Sauver le capitalisme : s’en remettre à ses seins, plutôt qu’à Dieu (IX)
La firme Hughes Aircraft s'était fait un nom dans les missiles et les radars, puis avait gravi de manière superbe les échelons industriels menant aux satellites et à leurs lancement. Etrangement, elle ne participera pas à la conquête humaine de la Lune, pour des tas de raisons, dont celle des attributions des marchés de la NASA où les différents acteurs politiques "en charge" comme on dit là-bas, prenaient un grand soin à partager le fromage en parts plus ou moins égales, pour sauvegarder les emplois des firmes de leur secteur électoral. Hughes était peut-être trop occupé avec sa division missiles, marchant à pleins tubes pendant la Guerre du Viet-Nam, ou peinait à rester dans les délais très courts de la conquête spatiale, sa tare fondamentale depuis le début. Ou était trop affairé sur des projets ultra-secrets. Il n'empêche : l'équipe somme toute restreinte de Hughes Aircraft allait réussir un coup de maître, en fabricant le premier engin américain à réussir à se poser sur la Lune, un engin qui était bien plus fondamental qu'on aurait pu le penser avec son allure plutôt fluette. Pour une fois arrivé à l'heure, l'engin ne sera pas pour autant le premier à se poser sur l'astre lunaire : cette fois, il n'y était pour rien, c'est sa fusée Altas-Centaur qui avait pris trop de retard. La moisson d'information que raméneront les sondes Surveyor seront vitales pour l'alunissage humain de 1969. Hughes, lui, étant déjà la tête ailleurs... ses relations tortueuses avec le pouvoir et la Mafia s'enfonçant de plus en plus dans le glauque.
En France, on découvre le robot lunaire dans le numéro d'avril 1965 de Mécanique Populaire, avec en couverture le procédé SECAM de télévision couleur. Avec une sorte de faire-part de naissance assez amusant : "Avant d'envoyer des explorateurs humains sur la Lune, on y expédiera d'abord des éclaireurs mécaniques qui aluniront sur trois pieds, regarderont autour d'eux et diront ce qu'ils voient. Quand l'un de ces robots sera sur la Lune, il donnera l'état de la surface. Avec une main, il grattera le sol pour voir s'il est dur ou mou. Il tendra une autre main pour se rendre compte s'il ne pleut pas des météorites. Cet Américain mécanique a d'autres aspects humains. Ses paupières se fermeront pendant l'alunissage, pour ne pas prendre de poussière dans les yeux, qui sont des cameras de télévision. S'il souffre trop de la chaleur pendant le jour lunaire, il règlera sa température intérieure. Il s'endort quand le soleil se couche, coupant toutes ses sensations excepté celle qui est sensible aux tremblements de lune, et il utilisera l'énergie de ses accumulateurs pour lutter contre le froid. Dans ses fonctions de photographe, cet Américain extraordinaire prendra des vues stéréoscopiques et les transmettra à la Terre, pour nous permettre de voir ce qu'il voit, en images en couleur à trois dimensions. Ce robot s'appelle Surveyor. Pour pousser l'analogie encore plus loin, son père est le laboratoire de fusées de propulsion de Caltech et sa mère est la Hugues Aircraft Company. Les parents placent de grands espoirs dans leur rejeton." Un bébé plutôt bien né car très simple : c'est avant tour une grosse rétro-fusée entourée de 3 petites fusées verniers, (ici vus de dessus) accueillis sous un treillis léger de tubes à trois "pattes" articulées par ressort amortisseurs, ayant chacun à chaque bout une sorte de grosse patte amortisseuse en nid d'abeilles, qui se compresse à l'atterrissage. Au milieu, sur un sur un mat central, deux panneaux solaires en forme de toit (vu ici de côté)..
