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Accueil du site > Tribune Libre > Sauver le capitalisme : s’en remettre à ses seins, plutôt qu’à (...)

Sauver le capitalisme : s’en remettre à ses seins, plutôt qu’à Dieu (XIII)

Avions, satellites, moyens d'écoutes électroniques, robots sous-marins : décidément Howard Hughes, qui rêvait d'être inventeur a réussi assez tôt son pari. Mais question réalisation de films, sa carrière ne se résume quasiment qu'à des navets. Des films de série B, où son obsession pour la présence féminine tient lieu de seul scénario la plupart du temps. Au final, un seul film sera à retenir des talents de réalisateur d'Howard Hughes. C'est "Scarface", l'histoire d'Al Capone, qui le fascinait littéralement. Hughes fera refaire plusieurs fois la fin, non pas de son plein gré, cette fois mais après le passage à la redoutable commission du code Hays (*) de la censure américaine, où les ligues de vertu avaient voix prépondérante. Son film avait été jugé bien trop violent. La violence chez Hughes était patente, il se l'infligeait. Dans un chapitre (le neuvième) du livre d'Harry Dulman, plusieurs scènes en attestent. L'une d'entre elles le voit en train de caresser la pellicule, au point de se couper avec les doigts, et d'en être ensanglanté, devant sa première épouse, Ella Boot Rice. Howard Hughes est devenu fou assez tôt car la scène se situe en 1925, juste avant son départ pour la Califiornie. Il n'avait alors que... vingt ans !

A vrai dire, la carrière cinématrographique d'Howard Hughes ne vaut pas tripette. Un article très bien écrit retrace ses premières expériences, qui ont failli d'emblée le conduire à la faillite avec le film hommage aux combats aériens, arrivé à un mauvais moment de l'histoire cinématographique. L'homme, abîmé par ses accidents, présente un côté psychologique que beaucoup ont remarqué assez tôt : il a eu de plus en plus le long de sa vie d'énormes difficultés à prendre des décisions, en soupesant trop toutes les possibilités, ou quand il en prend elles seront subites, totalement arbitraires et dénués de raisonnement. Ce qui explique en grande partie sa piètre carrière de réalisateur. A sa décharge, signalons qu'elle débute dans le muet, et que l'avènement du son sera vécu chez lui comme une catastrophe, pour une raison fort particulière : il était sourd d'une oreille, et devait porter un équipement auditif, que sa maladie mentale lui faisait changer le lendemain même où il l'avait porté : il en usait en effet un exemplaire par jour. Chez lui, il en accumulera des centaines, en homme prévoyant (ou en collectionneur schizophrène). Mais revenons donc sur cet article exposant clairement ses premières tentatives : "Étant donné l'intérêt pour The Aviator (2004), de Martin Scorsese j'ai pensé qu'il pourrait être intéressant de donner aux cinéphiles actuels certains éclairages sur "Howard Hughes, le cinéaste" en mettant en évidence quelques-uns des films qu'il produit et / ou dirigé. Le premier film qu'il produit en novice, Swell Hogan (1926), était si mauvais qu'il l'a retiré plus tard de la production.  Toutefois, le deuxième film qu'il a produit a été Two Arabian Knights (1927) - un magnifique film muet qui a fait remporter à son réalisateur Lewis Milestone (All Quiet on the Western Front (1930)), le seul et unique prix jamais donné du meilleur réalisateur, du Comedy Picture Academy Award . En vedettes dans le film William Boyd ("Hop-Along Cassidy") et Louis Wolheim (également dans All Quiet on the Western Front (1930)) jouent le rôle de deux soldats américains pendant la Première Guerre qui effectuent le sauvetage d'une princesse d'Arabie (Mary Astor -The Great Lie (1941) ), et avec également en vedette Boris Karloff (Frankenstein (1931)), qui apparait brièvement. On le voit, à part le tout premier, ses débuts sont donc plutôt prometteurs. Mais déjà, le goût pour les scènes de nusva apparaître : les accidents aériens et les atteintes au cerveau n'expliquent donc pas tout chez lui.

