atteignant 704 km/h, battant de très loin le record de Raymond Delmotte dans son magnifique Caudron 460 obtenu l'année précédente. Hughes gardera longtemps son record de 352,39 mph (566 km/h), jusque l'année dernière, en 2011 (?) car la catégorie d'avion n'était pas la même : il ne pesait que 2495 kilos, juste en dessous de la barre des 2,5 tonnes (**). L'appareil accidenté sera reconstruit, cette fois mais doté d'ailes plus longues et de réservoirs de plus grande capacité dans un autre but ; celui de battre un record de vitesse transcontinental. Un record battu le 19 janvier 19 de Los Angeles à New York en 7 heures et 28 minutes. Soit plus de 4.000 km parcourus à la moyenne d'environ 530 km/h. 7 heures et 1/2 dans un pareil cockpit, si étroit, après avoir failli y laisser sa peau : Hughes avait aussi un sacré cran ! Il ne pouvait rester sur un échec : le record de vitesse italien inatteignable, il s'était rabattu sur un autre. 

 

Sa collaboration avec Kaiser fut un peu plus fructueuse avec un projet plus personnel. Kaiser possèdait un bateau racer, le "Hornett", avec qui il faisait des courses. Après avoir perdu à plusieurs reprises celle du Lac Tahoe de 1929 à 1934, il revendit le canot rapide à Howard Hughes, qui ne su résister longtemps à l'envie de le modifier. Et de quelle manière : il enleva tout le ponton supérieur de bois verni pour le remplacer par... de l'aluminium type aviation, qu'il fit soigneusement polir. Devenu le "Hornet II", il ne perdit plus une seule course ! Hughes n'avait pas fait que le customiser extérieurement : il avait calé dedans, à l'avant du cockpit de pilotage, un énorme Packard V-12 model 1A-1237, un moteur d'avion qui devait équiper l'Aeromarine PG-1 en 1922 et le Loening PW-2 en 1920. Au final, le bateau avait une allure incroyable ! Mais ce qu'on gardait comme impression, au sortir de la guerre, c'est que Hughes, victime de plusieurs crashs aériens, était déjà bien amoché. Son atterrissage désolant dans un champ de betteraves l'avait davantage marqué qu'on ne l'avait crû au départ...Et ça nous l'étudierons demain, si vous le voulez bien.

 

(*) le déménagement du Spruce Goose pour son premier et dernier vol :

(**) l'avion a connu une superbe réplique, construite en 2002, et signée Jim Wright, originaire de Cottage Grove dans l'Oregon (au pays du bois pour avions !). La réplique était magnifique, et aurait dû servir pour tourner Aviator. Hélas, au retour de la fête d'Oskosh, au nord du geyser Old Faithful à Yellowstone National Park, tuant son concepteur, qui avait fait construire les ailes par un spécialiste, des ailes en effet fabriquées par un champion véritable : "Wright a recommandé à Steve Wolf de construire les ailes similaires à celles utilisées pour le record de distance plutôt que l'ensemble court utilisé pour le record de Hughes. Wolf, qui vit dans la ville voisine de Creswell, était surtout connu pour la création de la réplique du Gee Bee possédé et piloté par le showman Benjamin Delmar. En Juin1998, Wolf et sa femme Liz se sont rendus à Washington, DC, au musée ou était exposé le H-1, pour jeter un œil au look à la Racer. En utilisant une paire de maison de pied à coulisse d'1m fabriqués maison, ils ont pris les mesures nécessaires et retourné en Oregon convaincus que les ailes étaient constructibles."

 

sources (autres que celles citées dans l'article) :

Sur le H1 et sa réplique :

http://www.fiddlersgreen.net/models/aircraft/Hughes-H1.html

photos du H1 

http://www.airminded.net/h1/h1.html

le diaoporama de Life consacré à Hughes :

http://www.life.com/gallery/34722/howard-hughes-the-spruce-goose#index/0

sur le Spruce Goose :

Un reportage ici (avec son premier déménagement après son vol à côté du Queen Mary, à la mort d'Howard Hughes). Le degré de finition de l'appareil est extraordinaire (dans le commentaire, hélas, on confond un trépan avec un roulement à billes !). On le déménagera à nouveau, démonté le 27 février 1993 pour McMinville, venant de Long Beach. Depuis, il y est, son fuselage ayant été découpé pour montrer son intérieur et faciliter la visite des curieux.

http://blog.sonuma.be/howard-hughes-et-le-spruce-goose/

http://www.evergreenmuseum.org/the-museum/aircraft-exhibits/the-spruce-goose/

http://www.straightdope.com/columns/read/2406/how-come-howard-hughess-spruce-goose-flew-only-once

http://www.wired.com/thisdayintech/2011/11/1102howard-hughes-spruce-goose/

http://cnettv.cnet.com/howard-hughes-spruce-goose/9742-1_53-22016.html


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7 réactions à cet article    


  • morice morice 4 janvier 2012 10:33

    Parler de son intérêt pour les seins pourquoi pas, le contextualiser c’est encore mieux mais faire un lien avec le capitalisme est pour le moins (idéologiquement) douteux.

    On verra, on verra : j’espère bien arriver à vous convaincre dès demain... Et dans les jours à venir, ce n’est que le début de l’enquête...

    Merci pour le « mieux » !

    • obi53 obi53 4 janvier 2012 19:35

      content de vous lire Mr MORICE, j’avais hate de vous retrouver

      et mes meilleurs veux bien sur  :))))))


      • morice morice 4 janvier 2012 20:39

        merci Obi... (hobby ?)...


        • obi53 obi53 5 janvier 2012 21:07

          obi comme obiwan kenoby mais bien vu aussi comme hobby en kits par exemple !
          un régal de vous lire

          a quand et comment faire pour une intégrale de vos article en numérique , je m’en regalerais d’avance


        • Musardin Musardin 4 janvier 2012 22:49

          Putain Morice,

          La syntaxe et l’orthographe !

          A part ça je biche comme toujours sur tes articles  !


          • morice morice 5 janvier 2012 00:56

            La syntaxe et l’orthographe !



            voui voui....

          • yannos99 4 janvier 2012 23:52


            H.Hughes qui, paraît il, avait loué une chambre avec vue sur une certaine place, à Dallas, un certain jour de Novembre 63...

            http://fr.wikipedia.org/wiki/American_Tablo%C3%AFd - Polar, certes, mais ce Maître en la matière a vécu cette histoire en live, comme qui dirait...

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