Reste a faire construire un truc qui résiste... à l'atmosphère lunaire, pas si accueillante qu'on voudrait bien le croire : "dès le début, Surveyor a posé de nombreux problèmes à ses constructeurs de la Hugues Aircraft. Pour mettre au point une machine qui puisse déterminer la nature et la force de la surface lunaire, donner des informations pour l'établissement des cartes, relever les activités sismiques et même si la Lune a un noyau liquide, analyser la composition chimique de la surface et accomplir de nombreuses autres tâches, il faut un travail de géant. Ajouter encore trois complications. Le matériel scientifique ne doit pas dépasser 30 kg, tout ce que Surveyor apprend doit être transmis à 380 000 km, à la Terre, et le véhicule lunaire doit pouvoir y vivre » Par exemple, comment est-il possible de maintenir le matériel électronique entre - 20° et + 50° C lorsque la température extérieure atteint 125° C pendant le jour et tombe à - 120° C pendant lanuit ? En réalité, l'énergie accumulée dans les batteries maintiendra une température intérieure confortable pendant la nuit, explique Sheldon C. Shalton, chargé de la partie scientifique de Surveyor, chez Hugues, de sorte que la principale difficulté, c'est la diffusion de la chaleur pendant le jour. Aussi les parois extérieures sont-elles d'un blanc éblouissant pour réfléchir le plus possible les rayons solaires. A l'intérieur de cette enveloppe blanche extérieure, une épaisse enveloppe isolante formée de 75 couches de Mylar aluminisé froissé, de sorte que chaque couche ne touche les voisines qu'en quelques points. Si la température intérieure continue à monter trop haut, des contacts bimétalliques se toucheront et formeront des voies d'évacuation thermique aboutissant à une fenêtre de verre qui est recouverte d'une couche de réflexion polarisée. Cette fenêtre laisse passer très peu de chaleur de l'extérieur vers l'intérieur, mais peut rayonner beaucoup de chaleur vers l'extérieur. » Quels résultats cela donne-t-il dans la pratique ? Les boîtiers blancs électroniques ont été « cuits » sous un rayonnement solaire simulé (lampes chauffantes) dans une chambre à vide. Puis ils ont été refroidis dans l'azote liquide pour porter leur température au froid intense de la nuit lunaire. Cela fonctionne parfaitement."
Reste à faire atterrir le bazar sans trop de casse et pour cela il faut... un radar d'approche bien sûr... "C'est alors que le RADVS (Radar Altitude Doppler Velocity Sensor) entrera en jeu. Un des faisceaux du RADVS est dirigé verticalement vers le bas pour mesurer l'altitude et la vitesse radiale de chute. Trois autres faisceaux inclinés, mesurent la vitesse et la direction du déplacement du véhicule sur la surface de la Lune. Le RAD VS fait fonctionner automatiquement trois petits jets de gaz de compensation (verniers) qui réduisent le déplacement horizontal à néant et en même temps, la vitesse de chute à 3,60 mètres par seconde. Les jets sont coupés à 4,50 mètres au-dessus du sol pour éviter de soulever la poussière. et Surveyor touche le sol à la vitesse d'un parachutiste." Certes, mais elle fait quand même 995 kg la sonde, et tombée de 4 mètres, ça doit au moins laisser des traces dans le sol : la première photo envoyée d'un des pieds rassure tout le monde : le sol est meuble, en surface (la poussière lunaire ou régolithe à la consistance du sable mouillé) mais en dessous... ça tient, et ça devrait résister à l"araignée" le surnom du LEM.