"Le troisième film produit par Hughes a été The Mating Call (1928), réalisé par James Cruze. Ce film muet a été adapté du roman Rex Beach par Herman Mankiewicz (Citizen Kane (1941)). La star Thomas Meighan y joue le héros de guerre devenu fermier avec Leslie Hatton, et le film présente une performance scandaleuse et extrêmement sexy d'Evelyn Brent, ainsi qu'une scène de baignade nue (quoique brève, et pas aussi révélateur que celle de Tarzan and His Mate (1934)) avec Renée Adoree (The Big Parade (1925)). Renée Adorée, qui était....française et même Lilloise d'origine, s'appelant au départ Jeanne de La Fonte (ici en photo à gauche) ! " Evelyn Brent était alors très connue, ayantr commencé sa carrière en 1915. Elle avait la particularité d'avoir aussi une double carrière : elle jouait dans des films mais arrondissait aussi ses fins de mois en montant sur la scène de "vaudevilles", qui, aux Etats-Unis ressemblaient plutôt à du cirque qu'à du théatre. Le genre déclinera dans les années 30, en 1932 même pour les historiens. On y dansait parfois, notamment le fox-trot, qu'elle connaissait bien : son troisième mari s'appelait Harry Fox, et c'était en effet lui qui avait donné son nom à la danse. C'était surtout une provovatrice née, qui s'affichera longtemps comme lesbienne ou bi-sexuelle. Elle représentait donc celle qui bravait l'interdit, et c'est bien pourquoi Hughes avait eu recours à elle pour un rôle où il fallait jouer une scène de nu. Du "vaudeville" des années 30, on passera au "Burlesque" des années 50, où la principale attraction devint le strip-tease. Les casinos de Las Vegas ne sont donc pas une surprise chez lui.

"Cette même année" continue notre auteur, "Hughes a également produit The Racket (1928), un film fantastique muet qui a été nominé pour le Prix du Best Picture Academy Award, mais il perdra derrière Wings (1927). Il avait également été réalisé par Lewis Milestone et les stars Thomas Meigham, en capitaine de police (McQuigg), et Louis Wolheim (encore) en tant que leader de gang (Nick Scarsi)". En toile de fond, bizarrement, on a les luttes électorales et les financements des partis, thèmes chers à Howard Hughes qui pratiquait le pot de vin à outrance, comme on l'a vu. 

Arrive le temps du film qui aurait pu mettre la société de Hughes héritée de son père sur le carreau "Hughes est probablement mieux connu pour son implication complète dans Hell's Angels (1930), le "silent come talkie", un film historique qui contient non seulement les premières séquences couleurs de Jean Harlow dans un film, qui ont contribué à faire d'elle une star (« seriez-vous choqué si je mets quelque chose de plus à l'aise ? "), mais comporte aussi quelques-unes des meilleures séquences de guerre aérienne jamais mises à l'écran (il a été nominé pour un Oscar de la Prise de Vues). Bien sûr, cela est dû au fait que l'aviateur millionaire avait produit, réalisé, et même filmé lui-même en partie. Ce devait être initialement un film muet avec Greta Nissen dans le rôle de Harlow. Mais, pendant le temps qu'il le tournait, la transformation de films muets en « parlants » avait lieue. Donc, étant donné sa fortune, Hughes décida d'en reshooter la plus grande partie, exigeant de remplace l'actrice norvégienne par Harlow." Le passage au parlant fut une galère pour certains acteurs, mais chez Hughes, cela tourna à la catastrophe. Au total en effet, il mettra trois ans à faire ce film, à vouloir tout refaire avec sonorisation une fois le premier jet presque terminé.  Son perfectionnisme tant vanté tourna vite à la manie : s'étant mis en tête qu'il savait monter lui-même un film, il coupa et redécoupa séquence sur séquence, faisant du film un collage de séquences trop nombreuses, faisant au final un film bien trop long sans queue ni tête. Il s'étonnera, à sa sortie, d'être éreinté, incapable de se remettre en cause. Sa façon de se débarrasser de la première actrice pressntie pour le film est odieuse, comme il se débarassera de Jean Harlow, qu'il enverra en tournée dans le pays pour ne plus la croiser. Il refusera même de lui rembourser deux tenues qu'elle avait acheté de ses propres deniers pour le film. Quand il jetait debors les gens, il jetait tout avec. Sans le moindre mot, sans le moindre regret. Un véritable robot.