Ou trouver comment déterminer la résistance du sol lunaire : et là la réponse des cerveaux de Hughes sera limpide : avec un bon vieux ressort, on peut tout faire : "mais alors, comment concevoir un mécanisme qui puisse e déterminer les caractéristiques mécaniques de la surface lunaire ? Pour Surveyor, la réponse est simple et directe. Le préleveur de sol » est tout simplement un pantographe équipé d'instruments, qui peut s'allonger jusqu'à 1,20 m et balancer à droite et à gauche sur commande. Sous la pression d'un ressort, il peut frapper la surface comme une pioche. (Il est assez fort pour casser 12 mm de béton.) Il peut creuser un trou de 50 cm de profondeur, creuser un sillon en se repliant et mesurer du même coup la résistance à la traction. Les opérations sont exécutées par télécommande radio actionnée par des techniciens postés dans la salle des opérations du laboratoire de fusées de propulsion, à Pasadena, qui enverront les résultats par télévision. Si le bras mécanique remonte de petits cailloux sur son chemin, il peut les écarter et fouiller le sol en dessous. Pour analyser la composition des matériaux de surface, on se sert d'un faisceau de particules alpha de curium radioactif. La « dispersion s des particules alpha donne la mesure approximative des éléments qui sont présents, comme le calcium ou le fer. Le dispositif peut faire la distinction entre les roches météorologiques et volcaniques. Un sismographe monté sur le bâti du véhicule spatial servira non seulement à détecter les tremblements de lune, s'il y en a, mais aussi à déterminer s'il y a des dilatations et des contractions importantes de la surface à cause des changements de température et même à percevoir la chute des météorites à une certaine distance".
Bien entendu la division TV de Hughes sera mise à contribution : "une des parties les plus perfectionnées du laboratoire lunaire, c'est la partie télévision et, en particulier, une paire de caméras de TV dites de relèvement ». Elles peuvent explorer presque tout l'horizon autour d'elles et prendre des paires de photos stéréoscopiques couvrant à peu près un tiers de l'espace avoisinant. Les cameras sont en réalité stationnaires. Elles sont braquées sur des jeux de miroirs montés dans leur logement. Ce sont ces miroirs qui se déplacent et explorent l'horizon, à l'aide de petits moteurs.
Obéissant à la télécommande radio, les cameras font varier leurs champs depuis le premier plan à grande ouverture jusqu'au semi-télescopique, les ouvertures d'objectif de ff4 à ff22 et changent même de filtres pour permettre la reconstitution de vraies photos en couleur sur la Terre. Par des visées stéréoscopiques, les distances d'accidents de terrain tels que les falaises et les cratères, seront mesurées avec une telle précision que des cartes topographiques pourraient être préparée". Hyman est alors très fier de présenter sa maquette a Hubert Humphrey, le vice-président des Etats-Unis.
Tout est donc prêt, mais pas dans l'année 1965... le premier Surveyor a pris du retard, et il ne décolle que le 30 mai 1966. Ce n'est pas de sa faute, mais de son lanceur, qui utilise comme deuxième étage des ergols hydrogène - oxygène, difficiles à maîtriser au début. Hélas, car encore une fois les russes les ont battus, avec un apparei d'une toute autre apparence : une sorte de cocotte minute qui s'ouvre comme les pétales d'une fleur et qui s'appelle Luna 9 et qui pèse 99 kilos. Elle s'est posée quatre mois avant déjà, dans Oceanus Procellarum (l'Océan des tempêtes), le 3 février 1966 ! Encore raté ! les russes ont eux aussi opté pour des caméras avec miroir, mais Luna 9 n'a rien pour creuser dans le sol ni analyser. Dépourvu de cellules solaires, Luna 9 ne tiendra que 8 heures et 5 minutes en transmission continue, réparties sur 6 jours d'émission.
Pour se poser, la sonde en fait avait eu de la chance, comme l'expliquera Mécanique Populaire N°246 de novembre 1966. "Si Surveyor s'était posé à quelques cetaines de mètres de là, sur un terrain très accidenté, cela n'aurait probablement pas si bien marché a, a dit le Dr. Eugène Shoemaker, chef de la section astro-géologique du service géologique américain. Mais Surveyor n'a pas connu le désastre. Le premier alunissage en douceur d'un véhicule américain fut un succès complet, presque embarrassant. Les savants du jet Propulsion Laboratory furent submergés de photos de haute qualité et d'autres renseignements. Surveyor a fait un alunissage "littéralement incroyable" sur un terrain relativement. plat, avec une pente d'un degré seulement. « Je pense que nous avons eu une sacrée veine, a dit le Dr. Shoemaker. On aurait pu avoir de gros ennuis (...) L'alunissage en douceur de Surveyor est un exploit beaucoup plus difficile que l'écrasement sur la Lune de Ranger ou de Luna. Mais, contrairement à toutes les prévisions, Surveyor y réussit du premier coup. Les savants du J.P.L. qui ont connu de nombreux échecs depuis des années se seraient contentés de bien moins. Ils étaient comblés."
Une réussite, et très vite à la clé d'autres questions qui surviennent avec la découverte des étanges capacités de cette fameuse poussière lunaire. "Une étude sommaire de la masse de renseignements envoyés par Surveyor n'a donné aucune grosse surprise. Le Dr. Shoemaker a dit que les photos indiquent que la surface lunaire a la consistance d'une terre qui vient d'être retournée. Un explorateur y laisserait des traces, mais ne s'enfoncerait pas jusqu'aux genoux. Cette découverte répond aux désirs ardents des organisateurs du programme Apollo qui doit envoyer des hommes sur la Lune. Elle indique qu'ils avaient raison de croire que la surface lunaire serait assez solide pour supporter une capsule habitée, et qu'on y trouverait pas une couche épaisse de poussière qui risquerait d'engloutir capsule et explorateur." Solide, la surface, mais cette poussière intrigue en effet : "En réalité, Surveyor n'a indiqué l'existence d'aucune poussière. Au cours d'une expérience, les savants ont essayé de soulever la poussière en faisant fonctionner un petit jet de gaz monté sur le véhicule. Bien qu'ils aient pu faire fonctionner le jet sept fois, il n'y eut pas de poussière soulevée, et ce qui est encore plus étrange, aucune perturbation de la surface lunaire. Les savants refusent de donner une opinion sur ce fait étrange".
On l'a envoyé là-bas, car à vrai dire, on ne savait pas grand chose de la surface lunaire (sa poussière supposée, qui embêtera tant les cosmonautes qui ne s'attendaient pas à ce qu'elle s'infiltre partout, étant superfine, comme ici Eugène Cernan transformé en mineur lunaire !), continue notre journaliste de "MP" : "le rôle de Surveyor est de trouver la réponse aux questions du genre de celles-ci : La Lune est-elle recouverte d'une couche de poussière ? Et si tel est le cas, de quelle profondeur est cette couche ? (Malgré les observations radar et les photos prises à courte distance par Ranger VII, cette question est encore très discutée. Plusieurs savants engagés dans le programme Ranger estiment que la surface de la Lune est, dans l'ensemble, dure. D'autres savants de renommée égale disent juste le contraire ; d'après eux, la couche de poussière est assez épaisse pour engloutir un véhicule spatial. La poussière de la Lune mettra-t-elle les mécanismes hors d'usage ou même transformera-t-elle un astronaute d'Apollo en statue de poussière ambulante ? (Il y a des raisons de penser que dans un vide très poussé, la poussière se colle sur toutes les surfaces.) Y a-t-il sur la Lune une pluie constante de météorites ? (Comme la Lune n'est pas protégée par une atmosphère, les particules animées d'une grande vitesse peuvent perforer un costume spatial ou même l'astronaute lui-même.)" Bref, on le voit, quatre ans avant qu'un homme ne foule son sol, on ne savait encore rien ou presque de la Lune ! Et c'est bien pourquoi Surveyor était fondamental !!! En fait, on mettra 40 ans à comprendre ce qui provoque l'incroyable pouvoir d'adhésion de cette poussière. Un scientifique curieux, et âgé de 75 ans, en analysant les vidéos et les bandes de "data" enregistrées en 1969 et 1970 découvrira il y a peu de temps que c'est lié au rayonnement solaire, qui rend les particules de 70 microns électrostatiques ! Résultat secondaire de sa découverte tardive, les allumés qui ont décrit le manque de nuage de poussières au décollage du LEM n'ont jamais lu un seul rapport sur les expéditions de Surveyor, qui avaient déjà été confrontés au problème.