"Après les Hells Angels (1930), Hughes produit The Front Page (1931), un classique qui a plus tard été refait par Howard Hawks His Girl Friday (1940) et Billy Wilder (The Front Page (1974)). Il a été nominé pour un Oscar du meilleur film. En tête des nominés, Adolphe Menjou a reçu sa nomination de l'Academy Award (meilleur acteur), et son réalisateur Lewis Milestone a également été nominé. Il avait été co-écrit par le grand Ben Hecht." Avec Menjou, Hughes n'avait pris aucun risque : c'était déjà un acteur chevronné, spécialisé dans les rôles de... français ; perçus alors comme des personnages "exotiques". "Après plusieurs flops, Hughes produit (et co-réalise) l'acclamé et controversé Scarface (1932) avec Paul Muni dans le rôle phare interprétant le gangster Al Capone. Un scénario aussi de Hecht. Il a été ajouté à la National Film Registry en 1994. Ce fut peut-être le dernier grand film dans le portefeuille de Hughes." Dernier grand film, car obnubilé par les starlettes, Hughes commençait déjà à les choisir sur un seul critère ; la qualité de leur poitrine et en remplissait ses films de mauvaise qualité : le choc reçu en 1935 lors du crash de son H-1 ne devait pas y étre étranger. Chez Scorcese, rien sur les détails de la réalisation de Hell's Angel, à part les scènes d'avion et celle où Hughes doit implorer de l'argent supplémentaire à des financiers u film.  Rien sur ce fameux pistolet, par exemple, que l'on retrouvera dans la scène finale et qui appartenait bien à Howard Hughes : or c'était un Lüger allemand, qu'on retrouvera mis en vente en juin 2011. Hughes l'aurait offert à Joseph March, son scénariste accompagné d'un mot "comme un cadeau pour dire combien j'ai apprécié le film ". Or Hughes ne possédait en cas pas que celui-là, puisqu'il avait chez lui l'arme à feu de Goering, beaucoup plus ouvragée que celle-là, accompagnée d'une plaque précisant que ça appartenait bien au responsable de la Lutwaffe. Ce qui fait déjà beaucoup sur les goûts de Hughes à propos des symboles du IIIe Reich : par quel biais avait-il obtenu le premier Lüger, et le second (après la seconde guerre mondiale), nul ne le sait. Un texan d'origine qui préfère un Lüger à un Colt, c'est excessivement rare. Or de ça, pas un mot, bien sûr, dans Aviator. A espérer que jamais Scorcese ne s'attaque à Lindbergh, on risquerait de manquer.... sa double vie complète. Lindbergh mourut à Hawaï et non à Acapulco, remarquez. Présenté parfois, comme par Costelle comme étant "un génie doublé d'un maniaque, d'un dieu, d'un salaud" en dira un jour la Libre Belgique. La face cachée des héros réserve pas mal de surprises, on le sait.