Surveyor 1 tiendra 6 semaines sur place, dont deux semaines dans la nuit lunaire, et transmettra 11 237 photos. Battus dans le timing, les américains, face aux russes, certes, mais beaucoup plus efficace ! Le Surveyor 2 n'ira pas loin, le troisième lancé le 20 avril 1967, effectuera une première en rebondissant trois fois de suite avant de s'immobiliser, un peu secoué (il n'enverra par la suite que 6300 photos). Le quatrième sera perdu à quelques km de la Lune, le cinquième cherchera la composition chimique du sol, avec son analyseur à rayons alpha, le sixième lui effectuant un vrai saut de puce en réallumant ses fusées de freinage, une première, pour se retrouver plus loin (et prendre en photo les traces de son saut). C'était d'importance, car c'est à l'endroit qui avait été choisi pour l'atterrissage d'Apollo XI. Le septième constatera sur les aimants de son pied que la poussière lunaire où il a atterri posssède du fer dans sa composition.
C'est le dernier vol, le 7 janvier 1968, un an et demi avant l'atterrissage d'êtres humains : les délais sont courts, très courts. Le 19 novembre 1969, Apollo XII se pose à 177 m du lieu choisi au départ. C'est dans l'océan des Tempêtes, un peu encombré depuis puisqu'on y trouvait Luna 5,Surveyor 3 et Ranger 7 ! Mais aussi à proximité de Surveyor 3, le robot sauteur, dont Conrad démonte la caméra pour la ramener sur Terre.
En la déballant au retour, les techniciens de la NASA constatent qu'elle est porteuse d'une bactérie commune, la Streptococcus mitis, venue donc de la Terre "50 à 100 de ces bactéries auraient survécu dans cet environnement hostile pendant trois ans, seulement détectées quand Apollo 12 ramena la caméra sur Terre" précise Wikipédia. La caméra, qui étair blanche, ne l'était plus vraiment, couverte de poussière noire très fine et très adhérente, celle soulevée par son saut de puce : cette poussière qui envahira plus tard le LEM, transformant les cosmonautes en charbonniers. Entretemps, en 1967, le responsable du programme Surveyor, a reçu le plus prestigieux titre en aviation et aéronautique aux USA, le Collier Trophee, marquant l'efffort exceptionnel apporté par Hughes à la conquête spatiale. Sur les 7 tentatives, 5 avaient été jusqu'au bout Le programme Surveyor est une belle réussite... mais il avait coûté les yeux de la tête : 469 millions de dollars, quatre fois l'estimation de départ de Hughes, habitué depuis toujours à gonfler ses notes de frais... comme on le sait !
Et le rédacteur de Mécanique Populaire de s'enthousiasmer au bilan de l'expérience : "Il y a un siècle ou à peu près, les nations « civilisées » avaient l'habitude de déporter quelques-uns de' leurs pires criminels dans des régions peu hospitalières où la chaleur, les insectes et la maladie les décimaient. Aujourd'hui, cela peut paraître paradoxal, mais les U.S.A. comptent envoyer trois Américains parmi les plus doués et les plus courageux dans un enfer encore plus terrifiant. Sur la Lune, la température de la journée dépasse le point d'ébullition du sang. La nuit, si on n'est pas convenablement protégé contre le froid, on gèle en une fraction de seconde. Il n'y a pas d'air, pas d'eau." La conquête de la Lune était bien, avant tout, une opération de propagande politique, ou le "courage" et les "dons" des cosmonautes étaient mis en avance comme les symptômes de la société... capitaliste, face au communisme, finalement vaincu sur le fil. Aller sur la Lune avec des êtres humains, opération ô combien périlleuse (on l'a vu avec Apollo XIII !) ne rapportait rien scientifiquement que ne puisse faire un appareil automatique (ce que prouveront fort peu de temps après les russes). Ce n'était qu'une opération de prestige, un peu plus voyante il est vrai que les "special ops" dont s'occupait, dans l'ombre, Howard Hughes. Mais le but était le même : celui d'une hégémonie industrielle. L'URSS ne s'en relèvera pas : elle s'effondrera assez vite, démontrant qu'elle savait faire des fusées gigantesques comme celles des américains, mais qu'elle ne savait pas produire de poêles à frire recouvertes de Teflon. Les industriels russees de l'astronautique à qui le pouvoir avait confié cette tâche de reconversion avoueront ne pas y arriver.
"Envoyer des hommes à travers l'espace vers la Lune, les déposer là et les ramener ensuite indemnes sur la Terre, c'est vraiment là la plus fantastique aventure jamais tentée par l'humanité" concluait le magazine. Peut-être pas, mais en tout cas la plus fantastique aventure capitaliste, pour sûr. La belle époque ! De l'empire spatial de Hughes, il ne reste rien, ou plutôt il est toujours florissant, mais sous un autre nom, ou plutôt a changé plusieurs fois de statuts, au gré des rachats. En 1984, la Delaware Court of Chancery a en effet enregistré la demande de huit administrateurs de l'Institut médical Howard Hughes, qui avaient décidé de vendre Hughes Aircraft à General Motors pour 5,2 milliards de dollars - cette transaction a été achevée en 1985. GM a fusionné avec son unité de Hughes Aircraft Delco Electronics pour former Electronics Hughes. Ce groupe se composait alors de :
-Delco Electronics Corporation (pour Dayton Engineering Laboratories Co), les inventeurs du procédé d'allumage de moteur du même nom déposé dès 1911)
-Hughes Aircraft Company
-Hughes Space and Communications Company
-Hughes Network Systems
-DirecTV
En 1995, Hughes Space and Communications Company était devenu le plus grand fournisseur au monde de satellites commerciaux, ce qui a attiré des convoitises : le capitalisme, dès qu'il voit de l'argent qui se fait, se précipite. En 1997, GM Delco Electronics avait transférée la division Hughes Electronics à sa Delphi Automotive Systems et plus tard dans l'année avait vendu les activités aérospatiales et de défense de Hughes Electronics (Hughes Aircraft) à Raytheon. La division ce la Hughes Space and Communications Company est restée indépendante jusqu'en 2000, jusqu'au moment où elle a été rachetée par Boeing et est devenu le Boeing Satellite Development Center. Une visite assez désolante des tous premiers bureaux de Hughes montre l'abandon des sites dans les années 80, dans l'atmosphère un peu des photos déprimantes de Detroit, ancienne capitale automobile en passe de devenir ville fantôme... déprimante vision. Un endroit où l'on avait construit à la chaîne les hélicoptères de la firme et même le Spruce Goose !