"Un autre film pour lequel on se souviendra toujours de Hughes comme producteur c'est le classique et culte The Outlaw (1943), qui est également le seul film fait par un autre (à part les Hells Angels (1930)) pour lequel il a demandé le droit de diriger également. Le film est dans un désordre complet, marqué par la une lenteur atroce et beaucoup de musique venue pour ... rien de vraiment intéressant. Il y a aussi dedans quelques bouts de musique courts, qui donnent au film une ambiance de sitcom TV. Bien sûr, il est probablement mieux connu pour le plan sur le décolleté interminable de Jane Russell, qui, même si vous êtes un mec (comme moi), est de trop. Les dialogues sont tout simplement horribles, et Jack Beutel (en « Billy the Kid ») parle d'une telle façon, comme une bûche, que cele amène à se demander quelles étaient ses ses compétences en jouant ainsi. Une déception totale, même si elle comprend deux grands acteurs, le vétéran Walter Huston (The Treasure of the Sierra Madre (1948)), en Doc Holliday, et Thomas Mitchell (Stagecoach (1939)) en Pat Garrett". Vint alors l'époque où Hughes décide de racheter une société de production de films, ou plutôt s'arrange pour le faire, en rachetant les 25% de parts que possédait la Floyd Odlum's Atlas Corporation dans RKO. Sa façon de diriger y fut proprement désastreuse, en décidant de se passer des 3/4 des employés déjà en place, puis en commençant une chasse aux sorcières communistes sans beaucoup d'équivalents, suivant avec zèle les recommandations de McCarthy, sinon les devançant à de multiples occasions. Aidé à l'époque, déjà, par un jeune politicien zélé du nom de... Richard Nixon.

Rien non plus sur ce qui aurait pourtant été une évidence, pourtant, à montrer dans "Aviator" : en 1940, Howard Hughes, alors en cheville avec Gingers Rogers, qui le trouva vite "bizarre", avait acheté un terrain pour y bâtir une villa en forme de château donnant sur Los Angeles et là San Fernando Valley. Véritablement un superbe emplacement : celui faisant partie d'un lot sur le terrain de Cahuenga Peak."Le catalyseur de leur rupture, cependant, était le schéma habituel des infidélités cachées et régulières de Hughes. Rogers l'a attaqué alors qu'il gisait commotionné à l'hôpital après avoir perdu sa voiture avec un accident frontal avec une autre voiture, en lui rendant tous ses bijoux offerts dans un panier avant de lancer sa bague de fiançailles émeraude à la forme bandée sur le lit. Après le départ de Rogers, Hughes a abandonné le projet de Cahuenga Peak mais pas la propriété, sans doute parce qu'il avait des préoccupations plus pressantes. Les années 1940 ont sans doute été sa décennie la plus folle : en plus de diriger Hughes Aircraft et le développement de nouveaux avions civils et militaires, il a poursuivi en parallèle une carrière à Hollywood, produisant des films avec Preston Sturges et l'achat d'un studio, RKO, en 1948. Il a reçu une médaille du Congrès pour son travail de l'aviation en 1941 et a reçu un contrat pour produire son avion géant de transport militaire, le Spruce Goose, en 1942". C'est quand même bizarre qu'on ait pas retenu ce symbole évident pourtant : en 2006, tout le monde s'était ému à Hollywood car une parcelle de 138 acres venait d'être mise en vente, et tout le monde craignait que quelque chose disparaisse sur ce terrain si un promoteur décidait d'y bâtir quelque chose. Le terrain appartenait toujours aux descendants de Hughes (ses cousins), et dessus reposaient... les grandes lettres blanches visibles à des kilomètres à la ronde marquées "Hollywood" ! Comment un scénariste avait pu rater tel plan ?

On apprendra le 27 avril 2010 que le terrain avait été finalement sauvé par... le patron de Playboy : "hier, Hugh Hefner, le créateur du magazine Playboy, a versé les 900..000 dollars manquants pour sauver l'inscription Hollywood, qui orne les collines de Los Angeles. Son identité a été annoncée hier, lors d'une conférence de presse à laquelle participait notamment Arnold Schwarzenegger, gouverneur de Californie. Le terrain sur lequel se situent les lettres de Hollywood, baptisé Cahuenga Park, avait été acheté en 2002 au milliardaire Howard Hugues par un groupe d'investisseurs de Chicago. Ceux-ci envisageaient d'utiliser le terrain pour y construire des habitations, mais avaient laissé une chance à une association, qui avait jusqu'à vendredi pour réunir 12,5 millions de dollars. Et Hugh Hefner a versé hier les 900 000 dollars qui manquaient à l'association pour acheter le terrain. Celui-ci sera désormais légué à la ville, afin d'être incorporé à un parc avoisinant, afin d'empêcher toute construction qui pourrait gâcher la vue sur les collines de Hollywood et ses fameuses lettres, érigées en 1923 et hautes de 14 mètres. « Les lettres de Hollywood sont la Tour Eiffel de Hollywood, et je suis ravi de pouvoir aider à la préservation d'un monument culturel de cette importance », a déclaré Hugh Hefner. De son côté l'association qui a permis de sauver l'inscription a précisé que parmi les donateurs, on trouvait notamment l'acteur Tom Hanks et le réalisateur Steven Spielberg". L'histoire était connue depuis 2002, Aviator réalisé en 2004, Hanks et Spielberg avaient fait la une des journaux : comment passer à côté de pareille idée ? Ça coutaît moins cher à faire que de réunir une vingtaine de vieux coucous reconstruits en plein désert, non ?