Au jourd'hui, l'accent est mis sur "l'entertainment " et sa réception par antennes personnelles, c'est la "dish civilization", moyen le plus pratique pour couvrir des milliers de km sans avoir à les câbler, pour arroser les gens des fadaises de la Télé-Réalité, ou meubler l'espace entre deux pubs sur le Coca, aurait dit un grand patron de chaîne française. Une histoire commence au Canada, pour Hughes, comme j'ai pu déjà vous le raconter. Les investissements sont donc énormes, et ça se joue désormais en Bourse davantage que dans les ateliers de fabrication et, pour ce faire, le 14 février 2001, Hughes Communication a encore une fois changé de mains, comme on a pu l'apprendre récemment . "Charlie Ergen d'EchoStar Corp, a annoncé ce matin qu'il va acheter la société de satellites Hughes Communications en pour ajouter des morceaux à son empire de satellites. Le grand gagnant, en dehors de Ergen, est le groupe privé Apollo, qui a acheté à bas prix Hughes et l'a revendu très cher. C'est le groupe affilié SkyTerra ; lié à Apollo qui avait d'abord acheté, Hughes en 2004, et le propriétaire de DirecTV a accepté de créer un joint-venture 50-50 avec Apollo pour diriger l'entreprise. Dans le cadre de cette affaire, Hughes avait été évalué à 360 millions de dollars et Apollo a aussitôt plongé vers le bas avec juste 50 millions de dollars de trésorerie après sa participation dans Hughes. Puis en 2006, Apollo a racheté DirecTV pour 100 millions de dollars. Aujourd'hui, au prix où EchoStar a accepté de payer (60,70 dollars par action, soit 1,35 milliards de dollars hors dette),
Apollo vient de se faire à peu près 753 000 000 dollars, basée sur sa participation de 57,4% dans le communiqué de Hughes sorti à la fin de 2009". Echostar détient de fait tous les satellites diffusant sur les paraboles, aux USA. La firme avait lancé son premier satellite EchoStar 1 en 1995 et détient aujourd'hui 28 sur 32 des licences d'émettre que la trajectoire des 110° W. Elle a longtemps été en procés avec Dish Network Corporation pour l'utilisation sans droits du système Tivo, un litige résolu le 3 mai 2011 seulement, avec le paiement de 500 millions de dollars à Dish Network Corporation. Pas moins de 15 satellites EchoStar on été lancés depuis, le 16 eme, fabriqué par Space Systems/Loral (SS/L), division de Loral Space & Communications, étant programmé pour cette année. On est en situation de monopole. Signe des temps, Echostar VIII avait été lancé le 22 août 2002 par une fusée Proton : une pâle revanche pour les russes : la Proton était le "planB" des soviétiques pour se rendre sur la Lune !
Surveyor avait fait rêver ; les années suivantes verront les meilleures ventes dans l'aérospatiale de Hughes, mais on passait du rêve à la triste réalité des "sitcoms"... et aux informations, qui parlaient alors des déboires politiques de Richard Nixon.
Un document de la NASA sur le bilan (conséquent) des missions Surveyor :
http://ntrs.nasa.gov/archive/nasa/casi.ntrs.nasa.gov/19690027073_1969027073.pdf
analyse de la pelleteuse de Surveyor 3 ramenèee elle aussi.
http://ntrs.nasa.gov/archive/nasa/casi.ntrs.nasa.gov/19730064630_1973064630.pdf
(*) d'autres sont atterriront encore, dont Luna 20 Luna 20 qui s'est posé le 18 février 1972 entre la mer des Crises de celle de la Fécondité. Sa foreuse intégrée raménera 55 grammes de sol lunaire sur terre le 22 février 1972. Or désormais, grâce au LRO, on retrouve tout ce que l'homme est allé déposer sur la Lune, et l'un des premiers engins trouvés est l'étage de Luna 20 resté sur place. Ou l'étage de Saturn d'Apollo XIV intentionnellement envoyé s'écraser sur la Lune le 4 février 1971, retrouvé le 8 octobre 2009 . Bel impact. Désormais, on découvre tout : les modules d'atterrissages de LEM laissés sur place, les traces des déplacement de la voiture des cosmonautes, les instuments scientifiques déposés, etc (ici Apollo XVII)... ou celui du voyage à pied de Conrad vers Surveyor 3.... et ici Surveyor 6, un mauvais coup pour les crétins qui entretiennent les inepties sur la conquête de la Lune.... mais ça ne les empêchera pas hélas de continuer leur désinformation et leur négationnisme des faits. Les cosmonautes d'Apollo XI avaient pourtant déposé ceci sur la Lune : un réflecteur laser, qui sert toujours depuis à évaluer la distance Terre-Lune, qu'il est impossible d'amener automatiquement (il doit être mis à niveau manuellement avec un inclinomètre !). Rien que cela, déjà, devait leur clouer le bec depuis 43 ans déjà !!!
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