Après le rachat de RKO, ce ne sera guère mieux avec les réalisateurs, en effet. Hughes ne peut s'empêcher de venir fourrer son nez dans les films de ses propres recrues, qu'il rendait fort agacés : "En 1948, Howard Hughes rachète la RKO. L’une de ses premières décisions est de relancer le projet initialement intitulé "Bed of roses". Ecrit en 1946, le scénario de ce film relate l’ascension sociale d’une jeune femme sans scrupule. Il s’inspire d’une nouvelle d’Ann Parish au titre évocateur : All Kneeling ("Tous à genoux"). Initialement, il était prévu que Joan Fontaine, Henry Fonda, John Sutton et Marsha Hunt soient les têtes d’affiche de cette production. Quand Howard Hughes intègre ses fonctions, il confie le sujet à Nicholas Ray. Le cinéaste, qui vient de réaliser Le Violent pour le compte de Santana Pictures, revient dans le giron de la RKO, studio auquel il doit encore quelques films(...) Nicholas Ray tourne le film assez rapidement et en livre une version au studio. Après avoir visionné le travail accompli, Howard Hughes fait part de son mécontentement : le traitement de Nicholas Ray lui paraît trop sombre, notamment le final qu’il décide de réécrire. A partir de ce stade, Nicholas Ray ne touchera plus au montage, laissant Hughes et ses délires d’aviateur visionnaire charcuter la fin de "La Femme aux maléfices"…("Born to Be Bad")" Les coupes de Hughes, auto-bombardé assistant-monteur,(on possède des photos de lui de l'époque devant son banc de montage, avec des bobines de film derrière) vont défigurer le film de Ray. Mêlant à nouveau rêve et réalité, il s'est vu dans un des personnages, à qui il va donc donner plus d'importance qu'à l'origine : "En réalité, il semble que Hughes ait été touché par le personnage de Curtis Carey, l’homme richissime que Christabel séduit afin d’assurer son ascension sociale. Pendant tout le film, Curtis paraît faible et manipulé. Malgré son statut de victime, il est évident que Nicholas Ray ne s’est pas pris d’affection pour ce personnage. Hughes (qui y a certainement vu son double) a décidé en quelque sorte de sauver l’honneur de cet homme. Pour cela, il a écrit une scène où Curtis Carey, aux commandes de son avion, s’emporte dans un monologue grandiloquent sur les vertus du célibat et… de l’aviation ! Quand on connait un peu l’histoire de Howard Hughes, cette scène vaut évidemment le coup d’œil et prête à rire. Mais quand on aime Nicholas Ray, on souffre encore une fois de voir l'un de ses films dénaturé par le délire d’un de ses producteurs…" Pas la bonne méthode pour les retenir, pour sûr !

La façon dont il mit fin à sa carrière de producteur est aussi symptomatique : de 1948 à 1953, Hughes n'était pas le seul à avoir investi dans RKO : ce n'est qu'en 1954 qu'il devint seul propriétaire. Pour acquérir les dernières parts, il déboursa 24 millions de dollars. A peine 6 mois plus tard, il revendait RKO, à une fabrique de pneus, la General Tire and Rubber Company qui l'achetait 25 millions. Autrement dit, Hughes avait passé par pertes et fracas tous ses investissements antérieurs depuis 1948 ! D'un coup de crayon, il avait rayé 25 années de sa vie ! Pour passer à autre chose : sa façon d'être, de n'avoir surtout aucun remords. Un coup de tête de plus, mais à 25 millions de dollars. Il se débarrassait du studio RKO comme il l'avait fait avec Jean Harlow !

L'homme n'a donc pas fait de film intéressant, à part Scarface, et quand il s'est mêlé de ceux des autres, ça a été désastreux : il était abonné aux séries B et aux navets. Logique, alors, que le film retraçant sa vie en soit un également. Et sans aucun doute, "Aviator" en est un. On va à sa sortie avoir droit pourtant à peu de critiques, tant Scorcese est adulé (faudra qu'on m'explique un jour pourquoi exactement). On en verra même certains qui n'ont rien compris (au film Aviator) venir noyer le sujet dans une analyse "psychologique" à la petite semaine avec cette soi-disant notion de "pureté" sous-jacente au personnage de Hughes : c'est oublier les avortements, le voyeurisme des prises de photos, le recyclage des starlettes en danseuses de casino, sinon en prostituées, et surtout les magouilles, les assassinats, les coups montés et les pots de vins colossaux aux politiques pour obtenir des marchés, sans oublier les liens avec la mafia des casinos et son entourage de mormons, pas vraiment des représentants de cette fameuse "pureté", (dans le domaine des captations de fortune, surtour, dont celle de Hughes). Sans oublier la fabrication d'armes, laissée sous silence : à partir de là, cette "pureté" revendiquée ne tient pas debout. Elle tombe pile dans ce que souhaitaient sans doute Di Caprio et Scorcese : de faire de Howard Hughes une icone contemporaine incomprise. Dans le genre, le ponpon de ses admirateurs revient sans conteste à Pierre Remacle, dans son analyse du 13 mai 2008, qui parle d'une "’une carrière unique pour un homme unique. Car le succès ne quittera jamais plus Hughes. Que ce soit à travers ses conquêtes (Kate Hepburn, Ava Gardner… entre autres), ses réussites cinématographiques (Hell’s Angels,Scarface…), ou encore ses initiatives d’industriel (racheter la compagnie aérienne TWA, repousser toujours plus loin les limites techniques de l’aéronautique), Hugues est toujours un cran au-dessus des autres". On sombre d'emblée dans la plus complète hagiographie. De dire que Hughes "afin de conserver cette liberté à laquelle il tient par-dessus tout, ira jusqu’à réaliser ses films en-dehors des grands studios, seul moyen d’avoir réellement les coudées franches à Hollywood" est une tromperie manifeste.

Hughes avait racheté RKO pour faire fructifier son argent et rien d'autre, et si le milieu du cinéma le détestait, c'était bien en raison de ses opinions : plusieurs sorties antisémites non contrôlées avaient vite eu raison de ses capacités à s'introduire dans le milieu Hollywoodien. Son racisme anti-noir également le desservait en Californie, où l'on était beaucoup plus regardant sur ces opinions qu'au Texas, d'où venait Hughes (il est né à Houston et avait été traumatisé par l'émeute de 1917). L'admirateur allant plus loin encore, affirmant que "en fait, si on réfléchit une seconde, on s’aperçoit que Hughes va beaucoup plus loin qu’Icare" : pour un gars qui s'est écrasé aussi souvent, sans doute, car si Icare n'avait volé qu'à 21 mètres d'altitude sur un peu plus d'un kilomètre, et avait planté son racer dans un champ de betteraves, il n'y aurait jamais eu de légende ! Pire encore, quand l'admiration sans bornes aboutit à ce genre de phrases pour expliquer sa mise au ban de la société US : "toute cette quarantaine le laisse seul face à ses démons. Seul face à son propre esprit. Car Howard Hughes est le genre d’homme à n’avoir aucun ennemi à sa mesure. Et donc, son seul ennemi valable, c’est lui-même (et les craintes irréelles qu’il s’impose)". Si Hughes n'avait pas d'ennemis, alors qu'il travaillait avec à la fois la CIA et la Mafia, pourquoi donc a-t-il dépensé la moitié de sa fortune à se protéger ? Pourquoi vivait-il alors dans un bunker en plein Beverly, au milieu de ses archives, sans jamais communiquer à l'extérieur autrement que par messages déposés ou coups de téléphone ? L'homme qui a cherché à tuer à plusieurs reprises Fidel Castro et investi dans des opérations comme la Baie des Cochons n'aurait eu aucun ennemi ? On bondit, quand on lit pareille ânerie aussi grosse qu'un Spruce Goose ! Et encore, nous n'avons pas encore abordé véritablement le contenu d'Aviator, ce que je vous propose de faire lors du prochain épisode, avant de continuer la saga industrielle d'Howard Hughes.

 

(*) "Aucun film ne sera produit qui porterait atteinte aux valeurs morales des spectateurs. La sympathie du spectateur ne doit jamais être jetée du côté du crime, des méfaits, du mal ou du péché. Seuls des standards corrects de vie soumis aux exigences du drame et du divertissement seront présentés. La loi, naturelle ou humaine, ne sera pas ridiculisée et aucune sympathie ne sera accordée à ceux qui la violent". Dans un sens, Aviator est encore pile dedans !



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10 réactions à cet article    


  • Cryptomaga Cryptomaga 7 février 2012 13:30

    Dés le lendemain de l’élection présidentielle, une fois François Hollande à l’Elysée, la finance se vengera.

    http://www.latribune.fr/opinions/tribunes/20120206trib000682103/marc-fiorentino-le-7-mai-la-france-sera-attaquee-.html

    Le 7 Mai la France sera attaquée. Et mise à genoux. Dans la City et dans les plus grands hedge funds américains, c’est la veillée d’armes. On se prépare. Dans le calme mais avec une détermination froide et inquiétante.

    François Hollande devrait relire l’Art de la Guerre de Sun Tze et ne pas déclencher une guerre qu’il ne pourra jamais gagner.
    Le 7 Mai la France sera attaquée.
     


    • Francis, agnotologue JL1 7 février 2012 13:33

      Si cela était,

      alors François Hollande ferait bien de nommer Mélenchon premier ministre.


    • morice morice 7 février 2012 14:04

      le rapport avec le texte ? aucun.


    • flesh flesh 8 février 2012 01:02

      Quel texte ?




        • Pyrathome Pyrathome 8 février 2012 01:03


          Il y a plus de 735 000 liens qui disent la même chose, on s’en fout des curetons...
          Hughes était un T.O.C troubles obsessionnels compulsifs.....
          J’espère que vous ne souffrez pas du syndrome de Howard Hugues, morice ?


        • morice morice 8 février 2012 08:29

          J’espère que vous ne souffrez pas du syndrome de Howard Hugues, morice ?


          Pas plus que vous ne souffrez de celui de Roswell

        • morice morice 8 février 2012 08:39

          Vivons petits yeux fragiles ne vont pas le supporter.


          Et ça parle encore de cul et d’avions,,,

          C’est votre collègue aspirant géographe qui place Tourcoing au milieu du PdC qui ne va pas aimer : c’est plutôt les feux de la baise là....c’est l’histoire d’une grand mère qui vient d’avouer avoir tailé des pipes au bord d’une piscine, en 1962.

          J’écris ça pour attirer tous les obsédés qui sont venus lire de que j’ai écrit sur DSK, qui va bientôt être convoqué....

        • arbinger 16 février 2012 19:31

          Or Hughes ne possédait en cas pas que celui-là, puisqu’il avait chez lui l’arme à feu de Goering, beaucoup plus ouvragée que celle-là, accompagnée d’une plaque précisant que ça appartenait bien au responsable de la Lutwaffe.

          Sources ?

          Un texan d’origine qui préfère un Lüger à un Colt, c’est excessivement rare.

           ?????
          Sources ?

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